AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

3.26/5 (sur 46 notes)

Nationalité : Russie
Né(e) à : Moscou , 1981
Biographie :

Sergueï Lebedev est né en 1981 à Moscou. Géologue, comme ses parents, il a participé durant 7 ans à des expéditions dans le nord de la Russie et en Asie Centrale. Il a publié des poésies, des essais et des articles en tant que journaliste.
La limite de l'oubli est son premier roman

Ajouter des informations
Bibliographie de Sergueï Lebedev   (4)Voir plus

étiquettes

Citations et extraits (14) Voir plus Ajouter une citation
Nous reconnaissons ainsi ceux qui nous apparaissent à plusieurs reprises et qui, bien que différents, ne sont par rapport à nous qu'une seule et même personne : le confident, le conseiller silencieux, le consolateur.
Commenter  J’apprécie          280
C'est ainsi qu'à travers le rêve l'homme pénètre dans les arcanes de la mémoire et ressent la présence menaçante des domaines obscurcis du passé que la lumière de la conscience n'a jamais touchés.
Commenter  J’apprécie          240
Il suffit d'une marque, d'une encoche pour qu'une chose demeure.Il suffit d'une personne qui se charge du travail de la mémoire. Se souvenir signifie conserver un lien avec le réel, plus que cela : devenir le lien. Ce n'est pas nous qui gardons la réalité du passé dans nos souvenirs, c'est ce passé lui-même, originellement organisé, agencé comme un être vivant, qui parle à travers nos mémoires....
Commenter  J’apprécie          202
On ne se souvient pas de ce qui a eu lieu mais du souvenir lui-même, et le passé s'éloigne, rapetisse tel un objet reflété dans deux miroirs placé l'un face à l'autre.
Commenter  J’apprécie          200
En renonçant à soi-même, on renonce non pas aux sentiments en général, uniquement à la partie " émergente " de chacun d'entre eux qui est liée à l'amour -propre, orientée vers soi-même, et qui nous oblige à nous retourner sans cesse en nous demandant : comment es-tu face aux sentiments ?
Commenter  J’apprécie          170
Les Allemands avaient besoin d'un endroit secret - loin des triomphateurs de Versailles, des yeux, des espions et des dénonciateurs - pour continuer leurs expériences sur les armes chimiques, se préparer à rejouer la partie perdue.
Les Soviétiques avaient besoin de formules,de technologie, de méthodes d'application, de résultats, tableaux,rapports, d'une école pour leurs chercheurs.
Là, près du Fleuve, dans le débarras de l'Europe, les deux partenaires avaient trouvé ce qu'ils cherchaient : un endroit éloigné dans un environnement riche... où l'on pouvait tester l'action des produits sur différents théâtres d'opérations et en différentes saisons.
Commenter  J’apprécie          160
Je me trouve à l'extrémité de l'Europe.
(...) Je me tiens sur cette lisière qui invite à faire un pas en avant, mais pour cela il eût fallu que j'y vienne le coeur léger et l'âme libre. Or, mon âme et mon coeur sont plein de la mémoire des espaces qui s'étendent vers le cercle polaire, de leur mutisme qui a soif de mots, de la blancheur d'une feuille inentamée, et du noir semblable à celui, brillant, du charbon qui attend de se transformer en chaleur des flammes : noir de la nuit, noir de la mine dont l'air, appauvri par chaque respiration, ne connaît pas le jour.
Venu ici, au bout du monde, je n'ai pas mon dessein devant, mais derrière moi : je dois m'en retourner. Mon voyage est fini, j'entame mon trajet de retour : vers les mots. p 7-8
Commenter  J’apprécie          140
Certains actes sont commis en raison d'un mouvement intérieur inconscient, sans intention particulière, pas par automatisme ni par habitude.
Commenter  J’apprécie          100
Mon père était un passionné d’échecs, nous jouions souvent. A la fin de la partie, presque toutes les figures avaient péri, leurs corps vernis reposaient en tas des deux côtés de l’échiquier comme si le champ quadrillé noir et blanc avait vu se dérouler une vraie bataille, affrontement de fantassins rangée contre rangée, folle boucherie des attaques de cavalerie.
Ma reine survivait généralement, mon père devait construire des combinaisons en plusieurs coups pour la coincer avec les pièces qui lui restaient.
Les fous et les tours, figures balourdes qui ne pouvaient se mouvoir que tout droit ou en diagonale – mon père échangeait généralement ses chevaux – assiégeaient ma reine, la précipitaient vers sa perte. J’étais émerveillé par la résistance de la reine, la pièce plus libre, que l’on ne peut vaincre en combat singulier ; là où un roi ou un fou était pris au piège, la dame s’échappait, elle.
Mes deux grands-mères assises à table ressemblaient à des reines, des figures de rang supérieur. Elles rendaient visible la tragique faiblesse, la vulnérabilité de l’homme menacé par le typhus, les courants d’air, la septicémie, le scorbut dû à la malnutrition ; l’homme se faisait encercler par l’ennemi et le voilà coupé des siens, abandonné ou blessé, portant en lui le fer de la guerre, incapable de reprendre une vie paisible, sombrant dans l’alcool. L’homme avait besoin qu’on lave et reprise son linge, qu’on lui prépare à manger, qu’on fasse des tas de petites choses à sa place, obsédantes comme les poux et récurrentes comme les rhumes d’enfant. Les grands-mères donnaient à voir la prédestination de la femme, pleureuse, veuve qui, même jeune, était en quelque sorte par avance plus âgée que son mari auquel elle survivrait de plusieurs décennies. On reconnaissait en elles l’effrayante inflexibilité féminine de l’existence, la capacité de surmonter le destin, d’organiser le monde de façon à ce que celui-ci « boite » côté homme. L’homme était une silhouette en pointillé, la femme une cariatide, leur relation était celle d’une variable à une constante.
Commenter  J’apprécie          30
Oh, les longues soirées d’hiver ! Oh, l’apprentissage de la résistance au temps, à l’obscurité !
C’est au cœur de l’hiver, lorsque les jours raccourcissent, que je percevais la précarité de notre existence. Je sentais – ainsi agace-t-on du bout de la langue l’abcès sur la gencive – les paquets, les bocaux qui, blottis les uns contre les autres dans les placards de la cuisine, pesaient de toute leur masse sur les vis et les clous des étagères.
Ces réserves excessives de sel, de farine, de céréales, denrées de base qui avaient valu aux adultes un long piétinement – les files d’attente s’étirant tels des mille-pattes ou s’enroulant sur elles-mêmes tels des hippocampes, les centaines de semelles usées glissant sur le verglas dans cette promiscuité où germent les querelles, les silhouettes en manteaux de drap sombre obscurcissant encore le dense crépuscule du matin -, ces réserves qu’on eût cru constituées pour tenir en cas de guerre me disaient que la lumière des réverbères au-dehors, le tic-tac endormi de l’horloge, le cliquetis quotidien de la clé dans la serrure à sept heures du soir, tout cela pouvait cesser à tout moment.
Une duveteuse couche de givre recouvrait la vitre depuis plusieurs jours, et j’avais l’impression que nous vivions sur la banquise ; notre glaçon était encore solide, mais il fallait prêter l’oreille : n’était-il pas en train de se craqueler, un trou n’était-il pas en train de s’ouvrir, comme dans les livres qui racontaient les aventures des explorateurs polaires ? J’étais tout ouïe : j’interprétais le bruit des branches devant la fenêtre, le glouglou à l’intérieur des radiateurs, les voix provenant de l’appartement d’à côté.
C’était ma grand-mère Tania qui m’avait appris à tenir tête au temps et à l’obscurité. Laissant mes devoirs pour plus tard, je m’asseyais auprès d’elle à la table de la cuisine pour trier les céréales : le sarrasin, le millet, le riz. Il s’agissait de séparer de pur de l’impur, les graines à droite, les saletés à gauche. Parfois elle murmurait à part soi que chaque année, il y avait plus de déchets dans les céréales, puis de nouveau, je voyais s’agiter ses doigts rodés aux travaux minutieux : ravaudage, correction d’épreuves, points de couture, composition d’imprimerie.
Des radiateurs enveloppés de couvertures et de carton émanait une odeur de laine brûlante ; braquée sur la table, la lampe projetait une lumière brutale comme dans une salle d’opération. Mon attention, focalisée dès le matin sur les grands et petits carreaux des cahiers se dissipait, ma concentration cédait la place à une douce torpeur, à la fatigue accumulée à force de courir après les cours, à une tristesse transparente, décantée au fond de cette claire journée d’hiver.
J’avais l’impression de participer à une séance de divination. Une fois cuites, les céréales devenaient de la nourriture, l’ordinaire de l’homme. Crues, elles demeuraient la pitance des oiseaux, des animaux, l’offrande apportée aux défunts. Les graines rugueuses avec leurs facettes dures appartenaient encore au champ, à la terre, à un autre monde, les trier était comme y plonger les mains.
Ma grand-mère s’éloignait de moi. À ces instants, elle semblait appartenir aux deux univers à la fois : le gris de ses cheveux, les taches brunes qui parsemaient sa peau devenaient soudain des signes de l’au-delà.
Les graines étaient pour elles une sorte de chapelet. Mais elle ne priait pas : tel un médium, elle interpellait ceux qui étaient partis. Le spectre des jours du blocus qui avaient emporté ses soeurs, le spectre des combats où ses frères avaient disparu planait au-dessus de la table. Les céréales, principale richesse d’un siècle de famine, mesure de la vie et de la mort, devenaient des graines de la mémoire, le souvenir matérialisé. Grand-mère ne jetait pas celles qui étaient gâtées, comme si les ombres des morts, pour lesquels même ces déchets auraient constitué un trésor, pouvaient l’observer : elle les ramassait soigneusement et les mettait dans la maison des oiseaux de l’autre côté de la fenêtre. Des mésanges s’y précipitaient, mais je me demandais parfois si c’étaient vraiment des mésanges. N’étaient-elles pas autre chose que des oiseaux ? Elles regardaient par la fenêtre, immobiles, comme plongées dans leurs souvenirs, et j’avais l’impression qu’elles ressentaient l’étrangeté de leur petit corps, leurs plumes, leur bec, leurs yeux en tête d’épingle, leur gazouillement, leur agitation.
J’aimais aider ma grand-mère, mais cela me faisait peur aussi : absorbé dans cette besogne monotone, je perdais la conscience de mon être ; en revanche, je percevais soudain une présence dans le noir, au tournant du couloir : quelqu’un s’éveillait dans l’obscurité dense.
Commenter  J’apprécie          20

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Sergueï Lebedev (67)Voir plus

Quiz Voir plus

Le faucon déniché

Qui est l’auteur?

Jack london
Aucun
Miguel combra
Jean Côme nogues

30 questions
399 lecteurs ont répondu
Thème : Le faucon déniché de Jean-Côme NoguèsCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *} .._..