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4.86/5 (sur 11 notes)

Nationalité : Iran
Né(e) à : Qom , le 07/10/1928
Mort(e) à : Téhéran , le 21/04/1980
Biographie :

Sohrab Sepehri est un des grands poètes iraniens du XXe siècle. Contemporain d’Ahmad Shamlou, Forough Farrokhzad et Nima Yushij, il est également connu pour ses peintures.

Sepehri a passé la première partie de sa vie à Kashan, qu'il considérait comme sa ville natale et à laquelle il a dédié le poème صداي پاي آب ("Les pas de l'eau"). Il était également un grand voyageur. Il a fait de nombreux voyages en Europe et en Afrique, a vécu un an aux États-Unis puis deux en France.

Les grands thèmes de son œuvre sont la nature, l'amitié et le sens de la vie.

C'est en hommage à Sepehri qu'Abbas Kiarostami a réalisé en 1987 "Où est la maison de mon ami ?" (Khané-yé doust kodjast ?), un film portant le titre d'un de ses poèmes.
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Bibliographie de Sohrab Sepehri   (5)Voir plus

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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
J'ai bâti une maison à l'autre bout de la nuit.
Ici, dans cette maison, je suis tout proche de l'anonymat humide de l'herbe.
J'entends le crépitement du souffle du jardin,
Le son de l'obscurité lorsqu'elle coule de la feuille,
Le grincement de la toux de la lumière derrière l'arbre,
L'éternuement de l'eau dans les fissures des pierres,
L'égouttement des hirondelles du plafond du printemps,
Le battement clair des fenêtres de la solitude qui s'ouvrent et se referment,
Le chuchotement pur de l'amour qui change mystérieusement de peau,
L'intense désir des hauteurs qui crépite dans l'aile,
Le crissement d'une fêlure qui raie la maîtrise de l'esprit.
J'entends marcher la passion,
Le piétinement inexorable du sang dans les veines,
La pulsation matinale des puits d'où s'envolent les pigeons.
La fièvre vespérale au cœur des Vendredis.
J'entends l'écoulement des œillets dans les méandres de la pensée,
Le hennissement clair de la Vérité au loin.
J'entends la vibration furtive de la matière.
Et l'usure des semelles de la foi dans la rue de l'extase.
Et le clapotement de la pluie :
Sur les paupières moites de l'amour,
Sur la musique triste de la puberté,
Sur le chant pourpre des grenadiers.
Et le tintamarre des vitres de la joie qui éclatent dans la nuit.
Et le déchirement du parchemin de la Beauté,
Et la pompe du vent qui emplit et qui vide le corps de l'Exil.
Je suis proche des origines de la terre.
Je tâte désormais le pouls des fleurs.
J'ausculte le destin fluide de l'eau, l'accoutumance verte de l'arbre.
Mon âme circule dans la vertu inédite des choses.
Mon âme est encore toute jeune,
Parfois, à force de désir, la toux la prend à la gorge.
Mon âme oisive vaque à l'accueil des choses :
Elle se met à compter les gouttes de pluie et les joints des briques.
Mon âme est aussi palpable qu'une pierre
Au bord du chemin
Je n'ai jamais vu la haine de deux peupliers.
Je n'ai jamais vu un saule vendre son ombre à la terre.
Et gratuitement l'orme offre sa branche aux corbeaux.
Partout où frémit une feuille, s'épanouit aussi le bourgeon de l'ardeur.
L'ivresse d'un pavot m'a baptisé déjà dans le vertige du devenir.
Telle l'aile de l'insecte je connais le poids de l'aube.
Tel un pot pour les fleurs je tends l'oreille au murmure de la croissance.
Telle une corbeille pleine de fruits j'assiste à la fièvre des métamorphoses.
Telle une taverne désolée je m'arrête à la frontière de l'ennui.
Et tel une maison au bord d'une plage,
Je contemple les flots qui m'invitent à leur cadence éternelle.
Du soleil tant que tu voudras ! de l'union tant que tu voudras ! De la profusion tant que tu voudras !
Je m'en tiens facilement à une pomme.
De même qu'au parfum d'une camomille.
Je me contente d'un miroir, d'un attachement pur.
Je ne ris pas quand éclate un ballon.
Je ne ris pas si une quelconque philosophie coupe la lune en deux.
Je connais le bruissement de l'aile des cailles.
La couleur du plumage des outardes, les traces de la foulée des chevreuils.
Je sais bien où poussent les rhubarbes, quand vient l'étourneau,
Quand chante la perdrix, quand meurt le faucon.
Je sais comment se lève la lune dans le rêve du désert.
Je connais la présence de la mort dans la tige du désir,
Et le plaisir au goût de framboise que procure l'étreinte charnelle
La vie est somme toute une habitude agréable.
La vie a des ailes aussi vastes que la mort,
Un essor vertigineux comme l'amour.
La vie n'est pas cette chose que nous oublions, toi et moi,
L'ayant égarée naguère dans la niche de l'habitude.
La vie est cette main tendue qui s'apprête à cueillir
Les premières figues noires dans la bouche acre de l'été,
La vision qu'offre l'arbre aux yeux multiples des insectes,
La sensation étrange qu'éprouvent les oiseaux migrateurs,
Le sifflement d'un train qui vire dans le rêve d'un pont,
La vie est reflet multiplié par le miroir,
Fleur "à la puissance de l'éternité",
Elle est : terre amplifiée par nos battements de cœur,
Géométrie simple et monotone de nos respirations.
Il faut laver nos yeux.
Il faut voir d'une autre manière.
Il faut purifier nos mots.
Il faut que le mot puisse lui-même devenir vent,
Puisse lui-même devenir pluie.
Il faut plier nos parapluies.
Il faut rester sous la pluie.
Il faut que pensée et mémoire en puissent être imprégnées.
Il faut suivre toute la ville à l'accueil de la pluie.
Voir son ami sous la pluie.
Chercher l'amour sous la pluie.
S'unir à une femme sous la pluie.
Se livrer au jeu sous la pluie.
Écrire, parler ou planter des volubilis sous la pluie.
La vie n'est qu'un baptême perpétuel.
Une ablution dans la vasque de l'éternel présent.
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La fleur de la faïence
     
La pluie de lumière
s'infiltrant à travers le grillage du long couloir
lavait une fleur murale sur la faïence.
La tige de cette fleur comme un serpent noir
s'animait dans une danse douce et tendre,
comme si la substance brûlante de la danse
était versée dans sa gorge.
La fleur de la faïence était vivante
dans un monde mystérieux,
le monde infini du bleu.
     
Enfant,
partout où je cherchais au hasard
quelque chose d'inconnu
sur la courbe du plafond des terrasses,
sur les vitraux des fenêtres
ou parmi les taches sur les murs,
je voyais un semblable de cette fleur
et chaque fois que je voulais la cueillir
mon rêve se brisait.

Mon regard était attiré
par la texture noire de la tige
et je sentais la chaleur de ses veines :
toute ma vie était versée
dans la gorge de la fleur de la faïence.
Elle vivait une autre vie.
     
Elle qui avait poussé
sur la terre de tous mes rêves,
connaissait-elle l'enfant d'autrefois,
où était-ce moi seul qui était entré en elle
et perdu en elle?
     
Mon regard se fixait sur la peau fragile de la tige.
Il ne pouvait que s'accrocher à la tige.
Comment pouvais-je cueillir une fleur
qu'un songe faisait périr?
La main de mon ombre s'approcha de la fleur.
Le coeur bleu de la faïence se mit à battre.
La pluie de lumières s'arrêta : mon rêve s'effeuilla.
     
     
Livre II : « La Vie des rêves », traduit du persan par Jâlal Alavinia - pp. 53-54
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Ô respect que procure la blancheur immaculée du papier
Le pouls de nos lettres bat
en l'absence même de l'encre
du calligraphe.
Dans la pensée du présent
l'attrait de la forme s'évanouit.

Il faut fermer les livres.
Il faut se dresser
Et marcher sur le prolongement de l'Heure.
Il faut contempler les fleurs,
Prêter l'oreille au silence du mystère,
Courir jusqu'au fin fond de l'Etre.
Il faut répondre à l'appel parfumé de la terre du Néant.
Et atteindre le lieu où se rencontrent l'arbre et Dieu.
Il faut s'asseoir
au seuil de l'Expansion mystique
quelque part entre l'Extase et le
Dévoilement.
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La nuit de l'harmonie
     
Les lèvres tremblent, la nuit palpite,
la forêt respire, que crains-tu?
Promène-moi dans la nuit de tes bras!
Je touche tes doigts nocturnes,
et le vent défeuille le coquelicot lointain.
Tu regardes le toit de la forêt : les étoiles
se précipitent dans l'eau de tes yeux.
Sans larmes, tes yeux sont inachevés,
et l'humidité de la forêt est insuffisante.
Tu ouvres tes bras, le noeud de l'obscurité se défait.
Tu souris et le fil du mystère tremble.
Tu regardes et la plénitude de ton visage surprend!
Suivons la route de l'union.
Les reptiles dorment. La porte de l'éternité s'ouvre.
Ensoleillons!
Laissons les yeux,
car le clair de lune de la familiarité a brillé.
Oublions les lèvres, car la voix est inopportune.
Abreuvons de notre source le rêve des arbres,
car la splendeur de croître nous traverse.
Le vent souffle, la nuit cesse de couler,
la forêt cesse de palpiter.
Nous nous entendons
le jaillissement de la larme d'harmonie,
et la sève des plantes coule vers l'éternité.
     
     
Livre III : « Avalanche du soleil », traduit du persan par Jâlal Alavinia - p. 86
(Note : "Ensoleillons" traduit âftâbi chodan, qui peut signifier ensoleiller et se manifester).
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Allons donc vers la mer,
Jetons-y un filet.
Extrayons-en la fraîcheur.
Enlevons de la plage un grain de sable,
Palpons grâce à ce geste
Le poids frêle d l'existence.
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Pas de nuages.
Pas de vent.
Je m'assieds au bord du bassin :
Jeu frétillant des poissons, lumière, fleurs, eau, reflet de moi-même;
Éclat virginal de la grappe de vie...
Ciel sans taches, pétunias lavés de pluie.
Salut imminent : accroché aux fleurs du jardin.
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Refusons le livre où ne souffle aucun vent,
Le livre où la rosée ne distille point de fraîcheur,
Là où la vie reste fermée à l'espace des visions.
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Dans l'art il ya tellement de choses qui se pétrifient. Moi, je me cache toujours dans le vide de mes peintures. Ma voix est plus audible là-bas. Dans le vide, le regard n'arrête pas de s'envoler. Mais les espaces pleins sont des îles flottantes. Le regard s'y pose. Dans le vide, les chosent semblent ne pas avoir encore pris forme, il y a toujours la passion de créer. Tout ce qui est construit a un effet de froideur. Toutes les peintures du monde entier rassemblées ne sont pas aussi vraies qu'une pierre au bord de la route. J'aimais leur beauté ne peut égaler celle des doigts d'une main qui tremble.
Dans la création artistique la beauté et la vérité ont cessé de vibrer et se sont pétrifiées.
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Sohrab Sepehri
Où est la maison de l’ami ?
"C’était l’aube, lorsque le cavalier demanda :
« Où est la maison de l’ami ? »
Le ciel fit une pause.
Le passant confia le rameau de lumière
qu’il tenait aux lèvres
à l’obscurité du sable.
Il montra du doigt un peuplier et dit :
« Un peu avent l’arbre,
il y a une venelle
plus verte que le rêve de Dieu,
où l’amour est aussi bleu
que les plumes de la sincérité.
Tu vas au bout de la ruelle
qui se trouve derrière la maturité,
puis tu tournes vers la fleur de la solitude.
A deux pas de la fleur,
tu t’arrêtes au pied de la fontaine éternelle
des mythes de la terre,
et tu es envahi par une peur transparente.
Tu entends un froissement
Dans l’intimité fluide de l’espace :
Tu vois un enfant
perché sur un grand pin
pour attraper un poussin
dans le nid de la lumière,
tu lui demandes :
« Où est la maison de l’ami ? »"
Sohrab Sepehri
Comme A Golestâneh, L’adresse ou comme le traduit Alaviniâ Où est la maison de l’ami ? fait partie du recueil Hadjm-e sabz (Volume vert). Ce poème comporte de nombreuses références à la spiritualité et au mysticisme. Malheureusement, le traducteur l’a traduit tel quel sans donner au lecteur les éléments permettant la compréhension de cette dimension. Il a seulement changé le titre du poème et lui a donné le titre du film d’Abbâs Kiarostami qui s’est inspiré de ce poème.
Ce poème traite de la recherche de Dieu, l’Ami, en passant par les sept lieux mystiques. Les sept éléments de la recherche ont donc tous un sens mystique : le peuplier, la venelle, la fleur de la solitude, la fontaine éternelle des mythes de la terre, l’intimité fluide de l’espace, l’enfant et le nid de lumière. Le vert a également une connotation spirituelle particulière en islam et en Iran, mais cet aspect est également laissé sous silence par le traducteur.
Sohrâb Sepehri commence son poème avec « Où est la maison de l’ami ? » et le termine par la même phrase : il évoque ainsi un cercle, un aller-retour du moi au moi. Nous sommes donc ici en présence d’un mouvement circulaire, évoquant la nécessité de chercher Dieu en soi.
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Que de caresses ne verse-t-elle pas, cette lumière
Qui rêve dans le bol de cuivre !
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