30 mai 2022 #LaBoîte
En direct de LaBoîte, les romancières Sacha Erbel et Cécile Pellault nous offrent un extrait de leur apéro-crimino sur Les femmes tueuses !
« - Je n’ai pas eu besoin de connaître ton vécu pour voir la détresse qui est dans ton cœur. Tout cela t’a bien plus perturbée que tu ne le penses. Tu as réussi à compartimenter ta vie, à mettre ce qui te fait mal dans une petite boîte bien enfouie au plus profond de toi. De cette manière, tu peux continuer à t’épanouir dans ta vie professionnelle et dans tes relations avec tes amis, ainsi que ta famille. Mais la blessure est là malgré tout. Tu la caches bien, mais elle t’empêche d’avancer sentimentalement. » (p.153-154)
La fin c’est quoi? Est-ce qu’on flotte au-dessus de son corps en se moquant de ces pauvres cons qui pleurent autour d’une enveloppe vide? Est-ce que l’on part sans se retourner dans ce fameux tunnel, attiré par cette lumière douce et ardente à la fois? Ou est-ce qu’il n’y a rien? Rien du tout ? Sans être portée sur la religion, n’y aurait-il rien d’autre que le néant? Toute une vie construite de souvenirs pour que tout disparaisse aussi vite?
Tout le monde a un surnom ici, même les véhicules de la PJ. C’est leur monde à eux, leur seconde famille. Un repère dans une réalité qui montre l’être humain dans ce qu’il fait de pire. Ils passent plus de temps ensemble au boulot qu’avec leurs femmes et leurs enfants, alors ces surnoms, ce microcosme qu’ils se sont créé, c’est leur point d’ancrage à l’image d’une bulle d’air qui remonterait des profondeurs.
Et les médecins de cette même période ont continué d'attribuer tristesse et angoisse à l'action de la bile noire. Ils pensaient qu'elle imprégnait le cerveau et obscurcissait l'âme ,provoquant des hallucinations terrifiantes chez les mélancoliques .
« - Ton avenir n’est pas celui que tu crois ! Il est beaucoup plus incertain ! » (p.24)
« Comment pouvait-on être ami un jour, et agresseur le lendemain ? » (p.42)
– T’inquiète, Yan, j’ai du boulot pour toi aussi. Tu vas avec Granulé sur une scène de crime dans le Vieux Lille. »
Ça, c’est la voix de Luce, commandant et responsable de l’autre groupe, auquel Yan appartient. Elle passe la tête par l’entrebâillement de la porte, un petit sourire malicieux sur son visage. Yan éteint son ordinateur, pose le casque audio et lance un :
« Quelle chance ! Deux scènes de crime à trente secondes d’intervalle. Et on a droit à quoi, nous ?
– Un mec, noyé dans son bain, la tronche défoncée, a priori, c’est son appart. Vous y allez et vous me tenez au jus. Le proc est un peu sur les dents, là !
– Tu m’étonnes.
– Des journalistes sont déjà sur place.
– Pourquoi ?
– À toi de me le dire. Bon, maintenant, filez, tous les deux ! »
Talia se rapproche de son amie. Elle cherche son regard, mais Azaïa a peur, on dirait. Elle est comme hypnotisée par ce qui se passe sur le mur derrière elle. Cette ombre maléfique est en trains d’obscurcir son être. Hounsi n’est plus là. La prêtresse originelle a disparu. La pureté est en train de laisser la place a Mal absolu. Le Mal Surnaturel. Celui qui ne voit pas. Celui qu’on ne décèle pas. Que personne ne veut croire. A part peut être ici. Azaïa avale sa salive. Difficilement toutefois.
Vous savez, ici, c’est la Louisiane. La magie a une forte influence sur la vie quotidienne de chacun. Le vaudou, les gris-gris, les sortilèges, même si ce sont des histoires de vieilles bonnes femmes pour la plupart, restent très présents ici, et ce n’est pas seulement du folklore pour attirer le touriste.
– D’après toi, il y a beaucoup de personnes qui tombent sous l’emprise d’un mouvement sectaire avant même de s’en rendre compte ?
– Malheureusement, oui. Le gourou les isole complètement de leur famille, de leurs amis. C’est un réel déchirement pour l’entourage de se trouver impuissant à agir. Leurs avertissements restent sans écho et sans réponse. L’adepte est en prison, sans toutefois le réaliser. Si un grain de sable s’infiltre dans les rouages, la machine commence à s’enrayer, et à ce moment-là seulement, il est possible de montrer la sortie du tunnel à la victime. Pour s’en sortir, le sujet devra entreprendre la démarche de départ, seul. Quand ce pas-là est franchi, alors l’aide extérieure est nécessaire et utile, mais pas avant.