Ma très chère amie,
Les humains, on le sait, vivent tant d’années en moyenne si l’on parle d’ici, un peu moins si on les place là-bas, mais cela ne veut rien dire pour un tel, car la Camarde – la mince qui porte une grande faux bien aiguisée – ne s’enfarge pas trop de statistiques. Et elle affectionne d’ailleurs cette basse terre de soufre et de forgerons pour y entraîner quiconque dans sa danse à claquettes, se découpant sur le crépuscule laiteux ou sur les entailles grises, plombées de ces rivières. Je vous parle des terres du Saint-Maurice.
Les chevaux, eux, ont le problème supplémen-taire de vivre moins que les humains, et les chats et les chiens moins encore. Ce qui veut dire que la cohabitation dans l’arche de toutes ces espèces
– pour ne parler que d’elles – n’a rien de symétrique, car une année qui alourdit la valise du voyageur humain en fait quatre sur la sacoche d’un cheval.