Chris rit avec son nouvel ami. Après quelques tournées de plus, d’eau, de Cosmo, et d’une agréable conversation, Chris demanda à Colton où étaient les toilettes et ils s’y dirigèrent. Plus d’une fois, Chris dut soutenir Colton, les Cosmos exerçant leur magie, transformant ses jambes en gelée. Quand Chris se lava les mains, il remarqua une pile de flyers sur le comptoir. Il en attrapa un, le survola puis se tourna vers Colton.
— Quel est cet endroit ? Tu le connais ? demanda-t-il.
— Ah oui, En Mâle d’Amour, le summum du porno gay.
Colton chantait en quelque sorte les mots au lieu de les exprimer.
— J’y ai pensé une fois, ça rapporte bien, mais j’ai cette peur de parler en public, alors je ne crois pas que je pourrais être devant la caméra, encore moins avoir des relations sexuelles devant ladite caméra. Seigneur, mais les modèles sur ce site sont S.E.X… double Y… SEXY !
Colton s’éventa de la main et Chris éclata de rire.
Une main sur son épaule fit sursauter Frank et il bondit, lançant un juron que Valerie aurait certainement accueilli avec un regard noir.
— Doucement, vieil homme.
Taylor lui souriait.
Ouvrant la portière de la voiture, ce qui fit reculer Taylor de quelques mètres, Frank lui jeta un regard furieux.
— Va te faire voir gamin.
Le commentaire était risible, car Taylor se dressait maintenant à 1m90 et était tout en muscles et en courbes. C’était quoi ce bordel ? Frank essaya de déplacer les pensées dans son cerveau et de comprendre pourquoi il regardait Taylor d’assez près pour remarquer sa silhouette. Se faufilant devant lui, Frank détourna son regard et rit, espérant que son rire ne paraisse pas aussi hystérique à Taylor qu’il ne le paraissait à ses propres oreilles.
Il venait juste d’ouvrir le coffre quand un crissement de pneus, le grondement d’un moteur, et un klaxon à rendre sourd déchira l’air.
— Caleb, oh Dieu merci, murmura Frank.
— Hein ? demanda Taylor.
— J’ai dit, déchargeons la voiture.
Billy Scranton était le petit-fils du couple qui possédait le cottage voisin. C’était aussi le premier béguin de Taylor. Frank le savait parce qu’il était celui auquel Taylor s’était confié lorsqu’il essayait de comprendre ses émotions, ses sentiments pour le garçon d’à côté. Mais c’était quand même submergeant pour un enfant de quatorze ans d’être attiré par quelqu’un. Frank était certain que nonobstant si c’était un autre homme ou une fille, Taylor aurait été confus par les changements que son corps subissait. La puberté seule était déjà assez mauvaise. Ajoutez à cela un amour juvénile et une attirance sexuelle et c’était plus comme si vous vous faufiliez à travers un champ de mines. À l’époque, Frank était encore dans sa vingtaine et vraisemblablement, survivait toujours à sa propre puberté. Il avait pu s’identifier à tout ce que Taylor ressentait à l’époque.
Une fois Taylor en âge de vraiment comprendre le concept de l’homosexualité versus hétérosexualité, il s’était senti désolé pour toutes les personnes qui étaient rejetées par leur famille, ridiculisées par leurs pairs. Il était sorti de son placard inexistant à quatorze ans un soir au cours d’un dîner alors que Valerie lui avait innocemment demandé s’il y avait des filles à l’école qui pourraient l’intéresser.
— Beurk, non ! Je n’aime pas les filles. J’aime les garçons, comme Frank, avait déclaré Taylor sans ambages.
— Vois-tu comment ton corps me répond, Frank ? C’est parce que tu m’appartiens, Frankie. Fais tout ce que tu as à faire pour que ton cerveau en prenne conscience, parce qu’à partir d’aujourd’hui, je n’irai nulle part sans toi.
Et elle était là. La promesse d’éternité et Frank sut sans l’ombre d’un doute que c’était juste, que Taylor avait raison. Il lui appartenait et c’était le cas depuis longtemps.