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Critiques de Simon Johannin (141)
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Nino dans la nuit

Nino Paradis a vingt ans, sans argent ni aucune perspective de vie, mais une furieuse envie de dépasser cet horizon bouché, quitte à se fracasser contre les parois de la nuit. Se perdre dans les ténèbres lui permettra-t-il de retrouver le chemin de la lumière ? de sa prose ardente, ce roman illumine le crépuscule d'un nouveau jour. Un roman incandescent.



Ça commence par un engagement militaire dans la Légion étrangère, « l'armée en pire ». C’est une volonté empreinte de désespoir qui l'a poussée à venir « gueuler en coeur » parmi « un concentré de galériens, prêts à crever canon en avant pour un smic ». Mais il n'aura pas le temps de marcher au rythme du Boudin : recalé, car complètement camé. « C'est le destin de ce monde que de rattraper ceux qui fuient trop vite ».



« Retour à la case merdier », car il faut bien continuer d'avancer. Et s'il ne peut plus verser son sang pour la France, il se contentera de donner son corps dans des petits boulots précaires et mal payés. Son père le croit étudiant, alors qu'il crève de manque d'argent. Et le peu qu'il gagne, autant le dépenser à s'oublier. Nino Paradis, son nom pourrait être un gag, pour l'instant il le justifiera dans des plaisirs artificiels : la weed pour voyager, des canettes pas chères avec des gros 8 dessus pour décoller, la coke, la kétamine et toutes les lettres de l'alphabet sur des comprimés pour s'envoler. Fuir, oublier « la brume dégueulasse dans laquelle s'enfonce l'avenir », quitte à « sombrer dans un monde où tout est possible et qui fera demain encore un réveil triste ».



La nuit l'emporte, elle l'envahit. Défoncé des cinq sens, ses tympans pressurés par des musiques assourdissantes, à force de trop tirer sur le joint, « la queue du diable », il n'aura pas de second tour gratuit pour le paradis et risquerait bien de se faire appeler Nino Enfer.



Du fond de la nuit, brille encore une lumière.

Les souvenirs de sa peau l’aident à tenir. Elle s’appelle Lale. Elle revient dans sa vie comme un messie. Ensemble, ils pourront retrouver le chemin du jour et « baiser la nuit ». À corps unis, l’espoir surgit. C’est pour elle qu’il volera, pour elle qu’il vivra. Lale est son phare, son seul espoir.



« Je cherche le bout du départ pour nous dérouler la grande vie, te tailler des tangas dans le tapis rouge et plus jamais suer à courir après ce qu'il faut pour passer d'un jour à l'autre. Je sais pas comment faire, alors je sors guetter, brancher la vigilance dans la rue pour voir si des fois de l'or sortirait pas de ses trous. »



C’est une déclaration d’amour avec les mots qui lui restent. De leur prose étincelante, Capucine et Simon Johannin feraient lever le soleil dans la nuit la plus noire. Après L’Été des charognes de ce même Simon, on suit avec plaisir et émotion le destin de Nino l’écorché. Tour à tour poétique ou brute, sa langue fait briller en nous tous les espoirs assombris.



Nino dans la nuit, Nino dans le jour, Nino pour la vie. Une étoile polaire d’une vivacité et d’une vitalité éblouissante !



Retrouvez ma chronique sur Fnac.com/Le conseil des libraires :
Lien : https://www.fnac.com/Nino-da..
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L'été des charognes

L'été des charognes de Simon Johannin, décortique la décomposition de l'enfance dans une campagne rude et cruelle.



« J'ai grandi à La Fourrière, c'est le nom du bout de goudron qui finit en patte d'oie pleine de boue dans la forêt et meurt un peu plus loin après les premiers arbres. La Fourrière, c'est nulle part.

Le père il s'est mis là parce qu'il dit qu'au moins, à part ceux qui ont quelque chose à faire ici personne ne l'emmerde en passant sous ses fenêtres.

Il y a trois maisons, la mienne, celle de Jonas et sa famille et celle de la grosse conne qui a écrasé mon chat, celle à qui il était le chien qu'on a défoncé avec les pierres et qui vient que de temps en temps pour faire ses patates et pour faire chier. »



Ce qui frappe en premier lieu, c'est la violence brute qui s'exprime sur les animaux. Rien ne nous est épargné des miasmes et de la puanteur des corps en putréfaction. Pour cette famille d'éleveurs, pour qui l'élevage intensif et aseptisé n'est pas encore passé par là, il n'y a rien de plus naturel. La violence est quotidienne, et elle ne se contente pas d'être animale. Les coups tombent facilement : pas de temps pour la négociation, sauf si elle est commerciale, car il faut bien vivre de ses bêtes.

Les gamins doivent filer droit. Leur liberté, ils la trouveront dans les champs à jouer avec des cadavres, ou en collectionnant les plus beaux os qu'ils trouveront, peu importe les corps dont ils proviennent...



L'ambiance âpre de désolation est prégnante à travers les odeurs immondes, et les excréments. On se lave quand on peut, dans la rivière ou dans la ferme s'il reste de l'eau après avoir abreuver les animaux. On se rassure en humiliant ceux qui sont différents : les « gueux », ou les musulmans dont on se moque en jouant à « l'Arabe », beaucoup moins quand il s'agit de leur vendre des moutons.

Les gamins grandissent et mettent du Scorpion pour masquer les odeurs pestilentielles. Ils prennent le car scolaire qui les emmènera chez les grands, mais qui pue autant que l'équarrisseur quand il passe devant les usines de la région.

Dans ses « localités en fin de vie », dont ils en sont les « bouseux », on abat, dépèce et plume, « imprégnés de cette odeur de charogne » et au son du bruit des viscères qui tombent et du « cri que fait le sang quand il coule ». Heureusement il y a des moments de convivialité et de solidarité, même si les enfants finissent souvent par raccompagner leurs parent soûls comme des « bêtes molles dans du formol » en conduisant eux-mêmes les voitures sur les chemins vicinaux.



Un récit âpre et rude, presque infesté d'une atmosphère vénéneuse, qui ne peut qu'être conseillé à un public averti. Pourtant, c'est une écriture lumineuse qui éclaire sa lecture d'une poésie noire mais jubilatoire. le narrateur voit son enfance partir en fumée dans les effluves pestilentielles d'un monde en décomposition entre « les bêtes, les champs, et les cuites » et part se réchauffer au soleil de l'amour :

« Sont sortis partout de nous de l'énergie et des liquides, et sa mâchoire dictait la pulsation. Je suis tombé du bord du monde dans son odeur d'envoûtement, je suis allé et venu dans le noeud sous sa peau, j'ai pris le jus sur sa langue et avalé l'eau dans sa bouche, courbé le mouvement de sa nuque sur un rythme qui nous venait de ce qu'il y a derrière le désir.

Elle m'a traversé comme une cascade de lumière. »



L'occasion de découvrir la prose poétique de ce jeune auteur Simon Johannin, dans son premier roman, qui, s'il n'invente rien dans le genre du roman noir, le magnifie d’un style unique et poétique. Aussi hallucinée que lucide, son écriture prendra encore de l'ampleur avec Nino dans la nuit, co-écrit avec sa femme Capucine. Une plume acérée dans une encre vibrante à découvrir assurément.
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L'été des charognes

La Fourrière. C'est ici que je vis. Un hameau au bout d'une route qui finit en patte d'oie. Au moins ici, on est tranquille. C'est pour ça que le père s'est installé ici. Juste trois maisons : la mienne, celle de mon ami, Jonas, et de la grosse conne. Celle-là même qui a écrasé mon chat. Du coup, pour se venger avec Jonas, on lui a buté son chien. À coups de pierre jusqu'à ce qu'il crève. De toute façon, des chiens, il y en a au moins une douzaine au hameau. Agressifs, en plus. Une vraie meute qui gueule sans arrêt. Une fois à la maison, il y avait mon père dans le jardin, en train de cuire des côtes de porc. Le barbecue, l'été, c'est tous les jours. Pour éviter qu'il y ait trop de mouches dans la maison. L'été ne faisait que commencer et on allait bientôt plus pouvoir se baigner dans le ruisseau à cause des brebis que les chiens du hameau, rien qu'en gueulant, avaient tuées...



À l'instar de la couverture, Simon Johannin nous livre un roman profondément sombre, cruel et fangeux. À La Fourrière, le pays de nulle part, les gamins, livrés à eux-mêmes, collectionnent les os trouvés au cimetière, jouent au jeu de l'Arabe, squattent chez la seule voisine qui a la télé, tuent les agneaux, martyrisent les animaux ou ramènent leurs parents bourrés pour conduire. L'on est plongé dans une atmosphère glauque, violente, brumeuse et misérable. L'on a les pieds dans les merdes de chien ou la boue. L'on pourrait presque sentir ces odeurs de charognes bourdonnantes ou ces fumées noires des usines de croquettes pour chiens. Ce roman est divisé en deux parties bien distinctes : la première narre avec âpreté et rudesse l'enfance du narrateur au milieu des charognes ; la seconde évoque l'adolescence. L'écriture est à la fois poétique, dure et râpeuse. Un premier roman saisissant, sauvage et brut.
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L'été des charognes

Un livre voulu noir, comme un profond ravin.

Ils se tiennent à son bord, sans savoir.

Un gouffre à chiens; rempli de carcasses de métal ou de calcium.

N’oubliez pas qu’ils sont avant tout charognards.

La morale n’est qu’une poudre d’os, envolée sans avoir existé.

On pourrait juger, c’est leur premier, mais tout vient rapidement se troubler, comme une nausée imposée.



L’ombre de mon vieil ami Petit Mat imprimée sur le creux du Vernoubre, où les truites ne viennent plus; il savait les attraper en les caressant, la main sous les ouïes, souriant timidement de ses dents pourries. Une jeunesse passée dans l’ombre de cette Montagne Noire, ventée et sans sommet. Des semaines poisseuses à attendre leurs fins, une photocopie dans la poche, l’InfoLine de la free-party comme futur enviable. On y allait, camion baladé vers les étoiles… mais lui n’en est jamais vraiment reparti.



Simon est plus jeune. On l’a peut-être aperçu, sous une capuche, derrière une cigarette ou un feu; plus tard, sûrement, parmi ces artistes qui veulent en apprendre, au creuset de La Cambre, moi qui pestait, partant embaucher dans cette usine à eurocrates, servant à leur ivresse convenue, muni de mon sourire tarifé, en équipe avec celles et ceux qui n’avaient pas réussi, malgré leurs talents, rétifs à ces photographies dignes de magazines; moins beaux, sûrement; que la jalousie rend encore plus répugnants.



Elle et Lui écrivent ensemble. Ils sont très beaux. Ils ont raison d’être suspects, on ne peut pas faire autrement. Les excès leur sont pardonnés, trop faciles à détester; tous ces vêtements, soignés ou imposés; cet éditeur, cérébral et branché; le reste pour être imaginé.



Ecris, jeunesse !, même si tu est incomprise. Les autres ont tout oublié.

Ce livre n’est pas « trop littéraire ». Les autres vous tireront vers le bas, vers une romance inacceptable qu’on ne peut qu’accepter, forcée de se montrer sans dénigrer. Donne-leur ce qu’ils attendent, choqués avant tout par cette souffrance animale . Inconsciente d’être seule.



Allusives, car faites de sentiments contradictoires, ces phrases se prêtent au jeu de la critique, sauvant ce qu’il reste de ces pages saturées d’immondices, de ce chien qui se contente des charognes qu’on lui laisse; voulant grandir, avide de ces quelques instants d’éternité, où le bonheur prend les couleurs d’un buvard de LSD.



Reflux coagulés de nos jeunesses cristallisés, la violence comme seule différence, son absence comme meilleure chance. La bienveillance située dans ces poulets courant toujours sans leurs têtes; poisseuse de sang, de plumes et de poils; grouillante de vies et de morts. Innocence perdue dans le regard des autres.



Lecture ultra-contrastée, ambivalence de la méfiance, sordidité excessive ? Doit-on vraiment tout contextualiser ? Ce couple de regards à la mode responsable de cette déification de papier glacé ?

Alors qu’on ne devrait que leur souhaiter l’amour et la réussite… Tous les autres, errant, les yeux vagues, âmes-chienne perdues le long d’un canal ou d’une voie ferrée, ce passage de la fin de l’été à jamais disparu.

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L'été des charognes

L’été qui se finit…avec l’évocation d’un fléau qui hante décidément des jeunes écrivains.

Sur fond du thème de l’enfance, dans leur premier roman, avec sans doute les émotions qui marquent au fer rouge, et qui les inspire…

Comme dans ce premier roman, publié en 2017, écrit par Simon Johannin, alors âgé de 23 ans, un fléau qui couve et va accompagner le passage d’une enfance rurale dans un hameau au bout d’une route, vers l’âge adulte ; qui prend corps avec le narrateur et sa bande de copains, turbulente, et plutôt désœuvrée.

J’ai voulu relire ce journal intime - du début de ce siècle mais…- qui démarre dans « ce village de nulle part » du Sud-Ouest. Dans une atmosphère de violence.

Le quotidien à la ferme. Les animaux. Leurs jeux sauvages. Pas de règles. La vie dehors. Des enfants qui mûrissent, libres d’une certaine façon… Cet espace de liberté, l’auteur semble l’avoir puisé dans les souvenirs de sa propre enfance.

Une réalité crue : la misère ambiante et la précarité, avec l’alcool qui embrume le cerveau, l’âpreté et la rudesse des relations parents-enfants; la trivialité de la vie.

La crasse. Les odeurs de putréfaction.

Cela peut faire penser à la vie des rednecks du sud-américain dans « le Seigneur de porcheries ». On y tue le cochon aussi. On se bat, on rend les coups et on essaie d’éviter ceux des parents.

Des passages avec un peu de lumière, avec un peu de grâce. Système D pour s’en sortir.

L’enfance se dissout. Après la campagne, la ville. Les années collège sans Nike avec ses confrontations. Les filles. La drogue. L’ennui. Arrivent les grosses bêtises. La ville où tout se délite. Les angoisses de l’avenir. Le délire avec les obsessions. La déchéance.

Des scènes brutales, servies par un style direct, rude où les phrases sont courtes et où les mots se bousculent. Le parler d’un enfant sans fil directeur. Les touches d’humour s’effacent. Des changements de rythme qui déroutent. Vers des rêves hallucinés.

Cela prend à la gorge. On en ressort avec des sentiments contradictoires. Des interrogations sur le sens donné par l’auteur que je n’ai toujours pas résolues.

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L'été des charognes

Le Nature writing français bien trash

*

Un roman noir violent et cru.

Voilà les 2 adjectifs qui me viennent immédiatement à l'esprit à l'évocation de cette lecture.

Ce livre, de format court, n'est pas à mettre entre toutes les mains. Je le conseillerais plutôt à des lecteurs aguerris aux scènes dérangeantes. Ce n'est pas un polar , pas de crime à l'horizon, pas (trop) de sang mais alors de la chair il y en a à profusion!

Même moi qui ai l'habitude de "trifouiller" dans les viscères, de ramasser le vomi et autres liquides organiques (infirmière en digestif, ça ne s'explique pas:), j'ai eu besoin de quelques moments d'accommodation à ces phrases trop/très suggestives.

Le style est poétique (malgré le sujet), tout en finesse et sensibilité. L'auteur ne mâche pas ses mots. Il les expose sur le papier sans filtres, sans ornements.

Attention aussi aux lecteurs sensibles à la cause des animaux car dès la première page, vous appellerez la SPA ! Ici , les charognes sont reines, cela déborde de partout. Et pourtant, il y a du respect envers ceux-ci (c'est subtil).

Et les enfants? Elevés comme des animaux domestiques, toujours en quête de jeux sauvages, nourris à la viande, fessés au moindre regard de travers.

La première partie évoque surtout les premières années du jeune garçon. Ses parties de jeux avec ses voisins (ils collectionnent tous types d'ossements même humains !), la débrouille dans cette cambrousse remplie de crasse mais aussi élevé à l'amour "je t'aime moi non plus" de ses parents. Puis l'adolescence à la ville où tout se délite.

*

Un récit que j'ai dévoré presque comme le gamin qui mastique et engloutit son bout de méchoui. Oui, c'est une pépite qui fracasse sec. Du lourd qui t'en met plein les mirettes et te donne la nausée. Les bêtes, la crasse, l'alcool mais aussi l'amour. C'est brutal et beau à la fois.

Puissant et évocateur (je l'ai déjà souligné mais j'insiste!)

Et puis l'édition Allia l'a proposé dans un bel écrin noir. What else?

Un auteur à suivre donc....



* Lu dans le cadre du challenge #theblacknovember
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Nino dans la nuit

Capucine et Simon Johannin figurent parmi les révélations de cette rentrée 2019. Ensemble, ils ont écrit ce roman qui nous entraîne sur les pas d’un couple de jeunes vivant à la marge, essayant de sortir des galères qui font leur quotidien.



L’histoire de Nino est à ranger parmi les révélations de cette rentrée littéraire de 2019, à la fois par l’originalité de la langue et par sa conception, écrit en duo par Capucine et Simon Johannin Tous deux ayant déjà fait leurs armes en littérature auparavant. Mais avant de parler de ce jeune duo prometteur, revenons au scénario de ce roman qui commence très fort.

Nous sommes dans un centre de recrutement de la légion. Nino vient tenter l’aventure, même s’il n’a pas précisément le profil du candidat idéal. On apprendra plus tard qu’il s’agit pour lui de fuir une nouvelle galère, après avoir refait le portrait d’un homme qui entendait profiter de l’état semi-comateux d’une jeune fille pour la violer. Mais malgré sa docilité et son souci de ne pas se faire spécialement remarquer, il va finir par se trouver à nouveau dans la rue et dans la dèche.

« je fais le tour de l’appartement pour voir s’il reste des trucs que je pourrais vendre. J’ai les outils trouvés avant de partir au fort de la Légion, une perceuse, une disqueuse et des tournevis. Je vais garder les tournevis et je vais vendre le reste, ça fera quelques billets. Mais je vais pas tenir longtemps avec ce genre de magouille. Il faut que je trouve un travail, un truc valable avec un salaire, des heures, quelque chose de normal.»

De galère en galère, on le retrouve parmi ces anonymes à la quête d’un moyen de subsistance et qui se font exploiter pour dix euros de l’heure à la condition qu’ils ferment leur gueule: «Je transite sans encombre dans la masse de tous ceux qui sont debout avant l’heure de leur corps, et ça se lit sur les visages. J’ai autour de moi la preuve que le meilleur moyen d’attraper une sale gueule c’est de se lever tous les jours trop tôt pour aller bosser. Ça craint. Plus personne se tient droit…»

Son coin de ciel bleu s’appelle Lale. Arrivée de Turquie chez son oncle en France, à l’instigation de sa mère, la jeune fille a pris la fuite après avoir été battue par ce dernier et trouver refuge chez Nino. Deux solitudes, deux «misérables» qui essaient tant bien que mal de conjurer le sort.

«Je sais que tu m’aimes. Ce que je sais pas c’est vers quoi on va tous les deux. Comment ça va se passer, avec quoi on va vivre. Toi non plus t’en sais rien, mais pour l’instant c’est la nuit, alors on le fait. Parce que ça fait longtemps, parce que baiser nous permet de pas trop penser au reste, parce qu’ici on est que nous la peau dans la peau.»

Entre petits arrangements et gros ennuis, entre trafics illicites et alcools forts, ils tentent de sortir la tête de l’eau. Ou de s’enfoncer dans les paradis artificiels. Des barres de shit, on passe à la poudre, du joyeux délire à la nuit la plus noire. Au pays de la défonce, il n’y a guère de lendemains qui chantent.

«Je tremble comme un putain de camé et tout en moi me dit plus jamais ça mais je sais déjà que c’est pas vrai, qu’un jour ou l’autre je vais me jeter sur le délicieux croche-patte qui me fera retomber au pays des gogoles.»

Cependant les auteurs ouvrent la porte vers une solution. Nino est invité à participer à un casting, à gagner en un jour davantage que durant toute une année… «C’est fini de patauger dans la boue pour lever les perdrix, quelqu’un a un jour vu que ma tête à moi qui sort d’un costume chic pouvait servir à vendre sur toute la planète ledit costume. Je suis passé de la chasse dans la brume au concours de belles bêtes, et putain c’est tant mieux.» Mais on le sait, une hirondelle ne fait pas le printemps.

Nés en 1991 et 1993, Capucine et Simon Johannin ont trouvé la langue qui sied à leur personnages. Ils rendent à merveille les ambiances et le vécu de cette jeunesse qui reste à la marge malgré des efforts monstrueux, de cette vie qui joue les montagnes russes. Beau dans la violence, saisissant dans la souffrance, étouffant dans la noirceur.


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L'Été des charognes (BD)

Le graphisme est réalisé en peinture d'après modèle, au pinceau, avec des couleurs assez liquides, diluées, étalées avec agressivité, énergie, le style est brut, brut et plein d'autorité, les formes sont très soucieuses des postures et des expressions, du corps et du visage. Les couleurs sont parfois salies, avec des arrières plans verdâtres, mais la lumière est forte et prégnante, les contrastes articulent la mise en page et font circuler le regard dans la brutalité du trait.



C'est l'harmonie parfaite avec l'histoire, une histoire de petits voyous du monde rural, tout aussi brute que le graphisme, sans concession, un milieu où tuer des bêtes fait partie des habitudes, on tue l'agneau dans le garage pour les affaires, on tue un chien pour une vengeance mesquine, des histoires de misère sociale, d'amitiés, de haine et d'amour.



L'écriture des dialogues est parfois lourde, insistant sur le désœuvrement intellectuel de ce milieu, la voix off insiste et par moment elle semble décoller, se poétiser, sans jamais délaisser sa sincérité, cela donne un récit très intense, encore plus transcendé par le déroulement de l'intrigue qui semblait pourtant longtemps délaissée pour une simple étude de mœurs.



Des portraits délayés dans la vérité, sans concession, des destins mal partis.



Le style graphique et le style littéraire ne semblent en faire qu'un, ils sont indissociables, j'ai même du mal à concevoir cette histoire sans le dessin alors qu'il s'agit pourtant d'une adaptation de roman. le coup de pinceau devient langage lui-même, c'est un véritable chef d’œuvre d'un point de vue stylistique. Et le rythme, l'évolution aussi sont à couper le souffle, une grande histoire, dure et violente, forte et grave.



Mais est-ce qu'on a envie de lire ce genre d'histoires, à moins d'être un travailleur social, éducateur ou assistant social, voire psy. le propos est rude, l'univers décrit est vraiment glauque, et en même temps très réaliste, trop réaliste. Cette lecture s'est avérée très inconfortable, malaisante, je referme le livre à la fois ébloui par sa qualité et écœuré par son propos.

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L'été des charognes

Voilà un roman particulièrement sombre et déstabilisant, qui m’a rapidement perdu…



Pas pour son coté trash, hard ou cruel envers les animaux, dimensions omniprésentes et quotidiennes dans la vie du narrateur et de son enfance à La Fourrière, village perdu du Sud-Ouest comme il en existe tant en France. Là-haut, la vie y est parallèle, marginale, quasi-ancestrale. On y vit chichement et on y meurt salement, hommes comme bêtes, dont les carcasses et les ossements viennent pourrir puis nourrir la terre. Et les marqueurs sont immuables à travers les générations : le travail, l’alcool, la castagne et souvent la violence, la survie…



Quand le narrateur s’en échappe à l’arrivée des années collèges, c’est pour mieux se heurter à l’autre monde, celui des nantis des villes reconnaissables à leur Nike toutes identiques. À leur rejet, à leurs sarcasmes. Et quand vient l’âge adulte et la vie dans la grande ville, place à la défonce et aux univers fantasmés qui deviendront finalement les échappatoires tant espérées.



Tout cela a un peu trop tourné en rond pour moi, notamment dans la -longue- première partie, n’arrivant que rarement à entrevoir où l’auteur voulait nous emmener. Changement radical de rythme et de style dans le derniers tiers avec une ambiance plus poétique et métaphorique, sans que cela ne me ramène dans le livre, au contraire.



Un énième roman d’apprentissage, au style certes prometteur, mais sans grand apport au genre, ni empathie pour ses personnages.
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Nino dans la nuit

Aussitôt terminé, aussitôt chroniqué, à chaud. Car c'est un roman de l'urgence, du présent et des lendemains qui ne chantent pas.



Dans cette histoire, dans leur histoire, ils sont deux, Nino et Lale, à qui s'ajoute une bonne poignée d'amis. Ils ont la vingtaine, sont beaux, habitent Paris et s'aiment énormément, au moins autant qu'ils sont pauvres.



On suit la galère du couple pour survivre dans cette capitale grise où il ne fait pas bon vivre des minima sociaux. Après un très bref passage par la légion étrangère qui nous vaut un premier chapitre mémorable et des petites magouilles, le jeune homme enchaîne les tafs inintéressants et sous-payés de la France qui se lève tôt, lui qui pourtant est un fêtard couche-tard.



Les journées à peine terminées laissent place à des nuits d'excès qui ne se terminent qu'au petit matin. La fête de trop, celle qui fait oublier qui l'on est. Nino et Lale se défoulent, s'abrutissent de produits en tout genre, cocaïne, amphet, alcool... Un exutoire à un quotidien sans charme et terne.



C'est dur, mais il y a beaucoup d'humanité, de très bons copains et une belle solidarité. Les dialogues sont incisifs, réalistes et souvent drôles et les deux amoureux le restent, amoureux, malgré les obstacles.



Une prose lumineuse qui abreuve de clarté et réchauffe la misère la plus crue. Et un amour fou, tristement ancré dans le réel, mais pourtant tellement sincère ! On est avec eux, dans leur piaule, dans la chaleur de leur corps et c'est touchant.



Ultra contemporain, sensuel et d'une poésie rare, «Nino dans la nuit» nous embarque pour une très très bonne expérience littéraire ! Car oui, c'est un roman qui se vit, plus qu'il ne se raconte. Capucine et Simon Johannin sont deux jeunes auteurs talentueux, à la plume originale.



J'attends vos retours sur ce roman ou d'autres écrits du couple !



Je pense m'offrir «l'été des charognes» de Simon Johannin pour la rentrée 🤗



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Nino dans la nuit

Un roman très contemporain d’une jeunesse vivant en marge, l’engrenage des petits boulots précaires, mal payés, parfois non déclarés, et pour oublier un peu, les soirées de fête, l’alcool, les amis , l’herbe, les pilules diverses. Pas la vie rêvée, et pourtant c’est celle de Nino 19 ans et de sa copine Lale.

Un roman coup de poing, un uppercut !!! Tout semble presque inimaginable et pourtant c’est leur vie, le désenchantement y règne mais aussi l’amour, on aimerait croire que cette vie soit uniquement une fiction mais hélas !!!

Je reconnais que le langage est adapté aux personnages mais pas au mien mais il faut savoir s’adapter pour y goûter une certaine saveur car l’histoire est intéressante, c’est une critique de notre société d’une grande vitalité.

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L'été des charognes

Simon Johannin signe un premier roman extrêmement noir, à l’image de la couverture. L’éditeur, Allia, a d’ailleurs vraiment bien choisi celle-ci : un squelette de chien se dessine finement mais partiellement en bas de la page. Et des squelettes, il y en a dans cette histoire. Pas de meurtre ni d’assassinat, non. On est ici dans la campagne profonde sud tarnaise ; dans un lieu si bien imaginé « La Fourrière », entre Mazamet et Labastide Rouairoux, et les ossements dont il est question sont ceux des animaux, traités sans ménagement par les paysans qui y vivent. C’est que la vie est rude dans cette vallée du Thoré que je parcours chaque jour pour aller travailler : le soleil ne passe que trop peu entre la Montagne Noire et les Monts de Lacaune, et de ce fait, il y règne une humidité palpable. Le vent d’Autan qui y souffle est appelé « le vent des fous ». Et la folie, elle semble bien souvent se présenter au milieu de ces hommes rudes qui vivent à l’ancienne, élèvent des agneaux et cultivent des légumes entre deux plans d’herbe, et boivent des quantités phénoménales d’alcool pour oublier la noirceur de leur quotidien. Il en faut de l’abnégation pour tuer des animaux avec sang-froid, surtout quand on n’y arrive pas du premier coup. Le narrateur, que l’on devine double de l’auteur, a intégré ces méthodes et le roman s’ouvre par une scène terrible où avec son copain Jonas, ils massacrent un chien à coups de pierre.

La partie, largement autobiographique je suppose, concernant l’enfance de l’auteur est un mélange de rudesse et de sensibilité. On devine que s’il décrit ces scènes de beuverie et de cruauté, c’est qu’elles ont profondément marqué cet enfant des champs. La plume est alerte, souvent poétique, parfois grossière, et toujours trempée dans le sang.

A partir de la page 107, on entre dans l’itinéraire d’un jeune adulte confronté à un autre raisonnement, plutôt urbain, Et l’écriture devient plus abstraite, à l’image de ce jeune homme qui boit et se défonce pour survivre dans cette jungle finalement peut être plus sauvage que celle de la Montagne Noire. J’avoue avoir moins aimé cette partie-là, moins « authentique » que les premières pages.



Ceci dit, c’est incontestablement un talent à suivre !

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Nino dans la nuit

Je suis sorti des sentiers battus et de ma zone de confort avec cet ouvrage. Mais je ne le regrette pas.

C'est un roman noir, crasseux, poignants aussi à l'atmosphère désenchantée. On est ici avec un jeune, très jeune couple, Nino et Lale qui vont de galère en galère pour s'en sortir. Ils sont livrés à eux-mêmes, abandonnés par des parents absents pour tout un tas de raison . Ils vivent d'expédients : alcool,drogue et de débrouilles pour s'en sortir tant bien que mal. Ils poussent leurs limites au maximum pour s'évader d'un quotidien noir, qui les laisse sans répits. Seuls, leurs quelques amis sont des branches solides auxquelles ils peuvent se raccrocher pour éviter la chute inexorable.

La plume est très belle : poétique, immersive, sans fioriture. Elle permet de créer une atmosphère très prenante, bouleversante. On s'immerge dans ce récit, on s'attache très vite aux personnages, on a envie de les aider et on n'en ressort pas complètement indemne. Certains passages sont durs, très durs.

J'ai beaucoup aimé cette lecture. Seule la fin me laisse sur ma faim, j'attendais des réponses que je n'ai pas eu. C'est un livre qui mérite d'être lu, mais il faut avoir la pêche avant de l'ouvrir sinon on peut sombrer ....
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Nino dans la nuit

Claque littéraire, uppercut émotionnel.



On suit le quotidien de misère de deux jeunes amoureux fous enchaînant les boulots de merde. On danse avec Nino défoncé sous les stroboscopes, les yeux en mydriase. On rit avec son pote gay Malik, fêtard et généreux. On s'inquiète pour Lale quand elle est triste et on dort dans la chaleur de ses bras. On vit d'amour et de shit, pour maintenir quelques heures l'illusion du bonheur. On espère que le monde de demain sera moins pourri que celui d'aujourd'hui.



Critique sociale mais surtout hymne à l'amour fou, Nino dans la nuit est porté par une écriture flamboyante et poétique. A maintes reprises au cours de ma lecture, je me suis arrêtée pour relire la dernière phrase lue, la faire éclater dans ma tête, et en apprécier toute la force et la beauté.



J'ai quitté Nino le coeur serré mais les yeux grands ouverts dans la nuit.



2019 commence fort, je cours chez mon libraire me procurer L'été des charognes.
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L'été des charognes

Il n'y a aucun doute, L'été des charognes porte bien son titre ! Bon, vous ne vous apprêtez pas à passer à table ? Non ? Très bien, alors, on y va.

Allez, je dirais, dans les cinquante premières pages, vous passez… de la lapidation d'un chien à la dégustation du fromage aux asticots (gentil hein, mais attendez un peu pour voir), à la description des cadavres de quarante-six brebis qui pourrissent au soleil et dans lesquelles les gamins jouent à se pousser (eh oui, l'équarrisseur ne peut venir avant deux semaines…), un extrait pour voir ? Allez, courage : « … il y en a un en trébuchant qui est tombé sur les brebis mortes. Les bras en avant sur le tas gluant, il a fallu qu'on le tire par le col de sa chemise pour le sortir de là tellement les corps s'étaient mélangés en un amas de pourriture grasse, où il pouvait pas s'appuyer pour sortir et s'enfonçait un peu plus à chaque essai. Nous on hurlait de rire tellement c'était drôle qu'il soit recouvert de cette chose pire que de la merde, et puis quand il s'est approché les moins accrochés ont vomi. Il en avait partout presque jusque dans la bouche, plein ses bouclettes blondes du jus marron dégueulasse et des asticots collés sur les mains, même pour la pêche, on les aurait pas pris ceux-là. »

Ça va ? Vous êtes toujours là ?

Continuons !

Ensuite, on assiste à l'enterrement de Didi une femme chez qui les gamins allaient regarder la TV. Elle a laissé un cochon, qu'il faut manger et donc qu'il faut tuer… scène suivante, je vous le donne en mille : la mort du cochon (je vous en fais grâce), puis, c'est le tour des agneaux qu'il faut tuer… on passe au labo, une petite pièce de la bergerie…

Et là, on arrive à la page 50 et soudain, le rythme un peu éprouvant se calme, on souffle, je dirais presque, on respire…

L'été des charognes est un récit d'enfance puis d'adolescence : dans une campagne loin de tout, des gens très pauvres vivent plus ou moins coupés du monde. Ils élèvent des bêtes, les mangent, en vendent quelques-unes : « J'ai grandi à La Fourrière, c'est le nom du bout de goudron qui finit en patte d'oie pleine de boue dans la forêt et meurt un peu plus loin après les premiers arbres. La Fourrière, c'est nulle part. Le père, il s'est mis là parce qu'il dit qu'au moins, à part ceux qui ont quelque chose à faire ici personne ne l'emmerde en passant sous ses fenêtres. Il y a trois maisons, la mienne, celle de Jonas et sa famille et celle de la grosse conne qui a écrasé mon chat, celle à qui il était le chien qu'on a défoncé avec les pierres et qui vient que de temps en temps pour faire ses patates et pour faire chier. »

Les gamins s'amusent comme ils peuvent, c'est la misère : on boit, on se bagarre, les mômes ramènent les parents en voiture les soirs de beuverie, puis, un jour, ils quittent le pays pour aller voir ailleurs si ce n'est pas mieux.

Finalement, ils traînent partout où ils vont la mouise de leur enfance, ne trouvent pas de travail, se droguent, se battent, errent sans but et se perdent ...

J'ai aimé ce texte, la cruauté qu'il met en scène, la violence qu'il nous lance à la figure, la brutalité qui nous assomme à chaque phrase, chaque mot.

L'écriture est puissante, crue, âpre, poétique aussi. C'est sombre à souhait, terrible, désespéré et beau à la fois. Il y a du Céline et du Del Amo de Règne animal dans L'été des charognes.

Cependant, j'ai trouvé que les premières pages « en faisaient trop » : on passe sur un rythme effréné d'une scène insoutenable à l'autre et l'on entend l'auteur nous dire : attention, en voilà une autre, tenez-vous bien, encore une « grande scène » ! C'est un peu forcé, démonstratif donc artificiel et, il faut bien le dire, on sature très vite.

Attention, ces scènes, en elles-mêmes, sont fortes, puissantes : pas de doute, on y est, on les voit, on les sent (!), mais le problème, encore une fois, c'est le rythme. Trop serré. La narration perd de sa crédibilité, on décroche un peu. On a presque l'impression de lire des « morceaux choisis », une espèce d'anthologie de la cruauté. J'aurais préféré connaître davantage les personnages, leurs rapports entre eux, leur quotidien ... sans forcément qu'il y ait de l'hémoglobine.

La seconde partie qui évoque l'adolescence du narrateur à travers son errance urbaine dans les brumes de l'alcool et de la drogue est plus posée. On reprend son souffle, même si l'on reste dans un univers glauque et halluciné. L'écriture se fait plus poétique, les phrases s'allongent. Deux livres en un donc.

Simon Johannin, jeune auteur de 23 ans, promet.

Je retiens son nom et lirai à coup sûr son prochain roman.

Car il a du talent, c'est certain !
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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Nino dans la nuit

Révélation de la rentrée littéraire 2019, le roman "Nino dans la nuit" de Simon Johannin aborde les thèmes de la jeunesse, de la marginalité, de la violence avec l’inaltérable question de la quête de sens.

Un roman sombre, sans concession, qui décrit la vie de jeunes marginaux dans des environnements défavorisés d’une banlieue française, dans un monde de violence et de précarité.

Dans une langue crue qui transcrit la complexité des personnalités des personnages et leur désespoir.

Une langue qui saisit.

Une œuvre qui secoue et invite à la réflexion, en écho à l’actualité.Où et comment trouver sa place ? Qu’est-ce qui pousse à la délinquance ?

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Nino dans la nuit

Le roman de Simon et Capucine Johannin nous raconte l'histoire de Nino Paradis, 19 ans, qui après avoir été recalé aux tests d'aptitude pour s'engager dans la légion part pour Paris puis retrouve son amoureuse Lale. Ensemble ils vivent dans un appartement miteux et subsistent de petits boulots au noir, de débrouille et de combines illégales. Tout au long de ce roman c'est Nino le narrateur qui s'adresse directement à son amoureuse Lela, ici pas de grandes tournures littéraires, les dialogues sont familiers et percutants non sans une certaine pointe d'ironie qui est présente tout au long du roman. Avec sa prose railleuse Nino nous fait donc part de ses doutes, de son mal-être dans une société où tout n'est que conformisme, il trompe son ennui dans les fêtes, l'alcool et la drogue... J'ai aimé ce roman c'est aussi une belle histoire d'amour car l'amour Nino en a à revendre que ce soit pour Lale ou son meilleur ami Malik et c'est ce qui lui permet de tenir le coup justement. Les 2 auteurs nous offrent une vision très juste de la jeunesse actuelle, jeunesse pleine de désillusions, avec ou sans diplômes, le parcours du combattant pour se faire embaucher... Seul bémol pour moi : la fin du roman qui m'a un petit peu surprise, je m'attendais à autre chose.

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L'Été des charognes (BD)

Eh bien voilà un roman graphique adapté d'un roman dont on ne ressort pas indemne? Comme certains lecteurs de Babelio, il m'a fallu laisser passer un peu de temps pour écrire cette critique car j'avais un peu la tête à l'envers d'avoir vécu les parcours des ces être en errance.



Tout commence un été chaud, dans un bois, où deux adolescents massacrent un chien par vengeance et par bêtise. L'un porte le maillot de l'équipe de France attribué au célèbre numéro 10 Zinédine Zidane. L'autre, Jonas, porte les cheveux longs.



Ils reviennent ensuite vers leurs maisons qui semblent un peu en décrépitude, sortes de fermes avec plein de matériels et de matériaux plus ou moins à l'abandon. Ce hameau, La Fourrière, semble perdu au milieu de nulle part. le barbecue est un fut d'huile coupé en deux.



La cuisine est dans le même état : envahie par les mouches que le célèbre papier tue-mouche collant et gluant, tombant du plafond n'arrivant pas à éliminer les drosophiles. Idem au niveau du réfrigérateur et l'évier est rempli de vaisselle sale. Rien de bien ragoûtant, rien qui donne envie de rester.



Tout de suite, on ressent une atmosphère tendue entre ce jeune ado et son père. Sa mère est partie 3 jours chez sa sœur. Le père pose des règles strictes mais se montre humiliant pour son fils. Le jeune a un oncle qui a fait de la prison.



La vie est rythmée par des fêtes entre adultes où l'alcool est de la partie, les adultes étant ivres devant leurs enfants qui testent aussi la boisson.



Les adolescents vivent leurs vies en parallèle de celle des adultes, faisant leurs expériences. Ils vivent les plaisirs simples (ou pas) de la campagne : participation aux travaux des champs, les repas animés, les bals, le déplacement des charognes des moutons... Leurs véritables évasions, ils la prennent chez une vieille dame, qui les accueille et leur permet de regarder sa télévision. C'est le lieu de rassemblement des gamins comme cela l'a été celui de leurs parents. C'est un peu le foyer des jeunes, la maison de la culture ou le bar du coin pour d'autres.



La vie s'écoule lentement. Les jeunes ne sont pas malheureux tant qu'ils n'ont pas de moyens de comparaisons. Le jeune au maillot de Zidane demande à son père la permission de prendre une douche car il s'est sali. La réponse est négative car il faut garder l'eau pour les bêtes. Le jeune commence à découvrir une autre forme d'humiliation.



À la fin de l'été, il faudra intégrer le collège et les jeunes de la fourrière vont découvrir toute la méchanceté de leurs congénères. Ils ne sont de la ville, ils n'ont pas de vêtements de marques et les autres leur font bien sentir la différence. Ils n'ont pas les codes sauf celui de la violence et c'est pas la violence qu'ils vont s'imposer et de sa faire respecter quel qu’en soient les conséquences disciplinaires.



Syvain Bordesoules va nous plonger dans le parcours de ces jeunes et de leurs combines pour survivre. On va aller des petits chapardages de bonbons (qui sont cependant déjà des vols) à des vols plus importants et pas forcément nécessaires. Peu à a peu, ils avancent de manière inexorable vers des addictions de plus en plus complexes : alcool, tabac, cannabis et autres formes de drogues.



Pour l'un des jeunes c'est une lente descente aux enfers. On ne voit aucune main secourable se tendre pour les emmener vers autre chose. La seule entraide vient de ceux qui les entour et sont dans le même trip.



C'est poignant, c'est touchant, c'est poisseux. Le graphisme m'a impressionné, le choix de l'aquarelle est plus que judicieux. Il renforce le sentiment de malaise, nous entraîne dans le monde de la nuit et des substances pour "voyager". Chaque case mérite que l'on s'y arrête, c'est saisissant et troublant.



Pourquoi ai-je té autant troublé ? J'ai enseigné dans des milieux difficiles et auprès des populations les plus éloignées des codes de l'école et parfois de la société. J'ai cru reconnaître certains de mes anciens élèves; ceux qui se faisaient moquer pour leurs vêtements, leurs coupes de cheveux, parfois pour leurs odeurs. Certains d'entre eux vivaient dans des lieux chauffés au bois et mal aérés, leurs vêtements étaient imprégnés de l'odeur de feu de bois. Je me souviens de cet élève qui ne venait pas en cours les jours de grandes marées car il allait à la mer pour pêcher et rapporter un peu d'argent à la maison. L'école était bien loin de leur priorité, ils venaient parce que c'était obligatoire. Comme enseignant, j'ai toujours agi pour permettre à ces élèves de trouver leur place à l'école et dans la société, faire en sorte qu'ils soient respectés, respectueux. Je leur ai toujours apporté l'estime à laquelle ils avaient droit. Devenu chef d'établissement, c'est devenu un point fort des projets des collèges ou des lycées que j'ai eu l'honneur de diriger.



Eh oui, ce roman graphique m'a renvoyé tout ceci et je peux affirmer que les jeunes décrits n'étaient pas des charognes, juste des victimes de leur environnement.



Je vais lire le roman de Simon Johannin, mais pas tout de suite, pour récupérer.



Lisez ce roman graphique, il vous aidera peut-être à mieux comprendre les réactions de certains jeunes un peu marginaux.



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Nino dans la nuit

J'ai retenu ce livre lors d'un café littéraire. Il va falloir que je recherche mes notes car j'ai plus détesté qu'aimé.

Le style est bien, plusieurs tournures et citations à retenir. Deux étoiles pour la forme.

Mais le fond c'est tout ce que je déteste. Ce jeune Nino qui se pense différent des autres, qui préfère brûler la vie par les deux bouts pour surtout ne pas être comme les autres. L'argent facile, l'argent de la corruption, du crime, du délit... Je ne suis attendrie par aucun des personnages. Ils se valent tous à se croire immortel chacun se brûle les ailes.
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Nino dans la nuit

Ne vous fiez pas au premier chapitre. Il est sec, nerveux, percutant, magnifique. Ensuite l’histoire tourne en rond de galère en galère, de drogue en drogue – de la misère urbaine complaisamment décrite déjà lue des dizaines de fois, et l’écriture, qui fait mouche dans une phrase sur deux seulement, l’autre étant balourde ou incompréhensible, ne suffit pas à faire tenir le récit. Dommage.
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