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3.8/5 (sur 61 notes)

Nationalité : Biélorussie
Né(e) à : Minsk , le 12/07/1984
Biographie :

Sacha Filipenko est un jeune auteur Biélorusse qui s'est installé en Russie. Il a publié en 2014 Le Fils d'avant, en 2016 La traque et en 2017 Croix rouges. Il écrit en russe et en biélorusse.

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Sacha Filipenko : écrivain biélorusse, lauréat du Prix russe. Vivre en dictature ?


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[Dans les années 30]:
- Vous aimeriez réussir à comprendre pourquoi la Russie en est arrivée là où elle est...
- Je crois que démêler cela est assez difficile... Sans doute qu'il y a beaucoup de raisons...
- Eh non, mon petit gars! En réalité, tout est très simple! Comme deux fois deux! En Russie, mon ami, les choses sont ce qu'elles sont car on y admet l'inadmissible! Vous et moi, nous avons quitté un pays où personne ne tire jamais la sonnette d'alarme. A chaque fois qu'il faudrait dire "ça suffit", l'homme russe dit: "Oui, c'est vrai qu'on ne peut pas continuer comme ça, mais à bien y réfléchir..." L'un des plus grands problèmes de la Russie, c'est l'alliance du "mais" et de la virgule. Nous avons l'habitude de tolérer des virgules là où nous aurions dû mettre un point depuis longtemps!
- Excusez-moi, mais je ne saisis pas très bien où vous voulez en venir...
- Vous saisissez très bien! Je veux dire qu'au lieu de mettre un point final nous ajoutons des virgules sans fin! Oui, tuer est interdit, mais... Oui, la torture est interdite, mais... Oui, nous savons bien que les criminels ont tort, mais... Mais, mais, mais! Après le meurtre de la vieille et de sa soeur enceinte, Dostoïevski aurait dû mettre un point, mais il a commis un crime, un crime pas moins ignoble que celui de son personnage! Dostoïevski a décidé de justifier l'acte de Raskolnikov. Le voilà, notre drame! Trop souvent, nous voulons comprendre, quand il n'y a rien à comprendre! Nous justifions l'injustifiable! Nous creusons et creusons, là où il ne faudrait plus creuser du tout! Il y a des limites que même le désir de philosopher ne justifie pas de franchir! L'inadmissible est inadmissible!
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L'amour est toujours une erreur.
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Être écrivain, c’est d’abord avoir du courage, dépasser sa peur, oser se lancer. Le talent, le texte sur la page, ça vient après…
p 119
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Avec le temps, nous avons mis en place un système plus ou moins scientifique. Quand une accalmie survenait dans l’appartement du journaliste, nous allumions la musique. Quand la gosse pleurait, nous l’éteignions. D’une façon ou d’une autre, le silence était banni de la vie d’Anton. Même sa fille œuvrait désormais en notre faveur.
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Combien de fois, autour d'une table, après un ou deux verres, nous discutions entre amis de telle ou telle conduite ?
"Non, ça je ne le ferais jamais ! Non, même menacé de mort ! Trahir ? Vous n'y pensez pas ! Calomnier? Jamais ! Il y a des limites à tout ! Et la morale, alors ? Et l'honneur ? Vous avez appris que tel ou tel avait écrit des dénonciations ? Et moi, l'aurais-je fait ? Ah, non ! Jamais, c'est certain ! Accuser faussement quelqu'un ? Sottise ! Je ne le ferais pas, même sous la torture. Et si la vie de mes enfants en dépendait ? Rien ne pourrait me forcer à renoncer à mon humanité !"
Si seulement ! En réalité tout était beaucoup plus complexe. Si l'être humain a vraiment réussi en un domaine, c'est dans l'art de s'arranger avec lui-même.
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– Vous aimeriez réussir à comprendre pourquoi la Russie en est arrivée là où elle est…
– Je crois que démêler cela est assez difficile… Sans doute qu’il y a beaucoup de raisons…
– Eh non, mon petit gars ! En réalité, tout est très simple ! Comme deux fois deux ! En Russie, mon ami, les choses sont ce qu’elles sont car on y admet l’inadmissible ! Vous et moi, nous avons quitté un pays où personne ne tire jamais la sonnette d’alarme. À chaque fois qu’il faudrait dire « ça suffit », l’homme russe dit : « Oui, c’est vrai qu’on ne peut pas continuer comme ça, mais à bien y réfléchir… » L’un des plus grands problèmes de la Russie, c’est l’alliance du « mais » et de la virgule. Nous avons l’habitude de tolérer des virgules là où nous aurions dû mettre un point depuis longtemps !
– Excusez-moi, mais je ne saisis pas très bien où vous voulez en venir…
– Vous saisissez très bien ! Je veux dire qu’au lieu de mettre un point final nous ajoutons des virgules sans fin ! Oui, tuer est interdit, mais… Oui, la torture est interdite, mais… Oui, nous savons bien que les criminels ont tort, mais… Mais, mais, mais ! Après le meurtre de la vieille et de sa sœur enceinte, Dostoïevski aurait dû mettre un point, mais il a commis un crime, un crime pas moins ignoble que celui de son personnage ! Dostoïevski a décidé de justifier l’acte de Raskolnikov. Le voilà, notre drame ! Trop souvent, nous voulons comprendre, quand il n’y a rien à comprendre ! Nous justifions l’injustifiable ! Nous creusons et creusons, là où il ne faudrait plus creuser du Cinquième interrogatoire #
– Après Constantinople, tu es parti en Serbie, n’est-ce pas ?
– Oui…
– Pourquoi en Serbie précisément ? Pourquoi n’es-tu pas revenu en Union soviétique tout de suite ?
– Avoir servi dans l’armée des volontaires de Denikine était une tache particulièrement honteuse dans ma biographie, citoyen directeur. Je m’étais rendu gravement coupable envers le pouvoir soviétique. À Constantinople, j’ai compris que je n’étais pas digne de devenir citoyen de l’Union soviétique. De ce fait, j’ai été contraint à renoncer au chemin du retour…
– Nesterenko, tu ne vois pas que je prends des notes ? Pourquoi tu commences à chaque fois par me raconter toutes ces hérésies ? Il faudrait que je te casse la gueule avant chaque interrogatoire ?
– Je dis la vérité, citoyen directeur…
– La vérité ?! Donc tu me demandes de croire et de noter tout ça ?!
– Oui…
– Sale con ! Je sais que tu es parti pour la Serbie avec une haine profonde pour la patrie ! Espèce de petit enfoiré, je sais aussi que tu y as travaillé pour les services étrangers, et c’est de ça que tu vas me parler aujourd’hui, compris ?!
– Oui…
 
À ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, je perds pied pour la première fois. Perepelitsa change soudain de visage. Ou de masque. Ce n’est pas l’accusation, qui n’a rien de nouveau, qui me désarçonne, mais plutôt son intonation typiquement soviétique, creuse et agressive. Je recommence à avoir l’impression que ce Perepelitsa est complètement stupide. Et je doute : est-il vraiment le bélier entêté pour lequel il se fait passer ? Ou me teste-t-il pour la énième fois ?
Je suis sur mes gardes depuis tant de mois maintenant, mais si je l’avais complètement surestimé ? J’ai peut-être pris trop de précautions… Et si Perepelitsa était vraiment cet homme nouveau soviétique un peu demeuré ? C’est probablement juste un abruti… Et je me suis menti à son sujet. Il ressemble de plus en plus à un imbécile de la pire espèce. Serait-ce à mon avantage ? Non ! Il vaudrait mieux qu’il soit intelligent, car s’il s’avérait que j’ai un crétin soviétique élémentaire face à moi, je devrais jouer une comédie différente. Le courage, la sincérité et l’humour ne peuvent suffire à faire changer d’avis un personnage pareil. En répétant ses accusations vides de sens comme un mantra, Perepelitsa fait le chien dévoué, capable de servir son maître jusqu’à la fin. J’avais cru que nous avions un petit peu avancé, qu’il m’avait reconnu, s’était imprégné de mon ironie et avait compris que je n’aimais pas le genre humain en général, mais que je n’avais rien contre le pouvoir soviétique en particulier… et voilà que c’est reparti comme en quatorze ! En le regardant attentivement, je sens maintenant poindre l’angoisse. Pas facile de savoir ce que ce petit homme étriqué a vraiment en tête…
 
– Vas-tu, Nesterenko, cesser de te braquer inutilement et me parler enfin de ton activité d’espion et de traître de l’Union soviétique ?
 
Je vois… La voilà, sa méthode. Des coups de pioche, encore et encore. Ce n’est pas un enquêteur, c’est un mineur ! Tous, dans ce pays, aspirent à devenir d’illustres travailleurs. Répéter la même chose tous les jours, des mois durant, comme pour extraire une vérité de mes profondeurs, aussi opaques que les couches de la terre…
 
– Très cher citoyen directeur, je vous répète n’avoir jamais eu aucune activité d’espionnage préjudiciable à l’Union soviétique, et je vous dis la vérité depuis des mois !
– La vérité ? Je sais, Nesterenko, que tu es parti pour l’étranger après t’être vu confier des missions spéciales de la part du commandant en chef des forces armées du sud de la Russie. Pourquoi ne me parles-tu pas de ce travail pour les Blancs ?!
– C’est faux ! Je dis la vérité ! Si vous parlez de Belgrade, à mon arrivée en Serbie en 1921 j’ai décidé de commencer une nouvelle vie et ai cherché un emploi dans mon domaine d’activité, dans l’espoir de me remettre à voler un jour ou l’autre…
– Et qu’est-ce qui t’a empêché de voler ?
– Je n’ai jamais réussi à trouver de travail en Serbie. Alors, je suis parti pour la Bulgarie, où on m’a proposé de travailler temporairement comme gérant d’un hôtel.
– Et tu crois que je vais gober ça ?
– Écoutez-moi ! C’est facile à vérifier ! Cet hôtel appartenait à l’armée de Denikine. C’est là que j’ai travaillé. Un jour, l’adjoint du dirigeant de l’aviation de l’Armée blanche, Baronov, s’est présenté à la réception de l’hôtel. Il m’a raconté que du matériel d’aviation, exporté de Russie pendant la révolution, était stationné en Serbie et en Bulgarie. Baronov m’a proposé d’immatriculer les avions et de les envoyer à l’Armée blanche dans le Sud, ce que j’ai accepté…
– À ton avis, ce n’est pas de la trahison, ça ?
– À mon avis, en de pareilles circonstances, pas du tout…
– Mais puisque tu t’apprêtais à faire la guerre contre l’Union soviétique !
– Non. Je voulais simplement trouver de quoi m’occuper. En tant qu’officier et aviateur, passer ma vie à surveiller que l’hôtel reste entier m’intéressait peu.
– Tu as accompli cette tâche confiée par le général Baronov ?
– Non.
– Pourquoi ?
– Parce que les autorités serbes et bulgares ont refusé de transmettre les avions à Denikine avant que des relations diplomatiques normales avec la Russie n’aient été rétablies…
– Et comment t’es-tu occupé ensuite ?
– Les deux premiers mois, comme je l’ai déjà indiqué, j’ai servi en tant que gérant de l’hôtel…
– Leurs gérants avaient les mêmes fonctions que chez nous ?
– C’est-à-dire ?
– Comme Blokhine ?
– Oh mon Dieu, bien sûr que non ! Qui auriez-vous voulu exécuter dans cet hôtel ? Non, en Bulgarie, je ne faisais rien d’autre que ce qu’on me demandait – résoudre des petits soucis pratiques…
– Je vois, continue !
– Ce travail n’avait rien de réjouissant. Je n’aimais pas la ville, ni les Bulgares. Par conséquent, après quelque temps, je suis revenu en Serbie et me suis engagé comme agent mécanicien auprès de l’aviation militaire serbe, mais dès 1923 j’ai pris la décision de partir pour la France…
– Pourquoi ?
– Parce que j’ai compris que, tout comme autrefois en Russie, je n’avais plus rien à faire en Serbie. Les Serbes n’étaient pas pressés de nous aider…
– Donc, tu es parti en France ?
– Exactement.
– Qu’as-tu fait là-bas ?
– Les premières semaines, j’ai travaillé au noir, car je n’avais qu’un visa de transit. Puis, je me suis installé à Versailles où, après avoir reçu un vrai titre de séjour et le statut de réfugié politique, j’ai été embauché dans une usine de produits électroniques. Ensuite, j’ai travaillé à l’usine Renault, où je me suis même plu car pendant quelque temps j’ai fabriqué des pièces d’avion, je n’y ai cependant pas fait de vieux os car quelqu’un m’a proposé le travail de mes rêves…
– Ah bon, lequel ?
– Je suis devenu chauffeur de taxi.
– Travailler comme simple chauffeur de taxi, tu appelles ça le travail de tes rêves ?
– Oui, car un travail pareil, on ne peut qu’en rêver…
– Les chauffeurs de taxi avaient tellement la cote là-bas ?
– Je gagnais de quoi m’acheter du pain et un verre de lait.
– Je vois. Raconte-moi maintenant à quelles organisations de Russes blancs tu as appartenu à Paris.
– Vous ne lâchez toujours pas l’affaire, hein ? Je répète que je n’ai fait partie d’aucune organisation de l’émigration blanche !
– Tu es sûr ?
– Oui ! La seule chose, c’est que… avant Paris, vers la fin de l’année 1921, quand le représentant de Savinkov 1 est arrivé en Serbie depuis la Pologne pour recruter des spécialistes issus de l’Armée blanche, j’ai donné mon accord pour intégrer ses rangs, parmi d’autres officiers. J’ai ainsi pu me rendre à Varsovie…
– Dis donc, un vrai globe-trotter, ce Nesterenko ! Tu as aussi trouvé le temps de faire un saut à Varsovie alors ? Pour quoi faire ?
– On m’a proposé un salaire, et puis Varsovie c’était presque la maison. Je croyais alors que je pourrais y passer un peu de bon temps, me rapprocher de la Russie et enfin rentrer au pays. Mais à peine arrivé en Pologne, j’ai vu que l’Armée blanche était exsangue et, au bout de deux jours seulement, j’ai rebroussé chemin et suis retourné en Serbie…
– La Serbie, la Bulgarie, la Pologne, et partout, Nesterenko, tu as tenté de combattre le pouvoir soviétique !
– Pas du tout. Partout, j’essayais de recommencer ma vie ! Que de tentatives, citoyen directeur, avortées, incessantes… À l’époque dont nous parlons ici, je ne cherchais plus à combattre personne depuis longtem
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Un peu penchée mais solidement plantée en terre, cette croix résonnait dès que le vent se levait et se transformait en instrument de musique. Cette croix chantait le passé et l'avenir, la mort et la désespérance, la mémoire et la résignation. Son pied n'était pas arrosé mais imbibé du sang provenant de cette terre, cette croix était son histoire et sa métaphore, son avertissement et son repère.
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La mort est mon premier souvenir d'enfance.
Tous les jours, nous passons devant la tombe qui porte mon nom, je me promets de ne jamais mourir...
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J'essayais de mémoriser chaque mot, pour qu'un jour, une fois libérée, je puisse répéter tout cela aux gens. Oui, mais voilà, c'est malheureux mais quand je me suis retrouvée en liberté, j'ai soudain compris que personne n'avait besoin de cette vérité.
page 164
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J'ai appris que, comme nous, les enfants étaient envoyés, dans les orphelinats en convois escortés par des gardes, avec des chiens. Les enfants avaient droit à une ration, et, bien sûr, devaient travailler. Cinq fois par semaine, munis de petites binettes, les gosses de cinq ans allaient au potager sarcler les plates-bandes. Toutes les forces, même les plus minimes, devaient contribuer à la construction de notre grand pays.
J'apprenais que les enfants mangeaient les rats qu'ils attrapaient, que dès les premiers jours au camp, ils apprenaient à se dénoncer les uns les autres.
Des enfants me racontaient que certains orphelins reniaient démonstrativement leurs parents.
pages 179-180
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