Il est frappé, un court instant, par l'incongruité de la chose: ces types, qu'il ne connaît pas, avec qui il aurait pu échanger des propos aimables lors de sa traversée touristique de l'Allemagne, avancent, gavés de slogans nazis, pour le tuer ou le capturer, lui, Lucien Schraut. Et lui doit les tuer pour se défendre. Parce que c'est la guerre. Parce qu'on ne porte pas le même uniforme. Parce que tout ça devait péter un jour. Merde. Et, si on avait le même uniforme, on serait copains. Il y a peut-être en face un autre artiste, un photographe. Un écrivain qu'il aurait lu. Ou un jeune qui rêve à la poésie. Ou un cousin éloigné... La haine qu'il éprouvait tout à l'heure reflue.