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Invités : Raphaëlle Bacqué et Samuel Blumenfeld
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A ce moment précis, Mc Queen contredit les lois de la gravité. Il devient le maître du temps.Il regarde l'objectif du photographe avec une candeur exprimant à quel point il prend la mesure de l'exploit accompli: rouler à toute allure certes, mais en arrêtant le temps qui passe. Seul Josué y était parvenu avant lui.
L'analogie ne doit rien au hasard. Entre le récit biblique et Mc Queen, je percevais depuis longtemps un lien évident, que j'avais tenté de concrétiser, gamin, en parsemant les pages de mon Houmach, ma Bible en hébreu, de photos des films de Mc Queen. J'ai encore honte d'avouer un tel blasphème.
La scène du pont, qui nécessitera à elle seule six semaines de tournage, est restée, à raison, la séquence emblématique du film. Si elle demeure aussi impressionnante, c'est parce qu'elle se situe bien au-delà du tour de force. Elle apparaît d'abord comme la figure friedkinienne par excellence : deux hommes sur un pont suspendu en pleine tempête, l'un au volant, l'autre assis sur des lattes de bois vermoulues en train de lui donner des directions pour éviter de tomber dans le vide. Une image improbable, reflet de la folie des personnages. Et de celle de son metteur en scène qui ne recherche pas tant l'image marquante, susceptible de rester dans les mémoires, mais celle reflétant son état d'esprit. [...]
Ce qui est frappant dans cette scène du pont [...] est l'engagement déraisonnable de son metteur en scène, prêt à tout pour saisir cette image limite où ses comédiens frôlaient la mort devant la caméra.
"J'avais effectivement perdu la tête, les mecs auraient tout aussi bien pu mourir, que ce soit pour "French connection" ou "Sorcerer". Vous ne me parleriez plus à l'hôtel mais en prison. [...]
[p. 143]
Ils s'étaient trouvés autour de cet objectif factice, unis dans l'illusion, scellant leur relation dans un univers imaginaire dont ils croyaient posséder les clés.
La claustrophobie est l'une des figures marquantes de la grammaire du cinéma de Friedkin, que ce soit le HLM dévasté où habite Gene Hackman dans "French connection", du sommet duquel le tueur incarné par Marcel Bozuffi tente de le descendre ; le lit sur lequel est attachée la jeune fille possédée de "L'Exorciste" à l'intérieur de sa demeure de Georgetown ; les bars gay SM du Meatpacking District de New York où Al Pacino perd la tête dans "Cruising".
Si "Sorcerer" détonne dans cette liste à cause de l'appréhension des grands espaces par Friedkin, sa plongée dans un espace inconnu devrait procurer une sensation inverse : celle d'une liberté retrouvée le temps de leur périple par ces quatre hommes. Or, ils tournent en rond. Ils ne se confrontent pas seulement à une terre hostile, mais se déploient dans un paysage qui leur oppose une fin de non-recevoir. [p. 135]
Le titre initial de mon film était "Ballbreaker" ["casse-couilles"] raconte Friedkin. Wasserman m'a dit qu'il était hors de question de produire un film avec un tel titre. J'avais aussi pensé à "Dynamite", qui était trop évident. Un soir, j'écoutais "Sorcerer", l'album de Miles Davis, et le mot "sorcerer" m'est immédiatement apparu mystérieux. Il désigne un sorcier malfaisant. Dans cette histoire, le sorcier malfaisant est le destin. Les quatre personnages du film sont, à leur manière, un esprit malfaisant. Amidou avec les explosifs, Scheider au volant de sa voiture, Cremer en manipulant les chiffres et Rabal avec son revolver. Puis le destin est le véritable sorcier. Il me semblait que c'était un concept que le spectateur saisirait facilement. Il s'est avéré que personne n'a rien compris. [p. 55]
Mac Queen était le fils qu'il lui fallait. Qu'il méritait aussi. Un fils capable de l'écouter et de le suivre dans ses délires, d'entendre ses récits de chasse au trésor et de faire preuve de la compréhension nécessaire sans le juger avec sévérité.
Le pire ennemi de l'acteur est son intellect.