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Citation de Agneslitdansonlit


Le fils du maire était assez jeune pour, un jour, oublier l'étrangeté de ce moment. Avec le temps il ne se rappellerait plus le malaise suscité par la présence des touristes dans les rues, leurs regards curieux pénétrant partout, semblant s'ériger en juge de son mode de vie. Il ne se souviendrait pas de sa colère, quand l'un d'eux, goûtant à la saveur amère d'un bol de dhuba non raffinée, fit la grimace et recracha par terre, sous les rires de ses amis. il oublierait sa joie et son embarras, quand un autre, s'accroupissant devant lui lui demanda son nom. Un jour, sa mémoire des premiers touristes s'effacerait. Il croirait qu'ils avaient toujours été là; que, bien sûr, ils pouvaient traverser un champ, sans respecter la terre ou les tiges, pour obliger un moissonneur surpris à le laisser manier sa machette. Il trouverait cela normal.

La vie s'adapta à leur présence, de nouveaux bâtiments s'élevèrent pour les accueillir en nombre croissant. Les officiels suggèrerent aux habitants du Cinquième village d'apprendre la langue commune des stations. Certains visiteurs restèrent pour l'enseigner aux enfants. À huit ans, le fils du maire se débrouillait déjà, faisant la fierté de ses parents, du moins le pensa-t-il dans un premier temps. Il ne comprenait pas pourquoi ils lui interdisaient de l'employer à table, sous leur toit. Jamais ils ne lui expliquèrent la raison de cette règle, mais il obtint un début de réponse en surprenant parfois son père qui le regardait comme s'il ne le reconnaissait pas.
Il obéit. Il garda la nouvelle langue pour lui. Et il absorba les enseignements des outresmondains, sans s'apercevoir que, peu à peu, sa vie commençait à se scinder en deux. Mais que faire, à part s'adapter ? Le changement arrivait, de toute façon. (P.455)
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