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3.68/5 (sur 342 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Tunis, Tunisie , le 31/01/1949
Biographie :

Serge Bramly est un romancier, scénariste, critique d’art français, spécialiste de photographie.

Il quitte la Tunisie, en 1961, puis étudie les lettres modernes à Nanterre. Après un service militaire dans la Coopération en Afghanistan, il fait de nombreux voyages aux États-Unis et au Brésil. Il devient professeur de français au Pakistan puis au Brésil. Il en rapporte des livres sur les derniers Indiens d'Amérique et sur les pratiques vaudous, notamment "Macumba, forces noires du Brésil" (1975).

Il est l’auteur de romans érudits qui tournent autour du thème de l’irréalité, de la tromperie, de la mystification : "L'itinéraire du fou" (1978), prix Del Duca, "La Danse du loup" (1982), Prix des libraires.

Il est en outre l’auteur de nombreux essais, notamment sur la Chine ("Le voyage de Shanghai", 2003), sur l’art et la photographie.

Son roman, "Le premier principe, le second principe", paraît en 2008 chez JC Lattès dans le cadre de la rentrée littéraire. Il reçoit le prix Interallié 2008.

"Orchidée fixe" (2012), un roman inspiré d'un épisode de la vie de Marcel Duchamp, a été présélectionné dans la première liste de 12 romans en lice pour le prix Goncourt 2012.

Serge Bramly a été le mari en premières noces de la photographe Bettina Rheims (1952). Il est le père de l'acteur Virgile Bramly (1980) et de la romancière Carmen Bramly (1995).

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Bibliographie de Serge Bramly   (33)Voir plus


L`interview de Serge Bramly avec Babelio : Orchidée fixe


Vous situez l`action de votre roman dans un Maroc en pleine Seconde Guerre mondiale alors que Marcel Duchamp quitte la France pour rejoindre les Etats-Unis. Si votre ouvrage est avant tout un roman, que sait-on du passage de Duchamp au Maroc ?

Marcel Duchamp a écrit quelques cartes postales, à des amis, depuis Casablanca, en mai 1942. Il n`y dit pas grand chose, sinon que le camp d`hébergement où il était interné était une horreur, et qu`il s`en est échappé pour trouver refuge dans une salle de bains « confortable », proche de la mer. Quand j`ai interrogé Teeny Duchamp, la veuve de l`artiste, celle-ci se souvenait juste que, pour lui, après une longue période de difficultés et de privations, le séjour au Maroc avait été de « délicieuses vacances ».
Ce que l`on sait par ailleurs de cette période, et qui m`a paru riche en possibilités romanesques, c`est que Duchamp se trouvait d`une certaine façon au bout du rouleau, au physique comme au moral, quand il avait quitté la France (il avait des problèmes de vue, ne faisait presque plus rien, même les échecs avaient perdu de leur attrait, etc.), alors qu`en arrivant à New York quelques semaines plus tard, il semblait animé par une sorte de deuxième souffle : le « désir » lui était revenu, tant sur le plan artistique que sur celui des sentiments… Qu`avait-il bien pu se passer à Casablanca, qui avait suscité cette métamorphose, cette régénération, cette renaissance ?


Vous êtes un grand connaisseur de la vie et de l`œuvre de Marcel Duchamp. de nombreux épisodes de sa vie auraient probablement mérité un roman. Qu`est-ce qui vous a décidé de vous arrêter à cet intermède au Maroc ?

Marcel Duchamp, « le grand perturbateur », comme on l`a appelé, l`homme « le plus intelligent de son siècle » comme disait aussi André Breton, le génie iconoclaste qui a mis des moustaches à La Joconde et exposé un urinoir, est surtout célèbre chez nous pour avoir définitivement clos le règne d`un art centré sur la représentation. Mais Duchamp n`est pas seulement le fossoyeur de l`art européen traditionnel ; c`est surtout, pour moi, l`éveilleur d`une multitudes de mouvements, du Pop au conceptuel, l`inspirateur, la référence presque absolue de tout ce qui s`est créé dans le monde de 1950 et à nos jours, car aujourd`hui on continue de se réclamer majoritairement de lui. C`est donc la genèse de cette seconde phase de son œuvre que j`ai essayé de saisir et de concentrer, par la fiction, dans l`intermède casablancais : un portait du prophète des temps nouveaux.


Vous présentez ce roman comme étant en partie autobiographique. Or, tout le roman est construit autour des souvenirs racontés par un certain René Zafrani à un universitaire américain. Ces souvenirs sont-ils ainsi ceux des membres de votre famille ?

René Zafrani, surnommé le baron de la Cale par ses amis, moitié pour son élégance, moitié parce qu`il effectuait son commerce d`épicier en gros dans la cale des paquebots, ressemble beaucoup à mon véritable grand-père, de même que tout son entourage, joueur et batailleur, s`inspire de ma famille. Je suis originaire de Tunisie, non du Maroc, mais j`ai à peine transposé mes protagonistes. Je souhaitais rendre hommage aux miens, leur redonner la parole, les faire revivre, non seulement parce que cela me semble un devoir sacré, comme l`explique ma narratrice, mais aussi parce qu`on n`évoque presque jamais les tribulations de la communauté juive d`Afrique du Nord, francisée en l`espace d`une ou deux générations, qui avait placé tous ses espoirs en la France, et brusquement mise au ban de la société, privée de ses droits les plus élémentaires, par les lois raciales de Vichy. Tandis que Duchamp attendait à Casa le bateau de la liberté qui le conduirait à New York, le baron de la Cale qui l`hébergeait et ses amis se préparaient à un sort fatal — sort que seul le débarquement allié de novembre 1942 leur a épargné…


"Duchamp rend fou, faites-vous dire à l`un de vos personnages, personne ne vient à bout de Marcel Duchamp, parce que Duchamp c`est le silence et le vide, le vertige de l`infra mince, l`absence et le gouffre". Comment avez-vous, vous, Serge Bramly, découvert Marcel Duchamp et son œuvre ? Et ce roman était-il, justement un moyen d`en venir à bout ?

J`ai commencé à être fasciné par Duchamp à l`époque où j`écrivais une biographie de Léonard de Vinci qui disait (le premier) que l`art est d`abord « une chose mentale » (una cosa mentale). Qui d`autre avait mieux compris ce principe que Duchamp ? La peinture, disait encore Léonard, « est une fiction (finzione) qui exprime de grandes choses. » N`était-ce pas là encore du Duchamp avant l`heure?
De son côté, Duchamp affirme que « l`art est dans la lacune. » Il ouvre des brèches, pose des énigmes, opère des décalages, souvent insignes mais qui deviennent vite, pour qui s`y intéresse, des abîmes vertigineux. Il peut obséder, ses fleurs se métamorphosent alors en or qui est « idée fixe » si l`on cherche des réponses logiques à toutes les questions qu`elles posent. Tel est le danger : s`obstiner à les disséquer, à échafauder des réponses là où il n`y a que des questions, à vouloir faire la lumière sur des joyaux d`obscurité. Duchamp est pareil à un ko`an zen : l`éveil se produit « hors » de l`intelligible, par infra mince


Vous avez déclaré avoir commencé ce livre il y a plus de vingt ans. Qu`est-ce qui vous a permis d`aller au bout de votre projet ?

Mon roman a commencé de prendre forme le jour où il m`a semblé nécessaire de faire le lien entre Duchamp et ma famille dont on ne peut pas dire que l`art faisait partie de ses priorités. Je me suis ainsi dégagé des préoccupations duchampiennes (et intellectuelles) pour me concentrer sur l`élément humain, sur les impressions et les sentiments, le vécu et la mémoire, au moyen de quiproquos, de jeux de hasard, de suite de causes et d`effets, en m`engouffrant dans l`infra mince. L`histoire d`amour que je raconte, en particulier, ne sert pas que de moteur à l`intrigue : elle en est le symbole et l`aboutissement.


Vous aviez, je crois, le projet d`écrire une biographie de Duchamp. Ce projet est-il définitivement abandonné ?

Duchamp est rétif à l`analyse biographique. Chargez-le d`un appareil critique, et il perd de sa légèreté, de son humour, de sa profondeur. Il y a plus de vérité, me semble-t-il, dans les volutes de fumée des cigares bon marché sur lesquels il tirait en observant le plafond, que dans les innombrables exégèses qu`il a suscitées.



Serge Bramly et ses lectures


Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Oh, il y en a tant… ! Disons qu`Alexandre Dumas m`a donné le goût de lire, que Gustave Flaubert m`a montré ce qu`est un écrivain, et que Jorge Luis Borges m`a révélé LA voie.


Quel est l`auteur qui vous a donné envie d`arrêter d`écrire (par ses qualités exceptionnelles...) ?

Je crois continuer à faire des progrès. Les qualités exceptionnelles d`un auteur (W.G. Sebald, ces dernières années) me donnent toujours envie d`aller plus loin, de le et me surpasser — jamais encore le contraire, heureusement.


Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Je ne sais pas. "L`Affaire Tournesol" (un prodige d`art narratif), de Hergé ; "Le Chien des Baskerville", de Conan Doyle, autre machine infernale…


Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Sans doute "La Chartreuse de Parme" de Stendhal. Il suffit que j`en parcoure trois lignes pour être emporté à nouveau, avec l`impression de m`émerveiller pour la première fois.


Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

"L`homme sans qualités" de Robert Musil, que je garde pour plus tard.


Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

"Le Nazaréen", de Schalom Asch ; chef-d`œuvre jamais réédité, dont les pages hallucinées ont construit mon imaginaire.


Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Ah… "Julie ou la Nouvelle Héloïse " de Jean-Jacques Rousseau, que j`admire par ailleurs, mais qui est pour moi tout ce qu`un roman ne doit pas être…


Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« Seul est possible ce qui arrive », F. Kafka.


Et en ce moment que lisez-vous ?

Entretien dans la montagne, de Paul Celan



Découvrez Orchidée fixe de Serge Bramly aux éditions J.-C. Lattès


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Alternant l'écriture de romans et d'essais, Serge Bramly conserve au moins une constante dans l'écriture : celle de vivre l'entre-deux livres comme une période de deuil, de vide. L'histoire de "Pour Sensi" (JC Lattès) illustre d'autant plus cette "dépression postnatale" puisqu'il raconte une rupture amoureuse ayant coïncidé avec ce moment de battement où un ouvrage ne vous appartient plus. En savoir plus sur "Pour Sensi" : https://www.hachette.fr/livre/pour-sensi-9782709650595

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Citations et extraits (225) Voir plus Ajouter une citation
Les mauvais garçons ont une aura indéniable; c'est un vice de l'esprit sr quoi les chercheurs devraient se pencher.
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Lorsqu’on examine les préoccupations des artistes du Quattrocento, toutes extrêmement présentes chez Verrocchio, et par suite chez Léonard, lorsqu’on considère l’incroyable volonté de progrès qui anime ces "artistes-artisans" - qui ont tout à découvrir, qui, en moins d’un siècle découvrent tout par eux-mêmes (les principes de la perspective, la science de l’anatomie, les lois de lumière...) - on comprend en quoi cette époque se distingue des autres, et ce qui la rend unique : c'est un âge héroïque dont les chefs-d’œuvre sont chacun comme un trophée, la marque d’une conquête.
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La conviction de vivre en propre m’a longtemps fait défaut. Autrefois j’avais l’impression d’appartenir plutôt à l’espèce des «fausses gens» (ces gens qui n’ont que l’apparence de gens) que Carlos Castaneda prétend avoir appris à identifier grâce à l’enseignement d’un sorcier mexicain, don Juan Matus, un Indien Yaqui dont aucun anthropologue sérieux ne pense aujourd’hui qu’il a vraiment existé. Figurant fictif d’une fiction, c’est ainsi que je me vivais. Sans m’alarmer outre mesure. Savoir ce que l’on est ou que l’on n’est pas ne modifie guère le cours des événements. J’habitais une fable cohérente, dont je n’avais pas conscience d’être l’auteur, et m’en accommodais : elle semblait la réalité même.
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C'est au moment où ils travaillent le moins que les esprits élevés en font le plus;ils sont alors mentalement à la recherche de l'inédit et trouvent la forme parfaite des idées qu'ils expriment ensuite en traçant de leurs mains ce qu'ils ont reçu en esprit.
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Au cours du dîner, je l’avais interrogé sur son métier d’historien d’art. Il m’avait questionné en retour sur ma vie, mes études, mais il n’y avait grand-chose à en dire, je n’ai jamais eu de vocation, de sorte que nous avons poursuivi sur le surréalisme, la littérature, les musées, la culture, moi soutenant de mon mieux qu’il y a des choses plus importantes dans l’existence - une partie de volley-ball sur la plage, au coucher de soleil, ne procure-t-elle pas un plaisir plus vif qu’un roman de Tolstoï ou une toile de Picasso? -, lui évoquant des émotions d’un autre type et me faisant valoir que les plaisirs ne comptaient guère si l’on ne pouvait en fixer le souvenir, que l’art est tout à la fois une loupe, un révélateur, une lanterne magique, un facteur de perturbation et une source d’éternité, une malle au trésor, une passerelle tendue au-dessus du vide, une invitation à sortir de soi-même, une terre d’évasion etc.
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Sur leur gauche, une main triturait un mamelon, pinçant le bout entre le pouce et l’index replié, comme on tournait autrefois le bouton de la radio pour régler la fréquence. Sur leur droite, une blondasse quadragénaire aux nattes de gamine gobait à genoux un sexe au pubis glabre émergeant d’une braguette. Elle se balançait d’avant en arrière, tel un rabbin face au Mur des lamentations, et sa joue striée de bave se déformait à chaque va-et-vient. Des voyeurs s’agglutinaient derrière elle et l’encourageaient, une main dans la poche, impatients de se faire pomper à leur tour.
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A l’entrée des toilettes une grande Noire dépoitraillée se remettait du rouge aux lèvres. Un vers lui traversa l’esprit : L’élixir de ta bouche où l’amour sa pavane. Il se concentra sur le rythme de sa respiration. Inspirer, expirer. Le poème commençait par ces mots : Bizarre déité, brune comme les nuits, Au parfum mélangé de musc et de havane.
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Personne n’est obligé à rien dans une boite à partouze, mais certains mâles restent persuadés qu’un non féminin n’est jamais définitif, qu’il suffit de persévérer, de montrer du savoir-faire, d’afficher une détermination animale, pour que la proie se sente flattée, pour que ses sens s’enflamment, pour qu’elle perde la tête.
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J'ai rejeté la viande depuis très tôt dans mon enfance et le temps viendra où les hommes, comme moi, regarderont le meurtre des animaux comme ils regardent maintenant le meurtre de leurs semblables." (...) Tu as défini l'homme comme le Roi des Animaux ; moi par contre, je dirai que l'homme est le roi des fauves féroces parmi lesquels tu es le plus grand. N'as-tu pas effectivement tué et mangé les animaux pour satisfaire les plaisirs de ton palais, te transformant toi-même en tombe pour tous ces animaux ? La nature ne produit-elle pas de la nourriture végétale en quantité suffisante pour te rassasier ?
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Il n'y a pas de hasard, il n' y a que des rendez-vous - Paul Eluard
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