Sophie Marvaud

Les hommes politiques adorent faire des promesses. Ils aiment moins les tenir !

Inquiet, le commerçant tentait d'avancer plus vite ; en vain. Devant lui, la végétation formait un fouillis où il avait peine à se frayer un chemin. Quand il croyait pouvoir se glisser dans un espace plus large entre les chênes et les noisetiers, son gros sac était retenu par le bras d'une ronce. Impatient, il se blessait les doigts en l'arrachant de la toile. Après chaque obstacle, il retrouvait sa direction : plein sud, à l'opposé de la face moussue des arbres. Heureusement qu'il avait ce repère, car le temps était brumeux. Malgré l'arrêt de la pluie, impossible de savoir de quel côté se trouvait le soleil.

L'esprit du vent s'amuse parfois à souffler sur les étincelles allumées par les humains, pour voir ce qui va se passer. Le rôle des chamanes dignes de ce nom est alors de détourner l'attention des Esprits, d'apaiser les humains et de réparer les dégâts. Et non de rendre les choses encore plus difficiles.

Comme ça arrangeait les hommes que les femmes soient soumises et faibles ! Ainsi, dans toutes les couches de la société, ils gardaient leurs pleins pouvoirs sur elles, ils pouvaient se faire servir, où bien apparaître en sauveurs de ces dames …

Arrivant indemne au pied de la colline de sable, Licorne-la-Puissante traversa l'étroite bande de plage et atteignit le bord de l'eau. Les rouleaux explosaient à deux bras de distance, les vagues sifflaient jusqu'à ses pieds, elle venaient enserrer ses chevilles et menaçaient de la renverser... Ce devait être pour la taquiner. L'océan n'aurait eu aucun mal à l'emporter s'il l'avait voulu.
Elle se tourna vers les Quatre-Encoches et leur fit de grands signe : l'océan du Bout-du-Monde les acceptait dans son domaine !

Au cours de son existence, elle avait entendu parler, une fois, d'un homme qui en avait tué un autre. Le meurtrier était un chasseur incapable qui laissait le gibier s'échapper. Son frère, qui ne ratait jamais sa cible, prenait un grand plaisir à se moquer de lui. Il l'avait surnommé : « tête-de-renne », car cet animal était réputé pour sa bêtise : il tombait dans tous les pièges.

Grâce aux puissants pouvoirs des Étoiles d'Eau, Valtor va se débarrasser de moi pour toujours. Mais Stella, Flora, Musa, Tecna et Layla se placent autour de lui.

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A voix basse, Cléo demande à son meilleur ami :
- Tu crois que c'est ça qui rendra le fantôme de Grand Cerf Rouge tellement malheureux ? D'avoir un jour envoyé ce maigrichon à la chasse ?

Vasco bondit sur ses pieds.
-Je refuse ta démission ! A-t-on jamais vu, à la VOC ou ailleurs, meilleur capitaine, au jugement fiable dans les tourments, à la main sûre dans les tempêtes ? Qu'est-ce qu'on aurait fait sans toi au milieu des montagnes de glace de Patagonie ? Sous l'attaque des guerriers de l'île inconnue ? Et chaque jour où nous n'avions à nous partager que d'infâmes biscuits de mer et de l'eau pourrie ? Tu crois peut-être qu'avec un autre que toi l'équipage nous aurait suivis aussi longtemps dans nos folles aventures ? Et qu'après s'être mutiné, il serait rentré si facilement dans le rang ?
Les yeux gris-bleu de Hans Michielszoon se mirent à briller d'un éclat nouveau, humide et doux.
-Merci, Vasco, dit-il simplement en replaçant son chapeau sur sa tête.

-J'ai été la victime d'une injustice presque impossible à croire. Un élève de mon père m'a violée, et c'est moi qu'on a soumise à la question. Une fois que les juges ont été convaincus de sa culpabilité, ils ne l'ont condamné à rien d'autre qu'à m'épouser. Tandis que moi, on m'interdisait de continuer à peindre. Qu'est-ce qui peut justifier qu'on puisse briser ainsi la vie d'une femme sans que cela gêne personne ?

Ma chère Suzie,

Je hais l'idée de me battre ! Comment l'Eglise ose-t-elle parler d'une guerre juste ? Comment une guerre peut-elle être juste quand de pauvres gars s’entre tuent ?

Le pire, ce n'est pas de mourir. Le pire, c'est d'interrompre sa vie, comme ça, à vingt ans à peine, non pas pour sauver d'autres vies, mais au contraire pour participer à un massacre général. Suzie, je ne crois plus en Dieu qui a crée ces monstres que sont les hommes. Et sans Dieu, pas résurrection ni de paradis... Oh, Suzie, l'idée de vous perdre pour l'éternité m'est insupportable !
Alors vous avez gagné votre pari, je ferai tout mon possible pour survivre à cette maladie guerre, vous serrez à nouveau cintre moi (quel bonheur inimaginable !) vous épousez, et vivre de longues et nombreuses années près de vous.

Les feuillages des arbres prirent les teintes éclatantes des fleurs. Avec ces rouges et ces jaunes vifs, les Esprits voulaient consoler les humains du racourcissement des jours et de l'affaiblissement du soleil.

-Apollonio, où es-tu ? répéta William.
-Je ne sais pas.
-Parle-moi. Je vais me guider à ta voix.
-Je suis par là, William.
-Encore.
-Je ne veux pas mourir. Je veux peindre. Je veux ...
Je me retins de justesse. J'avais failli dire : " Je veux aimer. "
[...]
Une main saisit mon épaule.
-Apollonio ?
-Oui, William, c'est moi.
-Prends-moi dans tes bras, mon ami. J'ai peur de mourir.
J'eus une dernière hésitation. Et puis, je le serrai contre moi.

Les blocs de granit plantés dans le sable avaient été transportés là où Joli-Coffre l'avait ordonné; c'est ainsi qu'avaient été constitués les premiers alignements de géants. Ces silhouettes impressionnantes n'étaient pas seulement chargées d'éclairer et d'encadrer les voyageurs. Elles devaient les protéger des âmes errantes, comme celle de Pas-de-Géant. Grâce à leur massivité inébranlable, elles étaient chargées de s'opposer à la force mystérieuse, monstrueuse, molle et brutale à la fois de l'Océan tout proche. Le vent, la pluie, les tempêtes, les orages, rien n'ébranlerait les pierres de granit. Les longues files spectaculaires souligneraient lq suprématie des Cultivateurs tout au long de l'année.

Puissance-de-Licorne pensa avec compassion à la femelle géante qui luttait pour sauver son petit. Bien que les Esprits aient des pouvoirs invraisemblables, ils étaient sans pitié. Ils s'en prenaient de préférence aux plus faibles, y compris chez les humains. Voilà pourquoi ces derniers choisissaient pour leurs enfants des noms légers, ceux d'oiseaux, vite aperçus, vite enfuis: Iranie, Guillemot, Courlis, Fuligule, Marouette. Ils ne voulaient pas attirer l'attention sur eux en révélant à quel point ils les chérissaient. A ceux qui survivaient jusqu'à l'âge adulte, la chamane trouvait une appellation évocatrice de leur caractère, et qui les plaçait sous la protection d'un animal vigoureux.

Dans une autre vie, Suzie, une vie normale, une vie sans guerre, tout aurait été simple. Je vous aurais épousée, parce que je vous aime. Mais je suis un homme détruit. Mes trois frères ont été tués, et je ne serais pas étonné que ma mère décède bientôt de chagrin. Quant à moi, je ne suis qu’en sursis. Dans un mois, je pars à mon tour dans les tranchées. Je sais que je vais mourir en atteignant mes vingt ans, car il n’y a plus en moi ce ressort vital qui permet de se battre.

- Sauf si ce chat... est l'authentique propriétaire du château ! Si c'est un humain transformé ! Par exemple, Mme de Bellevue qui aurait subi un sort...
J'ai vu Tristan pâlir mais Sophia s'est moquée de moi.
- La chatte bottée ? Qui attend le baiser d'un Sébastien Martin pour retrouver sa véritable apparence ?

Les Esprits, qui devaient se faire discrets sur les terres des Cultivateurs, gardaient toute leur force là où la liberté existait pour les plantes, les animaux et les humains, là où la terre était nourricière à sa façon, là où la pluie et le soleil se succédaient sans être implorés sans cesse, là où les humains écoutaient la nature au lieu de vouloir lui imposer sa loi.

Les Nomades grignotèrent avec curiosité des petits poissons grillés trempés dans des sauces diverses – une spécialité des Pêcheurs qui les laissait sur leur faim. Ces derniers se régalèrent d’énormes morceaux de sangliers rôtis – une spécialité nomade qui avait le défaut de les rassasier trop vite.

-Justement ... Jeunes gens, voilà pour vous une occasion exceptionnelle d'exercer vos talents !
Alonso fit retentir les cordes de son instruments en un accord bref et triomphal.
-La Compagnie des Indes orientales nous confie, à nous, messieurs, l'exploration du sud du Pacifique. Notre mission est de localiser le continent qui s'y cache. Nous serons les premiers Européens à y mettre le pied ! [...] Là-bas, tous ensemble, nous récolterons gloire et fortune !
Paul poussa un cri, Jacob s'étouffa avec son vin, la main d'Alonso dérailla sur ses cordes.
Dans le regard de William et Francis [...] je vis qu'ils évaluaient nos chances de succès face aux dangers de l'entreprise, et que la balance ne penchait pas du bon côté.