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Critiques de Sarah Cohen-Scali (787)
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Max

Bien sûr, j’ai déjà lu et entendu parler à propos des Lebensborn, « fontaines de vie », en traduction littérale. C’était, en réalité, un programme de sélection des nouveau-nés puis des enfants pour créer la fameuse race supérieure aryenne rêvée par les Nazis.

Mais, en me plongeant dans la lecture de Max, le roman de Sarah Cohen-Scali, publié pour les plus de 14 ans mais surtout à ne pas réserver à la jeunesse, j’ai été complètement aspiré par le drame effroyable, cet engrenage inimaginable et pourtant bien réalisé par Himmler et des gens tout à fait respectables, intelligents, cultivés, comme le docteur Ebner et les sages-femmes, les infirmières, tous ceux qui l’assistaient.

Max qui est nommé Konrad - avec un K comme Krupp - à sa naissance, le 20 avril 1936, au foyer de Steinhöring, près de Munich, raconte. C’est lui, ce personnage fictif et pourtant d’un réalisme poignant qui m’a emmené jusqu’au bout que tout le monde connaît, la victoire des Alliés sur les Nazis en 1945, avec d’immenses dégâts matériels et surtout humains impossibles à réparer à cause de la quantité incroyable de victimes de Hitler et de ses sbires.

Max raconte donc et c’est d’une franchise, d’une spontanéité qui fait souvent sourire malgré les perspectives que l’on connaît. Il est dans le ventre de sa mère qui fut violée par un Waffen-SS évaporé ensuite, et il fait durer, retarde au maximum sa venue au monde pour naître le même jour que le Führer, ce fameux 20 avril.

Petit à petit, grâce à Max, je découvre toute l’incroyable organisation méprisant les règles les plus élémentaires de l’humanité afin de sélectionner les êtres « parfaits » à venir. Si on sélectionne, on élimine sans pitié et les prisonniers du camp de Dachau sont là pour nettoyer, embellir les lieux avant de mourir.

Le petit Max observe, décrit mais il est absolument persuadé de l’utilité de ce qu’il constate, soutient complètement le régime nazi, même s’il a peur, parfois, de faire partie de ceux qui sont « réinstallés » ou éliminés car on s’exprime en langage codé, ici.

Quand Max grandit, il est emmené en Pologne, à Poznań, où je découvre une autre facette abominable du plan, la capture des enfants polonais blonds, après sympathisation avec Max. La séquence avec Bibiana, cette femme extraite du camp de Ravensbrück pour jouer la mère de Max, est particulièrement terrible. De plus, les scènes de débauche entre les Frauen, putes allemandes pour les officiers et les Polonaises pour les simples soldats, sont très réalistes.

Changement de décor à six ans. Max est à Kalish, toujours en Pologne, où il est mêlé aux autres enfants embrigadés, scolarisés sous la direction de Johanna Sander. Max se fait passer encore pour un Polonais pour rassurer les autres. Lui qui a été Baptisé Par le Führer en Personne (BPFP), il découvre toute l’horreur de la sélection des filles et des garçons. C’est là qu’il est fasciné par un gars de douze ans, Lukas, qui joue un rôle très important ensuite. Surtout, il permet de comprendre le sort réservé aux Juifs et sa description du ghetto de Lodz est terrible.

Ensuite, c’est la Napola (NAtionalPOlitische LehrAnstalt) à Postdam. J’ignorais ce mot et j’apprends qu’il y en avait ailleurs comme à Rouffach, en Alsace. Dans un ancien hôpital psychiatrique dont on a « réinstallé » les malades, c’est-à-dire qu’ils ont été tués, gazés dans des camions, Max et Lukas sont scolarisés, l’un en primaire, l’autre en secondaire.

Les événements, les rebondissements ne manquent pas, les drames non plus. Même si Max-Konrad qui est toujours un parfait petit nazi, le vit mal, le sort de son pays est en train de basculer et les voilà tous les deux dans Berlin bombardée, avec Manfred, camarade que Max méprise puis accepte. Les couloirs du métro, les caves, l’appartement de la famille de Manfred puis les Russes qui libèrent et violent les femmes tout en chassant les SS, la fin est proche.

Max est un roman dont les principaux protagonistes comme le docteur Ebner, Johanna Sander et d’autres ont bien existé, ont bien appliqué consciencieusement cet odieux Lebensborn mais il est terrible d’apprendre qu’à l’issue du procès de Nuremberg, ces gens-là ont été libérés.

Quant à Max, Sarah Cohen-Scali a eu l’idée géniale de le créer et de lui faire raconter de l’intérieur ces années atroces qu’il ne faut en aucun cas oublier. De plus, l’hommage qu’elle rend aux déportés, aux victimes des camps de la mort, m’a particulièrement touché.

Un grand MERCI à Emma car Max est vraiment un livre à lire !!!


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Max

Ouawh ! Une lecture qui ne vous laissera pas indemne, je vous le garantis ! Et pourtant, cela s'est réellement passé, il faut bien se le dire. Même si cet ouvrage est avant tout un roman, destiné à la jeunesse (qu'on se le dise), il n'en est pas moins qu'il s'inspire de nombreux faits réels...et pas des plus gais que l'on puisse trouver puisqu'il s'agit à mon avis, des pires événements qu'a connu notre XXe siècle.



Max, ou devrais-je plutôt dire Konrad von Kebnersel, est né le 20 avril 1936, le jour anniversaire d'Adolf Hitler, à minuit une. Il est le premier représentant de la race aryenne, telle que l'a imaginée le Führer. Né sans amour puisque sorti du ventre d'une Frau sélectionnée pour les critères répondant à ceux qu'Hitler a déterminé répondant comme ceux de la race aryenne et d'un officier SS, sélectionné sur les mêmes critères, Konrad (ou Max comme sa mère biologique se plait à l'appeler) n'est que le fruit d'une organisation machiavélique : le programme "Lebensborn". Après sa naissance, Konrad a été examiné sous toutes les coutures ( taille, poids - jusque là, rien de choquant - mais aussi espacement entre les deux sourcils, taille de la bouche, esoacement entre le cou et le menton...bref toutes sortes de mesures inimaginables et qui font de Konrad le prototype parfait, pur représentant de la race aryenne.



Après que Konrad ait été "Baptisé Par le Führer En Personne (ce qui lui vaudra plus tard son surrnom de "BPFP"), celle-ci sera rapidement et que sa mère biologique l'ait allaité quelques temps, cette dernière sera rapidement "remerciée" et l'enfant confié aux plus hautes institutions sensées faire de lui le Parfait Allemand Nazi, véritable machine à tuer, antisémite et ne jurant que par le Führer.



Il sera par la suite envoyé dans des écoles d'élite (car il faut vous dire qu'il est également extrêmement intelligent) telles que celle de Kalish et la Napola qui feront de lui ce qu'il est sensé devenir. C'est dans celles-ci qu'il fera la connaissance de Lukas (bien entendu, ce n'est pas son vrai prénom, vous comprendrez plus tard en lisant la suite de mon récit) qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau et que le "Herr Doktor Ebner", celui qui l'a mis au monde, acceptera de lui octroyer comme frère. Cependant, et voici le basculement de l'histoire, Lukas est polonais et qui plus est, juif !





Etant donné que de nombreuses critiques ont été faites sur cet ouvrage, je vais m'arrêter là pour ce qui est de l'intrigue mais sachez que j'ai vraiment été bouleversée en lisant cet ouvrage tant il est émouvant (même si il est très dur), que l'ai trouvé vraiment très bien écrit, très documenté et que je le recommande vraiment à tous - même si je n'aurais pas eu tendance à classifier cet ouvrage dans les livres Jeunesse -. A découvrir !
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Max

Quelle audace, quelle originalité et en même temps y a-t-il meilleur narrateur qu'un enfant pour nous parler de ce fameux programme "Lebensborn" initié par Himmler dès décembre 1935 et qui perdura jusqu'en 1945 ?

Ce projet Lebensborn, l'un des plus secrets et terrifiant projet nazi, peut être traduit par "source de vie". Des femmes sélectionnées, jugées "racialement pures" par les nazis mettent au monde dans le secret, de purs représentants de la race aryenne, jeunesse idéale destinée à régénérer l'Allemagne puis l'Europe occupée par le Reich. Plus horrible encore, a été ensuite, l'enlèvement d'enfants répondant aux critères raciaux (cheveux blonds et yeux bleus notamment) et leur transfert dans des centres Lebensborn pour y être "germanisés".

Le livre débute donc dans la première maison Lebensborn créée en 1936 dans Steinhöring, un petit village non loin de Munich, lors de la naissance de notre narrateur, ou plutôt la veille à minuit, le 19 avril 1936, quand il est encore dans le ventre de sa mère. Il nous dit qu'il aurait déjà dû naître la veille, mais qu'il a tout fait pour retarder cela, et que, dans une minute, il aura réussi : " Mon vœu, le premier de ma vie à venir, est de voir le jour le 20 avril. Parce que c'est la date anniversaire de notre Führer. Si je nais le 20 avril, je serai béni des dieux germaniques et l'on verra en moi le premier-né de la race suprême. La race aryenne. Celle qui désormais régnera en maître sur le monde."

Le ton est donné. C'est donc cet enfant qui va tout nous raconter depuis sa conception, sa naissance bien sûr, sa grande crainte ensuite dans les mains du Docteur Ebner de ne pas répondre aux critères raciaux, sa vie avec sa maman réduite aux tétées, comment celle-ci a été sélectionnée pour faire partie du programme, jusqu'à l'apothéose. Son baptême, désormais remplacé par la cérémonie du Namensgebung, la "donation du nom" est présidé par… vous l'avez deviné, le Führer en personne, pour le récompenser d'être né le 20 avril comme lui et sa maman a été sacrée championne des donneuses de lait ! Un moment grandiose immortalisé par une photo où ils ont eu le privilège de poser avec le Führer, photo qui va revêtir une extrême importance. Et le principal, il a maintenant un nom et un prénom : Konrad von Kebnersol, K comme Krupp.

Ce bébé qu'on pourrait qualifié de surdoué a vite compris que les gens autour de lui s'exprimaient en langage codé et, contrairement à ses collègues de la maternité, il l'a vite déchiffré et compris que, par exemple, ces jeunes femmes qui n'ont pas convenu à la sélection et qui ont été "réinstallées", n'ont pas été installées ailleurs, mais tout bonnement exterminées. De même que lorsque des chauffeurs viennent chercher "les lapins", "ce sont les bébés qui servent de cobayes et qui sont livrés à l'institut de Vienne, pavillon 15." et d'autres encore... Quelques événements vont intervenir et perturber cette vie qui semblait toute tracée, puis il y aura la rencontre, lors d'une sélection parmi des enfants raflés, avec Lukas, jeune juif polonais, son aîné de quatre ans rencontre qui va tout bouleverser. La suite, à vous de la découvrir.

Contrairement à beaucoup d'ouvrages, ce roman s'inspire de faits réels, certains personnages dont le rôle est important dans l'intrigue ayant d'ailleurs réellement existé. On peut le qualifier de roman ou plutôt de fable historique, une fable glaçante, fascinante, très dérangeante écrite de façon très caustique. C'est une fiction, certes, mais basée sur tellement de faits réels qu'elle fait frissonner. Heureusement, beaucoup d'humour traverse cet écrit et permet de ne pas sombrer. On est, au contraire, scotché à ce personnage qui nous tient en haleine jusqu'au dernier mot. Un roman choc, un roman jeune-adulte, à lire par des ados, tout de même après explications.


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Max

Quelle douche froide ! En entrant dans ce livre, on s’en prend plein la figure du début à la fin. Je connaissais les Lebensborn, ces « fontaines de vie » cachant l’innommable, c’est-à-dire la sélection des meilleurs petits aryens et leur reproduction pratiquées par les nazis… Mais l’entendre « raconter » par un enfant qui le vit c’est parfois insurmontable et glaçant. Belle idée de l’auteure d’avoir imaginé comme narrateur un fœtus d’abord puis un bébé et un enfant que l’on suit jusqu’à ses douze ans. Malgré une réflexion d’adulte endoctriné et un vocabulaire soigné, ce narrateur garde la naïveté de l’enfance et cela rend le récit encore plus bouleversant.



J’ai dévoré ces 469 pages en deux soirées tant l’histoire est accrocheuse et ce, malgré les horreurs décrites. Sarah Cohen-Scali nous offre un récit richement documenté qui nous plonge au cœur d’un processus aussi abominable que le furent les camps. Que sont devenus tous ces enfants à la fin de la guerre ? Ces orphelins nazifiés ? Qui s’en est soucié ? Voilà une question qui me taraude depuis que je sais que l’eugénisme a existé à grande échelle en Allemagne et dans les pays conquis. Quel avenir a-t-on donné à ces enfants sacrifiés sur l’autel de la folie humaine ?



Avant de rédiger cette histoire, l’auteur a beaucoup lu sur le sujet et notamment « La chute de Berlin » d’Anthony Beevor. Un ouvrage qui fait référence si j’en crois les nombreux auteurs que j’ai lus et qui s’en sont inspirés. Il faudra que je le lise à mon tour.



Ce roman jeunesse destiné aux 15-16 ans devra faire l’objet d’un accompagnement dans les classes. Introduire le récit d’abord, pour mettre en garde les âmes sensibles sur l’implacable relation des faits et permettre aux élèves de s’exprimer ensuite sur leur lecture. S’il est bon que les jeunes sachent ce qui s’est réellement passé durant la Seconde Guerre mondiale, notre rôle d’adulte est de les accompagner dans leurs découvertes de l’indicible horreur qu’elle a engendrée.


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Arthur Rimbaud : Le voleur de feu

Une belle biographie d'Arthur Rimbaud au temps de sa jeunesse.

Le lecteur ressent ses tourments, sa créativité, son envie d'évasion...

Ressenti également de son envie de mobilité constante, jamais satisfait, il en veut toujours plus, jusqu'à la rébellion, au-delà des limites... Rimbaud dans toute sa complexité, mais si bien décrit par Sarah Cohen-Scali.

Un livre jeunesse, qui comme beaucoup de livres jeunesse, touche également un public adulte.

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Max

Hallucinant !

Effrayant !

Je reste sans voix. Je ne trouve pas les mots pour parler de ce livre, là, à chaud, une fois le livre refermé.

C'est un roman, certes, mais basé sur des faits réels.

Comment est-ce possible ? A chaque fois que je lis un livre ayant pour thème la 2nde guerre mondiale, je me pose cette question.

Quel que soit le sujet, que ce soit au sujet des camps, des exterminations, des expériences, des horreurs de cette période, et ici de cette sélection aryenne des enfants, des naissances. A chaque fois je m'étonne.

Et pourtant, l'Histoire montre que l'Homme est capable de tout.

D'ailleurs, que ce soit durant la 2nde guerre, ou à d'autres périodes, l'Homme semble ne rien retenir du passé. Encore aujourd'hui je suis épouvantée face à certaines actions d'hommes à l'encontre d'autres humains.

Peut-on parler d'Humanité ?

Merci à l'auteur, Sarah Cohen-Scali, d'avoir écrit cette partie de l'Histoire, vu de l'intérieur.
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Max

1) Les Lebensborn étaient des maternités où des femmes donnaient naissance à des enfants dits « parfaits » de race aryenne, selon les critères de l'idéologie nazie. Au total, on estime que 20 000 enfants seraient issus de ces dispositifs.

2) Pendant la Seconde Guerre mondiale, environ 200 000 enfants polonais, ainsi qu'un nombre indéterminé d'enfants d'autres nations, ont été arrachés à leurs foyers et transférés de force en Allemagne nazie à des fins de travail forcé, d'expérimentation médicale et de germanisation.

3) Les Napola étaient des internats de l'enseignement secondaire et étaient destinés à devenir les écoles de l'élite du Reich.

4) À la fin de la guerre, l'Allemagne est dévastée et occupée : elle capitule le 8 mai 1945 après la prise de Berlin par les soldats soviétiques. De nombreuses villes allemandes ont subi des dégâts considérables et Berlin est détruite à 40%.



À travers l'histoire de Max, ou plutôt de Konrad von Kebnersol ainsi baptisé par le Fürher en personne, l'autrice reprend ces quatre aspects de l'histoire de l'Allemagne nazie, de sa toute puissance à son effondrement. Max, ainsi je préfère l'appeler, est le premier bébé issu du programme Lebensborn, né un 20 avril comme le Fürher. Comme un fait exprès, il répond à tous les critères de la race nordique. Il est l'échantillon type de la race supérieure. Avec sa gueule d'ange (blond, yeux bleus, peau très clair et crâne dolichocéphal) et son "draufgängertum", il est le modèle à suivre.



Ainsi, nous suivons cet enfant, endoctriné dès sa naissance, sinon avant. Non pas orphelin, puisque sa mère est l'Allemagne et son père le Fürher. Il est fier de ce qu'il est et on le lui rend bien. Il n'hésite pas à dénoncer les traîtres à sa patrie, collabore du mieux qu'il peut, se donne à fond dans toutes les missions qu'on lui octroie. Il déteste les Juifs et les Tsiganes, comme on le lui a bien appris. À priori, il n'est pas un personnage très attachant, et pourtant je n'ai pas aimé le détester. Mais il évolue, petit à petit, jusqu'à penser quelque peu par lui-même et se poser des questions. Sa relation avec Lukas y sera pour beaucoup et lui ouvrira les yeux... Je n'en dirai pas plus, à vous de le découvrir.



Nous sommes bien évidemment dans une fiction, mais la dimension historique est si bien fournie qu'on pourrait se croire dans une histoire vraie. J'y ai cru en tout cas, j'y étais parmi ces gamins endoctrinés. J'ai suivi leur éducation, emplie de propagande et de haine envers les Juifs. C'est affolant mais je n'ai pas voulu en perdre une miette, d'autant qu'au fur et à mesure que l'Allemagne nazie s'affaiblit, un autre aspect de l'histoire finit par prendre le dessus : le relationnel et l'humain.



La narration étant à la première personne, nous vivons les événements en direct. Nous sommes dans la tête de Max, au plus près de sa conscience et de son état d'esprit. Nous grandissons avec lui, doutons avec lui. On finit par s'en sentir très proche, d'autant que nous l'accompagnons depuis qu'il est dans le ventre de sa génitrice (sa mère pourrait-on dire mais il n'en a plus de souvenirs). Avec lui, on assiste à certaines horreurs dont ont été capables les nazis.



Je n'ai rien appris de plus que ce que je savais déjà, pourtant ce roman est foisonnant de détails historiques. Encore une fois, les mêmes interrogations demeurent : Comment peut-on devenir à ce point inhumain et perpétrer de telles atrocités à ses semblables ? Comment peut-on devenir à ce point haineux et cruel ? Comment a-t-il réussi à ce qu'autant de gens le suivent ? [Mais aussi pourquoi décréter blond aux yeux bleus, grand et élancé comme critères de la race supérieure quand on est soi-même petit aux cheveux et yeux foncés ? Rien qu'avec ses propres caractéristiques, qui ne répond en rien aux critères, comment a-t-il fait pour se rendre crédible ? S'il avait suivi ses propres principes, c'est dans un camp qu'il aurait dû finir...]



"Max" est un livre que je voulais lire depuis longtemps, qui m'attendait bien sagement sur une étagère depuis aussi longtemps, j'ai enfin sauté le pas et je ne regrette qu'une chose, comme bien souvent, c'est de ne pas l'avoir ouvert plus tôt. C'est un roman enrichissant, abouti, très bien documenté, original par le choix de son point de vue (celui d'un enfant né nazi), mais aussi captivant et saisissant, qui ne laisse pas indifférent. Pour ceux qui veulent en savoir plus sur le programme Lebensborn, les Jeunesses hitlériennes et la germanisation, je vous le conseille fortement.



J'ai cru comprendre qu'il avait été maintes fois récompensé, et c'est amplement mérité.

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Max

Dès que l'on parle de la seconde guerre mondiale, on pense évidemment à l'abomination des camps.

Mais ce n'est, hélas, pas la seule horreur de cette période.

Il y a aussi le Lebensborn, cette association créée dans les années trente à l'initiative d'Heinrich Himmler, dans le but de faire naître plein de beaux enfants "aryens", pour faire de l'Allemagne un pays à la population la plus pure possible.

Et pour cela, tous les moyens sont bons. Enfin, "bons", c'est une façon de parler...

Des jeunes femmes considérées comme "aryennes" étaient poussées à concevoir des enfants avec des SS qu'elles ne connaissaient pas et qu'elles ne voyaient que pour la reproduction. Les enfants étaient abandonnés à la naissance, élevés dans des établissements spécialement créés, puis donné en adoption à des familles triées sur le volet. On motivait les femmes en leur disant qu'elles faisaient ainsi un cadeau à leur pays, ou, encore mieux : au Führer lui-même !

Et comme cela ne suffit pas, comme il faut le plus possible d'enfants, eh bien, on va tout simplement en voler.

Oui, vous avez bien lu. Voler des enfants. En Pologne principalement.

Des religieuses-infirmières spécialement formées sont chargées de repérer des bébés ou des enfants blonds aux yeux bleus, présentant tous les "bons" critères physiques ; des enfants que l'on qualifie de "germanisables". Ceux-ci sont kidnappés dans la rue ou chez eux, arrachés à leur famille puis regroupés dans des foyers dans lesquels on leur fait commencer une nouvelle vie. Abandon de leur langue, et apprentissage forcé de l'allemand. En fait, abandon complet de leur identité : un nouveau nom leur est donné, ainsi que de nouveaux papiers. Toute trace de leur vie antérieure est détruite et extirpée de leur mémoire, à coups de dressage et de punitions sévères pour ceux qui se rebellent.

Entre 200 000 et 300 000 enfants polonais ont subi ce sort, et l'immense majorité d'entre eux n'ont pas retrouvé leur famille après la guerre.

Penser que l'on ait pu imaginer et mettre en place un tel programme, à si grande échelle, ça fait froid dans le dos, non ?

Sarah Cohen-Scali a bâti son roman sur ce thème nauséabond. Elle a mis ses mains dans la fange pour, sous couvert de fiction, dénoncer et faire réfléchir.

Et elle a terriblement bien fait.

J'avais eu la chance, grâce à Babelio, de la rencontrer pour son livre Orphelins 88. J'avais été impressionnée par la quantité et la qualité des recherches qu'elle avait effectuées pour composer ses personnages et écrire cet ouvrage.

Max a bénéficié du même traitement, sa lecture n'en est que plus glaçante.

C'est une fiction, certes, mais fondée sur tellement de faits réels !

Sarah Cohen-Scali va loin, très loin dans l'horreur, mais ce n'est absolument pas pour un plaisir malsain. Si cela avait été le cas, j'aurais refermé ce livre très rapidement.

Il faut cette dose d'horreurs pour suffisamment bousculer le lecteur, pour qu'il accepte que l'inacceptable est bel et bien vrai, pour qu'il prenne conscience du degré d'abomination de ce programme "Lebensborn".

Lebensborn, un nom bien trompeur ! Formé des mots allemands "Leben" qui signifie "vie" et "Born" qui voulait dire fontaine en langue ancienne.

Fontaine de vie ! Quelle ironie dans ce nom, alors que je ne vois dans ce programme que la négation de la vie. La négation de la diversité de l'espèce humaine. La négation de la cohabitation de différentes cultures.

Fontaine de vie ! Quand on apprend que les enfants nés de ce programme qui ne présentaient pas les bons critères physiques (les "produits défectueux") étaient purement et simplement exterminés.

À travers ce roman glaçant, l'auteur jette un pont entre le passé et le futur.

Elle rend hommage aux victimes de cette barbarie, et secoue le lecteur, déclenchant forcément une prise de conscience. Pour que cela ne se reproduise plus.

Elle a créé le personnage de Max, un bébé du Lebensborn. C'est lui qui raconte, et à travers son histoire, c'est l'histoire de tous ces enfants qui nous est révélée.

Le procédé est très habile et donne une énorme force au récit.

Sarah Cohen-Scali expose à merveille l'embrigadement dont les jeunes enfants peuvent être victimes, l'endoctrinement qui peut s'exercer sur de jeunes cerveaux et le Mal absolu qui peut résulter d'une enfance volée, sacrifiée au nom d'une idéologie.

De l'histoire, je ne vous raconterai rien. Ce n'est pas le lieu, une "critique" n'est pas faite pour ça.

Lisez Max, et faites lire Max autour de vous ! Il est édité en collection "jeunesse", mais attention, le lecteur doit avoir une certaine maturité pour affronter ce texte, et être accompagné dans sa lecture qui ne manquera pas de générer des tas de questions.

Pour finir, je reprends ce que j'ai déjà écrit à plusieurs reprises.

C'est un fait maintenant bien connu : la lecture de romans, mettant en scène des situations et des personnages variés, permet au jeune enfant de développer de l'empathie. En se mettant dans la peau du héros, de la victime, du peureux, du lâche, du solitaire, du riche, du pauvre, du timide, etc. le jeune lecteur vit plusieurs vies, est confronté à des expériences diverses et en arrive à comprendre ce que ressentent les autres. Il comprend que les êtres humains sont variés, et il arrive à se mettre à leur place.

Bref, il développe cette empathie si précieuse et qui fait de plus en plus cruellement défaut dans notre société.

Cette empathie qui me rend totalement incapable d'aller égorger mon voisin même si je ne l'apprécie pas du tout !
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Max

Allemagne, 1936. Programme Lebensborn ou l'eugénisme nazi en action : on sélectionne deux géniteurs impeccablement blonds, grands et solides, au teint et aux yeux clairs, dont les ancêtres sont "irréprochables" depuis au moins 200 ans. Et on les fait s'accoupler un minimum de fois, dans le noir, sans amour, sans tendresse, pour concevoir des bébés 'parfaits', dont les jeunes mamans feront don à la patrie.



Pour augmenter l'effectif des futures troupes, on prend également des bambins dont la morphologie répond aux critères définis (selon des mesures anthropométriques très précises correspondant à l'Aryen idéal), en Allemagne, d'abord, puis dans d'autres pays - où les enfants sont littéralement arrachés à leurs parents. Adoptés pour la plupart, dans un premier temps, ces jeunes sont ensuite envoyés dès six ans dans des établissements éducatifs très stricts, où ils sont abreuvés de propagande.



Cette fable historique s'attache au parcours de Max/Konrad, le narrateur. Si cet enfant, tout premier-né du programme Lebensborn, est fictif, le programme fut hélas bien réel, lui... Max s'exprime dès sa naissance avec un langage d'adulte et possède une maturité époustouflante. Mais cette forme de récit est particulièrement bien adaptée aux propos du récit. On suit ce symbole nazi du milieu des années 1930 à la prise en charge par les alliés de toutes ces jeunes victimes.



Un roman bouleversant qui se dévore, grâce auquel j'ai encore beaucoup appris sur le nazisme, ses théories, ses pratiques. Je ressors à chaque fois de ce type de fictions documentées plus abasourdie, écoeurée, révoltée par des épisodes dont j'ignorais beaucoup.



Edition jeunesse, dès 15-16 ans.



(PS : Encore dans les années 1970, ces maternités étaient considérées comme une simple rumeur, donnant lieu à une grande puissance fantasmatique (...) jusqu'à ce que Georg Lilienthal, un jeune historien spécialiste de la médecine SS, y consacre sa thèse en 1985. - source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Lebensborn)
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Orphelins 88

1945 : fin de la seconde guerre mondiale en Europe.

La Libération et les scènes de liesses vues et revues dans des documents d'archives.

On pourrait croire la période faste, terriblement heureuse.

Et pourtant...

Les images sont trompeuses ou du moins, elles masquent la réalité.

Beaucoup de gens n'ont plus rien et errent sur les routes.

Beaucoup de Juifs, parmi les survivants de la Shoah, ne peuvent plus rentrer chez eux, parce "chez eux" n'existe plus. Spoliés, volés, ils n'ont plus rien. Leurs maisons sont occupées, ils ne savent plus où aller.

Beaucoup d'enfants, également, se retrouvent démunis, sans famille, sans repères.

Non, cette période n'est pas heureuse pour tout le monde.

C'est même une période barbare : beaucoup de gens meurent de faim et sont prêts à tout pour survivre : voler, piller... et même, tuer.

Les camps de DP (displaced persons : personnes déplacées) ne désemplissent pas, et la vie y est rude.

Dans ce contexte difficile, il y a Josh.

Josh est perdu, il n'a plus de mémoire ou pire, il n'a que des bribes de mémoire. Et le peu dont il se souvient a de quoi le laisser désemparé.

Il ne sait même pas quelle langue il parle. Il sait qu'il a appris l'allemand, mais manifestement sous la contrainte.

Son bras gauche est tatoué, "six chiffres gravés sous la peau, indélébiles" : a-t-il connu les camps ? Est-il juif ?

Son bras droit se tend en avant de façon irrépressible, tout en commandant à sa bouche de crier "Heil Hitler !" : mais que lui a-t-on fait subir ?

C'est terrifiant de ne pas savoir d'où l'on vient, de ne pas savoir ce que l'on a vécu. On a peur. Des autres et de soi-même.

Josh nous confie :

"Quand je vois des soldats américains, mon bras droit me dit que je dois les haïr, les fuir, en avoir peur, malgré leur gentillesse apparente − le chocolat, les bonbons, les sandwichs au jambon − tandis que mon bras gauche me dit le contraire.

Va vers eux ! Ce sont tes libérateurs !"

Le personnage de Josh est plus vrai que nature, et pour cause : Sarah Cohen-Scali s'est inspirée de personnes réelles pour construire son roman. Elle a procédé à un énorme travail de recherches, qui lui a permis d'écrire un ouvrage très réaliste, fondé sur les récits, les témoignages et les divers documents d'archives qu'elle a trouvés.

Josh est très attachant et le lecteur suit sa quête d'identité tout au long d'une histoire parsemée de personnages touchants.

Josh ne pourra avoir un avenir que s'il résout les mystères de son passé. Il veut savoir, tout savoir, mais a peur de ce qu'il pourrait découvrir...

Orphelins 88 est un roman prenant. Dans un contexte historique lourd, le sujet est un sujet douloureux : la quête de ses origines, et au-delà, la quête de soi-même.

Un très bon roman pour adolescents (l'éditeur indique "à partir de 13 ans"). Il y découvriront un aspect méconnu de l'après-guerre, et ce texte ne manquera pas de susciter de nombreuses interrogations.

Merci aux éditions Robert Laffont pour l'envoi de ce livre.

Merci à Babelio pour l'opération Masse critique et l'organisation d'une rencontre avec l'auteur. Rencontre qui fut passionnante grâce à Sarah Cohen-Scali qui a su si bien parler de la genèse de son roman, de ses recherches documentaires et de la façon dont elle a créé les personnages. Merci !
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Max

Voici un excellent roman jeunesse. Il est écrit à la première personne par le narrateur, un jeune garçon né dans un lebensborn, et endoctriné par le régime nazi. Le sujet n'est pas facile, mais comme toujours l'auteur s'en sort à merveille. J'ai beaucoup aimé le ton employé. C'est précis sans être ennuyeux, et surtout glaçant.

Un excellent roman jeunesse sur un chapitre tragique et peu connu de l'histoire.
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Max

Tout le monde a déjà entendu parler des Lebensborn, ces centres créés par le régime nazi pour engendrer des enfants de pure race aryenne, au mépris de la liberté et du respect du corps : persuasion intensive allant jusqu'aux viols étaient la méthode employée pour unir des femmes blondes aux yeux bleus aux hommes blonds aux yeux bleus, avec tour de crâne et tout ce qui s'ensuit adéquat.



Mais ici, Sarah Cohen-Scali adopte une méthode très spéciale pour nous faire entrer dans cette histoire d'horreur et de haine, celle du point d'un enfant né de ces unions sélectives.

De son jour -1 avant la naissance, (il est fier de naitre le 20 avril, jour de l'anniversaire d'Hitler) en 1936 jusqu'à la débâcle allemande de 1945, nous entrons dans la tête de cet enfant. C'est là l'unique point négatif que je mentionnerai : cet enfant s'exprime comme un adulte, sait tout sur la situation politique (cela m'a vraiment empêchée d'adhérer entièrement à l'histoire, contrairement au narrateur du « Garçon au pyjama rayé), et puis tout à coup, au détour d'une phrase, dit qu'il ne comprend pas telle expression, vu son jeune âge. Curieux paradoxe…



Rien ne nous est épargné : la vie dans les lebensborn où tout est programmé pour se croire supérieur, où au moindre faux pas, et même le moindre détail physique inadéquat est sanctionné de « réinstallation » (nom codé, évidemment, je vous laisse deviner son sens caché), où l'instinct maternel est bridé vu que l'enfant, au moment de son sevrage, est séparé de sa mère ; ensuite la vie dans les centres où ces enfants « purs » sont transférés pour être éduqués à la manière nationale-socialiste.

Et puis nous sommes des témoins horrifiés des vols d'enfants des pays de l'Est, ceux qui ont les caractéristiques de la race aryenne, pour les endoctriner et les germaniser.

Nous accompagnons le protagoniste dans son chemin de vie tout tracé, à première vue, sous la férule d'Hitler et de ses sinistres individus, jusqu'à sa rencontre décisive avec un Polonais un peu plus âgé que lui, qui l'influencera grandement et avec lequel il cohabitera.



Ce roman est donc un excellent témoignage de cette période terrible du nazisme, de 1936 à 1945. Autant dans les grandes lignes que dans les détails, il fera prendre conscience aux adolescents d'une idéologie honnie et de sa propagande qui, reconnaissons-le, a fait mouche malheureusement très vite.

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Max

Qu'il aurait été dommage de passer à côté de ce livre ! "C'est en lisant les commentaires sur le livre" la race des orphelins" d'Oscar Lalo que j'ai appris l'existence de ce "Max" qui est tout simplement un livre époustouflant !

Le programme Lebensborn mis en place par Himmler en 1933 est un pan honteux de l'Histoire et un pan peu connu.

Max est issu de ce programme. Sarah Cohen-Scali nous raconte d'une façon extrêmement intelligente la vie de ce petit être créé sur mesure pour répondre aux exigences de "la race aryenne".

Je suis vraiment admirative devant l'originalité de ce récit. Tout y est pour accrocher le lecteur qui ne peut que lire sans reprendre son souffle.

C'est un coup de cœur pour toutes les informations qu'on y trouve, c'est un coup de cœur pour l'originalité, c'est un coup de cœur pour la petite histoire dans cette grande Histoire.

Je vois que c'est un livre destiné aux jeunes adolescents, oui il est écrit pour eux mais il est destiné à tout le monde, on ne s'ennuie pas, on apprend avec beaucoup de plaisir. Un grand bravo à l'auteur.
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Arthur Rimbaud : Le voleur de feu

Merci chère Lola de m'avoir donné ce livre dont tu voulais te débarrasser.



L'auteure nous y raconte le parcours d'Arthur, second fils de la famille Rimbaud. Il vit avec sa mère, Vitalie, son frère et ses deux sœurs à Charleville, une ville qu'il haïra. Le père, officier dans l'armée, a quitté le foyer conjugal, attiré par les grands voyages que lui offre son métier.

Très bon élève, Arthur semble promis à un bel avenir. Mais le jeune adolescent veut s'évader, guidé par un oiseau imaginaire multicolore qui l'aide à surmonter toutes les vexations. Et bientôt il sait : il sera poète, même si pour cela il faut devenir voyou.



L'auteure nous propose une biographie romancée, éditée en 1994 bien avant la mode des biopics, destinée aux ado et pré-ado et qui permet de découvrir le parcours d'un de nos plus grands poètes. L'un de ses points forts de l'oeuvre est le lien mis en évidence entre certains événements de la vie du jeune Rimbaud et quelques uns de ses poèmes majeurs.

Pour le reste, pas de découverte majeure pour qui connaît déjà le poète : l'ouvrage de Sarah Cohen-Scali veut vulgariser, il ne s'agit pas du résultat d'une recherche historique ! Mais l'auteure fait œuvre plus qu'utile : le livre se lit facilement, me semble tout à fait accessible au public visé, tout en apportant quantité d'informations utiles pour comprendre la poésie de Rimbaud.

Une intéressante biographie romancée, facile à lire.



Cette chronique est dédiée à Lola G. qui se reconnaîtra.
Lien : http://michelgiraud.fr/2020/..
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Max

Que dire d’un roman qui a déjà plus de 300 commentaires ?

Que je l’ai dévoré malgré un sujet difficile ?

Que j’ai été particulièrement émue par l’histoire de ce petit garçon qui a été endoctriné dès la naissance à devenir un aryen de pure souche ?

Que je connaissais l’existence des « Lebensborn » mais que ce roman m’a permis d’en découvrir le fonctionnement et que j’ai trouvé ça passionnant tout autant que révoltant ?

Que j’ai été touchée par les mots simples et la vision enfantine de cette période de l’Histoire ?

Oui, tout ça à la fois, mais j’ajouterais que l’écriture est complètement addictive et que le sujet mérite une fois encore d’être étudié car c’est l’ignorance et la peur qui sont les racines de la haine et de la violence et ce, quelle que soit le lieu ou l’époque.

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Orphelins 88

« Mais rien. Toujours rien. J’ai parfois envie de me prendre la tête à deux mains et de la secouer comme une vulgaire boîte. Si les souvenirs les plus précieux sont au fond, ils reviendront ainsi sur le dessus… »



Ce roman est la clé de la boîte de la jeune vie de Josh, maltraitée, brutalisée.

Ce roman est sa quête suprême. Celle de la mère.

Celle de soi.

« La guerre nous a transformés en Petits Poucets perdus dans la lugubre forêt qu’est devenue l’Europe. »



Avec des phrases saisissantes, attendrissantes, Sarah Cohen-Scali clarifie ce paysage si sombre de l’après-guerre dans l’Europe de l’Est détruite où son attachant fictif petit héros erre, perdu, isolé, démoli.



Arraché à ses racines dès son plus jeune âge par le programme « Lebensborn » destiné à créer des enfants parfaits d’après une sélection raciale, il sera, en 1945, accueilli au sein de l’UNRRA, (unité pour le secours et la reconstruction).



Faites la route avec lui, vous croiserez une multitude de personnages aussi sincères et bouleversants que vils et méprisables. D’infirmières touchantes en guides adorables, de nazis écœurants en « Yvan » sordides en passant par des amies surprenantes et attachantes.



Toutes les sensibilités sont exacerbées. On lit, on vit pour Josh, l’estomac au bord des lèvres.

Truffés de petits épisodes truculents, vous sourirez parfois vous reniflerez souvent.

Comment peut-on avoir vécu « ça » ?

Comment en réchapper sans bleus à l’âme ?



Dans ce roman estampillé « Young Adult » vous trouverez les mots qui, « quand ils sortent râpent la gorge. »

Vous apprendrez également ce que, malheureusement, la plupart des « Old Adult » ignore.

Je m’étais laissé « lire » que les romans « Young Adult » traitent essentiellement d’ « Heroic Fantasy », pour mon premier du genre, on est plutôt dans le « Realistic Epic Pathetic History.»

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Août 61

Deuxième critique de la journée, et autant vous dire tout de suite que celle-ci n'aura pas la même tonalité que la précédente ! Autant "Le crime de Julian Wells" m'a déçu, autant "Août 61" m'a enthousiasmée. Pourtant les thèmes sont loin d'être joyeux, puisqu'on y évoque les marches de la mort qui ont achevé tant de rescapés juste avant la fin de la seconde guerre mondiale, l'exil de milliers d'enfants à travers l'Europe qui s'est parfois soldé par des drames (comme pour Tuva, l'une des héroïnes du roman), ou encore de nos jours, cette terrible maladie qui tue la mémoire et dont est atteint Ben.

Ben a quatre-vingt-trois ans, et une histoire jalonnée de drames, mais aussi d'amour et d'amitié. Le récit commence au moment où il se retrouve à Calais, embarqué au commissariat parce qu'on l'a ramassé dans un camion avec des clandestins. Il ne sait absolument pas comment il est arrivé là, ni qui est "Angela", cette jeune fille qui vient le récupérer pour le ramener à Paris, chez lui, et qui semble sincèrement lui être attachée. Sa petite-fille ? Une étudiante qui loge chez lui en échange de quelques services ? Il ne s'en souvient plus...



Plusieurs de ses "alter ego" vont l'aider à reconstituer sa propre histoire, en remontant depuis l'époque du ghetto en Pologne, quand il s'appelait Beniek et avait vu mourir toute sa famille avant d'être déporté à Mauthausen. Après la Libération, et un séjour à Indersdorf, ce centre d'accueil pour enfants déjà évoqué dans "Orphelins 88", où il va rencontrer Tuva, Beniek va se retrouver à Londres en compagnie de Waldek, (l'ami fidèle rencontré lors d'une marche de la mort) et de nombreux autres orphelins de guerre.



Ben Junior va succéder à Beniek en 1955 pour raconter au Ben d'aujourd'hui la vie en Angleterre, la transformation de l'enfant rescapé des camps en jeune homme indépendant, fan de cinéma et de théâtre, et qui a décidé "d'oublier" volontairement son passé douloureux. Passé qui vient cependant faire des incursions dans sa vie, surtout lorsqu'il apprend le triste sort de Tuva, retournée en Norvège auprès de sa mère biologique.



Dans la troisième partie, nous sommes en 1961, Ben est devenu Beni et se rend à Berlin pour enfin y retrouver celle qu'il n'a jamais oublié depuis leur rencontre à Indersdorf, la fameuse Tuva. Mais le 15 août de cette année-là, tout va basculer, un mur va les séparer une nouvelle fois, deux jours seulement après leurs retrouvailles...Tuva fait le choix de croire à l'idéologie prônée par les dirigeants de la RDA, celle d'une Allemagne qui rejette son passé dictatorial et "forme" sa jeunesse à un nouvel avenir débarrassé des fascistes. Elle, née dans un Lebensborn, est devenue monitrice des Pionniers, une promotion inespérée ! Elle refusera donc de suivre Beni à l'Ouest. Mais au fil des mois et des années qui suivront, peu à peu le voile se déchirera et elle perdra ses illusions.



C'est justement l'histoire de Tuva qui est relatée dans la quatrième partie, de cette séparation brutale en août 1961 jusqu'en 1969. A son tour elle va s'immiscer dans la tête de Ben, et va rassembler pour lui les dernières pièces du puzzle de sa vie. Mais ce n'est pas elle la narratrice...

Et c'est une poupée de chiffon bien malmenée par la vie qui nous livrera la conclusion.

Le Ben actuel est bien présent tout au long du récit, sa mémoire lutte contre "Al" (pour Alzheimer) pour remonter à la surface et parfois c'est lui qui lutte parce que c'est trop dur de se remémorer certaines choses. Il m'a profondément ému, tout comme ses anciens moi, Beniek, Ben Junior et Beni, même si ce dernier m'a parfois un peu énervé par sa passivité face aux événements. La triste histoire de Tuva m'a remuée également, combien ont comme elle été dupés par une idéologie trompeuse qui a joué sur la stigmatisation du nazisme pour recréer une autre forme d'embrigadement et de soumission à un "idéal" ? D'autres personnages revêtent une grande importance dans le récit, comme Angela, William (alias Waldek), ou Lili, mais il serait dommage d'en dire trop.

Sarah Cohen-Scali a véritablement accompli un énorme travail de documentation sur toute la période allant de la création des Lebensborn, ces "fabriques de bébés parfaits", à la fin des années 60, à travers "Max", "Orphelins 88" et "Août 61". Ces trois romans qui ne sont pas une suite mais constituent une trilogie nous apprennent bien mieux que les livres d'histoire le sort des enfants de la guerre, quel que soit le côté où ils sont nés, enfants aryens abandonnés, enfants juifs rescapés des ghettos, enfants déportés, tous orphelins à la Libération. Ces trois romans devraient être présents dans tous les CDI, à mon sens, et proposés aux profs d'histoire pour initier des débats avec leurs élèves à partir de la 3ème.

Je suis certaine que ceux-ci se montreraient bien plus intéressés par notre histoire (pas si ancienne) au travers de tels récits que par les contenus dénués d'affect des manuels scolaires...





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Gingo

Sarah Cohen-Scali fait partie des auteures que j'apprécie pour ses romans ados, notamment "Max", et "Orphelins 88" que j'ai largement diffusés auprès de mes élèves. "Gingo" n'est pas de la même veine, il s'agit d'une dystopie assez glaçante, surtout que par certains aspects nous ne sommes pas vraiment loin de ce qu'elle décrit.

Une ville à deux visages, comme ses habitants : à l'intérieur, bien à l'abri derrière leur mur, les Blancs sont devenus complètement dépendants aux nouvelles technologies qui régentent leur vie et celle de leurs enfants. Chaque adulte a son APR (assistant Personnel Robotisé) qui prend en charge le destin de l'humain qui lui est confié à l'adolescence, y compris dans les aspects les plus intimes comme le choix d'un conjoint. L'eugénisme est la règle, impossible de concevoir un enfant qui ne répondrait pas aux souhaits de ses géniteurs. Et si la nature ne fait pas assez bien les choses, on le sait dès la conception, et on choisit alors de recourir à la PMA qui garantit un résultat "à la hauteur". Tel enfant deviendra un mathématicien de génie, et le suivant aura des capacités artistiques hors pair, si tel est le désir des parents. Bien sûr l'APR veille à recruter la personne parfaite pour s'occuper de la progéniture si Papa et Maman doivent travailler. Et c'est ainsi que Jade devient la nounou de la famille Alma.

Jade est une Bleue, elle vit de l'autre côté du mur, dans la ville qui encercle la ville ( anciennement Paris). Les bleus sont des rebelles, ils se sont déconnectés lors d'une révolution contre la surveillance exercée par le biais d'internet sur les citoyens, il y a quelques décennies. Ils vivent depuis dans des conditions précaires, ne pouvant avoir librement des enfants que s'il satisfont aux exigences décidées par les Autorités blanches. Dans le cas contraire, la solution est également l'adoption, mais les candidats sont prévenus : les @toptés sont des enfants "différents", aux capacités réduites, et sourds-muets en général. Et on pourra les leur reprendre sans préavis dès qu'on le jugera utile.

Jade voudrait obtenir le droit de concevoir un enfant avec son mari Alban, mais suite à une transgression des règles en cours chez les Blancs, elle se voit refuser sa demande. Elle va donc adopter Gingo, et nouer un lien très fort avec lui malgré les nombreuses difficultés...

L'idée de départ est très intéressante, car même si la situation décrite manque un peu de vraisemblance sur certains points, elle fait appel à des concepts qui sont déjà présents dans nos vies actuellement. L'APR ne fait que pousser un peu plus loin ce réflexe que beaucoup d'entre nous ont déjà, à savoir se référer à Internet pour nous assister à tout bout de champ. Et ceux qui n'ont pas la "chance" d'être suffisamment connectés ou sont moins à l'aise avec les nouvelles technologies se retrouvent vite défavorisés, on l'a très bien constaté lors de la fermeture des établissements scolaires par exemple. Dans le roman, on pousse juste le raisonnement un peu plus loin. Le recours à la PMA existe aussi, mais pour l'instant il ne peut heureusement pas être demandé dans le but de programmer un enfant conforme en tout point aux voeux de ses parents. J'espère que nous n'en arriverons pas là !

Je me suis facilement attachée à certains personnages, notamment Jade qui a le courage d'oser exprimer ses désaccords, et essaie de protéger son fils adoptif envers et contre tout. Son mari Alban manque de personnalité, il n'est là que comme faire-valoir. La famille Alma m'a paru sans grand intérêt, à part de nous exposer comment on vit dans la cité blanche, seule leur petite fille semble avoir un peu de caractère. Et bien sûr il y a Gingo, cet @topté si mal parti dans la vie, mais qui a eu la chance d'arriver dans un foyer aimant et d'avoir une mère déterminée à l'aider à surmonter ses "handicaps". Il y a encore un médecin dans l'histoire qui montre un peu d'empathie pour Gingo et donne de l'espoir à la petite famille.

Mais là où j'ai vraiment été déçue, c'est à la fin...bien sûr je ne vous raconte pas, sachez juste que je m'étais dit bien avant dans le récit "elle ne va pas nous faire ce coup-là, quand même", et puis comme ça continuait bien, j'étais rassurée, et là : bam !

C'est là qu'on se dit que ce genre de choses ne passerait pas dans un roman "adulte", mais que c'est dommage de prendre les ados pour des idiots. Heureusement que cela n'arrive pas très souvent, mais je ne m'attendais pas à ça de la part de Sarah Cohen-Scali.

Allez, sans rancune, je reviendrai quand même vers elle, mais....
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Max

Des bons ou très bon romans, il y en a un paquet. Mais Max est au-delà. C'est un roman vraiment exceptionnel. Un roman qu'il est très difficile de lâcher, un roman qui reste profondément gravé, un roman que l'on aimerait faire découvrir à la terre entière, aux adolescents comme aux adultes. Car, oui, Max est étiqueté « littérature jeunesse » et il serait vraiment dommage de passer à côté de ce titre en raison de sa classification. Dans le panel des oeuvres traitant de la Seconde Guerre mondiale, il occupe une place à part en abordant la question des Lebensborn, ces pouponnières nazies créées dans le but d'accélérer le développement de la race aryenne. Max en est un pur produit. Il n'est qu'un foetus au moment où il commence à nous raconter son histoire, mais du haut des quelques centimètres que mesure son corps, il est déjà un parfait petit nazi. Détestable, arrogant, sans états d'âme. En un mot : endoctriné. Sorti le premier du ventre maternel, avant tous les autres bébés conçus, il se rêve en fils spirituel du Führer et il n'aura de cesse, tout au long de son existence d'enfant, de penser et d'agir comme le digne héritier qu'il pense être, jusqu'à ce que la confiance aveugle qu'il porte au régime nazi et à son chef ne vienne se heurter à des pensées et à des émotions nouvelles et déstabilisantes…

Max n'est pas un documentaire historique mais une oeuvre de fiction qui se revendique comme telle. Aussi, le lecteur qui veut en apprendre davantage sur les Lebensborn ira consulter des ouvrages historiques et Max aura eu le mérite de le pousser à cette curiosité. C'est le premier point fort du roman : faire comprendre au lecteur que derrière cette narration fantasque consistant à donner la parole à un foetus se cache une réalité historique glaçante. le personnage de Max est le deuxième point fort. À de multiples reprises, la franchise et la spontanéité de l'enfant peuvent faire sourire : il apparaît comme une pièce dénuée de toute capacité à la réflexion de la mécanique bien huilée du régime nazi. Il raconte les choses telles qu'il les voit, sans aucun filtre. Mais le sourire qui se dessine sur les lèvres du lecteur est généralement dépourvu de légèreté car le cynisme quasi permanent de Max fait littéralement froid dans le dos. Et pourtant, on se surprend, parfois, à l'apprécier… ou du moins à apprécier quelques-unes de ses réactions qui viennent trahir, sans que lui-même ne le sache ou ne le comprenne, son appartenance au régime qu'il porte aux nues.

Max est incontestablement un roman qui fait réfléchir. Lisez-le !


Lien : http://aperto-libro.over-blo..
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L'inconnu de la seine

"Un rendez-vous avec la mort"



Un bon roman policier, avec beaucoup de suspens et une belle écriture. Un professeur dans le supérieur se sent menacé par une ombre qu'il pense être un personnage d'un roman qu'il n'a jamais publié. Un roman en trois tableaux avec une intrigue subtile jusqu'à la dernière ligne. Classé dans la catégorie roman jeunesse, pourquoi pas. J'y ai pris un grand plaisir et j'ai adoré non seulement la personnalité du personnage principal, ses réparties, mais également le thème déroulé : "la littérature et la mort". Oui "il y a quelque chose de magique dans la création littéraire ! Certains personnages dépassent complètement leurs auteurs." Ce roman peut donner envie de lire d'autres auteurs à des enfants qui n'y seraient pas venus directement et j'ai trouvé la manière de faire très intéressante.
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