Un nouveau texte vint se substituer au précédent. Paul sentit des doigts glacés courir le long de son échine. "UN HABITANT D'UN VILLAGE ISOLE EN ALASKA Soupçonné DE PLUSIEURS MEURTRES".
Paul entendait son battement cardiaque se répercuter dans ses oreilles.
Les lieux sont maudits. Tous ceux qui se rendent sur place sont la proie du désastre. Ils se perdent. Spirituellement, j'entends.
Tu ne devrais pas être là.
Tout le monde. Même en ville. Mais plus vous vous enfoncez dans les régions rurales, plus ils disjonctent. On dirait des punaises. Suicides, alcoolisme, violences conjugales... Dans certains coin, le viol est une véritable institution, vous savez, même s'ils n'en parlent pas à la télé.
- Un simple rêve.
- Non, pas uniquement. Enfin oui, c'est un rêve, mais il dégage une symbolique forte, il représente mon état d'esprit. Toi qui est prof, tu devrais piger le côté métaphorique mieux que personne. Mon subconscient me dit de ficher le camp avant qu'il ne soit trop tard.
Elle prétendait qu'une présence maléfique hantait la forêt, que le village lui- même était maudit. Selon elle, certains sites s'apparentaient à des tâches sombres, des hématomes sur la carte des Etats- Unis. Dread's Hand en faisait partie.
Appartenait-il maintenant à une sorte de confrérie des mutilés, un club morbide dont les adhérents passaient leur temps à montrer des photos à des inconnus pour savoir si le disparu leur évoquait quelque chose ?
Certains prétendaient d'ailleurs que le village ne recevait pas de visiteurs et n'en recevrait jamais. Seulement des épaves, des égarés, des échoués de l'existence.
Elle toisa Paul. "Il y a des serviettes en papier sous le comptoir. Essayez de ne pas salir par terre."
Moi aussi, je t'emmerde, s'insurgea mentalement Paul.