Citations de Robert Doisneau (32)
La beauté échappe aux modes passagères.
Dans la course du temps, les quelques images qui surnagent aujourd'hui et viennent se grouper comme des bouchons dans un remous de rivière ont été faites pendant les heures volées à mes différents employeurs.
Désobéir me parait une fonction vitale et je dois dire que je ne m'en suis pas privé.
La beauté échappe aux modes passagères.
A tel endroit, il m'est arrivé en pleine figure une silhouette si harmonieusement équilibrée qu'elle a pris immédiatement valeur d'un totem éblouissant que depuis je cherche à retrouver et qu'à cette autre place, un ami m'a fait ce signe de la main, le dernier, avant de disparaitre au coin de la rue. Vous voyez, cela ne représente aucun intérêt pour vous. Ainsi la ville m'apparait comme de plus en plus peuplée de fantômes.
"Comment dites-vous cela, il y en a toujours eu autant.
--Peut-être mais les fantômes des autres me laissent indifférent."
Je n'ai pas le droit au palmier, je vais m'arranger avec le platane.
On appelle aura cette sorte de tube de néon qui s'allume autour de certains êtres et vient les isoler pendant un bref instant. Il faut faire vite pour l'enregistrer car il résiste mal au mouvement.
" Des milliers et des milliers d'années
Ne sauraient suffire
Pour dire
La petite seconde d'éternité
Où tu m'as embrassé
Où je t'ai embrassèe
Un matin dans la lumière de l'hiver
Au parc Montsouris à Paris
A Paris
Sur la terre
La terre qui est un astre. "
Le souvenir de ces moments est ce que je possède de plus précieux - peut-être à cause de leur rareté - un centième de seconde par-ci, un centième de seconde par-là mis bout à bout, cela ne fait jamais qu'une, deux, trois secondes chipées à l'éternité.
Robert Doisneau
2464 - [p. 27]
Le peuple de Paris, en se frottant au mobilier urbain, a donné à la ville cette patine que l'on peut aimer. Ainsi moi-même, par mes passages répétés, j'ai tellement participé à l'astiquage des bibelots de la rue que j'éprouve, pour la première fois de ma vie, un vague sentiment de propriété.
"... lorsqu'il travaille à la sauvette, c'est avec un humour fraternel et sans aucun complexe de supériorité qu'il dispose son miroir aux alouettes, sa piègerie de braconnier et c'est toujours à l'imparfait de l'objectif qu'il conjugue le verbe photographier."
Jacques PRÉVERT
L'ascension de la tour Eiffel permet de découvrir un immense panorama parisien - qui paraît méconnaissable puisqu'il manque alors l'indispensable silhouette de la tour Eiffel.
Le premier de la classe ignore le plaisir que prend le cancre à regarder par la fenêtre.
Les enfants qui s'aiment s'embrassent debout
Contre les portes de la nuit
Et les passants qui passent les désignent du doigt
Mais les enfants qui s'aiment
Ne sont là pour personne
Et c'est seulement leur ombre
Qui tremble dans la nuit
Excitant la rage des passants
Leur rage, leur mépris, leurs rires et leur envie
Les enfants qui s'aiment ne sont là pour personne
Ils sont ailleurs bien plus loin que la nuit
Bien plus haut que le jour
Dans l'éblouissante clarté de leur premier amour
Jacques Prévert
"Que détestez vous par dessus tout?
-La musique militaire, la justice militaire, la cuisine militaire"
Lundi soir 30 juillet (1962 ?)
Cher Maurice
(...)Tu vois que même seul, je ne m'ennuie pas et c'est heureux, car l'homme est toujours seul, c'est dit.
Pour toi, Maurice, qui combats la solitude essentielle par la recherche permanente d'une âme sœur, c'est sans espoir, mais rien ne vaut l'expérience personnelle et comme je te connais, tu continueras à chercher. C'est plaisant. Il y a des recherches moins passionnantes ou du moins avec un matériau moins satiné. Salut, Maurice, demain je pars pour l'Espagne, les vacances et dormir.
A bientôt mon vieux violon céleste,
Robert (p.78)
La Toussaint 1960
Mon cher Maurice,
(...) Une seule a été parfaite et m'a épaté, c'est Piaf. A croire qu'elle a déjà tout senti. Le cas Piaf est phénoménal et antiacadémique, l'instinct génial, comme une bonne femme de quatre saisons qui fait des bouquets jolis, jolis, sans avoir aucun diplôme. [p. 20 / coll. Babel- Actes Sud, réédit. 2020]
Vous savez ça me donne un tel sentiment de mélancolie de regarder des photos que j'évite de le faire.
(en parlant de son ami photographe, Robert Doisneau)
C'est toujours à l'imparfait de l'objectif
Que tu conjugues le verbe photographier.
Jacques Prévert
C'est toujours les rues des plus pauvres quartiers, qui portent les plus jolis noms (Jacques Prévert).
Les images malhabiles témoignent d'une belle fluidité de l'âme et d'une impatience à faire partager les émotions.