Richard Birkefeld et
Göran Hachmeister - "
Deux dans Berlin" et "
Des hommes de tête" .
Richard Birkefeld et
Göran Hachmeister vous présentent "
Deux dans Berlin" et "
Des hommes de tête" aux éditions le Livre de poche. Traduit de l'allemand par
Georges Sturm. http://www.mollat.com/livres/birkefeld-richard-deux-dans-berlin-9782253164807.html http://www.mollat.com/livres/birkefeld-richard-des-hommes-tete-9782253178989.html Notes de Musique : Jahzzar/Servants/06 Liar. Free Music Archive.
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Il allait traverser une rue calme quand son regard fut attiré par un kiosque sur lequel on avait placardé un nouvel avis à la population.[...]
Il sursauta et tourna la tête en entendant approcher brusquement un individu relativement âgé portant des vêtements de travail en coutil et qui se mit à lire le communiqué par-dessus son épaule. [...]
Il se plaça à côté de lui, battit un briquet qu'il approcha de l'affiche et de sa main gantée suivit les lignes imprimées.
- Quiconque, épela-t-il à haute voix, tentera d'échapper à ses devoirs envers la communauté, et plus particulièrement par lâcheté ou intérêt personnel, devra immédiatement rendre compte de ses actes et sera jugé avec la plus extrême sévérité afin que la défaillance d'un individu ne porte pas préjudice à l'ensemble du Reich.
L'inconnu étouffa la flamme de son briquet dans sa paume, se retourna et le regarda.
- Vous savez ce que ça veut dire ?
Croyant que l'homme n'avait pas compris ce qu'il venait de lire, il s'apprêtait à lui répondre, mais celui-ci le devança :
- Pour moi, c'est parfaitement clair : le Führer vient de déclarer la guerre au peuple allemand.
Était-ce bien lui ? Venait-il de crier ? Dans un cimetière, devant la tombe de sa famille ? Ils allaient apprendre à le connaître, éprouver ce qu'il était devenu, ce qu'ils avaient fait de lui. Il essaya de mettre de l'ordre dans les noms, les visages qu'il avait en tête, mais il n'y parvenait pas. Il n'en savait pas encore assez, ignorait où ils se terraient, derrière quelles façades en ruine de cette ville à l'agonie ils se cachaient. Mais il les retrouverait, même si c'était la dernière chose qu'il ferait dans sa putain de vie. Il n'avait plus rien à perdre. Ruprecht Haas, l'épicier du coin, était mort depuis longtemps, ce n'était plus un être humain, et ce depuis bien plus longtemps qu'il ne se l'était avoué. Il en avait déjà eu le pressentiment quand la Frick lui avait parlé de la mort de sa famille. Mais ça ne lui était devenu vraiment évident qu'au moment où, avec le tranchant de cette pelle fichée dans le seau de sable, il lui avait ouvert le crâne jusqu'à ce qu'il explose avec un bruit d'air s'échappant d'une bouteille de limonade dont on a, du pouce, fait sauter le fermoir à ressort.
Il ne faisait plus partie de la communauté des humains. Il était devenu une bombe à retardement.
Tu crois vraiment qu'après tout ce qui s'est passé, il suffit de travailler dans une fabrique de savon pour avoir les mains propres ? Tu crois ça, vraiment ? Qu'il suffit de dire : tout ce que j'ai fait, c'était de la merde, mais c'est terminé, je vais refaire un travail correct, et tout sera pardonné, et oublié.
Tu crois vraiment que ça marche comme ça ?
Il palpa la saucisse.
"La saucisse est froide et la bière est chaude comme de la pisse, vous avez dû inverser ma commande."
Ils s'étaient tous rendus coupables. Ils avaient tous été entraînés, tous avaient été inconscients, tous champions du détournement de regard. D'une manière ou d'une autre, ils étaient tous complices. Plus personne n'était capable de tracer une frontière entre culpabilité et innocence.
"... Et si le monde entier est transformé en un tas de ruines pendant nos combats, que le Diable l'emporte, on le reconstruira"
Quelle folie ! La guerre était perdue depuis longtemps et on continuait à faire semblant. Et voilà qu'il fallait aussi défendre Berlin jusqu'au dernier homme et à la dernière cartouche ! Et le fuhrer, lui, était assis loin sous terre, dans son bunker, comme un cloporte sous sa pierre, et envoyait des milliers d'hommes à la mort tout en fêtant son anniversaire. 71.
A quelques pas de la porte, Arno demanda : "Dis-moi, Fiffi, c'est vrai que t'es juif ? "
- oui, mais je l'avais oublié depuis ma bar-mitsva..."
Quelle folie ! La guerre était perdue depuis longtemps, et on continuait à faire semblant.
Quiconque, épela-t-il à haute voix, tentera d'echapper à ses devoirs envers la communauté, et plus pariculierement par lâcheté ou intérêt personnel, devra immédiatement rendre compte de ses actes et sera jugé avec la plus extrême sévérité afin que tel défaillance d'un individu ne porte pas préjudice à l'ensemble du Reich.
L'inconnu étouffa la flamme de son briquet dans sa paume, se retourna et le regarda.
Vous savez ce que ça veut dire ?
Croyant que l'homme n'avait pas compris ce qu'il venait de lire, il s'apprêtait à lui répondre, mais celui-ci le devança :
Pour moi, c'est parfaitement clair : le Führer vient de déclarer la guerre au peuple allemand.