[...] Pourtant je savais qu'ils viendraient. Si j'avais appris une chose depuis que je vivais ici, c'est que j'étais incapable de repousser quoi que ce soit. Moi qui n'avait pas su empêcher la mort d'entrer comme chez elle, comment parviendrais-je à écarter ceci ? En imagination, je voyais ma maison après le passage des blessés et de ceux qui les accompagnaient. Combien seraient-ils ? Dix ? Vingt ? Mes entrailles se tordaient à l'idée de ces hommes dans ma maison, de leur sang répandu. Peut-être pourrais-je secourir une poignée d'entre eux et il se pouvait que la guerre épargne les autres...
Un des soldats dont je m'occupais me confia que rien ou presque ne donnait autant d'effroi que la solitude : c'est à cause d'elle que nous redoutons tellement la mort, et il faut être insensé pour s'y exposer de son vivant.