AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

Citation de Pippo


Curieux comme notre perception du destin change au cours d’une vie. Jeunes, nous croyons ce que croient les jeunes, que tout dans l’existence est affaire de choix. Nous avons une centaine de portes devant nous, nous choisissons d’en ouvrir une, puis il en arrive encore cent, et il faut recommencer. Nous choisissons ce que nous ferons, mais aussi qui nous serons. Sans doute le bruit de chacune de ces portes qui, au fur et à mesure, se referment derrière nous devrait-il nous troubler, mais non. Même si elles se ressemblent et nous amènent au même endroit. Il s’en trouvera à l’occasion quelques-unes de verrouillées, mais qu’importe, puisque tant d’autres ne le sont pas. Le choix lui-même n’est peut-être qu’une illusion, mais nous n’en tenons pas compte. Nous sommes trop curieux de savoir ce que cache la prochaine, celle qui nous conduira espère-t-on, au cœur du mystère. Nonobstant les preuves manifestes du contraire, toujours plus abondantes, nous restons sûrs que, tout au bout, une fois les choix faits, nous aurons trouvé notre vraie destination, et que celle-ci révèlera son sens. La jeunesse voit ainsi la vie, à l’endroit, les yeux sur la lorgnette qui balaie avidement l’infini du ciel et ses myriades de possibilités. En opposant le libre arbitre et la responsabilité individuelle, la religion confirme le besoin des plus jeunes de se croire au milieu de la scène, de dire oui à ceci, non à cela, sous l’œil accusateur de la moralité.
Mais il est un moment où cela change. Fruit de la déception et de la répétition, le doute remplace la curiosité. De guerre lasse, nous commençons à situer le vrai, à comprendre que les portes sont plus nombreuses derrière qu’il n’en reste devant, et nous sommes pour la première fois tentés de retourner la lorgnette et de regarder le monde par le mauvais bout – mais qui peut dire lequel est le bon ? Comme les choses prennent alors une autre allure ! De plus larges contours émergent, les décisions individuelles perdent leur consistance. Regarder la vie à l’envers, comme tout le monde s’y essaie après un certain âge, revient à la dépouiller de son mystère et à l’habiller de fatalité – ennemie jurée du théâtre. Voilà du moins ce qui m’apparaît à moi Louis Charles Lynch. L’homme que je suis devenu, l’existence que j’ai menée, - n’est-ce pas une série de dominos qui se suivent comme ils se doivent, et non comme je le voudrais ?
Commenter  J’apprécie          80





Ont apprécié cette citation (6)voir plus




{* *}