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Citations de Robert Merle (782)


Un mois après, la clef tourna dans la serrure, et le pasteur apparut. Il va sans dire que je me levai aussitôt. Il me demanda si j’avais commencé à lire la Bible et si j’avais trouvé cette lecture intéressante. Je lui répondis que oui. Il me demanda alors si je me repentais de mon crime. Je lui dis que je n’avais pas à m’en repentir, car ce Kadow était un traître, et c’était par amour de la patrie que nous l’avions exécuté. Il me fit remarquer que seul l’État avait le droit d’exécuter les traîtres. Je restai silencieux, car j’estimai que, là où je me trouvais, je n’avais pas à lui dire ce que je pensais de la République de Weimar. Mais il comprit mon silence, car il hocha tristement la tête, récita quelques versets et s’en alla.
Je ne mentais pas en répondant au pasteur que la Bible m’avait intéressé : Elle me confirmait tout ce que Père, le Rittmeister Gunther et le Parti m’avaient appris à penser des Juifs : C’était un peuple qui ne faisait rien sans intérêt, qui employait systématiquement les ruses les plus déloyales, et qui témoignait, dans le cours ordinaire de la vie, d’une lubricité répugnante.
(1922)
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— Il n’y a pas place en Turquie pour les Arabes et les Turcs.
Il s’assit en tailleur et se mit tout d’un coup à sourire.
— C’est ce que notre gros commandant essayait de faire comprendre, hier soir, à votre Lieutenant von Ritterbach. Heureusement, votre Lieutenant ne comprend pas le turc…
Il fit une pause.
— … car il n’aurait absolument pas compris que le village rebelle s’étant prudemment évanoui, on liquidât tout bonnement le village arabe le plus proche…
Je le regardai, béant. Il se mit à rire, d’un rire aigu, féminin. Ses épaules sautaient convulsivement, il balançait son torse d’avant en arrière, et quand il revenait en avant, il frappait le sol de ses deux mains.
Il se calma peu à peu, alluma une cigarette, souffla la fumée longuement par le nez et dit :
— Voilà à quoi ça sert d’être un bon interprète.
Je repris au bout d’un moment :
— Mais ce village était innocent !
Il secoua la tête.
— Mein Lieber vous ne comprenez pas ! Ce village était arabe. Il n’était donc pas innocent…
(1916)
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- C'est un héros, dit Pierson avec gravité.
- Oui dit Maillat, c'est le type même du héros. Il n'est pas capable d'imaginer sa propre mort. Seulement celle des gens d'en face.
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- Tu ne comprends pas, Elsie. Je ne suis qu'un rouage, rien de plus. Dans l'armée, quand un chef donne un ordre, c'est lui qui est responsable, lui seul. Si l'ordre est mauvais, c'est le chef qu'on punit, pas l'exécutant.
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Coulondre avait posé son bras ou plutôt son avant-bras de fer sur la table pour soulager l'épaule de son poids. C'était un homme dont le poil, la quarantaine à peine franchie, blanchissait déjà. Ses traits, dans un visage long comme carême, étaient tous tirés vers le bas : le coin des yeux, les commissures des lèvres, le nez. Il avait, à table, une façon à lui de clore les yeux qui ne donnait guère envie de lui parler. D'ailleurs, personne n'aurait été très désireux d'ouïr sa réponse. Car lorsque Coulondre Bras-de-fer émettait non pas un grognement, mais des sons articulés, ce n'étaient que propos tristes et calamiteux. La veille du départ de mon père pour la guerre, Cabusse montrant aux enfants les bâtons à feu, je m'étais exclamé avec enthousiasme : "Voilà de fières armes, et qui vont occire beaucoup d'ennemis." Et Coulondre avait dit : "L'ennemi a les mêmes", avec un regard et sur un ton qui impliquaient que pas un d'entre eux, mon père compris, n'en réchapperait.
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_ Une prison, c'est toujours une prison. Même pour le gardien.
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Il y a sous le nazisme des centaines,des milliers de Rudolf Lang;moraux a l'interieur de l'immoralite,consciencieux sans conscience,petits cadres que leur sérieux et leurs"merites" portaient au plus hauts emplois
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" Un moucheron qui naît à l'aube et meurt au coucher du soleil ne peut pas comprendre le mot nuit. "
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- Le camion-gazeur, dit-il en passant sa main gantée sur l'aile arrière.

- Vous voyez, reprit-il, le gaz d'échappement est capté par le tuyau et conduit à l'intérieur. Supposez maintenant que la Gestapo arrête une trentaine de partisans et les mette aimablement à ma disposition, le camion va les chercher, et quand il arrive ici, ils sont morts.

Il sourit.

- Vous comprenez, on fait d'une pierre deux coups, pour ainsi dire ; L'essence sert à la fois au transport et au gazage. D'où...

Il fit un petit geste de la main :

- ...Economie.

... Au début, on ouvrait les portes du camion, on croyait recevoir des cadavres, mais les gens étaient seulement évanouis, et quand on les jetaient dans les flammes, ils poussaient des cris.
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Ses yeux bleus se fixèrent sur moi avec une intensité gênante, il secoua de nouveau la tête, et il dit à voix basse, avec un bizarre mélange de pitié et d'horreur :
- Vous êtes complètement déshumanisé.
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Pour moi, la guerre est absurde. Et pas telle ou telle guerre. Toutes les guerres. Dans l absolu.Sans exception. Sans régime de faveur. Autrement dit, il n y a pas de guerre juste,ou de guerre sacrée, ou de guerre pour la bonne cause. Une guerre, par définition, c'est absurde.
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On s'y habitue, à ce qui vous fait vivre. On finit par croire que ça va de soi. Et ce n'est pas vrai, rien n'est donné pour toujours, tout peut disparaître.
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L'homme c'est la seule espèce animale qui puisse concevoir l'idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange : si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver.
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Ce qui ne vas pas chez l'homme, c'est qu'il gâche la moitié de sa vie à espérer ou à craindre ce qui va arriver le lendemain.
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- Ce n'est pas parce que vous évitez de penser à la mort que la mort va cesser de penser à vous.
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Pour moi, le cercle est une communauté d'hommes et de femmes, dont je fais partie, et dont je partage les problèmes, les tensions, les espoirs. Le bonheur, pour moi, c'est le fait d'être ensemble. A mes yeux, il n'y en a pas d'autre.
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-Mais, dit Siorac,..qu'arrivera-t-il de ceux de nos villageois qui n'ont plus de terre à gager, ni même à vendre? Allons nous les laisser se périr de faim?

-Nenni. Nous leur baillerons du grain contre la force de leurs bras. Et ils nous repaieront dans l'année en journées de travail. Nous n'aurons donc pas tant à dépenser en mercenaires au moment du foin ou des récoltes, ou de nos travaux de voirie.

Mon père baissa la tête et regarda ses bottes, les sourcils froncés et l'air assez chagrin.

-Ainsi, dit-il au bout d'un moment, tout, même la sécheresse, nous devient pain et miel. Tout nous accroît. Tout nous profite. Il me semble, pourtant, mon frère, que nous prospérons trop sur la misère des temps.

-Ce n'est point nous qui l'avons provoquée, dit Sauveterre, et rappelez-vous, je vous prie, la parole de Calvin: "C'est une grâce spéciale de Dieu quand il nous vient à l'entendement d'élire ce qui nous est profitable."

-Certes!certes! dit mon père. Mais à ce compte, les pauvres, autour de nous, deviennent toujours plus pauvres, et Mespech, à proportion, s'enrichit.

-Je ne vois pas que nous ayons à le regretter ni à battre là-dessus notre coulpe, dit Sauveterre avec fermeté. Nous n'allons point donner dans l'hypocrisie des papistes, qui vivent dans le pourpre tout en donnant comme une grande vertu la pauvreté volontaire. Non, Jean, l'enseignement de Calvin est ici lumineux. Qu'il y ait beaucoup de pauvres et quelques riches n'est pas dû au hasard. Ce que chacun possède ne lui est point advenu par cas fortuit, mais par la distribution de celui qui est le souverain Maître et seigneur de tout.

-Je le crois, dit mon père.
Mais au bout d'un long moment, et émergeant de ses réflexions, il dit en baissant la voix:
-D'où vient donc que mon cœur se tourmente de la grâce qui nous est faite, comme s'il la trouvait excessive?
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Sauveterre alla prendre dans une armoire de la grande salle un long rouleau, le posa sur la table, le déroula et le fit tenir aux quatre extrémités par des balles d'arquebuse qu'il tira de sa poche

-Ceci, dit Sauveterre, ses yeux noirs brillant sous ses épais sourcil, et avec une émotion contenue dans la voix qui se communiqua à tous, ceci, c'est le royaume de France.

Il y eut un silence, et la Maligou se signa d'un air effrayé.

-Doux jésus! dit-elle d'une voix tremblante, c'est une bien étrange magie qu'un royaume qu'on dit si grand tienne dans une feuille de papier qui fait à peine la largeur de notre table!
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Je vais donc jeter tes paroles sales et fâcheuses dans la gibecière de mes oublis et te demander ,Louison, sous peine de me fâcher beaucoup, de rogner à l'avenir les griffes de ta jalousie.
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L'homme, c'est la seule espèce animale qui puisse concevoir l'idée de sa disparition et la seule que cette idée désespère. Quelle race étrange: si acharnée à se détruire et si acharnée à se conserver.
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Roman historique lauréat du prix Goncourt publié en 1949 racontant la retraite d'un groupe de soldats français lors de la défaite franco-britannique lors de la seconde guerre mondiale. Mon titre est "week-end

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