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Critiques de Ruth L. Ozeki (91)
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Le Fardeau tranquille des choses

Pour une fois, j'ai vraiment pris le temps. le temps de le déguster ce livre de près de 600 pages, livre étonnant, très original, étrange pourrait-on dire, teinté de réalisme magique, véritable hommage aux pouvoirs des mots et au rôle salvateur des livres, où les « choses » et toutes les pulsions contradictoires qu'elles engendrent – entre accumulation obsessive et besoin vital de dépouillement – en sont les véritables protagonistes.



C'est l'histoire d'une mère, Annabelle, et d'un fils, Benny, qui perdent pied après la mort de Kenji, ce père adoré mi-japonais, mi-coréen, une mort stupide qui plus est : cet artiste, prodigieux musicien de jazz, amateur d'alcool et d'herbes, rentre un soir dans un état second du fait des drogues dont il a abusé, et, après s'être allongé sur la route, se fait écraser devant chez lui par un camion transportant des poulets. Une mort absurde aux conséquences dévastatrices pour ses proches.



Le vide laissé par l'absence va être comblé par d'étranges phénomènes touchant aux objets : Annabelle se met à remplir névrotiquement la maison de tous les objets qu'elle peut trouver, achetant de façon compulsive toute sorte de choses, malgré la précarité traversée désormais, afin de se constituer comme un rempart d'objets, collectionnant les choses les plus diverses, les boules à neige, les jouets vintage, les bouteilles, les cartes postales, entre autres. La maison devient un tel capharnaüm, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur, qu'elle est menacée d'expulsion par son propriétaire.



« Elle se glissa près de la maison, entre le mur et la clôture, et se hissa jusqu'à la fenêtre. Un store vénitien accroché de travers pendait derrière le carreau mais l'Aleph parvint à distinguer l'intérieur. Ses yeux mirent quelques instants pour s'acclimater aux objets amassés dans la cuisine. Elle commença à discerner des détails, les sacs-poubelle entassés le long des murs, les paniers de linge, les cintres emmêlés, le tuyau de l'aspirateur enroulé autour d'un pied de la table, le couvercle d'une essoreuse à salade dépassant d'un carton pour colis. Elle vit une lampe cassée, un égouttoir à vaisselle, un beagle avec un chapeau carré, et au milieu de tout cela, Annabelle. La mère de Benny était assise, seule, sur une petite chaise de cuisine, avachie, immobile ».



Benny, lui, entend parler les objets, entend leurs voix, capte leurs émotions, leur histoire, au point de passer pour un fou et de se croire fou tant la cacophonie est perturbante, semblable au « murmure d'une foule au début d'un concert ». Autour de lui, les objets susurrent, grognent, pleurnichent, crient, hurlent, parfois chantent et fredonnent.

La cohabitation entre les deux va ainsi devenir de plus en plus compliquée, la mère ne cessant d'accumuler quand le fils souhaite lui à tout prix se dépouiller…



Comment trouver la paix face au vertige, au chaos, à la solitude et à la précarité ? Où est la frontière entre le rêve, les sensations et la réalité ? Qu'est-ce que le réel ? La poésie émerge-t-elle de ce chaos ? La présence des livres, les milliers de livres de la Bibliothèque municipale feutrée dans laquelle se terre avec bonheur Benny au lieu d'aller à l'école, mais aussi un livre, un seul, celui de Aikon, la bible du rangement, pour Annabelle, pourront-ils leur venir en aide ? Les personnes marginales côtoyées, à priori infréquentables, ou celles lointaines qui écrivent sur la sagesse peuvent-elles leur montrer la voie ?



La marginalisation de la mère et du fils à laquelle nous assistons avec effroi rend les personnages terriblement attachants. Nous comprenons à quel point il est nécessaire pour chacun de respecter son temps de deuil, temps que la société, avec ses rythmes imposés, ne respecte pas toujours, et accepter le processus du deuil propre à chacun.



J'ai beaucoup aimé ce roman singulier. J'ai aimé prendre le temps et sentir toute son étrangeté, j'ai adoré me laisser bercer sans me poser de question par son côté fantastique. La référence à Jorge Luis Borgès est évidente, depuis le prénom de la jeune fille marginale qui aide Benny, l'Aleph, jusqu'à la bibliothèque quasi vivante en son coeur, qui semble infinie tout autour, qui n'est pas sans rappeler la célébrissime nouvelle de Borgès : La bibliothèque de Babel. Ce livre est un hommage au livre et aux lieux qui les accueille, les bibliothèques, véritables refuges pour se retrouver, se reconstruire.

L'Aleph, quant à elle, est une célèbre nouvelle de Borgès dans laquelle un homme, lui aussi dénommé Borgès, se lie d'amitié avec un poète pompeux occupé par l'écriture d'un poème intitulé « La Terre » dans lequel il a pour ambition de versifier la planète entière. Pour cela, il détient chez lui un Aleph, « un point dans l'espace dans lequel se trouvaient tous les points » grâce auquel « chaque chose équivalait à une infinité de choses, parce que je le voyais clairement de tous les points de vue de l'univers »…Force est de constater que la jeune fille aux nombreux piercings, aux cheveux blancs, à la vie totalement marginalisée, vivant en compagnie d'un clochard, poète connu dans son pays d'origine, provoque un effet ainsi cosmique sur Benny. de même, part belle est faite au philosophe allemand Walter Benjamin, chaque partie du livre démarre avec une citation de cet auteur. Pour ma part, ce livre m'a donné envie de retenter l'expérience avec Borgès, le premier essai ayant été un cuisant échec…



J'ai trouvé très intéressante la façon dont sont abordés les maux psychiatriques touchant Annabelle et Benny. Si l'obsession de l'accumulation de la mère permet à l'auteure de dénoncer les affres de la surconsommation, du matérialisme au sein de la société capitaliste, ce que vit le petit Benny est une ode à la différence où la question de la folie le dispute à la sensibilité poétique et empathique dont il est capable. Les objets fabriqués lui parlent, les voix des personnes qui les ont fabriqués y étant restées accrochées, comme une odeur s'accroche à un vêtement. Tout ce qui n'est pas fabriqué, comme les arbres ou les galets, parle aussi mais avec une voix différente.



« Ce n'est pas toujours horrible. Il y a des fois où les voix sont belles, agréables, comme celle du canard en plastique que ma mère a trouvé dans une benne. Je ne parle pas du coin-coin affreux qu'il produit quand on appuie dessus, mais des autres voix, celles de l'intérieur, qui correspondraient plus à un souvenir de la mer, des marées, du gonflement des vagues et des rivages, et à quelque chose de vaporeux aussi, à la fois doux et voilé, comme si une personne exceptionnelle l'avait un jour touché ».



L'auteure touche du doigt avec beaucoup de subtilité la maladie mentale, met en valeur la frontière, poreuse, entre celle-ci et la création artistique empreinte de solitude, la poésie qui émane souvent d'états seconds ou délirants qu'il suffit d'accepter et de recueillir pour en faire quelque chose de beau et d'intime.





Ozéki sait de quoi elle parle étant elle-même métisse comme Benny, née d'un père américain et d'une mère japonaise, vivant au Canada, ex-réalisatrice de films, ordonnée « religieuse zen » depuis 2010. Elle ose vraiment balayer les frontières de genre, son livre est multifacette. Entre onirisme et récit psychiatrique, fable zen sur le vide et le plein, métaphore étrange enveloppée de réalisme magique, chronique sociologique de l'Amérique trumpienne, l'auteure, avec tendresse et douceur, élégance et grâce, avec poésie aussi et même un certain humour, dénonce le capitalisme, la surconsommation, analyse la fantaisie imaginative adolescente et franchit la frontière entre solitude artistique et maladie mentale, les livres comme refuge envers et contre tout. D'ailleurs une voix nous raconte cette histoire, c'est celle d'un objet parlant, le livre que nous-mêmes, lecteurs, tenons entre les mains. Une mise en abime borgésienne tout à fait délicieuse ! Pas étonnant que cette auteure ait eu le Womens Prize for Fiction en 2022 !

En tout cas, après cette lecture étonnante, je me prends à regarder autrement les choses qui m'entourent, et à penser à l'harmonie dont elles peuvent, ou pas, être à l'origine, à réfléchir au fardeau, pas si tranquille, dont elles sont lestées.



Un grand merci à @Kiitywake dont le retour m'avait tant interpellé que j'avais aussitôt acheté ce livre qui a trop peu de retours.



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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Comme une bouteille à la mer.



Une boite à bento échoue sur les rivages de Colombie Britannique. A l’intérieur un journal intime écrit en japonais qui appartenait à une jeune adolescente japonaise. En vieil obsédé que je suis, je l’imagine déjà dans sa tenue de lycéenne, jupe au-dessus du genou et longues chaussettes blanches.



« Donc, si vous êtes du genre à aimer les trucs bien dégueulasses, je vous le demande, fermez ce livre et passez-le à quelqu’un d’autre, votre femme ou un collègue. Vous vous épargnerez un mauvais moment. »



Autant dire que je referme de suite ce bouquin et que je refile le journal intime de Nao à ma voisine Ruth, d’autant plus que mon niveau de japonais connait ses limites.



Mais avant, je m’assois, la respiration posée. Posture de zazen pour laisser défiler les mots de Nao, laisser s’envoler les images de Ruth. Pour laisser m’imprégner de cette double atmosphère mi-japonaise mi-canadienne, la tristesse des êtres, la quête spirituelle des autres. Pour sentir le parfum irradié du Japon post-Fukushima qui s’entremêle à celui des pins et d’iode de la Colombie Britannique. Tabarnak – fallait bien qu‘il sorte, celui-là !



Et pour ressentir les émotions de ce témoignage.





A l’instar de Ruth, je découvre, au rythme des pages, la vie de Nao, cet être presque impersonnelle ignorée de tous, transparente pour tous, humiliée par tous. Pourtant, elle trouve la force de survivre, grâce à sa grand-mère Joki, une bonzesse centenaire, adepte de textos, son grand-oncle kamikaze dont elle découvrira certains carnets secrets datant de la guerre ou son propre père, tendance hikikomori porté fortement sur le suicide.



Un roman qui s’effeuille comme quand on ouvre un tiroir et qu’on renifle les dentelles d’une jeune femme. Chacune a son propre parfum, son histoire, ses images, et ses fantasmes. Entre la réalité et l’onirisme, les mots se mélangent et s’emmêlent, je pense forcément à Murakami en version féminine, même si je n’aime pas comparer les auteurs entre eux.



« En même temps, toute la terre et le ciel » est une histoire zen. Elle y parle de la société contemporaine et de ses travers, de Fukushima catastrophe tout aussi traumatisante que Nagasaki, de la Colombie Britannique à la limite d’une déforestation intensive, de la seconde guerre mondiale et de ses kamikazes, du onze septembre, du mal-être des hommes et des petites culottes de Nao – bon, je crois que sur ce dernier point, mes fantasmes prennent l’avantage sur ma spiritualité.



Entre les pages de ce carnet intime, confession d’une adolescente et d’un bouddhisme à portée de mon esprit, aux évènements du quotidien se mêlent les préceptes de maître Dogen ; je ne peux que m’assoir en zazen, attendant sans l’attendre le fameux coup de kyosaku.



Et au fil de l’histoire, l’esprit se libère, les idées s’envolent, le corbeau croasse et les mots deviennent fous. Ils s’enchainent et se défilent comme les pensées de mon esprit ne s’accrochant ni à la cime des arbres ni au sommet des montagnes, tels des nuages flottant inlassablement dans l’atmosphère. Ils naviguent au-dessus des flots, ils volent au-dessus des monts, ils s’élèvent, les lettres se mélangent entre elles comme une partouze littéraire avant de s’évaporer dans le silence.



Où vont les mots lorsque je les lâche ? S’envolent-ils dans le ciel au grès des courants d’air. S’enracinent-ils dans la terre pour faire de nouvelles pousses de phrases qu’un esprit passant pourra cueillir à sa bonne volonté ? Se déverseront-ils dans le grand océan azuréen qui sépare la terre mais relie le ciel, ou dans l’urinoir que les carreaux de faïence reflètent de son éclatante blancheur ? Est-ce pour cette raison que je suis avare de mes mots… Mais mon silence, où s’échappe-t-il ?
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Le Fardeau tranquille des choses

Gros coup de coeur pour ce roman américain, qui réunit tout ce qui me séduit en littérature !



La parole est donnée à ceux qui se taisent : les objets qui nous entourant, le livre que nous tenons sont conviés à livrer leurs pensées les plus intimes. Personnages à part entière, ils soutiennent le discours parfois délirant de Benny, cet ado qui ne parvient à masquer son mal-être et subit ainsi les humiliations de ses pairs, qui agissent en se conformant au comportement animal qui bien souvent consiste à éliminer les plus faibles de la cohorte.



Et pourtant, on l’adore ce personnage, qui a, à quatorze ans, déjà vécu de sombres drames, et qui lutte pour ne pas se laisser envahir par ces voix chorales issues de tous les objets qui l’entourent, de ses peluches à ses chaussures !



Quant à Annabelle, sa mère, bien éprouvée elle aussi par la perte de son mari et rattrapée par la précarité induite par la politique de notre système, que d’empathie elle suscite et combien on souhaiterait que la vie lui sourie à nouveau !



La poésie improvisée s’invite au cours des pages mais une place originale est aussi réservée à des extraits de la bible du rangement de Marie Kondo, devenue nonne bouddhiste. Pourra-t-elle venir en aide à Annabelle, noyée au coeur d’une accumulation monstrueuse, au point d’être menacée d’expulsion ?



Le roman est aussi un hommage rendu à la littérature et aux pouvoirs des mots, ainsi qu’aux lieux qui les abritent dans le calme feutré ambiant qui les caractérise, ces temples du savoir que sont les bibliothèques.



Bien d‘autres facettes de notre façon de vivre et de consommer sont abordées tout au long de ce roman foisonnant : la consommation, les limites de la psychiatrie, le racisme …





Les quelques 600 pages défilent à toute vitesse, pour un grand bonheur de lecture. C’est une découverte de cette autrice que je ne connaissais pas. A suivre de près !



Merci à Netgalley et aux éditions Belfond.





592 pages Belfond 6 avril 2023

Traduction (Anglais) : Sarah Tardy

#RuthOzeki #NetGalleyFrance


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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Vous avez envie d’une belle histoire, avec une jolie écriture, beaucoup d’émotions et une pointe de magie ?

Ce livre est peut-être fait pour vous, mais pour cela, il faudra que vous ayez un moral d’acier car l’histoire racontée ici n’est quand même pas bien gaie.

Ruth, une femme écrivain qui vit au Canada, découvre un sac échoué sur la plage, il contient notamment un journal rédigé par une jeune japonaise maltraitée dans son école.

Ruth va tenter de trouver qui est cette jeune fille et elle fera tout pour savoir ce qui lui est arrivé, car elle pense qu’elle a probablement été victime du tsunami.

Les thèmes abordés ne sont pas joyeux : exil, harcèlement et suicide en sont les principaux.

Mais l’écriture est de toute beauté et l’intrigue nous prend aux tripes.

Un roman que j’ai eu du mal à lâcher malgré des thèmes difficiles.

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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Ruth a quitté sa trépidante vie new-yorkaise pour suivre son mari au Canada sur une île de Colombie britannique. Bien sûr elle aime son mari et sa nouvelle vie mais éprouve tout de même une certaine nostalgie et connait une panne d'inspiration dans son travail d'écrivain. Un jour, lors d'une de ses promenades le long de la plage, elle trouve un étrange paquet rejeté par la mer, sans doute un de ses rebuts provenant du Japon comme il y en a souvent depuis le tsunami. Au milieu d'objets hétéroclites, Ruth découvre le journal intime de Nao, une adolescente japonaise qui couche ses réflexions dans un carnet, installée dans un maid café tokyoïte. Très vite, Ruth est emportée par le récit de cette jeune fille hors du commun qui raconte ses jeunes années en Californie, le difficile retour au Japon, le harcèlement dont elle est victime au lycée, la déprime de son père, son grand-oncle kamikaze, son arrière grand-mère nonne bouddhiste, sa vie de l'autre côté de l'océan. Par delà la distance et le temps, un lien très fort se tisse entre l'auteure américaine et l'adolescente japonaise.





Foisonnant et audacieux, le dernier roman de Ruth OZEKI est un saut en chute libre dans la société nipponne, entre traditions ancestrales et modernité. Inclassable, mêlant rêve et réalité avec bonheur, il est complexe sans être compliqué et fait la preuve que l'auto-fiction, si elle est bien maîtrisée, peut être autre chose qu'une étude attentive de son nombril. Ruth OZEKI, portée par sa double culture, américano-japonaise, crée un monde parallèle où tout est possible : croiser un kamikaze de la deuxième guerre mondiale, une nonne centenaire qui pratique le zazen, un homme qui se met à l'origami pour éloigner son désespoir, et -pourquoi pas ?- changer la fin de l'histoire et sauver l'adolescente et sa famille. Il faut lire ce roman, apprendre à connaitre l'attachante Nao et se laisser emporter dans ce voyage onirique. Une lecture surprenante mais magique, à ne pas rater !
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Le Fardeau tranquille des choses

Singulier, ce roman est mâtiné d'une sorte de merveilleux contaminant les objets qui y sont décrits. Benny, le héros adolescent qui perd son père alors que s'ouvre le livre, se met à entendre leur voix mécontente, hanté par ces cris qu'il est le seul à percevoir. Avec cette métaphore étrange, Ruth Ozeki dénonce le capitalisme, la surconsommation, s'appesantit sur la psyché adolescente et sur la frontière entre solitude artistique et maladie mentale, les livres comme refuge envers et contre tout (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2023/04/21/le-fardeau-tranquille-des-choses-ruth-ozeki/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Voici un roman qui m'a particulièrement plu. Premièrement pour l'onirisme qui se dégage du bouquin, mais également pour le style particulier où deux mondes à deux endroits différents se mélangent pour n'en former qu'un à travers le prise confidentiel d'un journal intime d'une jeune fille. Une jeune fille qui, victime de harcèlement, écrit son histoire et celle de sa famille dans son journal. Un journal intime servant de lien métaphysique entre les protagonistes. Jamais Proust n'aura autant retrouvé son temps que dans cet ouvrage poétique où les deux personnages liés par un phénomène quantique se croisent et se décroisent sur une ligne du temps qui se distord à coup sûr.



On y ressent une forte influence du style Murakami et plus particulièrement de Kafka sur le rivage. Il y a cette même poésie, ce lyrisme et une douce mélancolie qui flotte et qui rendent la lecture agréable. Peut-être est-ce dû à l'histoire de Nao, victime de harcèlement qui ajoute cette touche mélancolique ou bien cette envie de sauver et de découvrir le sort réservé à Nao qui font que Ruth brasse toute la terre et tout le ciel ?



L'ambiance et l'effet humidité de la lecture (il y a assez bien de relation avec l'eau dans la narration) ont fait que ce livre m'a emporté comme une vague du naufrage. Aussi, il faut reconnaître que l'on a une impression d'avoir échoué soi-même dans tout cela. Passager du bateau qui sombrera. Autant de sens au livre qui s'échoue sur la plage, que pour Ruth qui reste dans le doute avec cette sensation d'avoir perdu à l'avance dans pas mal de choses. Là, encore le temps se distord. Le livre amène à quelques réflexions et pensées sur nos choix et l'influence de ceux-ci sur notre existence. On sent beaucoup d'interrogation de la part de l'auteure au niveau de l'écologie avec les références sur le tsunami, mais on y sent également un vécu personnel à travers le personnage intéressant de Jiko qui vit dans un temple bouddhiste retiré dans les montagnes, comme le fut Ruth Ozeki. Le réel se mélange à l'irréel et c'est beau.



C'est un livre que je conseille à ceux qui ont lu Kafka sur le rivage et qu'ils l'ont apprécié. Ceux-ci devraient peut-être trouver celui-ci intéressant. C'est un des livres que j'emporterais sur une idée déserte. Autre point intéressant est le grand soin du traducteur à annoter le vocabulaire lexical spécifique du Japon, ainsi que l'appendice qui accompagne la fin du livre. Ce qui donne un aspect éducatif et instructif intéressant supplémentaire.
Lien : https://uneodeurdevieuxlivre..
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Ecrit par une romancière mi-américaine, mi-japonaise, devenue nonne boudhiste, ce livre, qui fait penser à l'univers de Murakami, par son oscillement entre réalité et imaginaire,m'a captivée.



Deux personnages nous sont présentés, en parallèle.Tout d'abord Nao, une adolescente japonaise, dont la famille est revenue désargentée ( et mal considérée) au Japon, après avoir vécu dans l'opulence aux Etats-Unis.Elle raconte dans un journal son quotidien difficile à Tokyo.Son père, qui ne supporte pas sa déchéance tente plusieurs fois de se suicider.Les relations de Nao avec sa mère sont tendues.Et surtout, elle subit un harcèlement moral dans son école.Heureusement, elle trouve du réconfort auprès de sa grand-mère, nonne boudhiste.



J'ai beaucoup aimé les confidences écrites de Nao, son humour, son désarroi, ses souffrances, sa quête d'identité.C'est un personnage très émouvant.



L'autre personnage est une romancière , prénommée Ruth, comme l'auteur.Elle vit sur une île, au Canada.Elle est en panne d'inspiration.Quel lien, me direz-vous, avec Nao ? Eh bien, elle va découvrir sur la plage un sac en plastique, contenant , entre autres, le journal de Nao .Sans doute un rejet du tsunami de 2011.Elle n'aura cesse de la retrouver...



Le livre est riche, à tous points de vue: non seulement il présente des destins intéressants, surtout celui de Nao, mais il offre de multiples réflexions ( et questionnements)sur des sujets importants comme l'écologie, le temps ( la physique quantique notamment), la méditation, le harcèlement.



Voilà un roman passionnant, étrange, fourmillant d'émotions et de pensées.
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Ruth, américaine, écrivain en mal d'inspiration recueille sur une plage du Pacifique un paquet échoué...

A l'intérieur, elle découvre entre autres le journal intime de Nao, jeune lycéenne de Tokyo, de retour au Japon (après une enfance heureuse vécue aux Etats Unis).

Dès lors Ruth développe une connexion quasi "karmique" avec cette jeune fille, au fil de la lecture de son journal, lui permettant de découvrir sa vie quotidienne, son mal de vivre...mais aussi son éveil à la spiritualité, au zazen, à l'être temps et autres concepts de la physique quantique.

Une immersion dans la culture nippone et son histoire. Une belle découverte.
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En même temps, toute la terre et tout le ciel





La rencontre de deux femmes, Ruth et de Nao, a lieu sur une plage canadienne. Ruth trouve le journal intime de Nao parmi les déchets échoués après le tsunami.



Dans ce roman, écrit à la première personne, l'auteur mélange une part de réalité autobiographique et la fiction dans la tradition des I novel japonais. L'histoire de la jeune fille japonaise Nao, personnage de fiction, vient s'insérer dans celle de l'écrivain américano-japonaise Ruth Ozeki, personnage réel.



Ce récit enchevêtré est l'occasion d'une réflexion sur le temps, le suicide et la mort. le journal de Nao, bouteille à la mer, apporte sur les côtes canadiennes un fragment de la culture japonaise ; Ruth ressent le besoin de sauver Nao, symbole de la partie asiatique qui est en elle.



Le passé de Nao et le présent de Ruth sont deux mondes parallèles qui se rejoignent dans l'esprit de Ruth, au point qu'elle se demande si elle peut changer le destin de Nao en réécrivant la fin de son histoire. Ozeki compare cette situation à celle des particules selon la physique quantique, dont l'état n'est pas défini tant qu'il n'est pas observé.



Ruth Ozeki, avec ce roman qui se lit à plusieurs niveaux, livre une réflexion philosophique et métaphysique qui n'est probablement pas étrangère à son ordination récente de nonne bouddhiste. Ses personnages surmontent le harcèlement et la torture physique, ce qui les transcende et donne un sens à leur vie.



Les deux cultures de l'auteur, occidentale et orientale, lui permettent de prendre le recul nécessaire pour comprendre leurs contradictions et les siennes. de cette réflexion naît une philosophie personnelle où le temps retrouvé peut être consacré à la méditation pour appréhender « en même temps, toute la terre et tout le ciel ».



Ce roman, très inventif, peut par moments paraître un peu confus. L'auteur donne l'impression de vouloir aborder trop de sujets, ce qui nuit aux idées qui y sont développées.

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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Euh, c est du pur ressenti car il est possible que je mette mes grosses pattes dans un truc immense que je ne maitrise pas du tout : la culture japonaise.

En même temps c est mêlé de beaucoup d occident.

Ruth, canadienne d origine japonaise trouve le journal de Nao, collégienne japonaise, sur une plage de Colombie britannique. Elle commence à le lire, et le lecteur pénètre dans leurs deux histoires. Il y a plusieurs niveaux de lecture, certains m ont plu, d autres beaucoup moins.

Le niveau réaliste : récit de l adolescence au Japon. Harcèlement au college subi par la petite absolument ahurissant. Tout le monde y participe, les adultes n interviennent pas ou même participent...incompréhensible et inimaginable sous nos latitudes. La moindre des attaques qu elle subit journellement vaudrait ici à son auteur une mesure conservatoire et un conseil de discipline...quant aux grandes actions ça finirait au tribunal. Mais là, il ne se passe rien. J en reste coite. C est intéressant.

Niveau historique : le grand oncle fut kamikaze. Ce qui se rapporte à lui est aussi intéressant.

Niveau culturel : la grand mère est une nonne bouddhiste qui vit dans un petit temple. Le récit du séjour de Nao dans ce lieu est très bien écrit, apaisant, et donne envie de méditer en posture de zazen.

Niveau spirituel : fantômes, esprits et démons ...j ai commencé à me perdre.

Niveau métaphysique : haut et bas pareil, combats la vague, tu es la vague ...je décroche.

Niveau physique quantique rattachée au zazen interférant dans le récit et les pages qui s écrivent toutes seules avec le chat de Schrödinger attaqué par des ratons laveurs du Canada : ça me gonfle.

Et je n aime pas trop la fin non plus.

Bref, des passages fort intéressants - à ma portée ? - et de la confusion - la mienne ?

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En même temps, toute la terre et tout le ciel

J’ai aimé ce roman qui aborde la sagesse zen d’un point de vue inattendu, avec une analyse spécifique du rapport de l’individu au temps. On y trouve d’autres thèmes rarement explorés en littérature tels la question de savoir pour qui l’auteur écrit et plus généralement le rapport entre l’auteur et le lecteur, l’ambiguïté de ce rapport, comment on peut être à la fois auteur et lecteur et se nourrir des écrits d’autrui, quel rôle joue la langue maternelle dans la construction de l’individu …. Sont abordés aussi certains concepts scientifiques reliés à l’informatique mais surtout à la mécanique quantique et là, je suis moins sûre qu’ils aient leur place ici. Il ne m’apparaît pas pertinent d’appliquer les concepts d’intrication et de superposition d’états à la vie quotidienne; sans parler de la théorie d’Everett qui n’a pas été retenue par l’Histoire et me paraît plutôt soutenir une certaine science-fiction. Je doute, en outre, que les références et les appendices qui tentent d’éclaircir ces notions en fassent une bonne vulgarisation. Il n’empêche que je comprends les intentions de l’auteur qui, par ce biais, nous fait toucher du doigt l’incertitude de toute chose ainsi que la subjectivité de l’observation. Il y a d’autres choses aussi: l’intimidation, l’abus, les rapports difficiles entre les parents et leur enfant adolescent pour ne citer que quelques-uns des thèmes abordés qui le sont toujours avec un réalisme frappant même si on s’écarte quelquefois de la rationalité pour entrer dans des moments où la magie est de mise.

Mais ce qui m’a plu justement, c’est que c’est un roman et que je l’ai lu « comme un roman » que j’avais hâte de retrouver, de le finir pour que se dénoue enfin l’intrigue digne à certains égards d’un roman policier.
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

C'est un livre qui jette des ponts entre le Japon et le reste du monde.

Il y aborde des sujets difficiles :

苛め - いじめ - Ijime : Nao est harcelée à l'école. Ayant passé son enfance en Californie, elle est la cible de vexations, d'agressions ... Les adultes ne font rien. Ils sont soit indifférents, soit pas au courant.

Au Japon encore plus qu'ailleurs, la victime se tait.

Les kamikazes : L'oncle de Nao fut enrôlé de force dans les forces aériennes pour être kamikaze.

Le suicide

La très grande difficulté de trouver sa place dans la société.

L'auteure ne se contente pas de la société japonaise, mais de sa propre place.

Le roman aborde aussi le zazen. Les passages avec Jiko la grand-mère de Nao sont de véritables rayons de lumière dans un livre parfois sombre et sans autre issue que le suicide. Ce sont des passages emplis de poésie, de sagesse et de tendresse.



Le roman est bien documenté (les kamikazes, le zazen ...)



Le style est très bien équilibré et la trame du récit fait qu'on ne lâche qu'à regret le roman.



Très prenant et émouvant, c'est un livre que je conseille.



Ce que j'ai moins aimé



Le roman est écrit à la première personne et le narrateur est "Ruth" elle-même. Je sais bien que les "I-Novels" sont justement des romans écrits à la première personne entre fiction et autobiographie. Mais ne pas savoir ce qui relève de la fiction de ce qui relève de l'autobiographie me gêne un peu. Cela m'aurait moins gêné si les thèmes abordés n'avaient pas été si graves.



Une fois de plus, la mécanique quantique est amenée dans la narration pour servir d'attelle au côté fantastique du récit.



Le côté trop exagéré des personnages. Le père s'enfonce corps et bien dans la dépression sans jamais parler. Jiko est trop sainte.

Note sur le format



Le livre est disponible en numérique.

Mais l'éditeur Belfond impose deux choses :



Le livre est vendu 21€ en papier et 15€ en eBook.

C'est au-delà de mes critères d'achat en numérique.

Je n'achète plus en papier.

Certes l'ebook est moins cher qu'en papier, certes c'est une nouveauté.

Mais quand le poche sortira, je doute que le prix de l'eBook soit revu à la baisse.



L'eBook est vendu avec des DRM

C'est inacceptable et donc je ne l'ai pas acheté.

J'ai donc emprunté ce livre à la bibliothèque.

S'il en avait absent, j'aurais lu autre chose tout simplement.
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Mon épouse américaine

On sillonne l’Amérique profonde pour les besoins d'une émission TV destinée aux japonais ventant les mérites des bons steaks et de l'American way of life.

On bascule du cliché à l'envers du décors, du faux à la sincérité, du Japon aux US.

J'ai beaucoup aimé les thèmes abordés : l’héroïne a des parents mixtes, l'industrie agro alimentaire est dénoncée de manière fine et non avec l'agressivité militante habituelle.

Un bon moment !
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Coincée entre la terre et le ciel!

Je n'ai pas su sauter toutes les cases du jeu de marelle.



Un constat: Je suis décidément hermétique à la littérature japonaise dont l'onirisme, les fantômes et l'approche surréaliste me laissent sur le bord du chemin. J'avais déjà jeté l'éponge pour le cultissime Murakami ( Eh oui! il y en a!)



D'accord pour trouver de l'intérêt à la comparaison des cultures américaines et japonaises.

D'accord aussi pour trouver de la fraîcheur au personnage de Nao, ressentir de la compassion pour le calvaire de cette adolescente, être au recul pour une société qui maltraite ses individus avec ce degré d'indifférence pour le respect de l'humain.

Mais pas d'accord pour me passionner pour la philosophie zen de nonne centenaire et à des digressions écologiques sur les corbeaux, le climat et les déchets rejetées par nos sociétés hyper consommatrices.

Pas d'accord pour trouver de l'intérêt aux rêves et aux mondes parallèles.



Plus généralement, je reconnais un talent d' écriture et un montage narratif impeccable mais j'ai bien du mal à trouver de la poésie dans ce livre. Son entre-deux construit sur réalité et utopie me désarçonne, mon cerveau fait blocage et l'ennui s'installe insidieusement.



Tempérons un peu le propos! Il est la conséquence "à chaud "d'un agacement à la fermeture en cours de lecture! Je déteste abandonner ...il y a de la culpabilité là dessous!

J'attendais beaucoup de ce livre qui a conquis la babeliosphère (du moins ceux qui y ont donné leur avis, car sa note n'est pas si élevée). Ma frustration est sans doute à la hauteur de mon attente.
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Un sac en plastique rejeté sur une plage : a priori un de ces déchets qui encombrent nos océans. Pourtant, en décidant d'y jeter un œil, Ruth ouvre la porte d'un univers insoupçonné : celui de Nao, une jeune lycéenne japonaise qui confie à l'océan son désenchantement.



C'est par ce tour de passe-passe, matérialisé par quelques objets hétéroclites comme un bento Hello Kitty, une montre ancienne ou une édition d'A la recherche du temps perdu, que Ruth Ozeki nous entraîne alternativement de l'existence de Ruth, sur son île de Colombie britannique, au quotidien de Nao, une adolescente lucide et désespérée. Des récits entrecroisés passionnants !



Se jouant du temps, de l'espace ou encore des langues, l'auteur jongle avec ces vies que tout oppose à première vue : décor, réalité, époque, ... Après une enfance passée aux Etats Unis, Nao se sent déracinée au cœur de Tokyo. Elle est harcelée par ses camarades et perd pied peu à peu. Ses parents ne lui apportent qu'un maigre soutien : son père étant aussi perdu qu'elle et sa mère aveuglée par trop de réalisme. Le réconfort lui viendra de ses ancêtres, ceux dont elle n'espérait plus rien. Dont elle ignorait jusqu'à l'existence. A l'opposé, menant une vie plutôt bohème, Ruth cherche l'inspiration sur son île; le temps y semble une réalité dépassée et les soucis sont tout autres.



Dans cette fresque chorale, deux personnages se démarquent prennent tour à tour la parole : Nao est une jeune fille déboussolée. Son enfance en Californie l'a éloignée de son pays natal; elle parvient difficilement à y trouver ses marques. Elle cache à ses parents les problèmes qu'elle rencontre au collègue et confie à son journal son mal-être et ses pensées. En mal de repères, elle trouve auprès son arrière-grand-mère Jiko qu'elle connaît à peine une grande écoute et un soutien inattendu. Les jours qu'elle passe en sa compagnie au temple ont la saveur de la plénitude et de la légèreté : ils lui permettent de mettre des mots sur sa colère, de se fixer sur ses valeurs. C'est également lors de ce séjour qu'elle découvre également Haruki 1, son grand-oncle kamikaze. Une figure qui lui servira de modèle, tout comme Jiko, qu'elle contacte via sms en cas de doute. A son corps défendant, Nao est un personnage fort et plein de ressources.



Désœuvrée sur son île, Ruth trouve dans ce journal à la mer et dans la quête qu'elle entreprend, une nouvelle raison de vivre et d'agir. Elle a choisi de fuir le monde en compagnie de son mari Oliver, passionné d'écologie et de sa mère malade d'Alzheimer. Aujourd'hui, sa mère est décédée et elle tourne en rond, coincée sur son prochain roman... Ce sac rejeté par les flots lui offre un dérivatif bienvenu, elle veille jalousement sur son contenu et est contrariée de le voir au centre de l'attention des habitants de l'île. Indécise et nostalgique, elle y trouve une raison de s'interroger, autre que le retour de l'électricité ou les aventures du chat familial. Elle aimerait faire de Nao le personnage d'un de ses romans, détenant alors la toute-puissance sur sa destinée.



Au-delà de ces personnages attachants et improbables pour certains, Ruth Ozeki confronte également deux visions du monde. D'un côté, ce Japon multi-facettes où modernité et traditions cohabitent mais où réalité et légendes s'affrontent également cruellement. A l'autre bout de l'océan, sur l'île de Ruth, la vie semble rythmée par ces déchets trouvés sur la plage; l'horizon est réduit dans cette communauté où tout se sait, où chacun se sent impliqué au cœur de la vie des autres.



Quant au style, il varie au gré des personnages qui prennent la parole, s'adapte tout au long du roman, lui conférant fraîcheur et vivacité. L'ensemble est un savant mélange de styles et d'époques : par-delà les récits de Nao et Ruth, interviennent d'autres destinées, d'autres lieux qui tour à tour s'imbriquent avec succès dans cet édifice délicat. A l'image du Free Store, le magasin favori de Masako, la mère de Ruth ou de cette bibliothèque un peu magique, cachée au cœur de la déchetterie, montée d'ouvrages uniquement de récupération : une pépite qui semble se laisser désirer et promet de petits instants de bonheur.





Mêlant les genres et ne reculant pas devant les sujets sensibles, Ruth Ozeki avance patiemment et élabore un ouvrage minutieux A deux niveaux, voire plus, l'intrigue est habilement construite, par petites touches, au fil du journal de Nao : la pression de ses pairs, le désespoir de son père, le tsunami, élément factuel survenu entre la rédaction du journal de Nao et la découvert de Ruth, ... autant de facteurs qui ont pu mettre la jeune fille en danger et faire de son sauvetage par Ruth une chimère. Fantastique, Histoire, spiritualité, actualité douloureuse, témoignage, magie,... l'histoire croisée de Nao et de Ruth, telle un patchwork confortable et harmonieux, se tisse peu à peu et aboutit à un récit passionnant, émouvant qui laisse le lecteur charmé et étourdi une fois la dernière page tournée.


Lien : http://nahe-lit.blogspot.be/..
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Ruth est une romancière en mal d'inspiration, elle vit sur son île reculée de la baie désolation, en dehors du temps, avec son ami Oliver et leur chat Schrödinger rebaptisé Pesto. Sur la plage, dans un sac en plastique elle découvre le journal d'une lycéenne, une vieille montre-bracelet et des lettres jaunies. Depuis le tsunami de 2011 on trouve des tas de bricoles sur les plages. Ruth se demande si elle doit se saisir de ce vieux livre rouge, quoi qu'il en soit sa curiosité a été piquée au vif et elle commence la lecture du journal intime de cette jeune fille qui se prénomme Nao, qui vit à Tokyo et qui livre des instants de sa vie avant de disparaître. Nao est une jeune fille de 16 ans qui a vécu petite fille en Californie puis a dû rejoindre le Japon avec ses parents. A partir de là, rien ne va plus, son père cherche par tous les moyens la meilleure façon de se suicider, sa mère est toujours absente à cause de son travail et Nao subit des agressions physiques et verbales de la part des jeunes du collège. Elle fait la rencontre de sa grand-mère qui est une nonne bouddhiste de 104 ans avec qui elle partage sa sagesse. Cette grand'mère Jiko a perdu son fils bien aimé à la guerre. Haruki I a été enrolé comme kamikaze et est mort au combat. C'est afin de retrouver une paix intérieure que Jiko se rapproche de la méditation zen. L'oncle de Nao mort au combat a lui aussi laissé des écrits en français, étant philosophe et poète . Haruki I est une sorte d'incarnation du passé, c'est un esprit qui vagabonde autour de Nao. Ces esprits cohabitent avec les êtres-temps divisés entre le passé, le présent et le futur.

Ruth pourra-t-elle changer le cours du temps. Pourra-t-elle l'infléchir, le modifier pour un nouveau futur. Pourra-t-elle unir le ciel et la terre avec ces âmes qui ont pour mission sur terre de diffuser la lumière, de l'incarner.

Il faut se laisser porter par cet univers parallèle et se laisser envahir par un univers d'images, de sensations, de symboles et de métaphores avec la fusion des êtres par delà l'espace-temps.

Roman lu en avril 2016, que je vais relire pour me remettre en mémoire les différents détails qui font de ce livre un petit bijou.
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Le hasard fait parfois ( très) bien les choses.. Ayant lu fortuitement ce roman, je ne peux que vous le recommandez. C'est un livre passionnant comme je les aime avec une très belle histoire où une américaine découvre la vie d'une jeune japonaise grâce à un journal intime échouant sur une plage.. Mais surtout l'auteur aborde de multiples thèmes : les traditions japonaises, le traumatisme de la 2GM, le suicide. la puissance de la littérature et des mots..et tout cela avec une réelle poésie et une pointe de fantastique.

Un roman passionnant et enrichissant !
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En même temps, toute la terre et tout le ciel

Une boite à goûter étanche « Hello Kitty » rejetée sur la plage d’une petite ile de Colombie Britannique, à l’intérieur une vieille montre bracelet, une petite pile de lettres manuscrites et le journal intime d’une collégienne japonaise dissimulé dans une fausse édition de « A la recherche du temps perdu ». Cette trouvaille va changer la vie d’un couple de bobos américains : Ruth écrivaine en panne et Oliver son mari artiste plasticien « sylvestre ».



En même temps que Ruth, nous faisons connaissance de Nao jeune fille de 16 ans, sadisée par ses camarades de classe, et de sa famille, un père informaticien génial mais dépressif ,il n’a pas accepté que ses découvertes puissent être utilisées par l’armée, une mère dépassée, une arrière grand-mère nonne zen, seule personne ressource pour l’adolescente en perte de repère et le fantôme bienveillant d’un grand oncle ,brillant philosophe, devenu malgré lui un soldat kamikaze pendant la seconde guerre mondiale .



Le journal de Nao devient un vrai document sur la vie à Tokyo aujourd’hui, contrastant formidablement avec l’existence ralentie des habitants de la petite ile canadienne où rien n’arrive jamais, à part peut être des déchets rejetés sur la plage….



Récit à deux voix, à cheval sur deux continents, Ruth Ozeki née d’un père américain et d’une mère japonaise embrasse l’histoire du japon, ses mythes, ses légendes, sa réalité et nous livre un formidable roman philosophique, politique, profond et simple à la fois.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Le Fardeau tranquille des choses

Annabelle et Kenji vivent un grand amour. De cet union, nait Benny. Quand Kenji meurt d'un accident stupide, Benny commence à entendre des voix. Car oui les objets ont, eux aussi une voix.

C'est un livre plein de poésie et un peu loufoque à la fois.

La plume est belle et poétique. Il y a un côté un peu fantastique aussi avec ses objets qui parlent et s'expriment.

On sent la peine de Benny, son deuil qui se fait via la communication avec les objets. Sa mère qui perd pied quand son grand amour meurt.

J'ai trouvé l'histoire de cette famille émouvante.

La construction est originale. Le livre interpelle le lecteur, dialogue avec Benny puis laisse Benny raconter.

Un joli moment de lecture.
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