Qu’est-ce qui l’attirait autant chez cet homme ? Pourquoi lui faisait-il perdre à ce point la maîtrise de ses sentiments ? Depuis l’adolescence et les déboires avec sa tante, il s’était juré de ne plus jamais succomber aux flèches de cupidon. Cette fois c’était raté, il avait bel et bien été touché en plein cœur. Il se sentait faible et en était contrarié.
Des nuages de plus en plus gris s’amoncelaient au-dessus de sa tête. Le vent soufflait, enflant les vagues qui, en grossissant, faisaient tanguer le bateau de droite et de gauche, renversant les verres et provoquant un désagréable mal de mer aux personnes trop sensibles. Une pluie abondante, intrusive, soudaine, vint s’immiscer impudemment sur les transats, les serviettes, les habits, mouillant les corps, les cœurs, les ponts, faisant crier, courir et glisser toutes ces amusantes marionnettes vivantes et agitées, mues brusquement par les fils invisibles du temps. Seul David, imperturbable, poursuivait sa course effrénée, à la recherche de son homme de cœur. Il avait un mauvais pressentiment, il y avait urgence, il fallait qu’il le retrouve coûte que coûte et qu’il lui avoue son amour.
Au mur du salon, un tableau était suspendu qui appartenait à Éva. C’était un cadeau que lui avait offert sa mère dans un bon jour, qui le tenait elle-même de son arrière-grand-mère. Il représentait un soleil couchant sur une rivière qui tombait dans un lac. […] Sur la gauche, comme reliant la terre et le ciel, un étrange cylindre creux se dressait de façon presque indécente et envahissait l’espace. Un rayon de soleil le frappait en plein coeur et le remplissait afin d’irradier le sol d’une chaleur et d’une énergie concentrées, presque surnaturelles. Ce cylindre demeurait une énigme pour Éva. […]
Mais ce soir, le tableau semblait s’être assombri. Le rayon venant du ciel et pénétrant dans le cylindre avait pris une couleur violet sombre avec des reflets verts. C’était vraiment étrange.
Tu dis que tu n'as plus rien à attendre de la vie, mais t'es-tu demandé ce que la vie attend de toi !!!
Cela faisait bientôt quatre mois déjà que Flora était là. Elle était maintenant un symbole idéal et particulièrement actif de la secte du Bâton doré. Elle avait développé un amour inconditionnel et une admiration sans limites pour Masha, le grand Maître, de qui elle était devenue la dixième épouse et l’adepte la plus fervente. Malgré le despotisme, la mégalomanie et les accès de fureur paroxystique de ce dernier, Flora avait abdiqué sa personnalité propre, […] était devenue un modèle de vertu et une femme parfaitement soumise. Mais aujourd’hui, Flora se sentait mal.
— Mais oui, ma chère Mélo. Il suffisait de demander ! Je me suis laissé aller à vouloir égoïstement tout regarder, mais tu sais bien que je ferai tout pour toi.
Une rougeur indécente envahit le visage de Melinda. Elle était gênée par ces récentes marques d’affection du jeune homme. Elle sentait confusément qu’une dimension nouvelle s’installait entre eux. Serait-elle due à trop de rires, trop de temps, trop de complicité ?
N'est-il pas un coin sur la terre
Pour reposer nos corps meurtris
et nos coeurs endoloris ?
N'est-il pas un coin sur la terre
pour apaiser nos âmes tourmentées
et nos yeux fatigués
de voir tant de douleurs et de larmes
reposer nos mains lasses de porter des armes
N'est il pas un coin sur la terre ?...
Prologue
L'Envol
Je m'envole à présent. Je ne sais pas quand le sol va venir m'écraser, mais en attendant je me sens libérée, pour la première fois de ma vie.