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4.43/5 (sur 15 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Sébastien Ménard écrit des livres sur la route, et prend des photos.

Depuis 2010, c’est le site Diafragm qui lui sert de carnet commun.

son site : http://diafragm.net/
Twitter : https://twitter.com/SebMenard/

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Bibliographie de Sébastien Ménard   (5)Voir plus

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Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
des gamins se jettent sur un paquet de friandises et l’orage un ciel noir mes fantômes
— ils vont dans leur carrosse d’acier leur route n’existe sur aucune carte.
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Ceux qui portent un masque de l’Est. Un soir. Un jour. Un matin. Qu’importe sauf mettre le masque. Qu’est-ce qu’un masque de l’Est ? Qui pour dire d’un masque : c’est un masque de l’Est ? Qui pour attendre à l’ombre d’un arbre et au bord d’une route – voir surgir les masques de l’Est ? Comment l’entretenir ? Le conserver ?
Quelques secondes s’écoulent. Des nez rouges. Des cloches. Des bouteilles en plastique. Des corps. Mouvements. Un cheval file – galop sur l’asphalte.
Alors les héros avaient mis leurs masques de l’Est. Leurs suées de l’Est. Leurs jambes de l’Est. Leurs peaux. Leurs corps. Ils couraient dans leurs rêves de l’Est comme il leur arrive de courir la nuit et yeux fermés. Personne pour vérifier leurs chemins – leurs mondes. Personne pour nommer leurs quêtes. Moi pareil – j’avais mis le masque. Et on fonçait dans la nuit. Quelqu’un dit qu’un masque de l’Est – ça n’a pas de sens. Pourtant : personne pour dire qu’il fallait croire nos masques. Ainsi les héros avaient leurs masques de l’Est sur leurs gueules et corps. Ils étaient debout. Ils tenaient des histoires terribles et sauvages. Ils attendaient la fin d’une nuit. Le début d’un matin. Ils voulaient savoir – la suite – « La passation des pleins pouvoirs de la nuit au petit jour ». Ils voulaient vérifier que leurs masques allaient tenir une aube – et des rêves.
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Dictionnaire intérieur
Liste des questions que t’a déjà posées un homme ou une femme armé dans un aéroport (chacune de ces questions pouvant être répétée au moins deux fois de façon différente) :
parlez-vous anglais – parlez-vous d’autres langues – quel est votre nom – où êtes-vous né – êtes-vous venu seul – comment s’appellent vos amis – où vous êtes-vous rencontrés – combien de temps comptez-vous rester ici – quelle est la raison principale de votre venue – êtes-vous déjà venu – en quelle année êtes-vous venu – où comptez-vous vivre – pouvez-vous répéter – parlez-vous arabe – tarkem arabi – pourquoi apprenez-vous l’arabe – connaissez-vous quelqu’un sur place – pouvez-vous donner le nom et l’adresse des personnes que vous connaissez sur place – est-ce que quelqu’un vous attend à la sortie de l’aéroport – êtes-vous musulman – de quelle somme d’argent disposez-vous sur votre compte – quelle est votre adresse mail – quel est votre numéro de téléphone – quelle est l’adresse mail de votre père – où est né votre père – où est née votre mère – quel est son nom – quelle est son adresse mail – quel est le nom de votre grand-père paternel – quel est le nom de votre grand-mère maternelle – où sont nés vos grands-parents – êtes-vous déjà allé dans des pays arabes – pour quelle raison vous êtes-vous rendu au Liban en 2008 – pour quelle raison vous êtes-vous rendu au Maroc en 2006 – pour quelle raison souhaitez-vous vous rendre en Syrie – connaissez-vous quelqu’un en Syrie – avez-vous rencontré quelqu’un dans le bus – pourquoi voyagez-vous seul – pouvons-nous joindre un membre de votre famille – quel est le nom du père de votre ami – où est né votre ami – pourquoi vous intéressez-vous à ces gens – pourquoi vous intéressez-vous à la Palestine – pouvez-vous donner le nom d’un artiste arabe – connaissez-vous Mahmoud Darwich – savez-vous que Mahmoud Darwich symbolise la résistance palestinienne – savez-vous que Mahmoud Darwich est mort – savez-vous où est enterré Mahmoud Dariwh – pour quelle raison avez-vous choisi ce pays – croyez-vous que nous faisons confiance au consulat français – où va votre vol – pouvez-vous ouvrir votre sac – pouvez-vous poser votre sac dans la machine – pouvez-vous récupérer votre sac – pouvez-vous porter votre sac là-bas – pouvez-vous déposer à nouveau votre sac dans la machine – pouvez-vous reprendre votre sac – excusez-nous la machine ne fonctionne pas bien ce soir – pouvez-vous déposer tous les objets que vous avez sur vous dans le bac mais gardez vos vêtements – pouvez-vous me dire d’où provient cet ordinateur – pouvez-vous me dire si cet objet est bien votre chargeur d’ordinateur – pouvez-vous me dire votre nom – pourquoi êtes-vous venu ici – connaissez-vous quelqu’un ici – pourquoi votre chargeur d’ordinateur sonne-t-il dans le détecteur d’explosifs – avez-vous toujours eu votre chargeur d’ordinateur avec vous – où avez-vous posé votre chargeur d’ordinateur pendant votre voyage – où se situe votre maison – quel est le nom du quartier – quel est le nom du propriétaire – viviez-vous seul ou bien avec d’autres gens – quelle était leur nationalité – pouvez-vous ranger votre sac – pouvez-vous récupérer vos objets personnels – pouvez-vous me suivre – pouvez-vous mettre vos objets personnels dans ce bac – pouvez-vos enlever vos chaussures et les mettre dans le bac – pouvez-vous lever les bras et vous tourner – pouvez-vous enlever votre chemise – pouvez-vous enlever votre pantalon – pouvez-vous lever les bras et écarter les jambes – ne bougez plus – habillez-vous – pouvez-vous récupérer vos affaires – quel est votre vol – suivez-moi – comptez-vous revenir.
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Qui München Ljubljana Zagreb Belgrade
égrènent – chapelet mantra nuitamment
chanté essoufflés soufflant – fumée de
clope entre champs de maïs et buildings
avec horizon brume et notre langue d’autoroute.

Qui quadrillent l’Europe et récitent
La Traversée des États au volant du
diesel – le raffut que ça fait entre les
bielles entre nos corps toute une nuit
se déchire au prix du gasoil et nous
– on n’y verra – rien.

Qui Lindbergh dans le bleu nuit ou
mécanos d’occasion passagers du diesel
– fumée de clope dans l’habitacle – vieille
tire des particules noires en suspension –
sur les routes de l’Est et bitume bitume.

Qui vident leurs verres à l’accordéon dans
des basses-cours basses-cours basses-
cours – et se diluent dans le flou sous le
soleil s’estompe une langue de bitume d’ici
vers l’horizon – ce souvenir lui-même dans
le flou et ploc et ploc la goutte à
l’alambic.
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Alors on avait voulu rouler sur les routes de l’Europe.
Quitter nos cabanes – nos baraques et nos territoires.
Toutes ces histoires d’ours – de mecs qui prennent la route la nuit dans la neige – toutes ces histoires de poussière de poème d’eau-de-vie et de feu qu’on allume – c’était quoi alors ?
On avait voulu parcourir les États – traverser les États. On avait voulu rouler – comme ça – sans savoir autre chose que les bords de nos mondes – les bouts de nos plaines – sans chercher autre chose que le nom des sommets – le nom des fleuves – le nom des routes – le nom des Hommes – celui des bêtes.
Voir les eaux de l’Europe s’écouler – suivre des fleuves – écouter les flottes les embarcations les rades et les rafiots. On voulait vérifier que tout était vrai – tout était là – vraiment là.
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L’histoire que je porte ne connaît ni virgule ni ponctuation. Elle se dessine dans nos têtes le matin. C’est la petite phrase qu’on entend encore – celle qu’on a en bouche lorsqu’il s’agit de prendre la route de nos jobs et qu’on sent les herbes fraîches. Et même pas le temps de courir pieds nus ! De jeter ses fringues une à une en riant – en riant ! Se rouler nu dans l’herbe. C’est ça. C’est vraiment ça. L’histoire que je porte relit chaque livre – recopie les breaks les marges et les images. Elle copie les images restées là dans l’œil ou dans l’oreille. L’histoire que je porte est un son – et ça résonne et ça nous crie dans le corps. L’histoire que je porte pourrait déclamer son monde de poussières debout sur le col de Borşa – sous les pluies froides d’un orage d’été – au milieu d’un boulevard du gasoil et des immondices. Et on entendrait au loin les vaches meugler. Et on entendrait au loin une bagnole étouffer sur le bitume. Des corps l’un contre l’autre. Des rires. Des chiens. Ce serait le son de l’histoire que je porte. Et puis à la fin – quand on aura passé les montagnes et les langues – on s’assurera que cette histoire n’existe pas. On consultera les registres – les carnets et les bouches de nos héros. F. avait-il déjà dit : bougeons sans cesse – bougeons tout le temps – changeons chaque jour chaque matin ? Personne n’a-t-il jamais demandé : pourquoi t’écris comme ça ? Et si jamais on trouvait quelqu’un pour l’avoir dit – est-ce qu’on ne tremblerait pas un peu en avouant que l’histoire que je porte c’est celle-ci – exactement celle-ci ? Alors on fermerait les livres. On fermerait tout. La porte de nos cabanes. Les lieux qu’on n’a pas. La caravane de nos songeries. Les cartons – les microphones et les portes. Alors ce serait le début de la quête du héros moderne. Le début des routes. Le début des soleils qui tombent sur les herbes jaune jaune. Les pluies sur nos peaux. Les matins dans les bois. Et les nuits dehors.
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la première chose d’importance
que je peux vous dire

la première chose
que je peux vous dire
c’est qu’aujourd’hui
j’ai posé cette question
à plusieurs reprises

« quelle est
la première chose
d’importance
que vous pouvez nous dire ? »

on fait son malin
on imagine qu’on peut poser cette question
à tout le monde
et c’est vrai

on peut

on peut demander à beaucoup d’humains
de choisir la toute première chose
d’importance
et nous la dire

c’est même
très intéressant

il faut
simplement
être prêt à
tout entendre

et après
après on est là
on est là et on rapporte
ce petit morceau du monde
ce petit morceau du monde
dont nous sommes dépositaires

ouaip et on fait le zen
on fait le zen avec ça
on fait le zen avec les petits morceaux éclatés
saillants
dont nous sommes dépositaires

et on est là
on est là avec ça
avec ça et notre foutue recherche d’une poésie
qui serait d’une
« absolue pureté »
comme on dit dans les critiques
ou sur les post-it
collés sur les livres
en librairie

c’est ça

c’est ça « la vie »

sans doute que c’est
être dépositaire des morceaux éclatés
de nos semblables
et de la recherche d’une poésie
d’une « absolue pureté »
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Alors – chacun avait fait le compte. Chacun avait retiré son argent des banques des coffres et des tiroirs. Quelques-uns avaient préféré enterrer une partie de leurs billets dans un jardin – sous cinquante centimètres de terre – dans un bocal – là : rien ne bouge. Chacun avait annoncé des kilomètres de route – des altitudes – des jours de voyage. On avait pris des bouquins des carnets des chaussures et des fringues – on était prêts. On avait entendu parler de ceux qui marchent debout sur le vent. On nous avait dit qu’un jour – tout était fini. On nous avait dit qu’il y avait des bords des ombres et des puits immondes – on savait tout ça – on était prêts. On avait voulu aller jusqu’au bout – dans chaque direction – casser des murs des barrières – des barbelés. On avait voulu montrer que tout était là – entre nous – entre nos mains – là – juste là.
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L’homme avance et marche lent – régulier dans sa tenue d’homme seul – nuls lampadaire foyer ni feu allumés là pour guider cet homme ou même un autre – personne pour l’observer le suivre furtif et silence – personne pour l’attendre là en vérifiant que le bois ne manquera pas.
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39 fantômes

Qui vont sur des pistes défoncées Carpates
traversent des campements de fortune
cabanes en plastique feux de camp – la
caisse carcasse elle file torrent de boue
la carlingue elle frotte dans les ornières
pauvre corps tremblé.

Qui s’exclament silencieux béats complets
devant les montagnes du Maramureş
mutilés mutins mes « monstres morts »
– morts pour quelques instants ils
n’existent pas souvent ils ne vivent pas tout
le temps.

Qui debout sur le vent du col de Borşa leurs
yeux même yeux de fantômes – voient les
mendiants gamins assoiffés et marques
ça reste ça stagne – fer plus chaud que
l’horizon éclaté de vert jaune.
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