Une décharge fulgurante traversa son crâne et l'abima au sol. Elle ne perdit pas immédiatement connaissance. Samia tenta de se redresser mais ses mains glissèrent sur le carrelage baigné d'un liquide chaud et d'une odeur doucereuse et familière de souvenirs lugubres.
La même que celle du mouton égorgé.
Le réveil cracha sa sonnerie assassine. Gabriel peina à lever les paupières sur les chiffres rouges. Des banderilles stridentes lui perçaient le cerveau et des seaux de sable lui brûlaient les yeux.
Diriger sa colère contre un individu ou une institution permettait à beaucoup de ne pas s'effondrer devant la souffrance et l'absurdité de la mort.
Le hasard, l'inadvertance ou l'imprévisible n'avaient plus droit de cité dans notre système judiciaire et notre conception de la mort. Son expérience lui démontrait que cette rage s’éteignait quand les plaintes se classaient sans suite et que le temps faisait son œuvre de cicatrisation.
L'avocate ne connaissait que trop bien ses réactions immédiates après la mort soudaine d'un proche. Les familles voulaient toujours un responsable pour expliquer l'inexplicable. La faute du médecin, du pompier, du policier, de la justice, de la société
Deux grandes lampées de whisky apaisèrent ses tempes en feu et lui permirent de gamberger sur cette nouvelle équation policière à la belle inconnue.
Ses mots tendres se fracassaient sur l'épaisseur de son silence.