Citations de Tahar Ben Jelloun (1756)
La réalité de l’imaginaire maghrébin est fabuleuse ; elle est plus forte et parfois plus folle que la fiction.
❝ Une bibliothèque est une chambre d'amis. ❞
C'est dans l'absence qu'on découvre l'intensité de l'amour ou ses ravages.
Elle s'ennuyait beaucoup et, puisque personne dans sa famille ne lui manifestait de la tendresse, elle sombrait dans une espèce de mélancolie pitoyable où elle cernait son être. Sacrifiée et lasse, elle était une petite chose déposée par l'erreur ou la malédiction sur la monotonie quotidienne d'une vie étroite.
La paresse est nécessaire. Elle est même recommandée dans le but de reposer l’esprit et aussi d’entrer dans une belle lenteur . Elle a les mêmes vertus que la sieste. Prendre le temps de ne rien faire, apprendre à méditer, reconsidérer les choses tout en faisant une pause.
Le mur
habillé de chaux
compte les jours captifs de ses pierres
avec pudeur
voile la misère et la main qui se lève
Que serait Tanger sans le vent d'Est, qui lave les rues et les regards, qui nettoie l'air des moustiques et autres mouches du Sud, qui donne la migraine et dérange l'ordre des choses?
Des vers naïfs, bien tristes. Ils tombent en syllabes mangées par la rouille, rongées par l'humidité. Ils disent que la vie est une illusion, que le rêve est une arnaque, que les hommes sont des crabes et les femmes des jarres. Ils décrivent un morceau de pain rassis devenu verdâtre, une figue sèche pleine de vers blancs, une main couverte de fourmis noires.
Si c'était un film, il serait en noir et blanc avec des séquences où la nuit dénonce les magouilles du jour.
Il est des rencontres dont on se passerait. Non parce qu'elles arrivent au mauvais moment ou nous mettent aux prises avec des personnes sans intérêt, mais parce qu'elles sont de l'étoffe dont sont faits nos cauchemars, nos déprimes et aussi notre douleur. Aussi vaut-il mieux ne pas s'y attarder, ne pas les décrire ni leur accorder d'importance.
Son existence était de plus en plus tournée vers la spiritualité. Elle profitait de ses cours pour faire l'éloge de l'Esprit et surtout prôner un islam de paix. Mourad comblait sa femme de cadeaux. Elle les acceptait presque à contrecœur, affirmant que les biens matériels n'étaient que la poussière de la vie.
J’en étais arrivée à souhaiter l’amnésie, ou brûler mes souvenirs les uns après les autres, ou alors les rassembler tel un tas de bois mort, les ficeler avec un fil transparent, ou mieux les envelopper d’une toile d’araignée, et m’en débarrasser sur la place du marché. Les vendre pour un peu d’oubli, pour un peu de paix et de silence. Si personne n’en veut, les abandonner comme des bagages égarés.
« La violence de mon pays est aussi dans ces yeux fermés, dans ces regards détournés, dans ces silences faits plus de résignation que d’indifférence. »
La rupture avec le passé n’était pas facile. Alors elle inventait ces espaces blancs où d’une main elle lançait des images folles et de l’autre les habillait du goût de la vie, celle dont elle rêvait.
Je dis que je l’habite mais à bien réfléchir c’est la solitude, avec ses effrois, ses silences pesants et ses vides envahissants, qui m’a élu comme territoire, comme demeure paisible où le bonheur a le goût de la mort.
Ô mes compagnons, notre histoire n’est qu’à son début, et déjà le vertige des mots me racle la peau et assèche ma langue. Je n’ai plus de salive et mes os sont fatigués. Nous sommes tous victimes de notre folie enfouie dans les tranchées du désir qu’il ne faut surtout pas nommer. Méfions-nous de convoquer les ombres confuses de l’ange, celui qui porte deux visages et qui habite nos fantaisies. Visage du soleil immobile. Visage de la lune meurtrière. L’ange bascule de l’un à l’autre selon la vie que nous dansons sur un fil invisible.
Ce sont les histoires qui viennent à moi, m’habitent et me transforment. J’ai besoin de les sortir de mon corps pour libérer des cases trop chargées et recevoir de nouvelles histoires.
Tu connais l'histoire du naïf qui a cuisiné un plat très raffiné au gingembre et l'a offert à l'âne. Celui-ci l'a avalé comme si c'était une poignée de foin. C'est de là qu'est venu le dicton : "Que comprend l'âne au gingembre ?" Le trésor, le tien, tu l'as eu entre les mains et tu l'as saccagé ! Aujourd'hui, ton homme n'est plus un poète. C'est un scribe, en lui tout est éteint, son âme comme la lumière de ses yeux? C'est un héros : il a défié tout le monde et a voulu concilier l'inconciliable. Il n'est pas le premier à avoir voulu réunir deux univers faits pour s'opposer. C'est un poète et un conteur. C'est sa folie qui m'a le plus rapproché de lui. Sa folie et sa douleur. Adieu, petite fille qui as grandi quand il fallait être enfant et qui t'es comportée comme une gamine quand il fallait être adulte. Adieu, je t'aimais bien. j'aimais ton courage, ton obstination, ton imagination et tes rêves ! Prends à présent le temps de réfléchir et d'agir."
Ta ligne de vie et ta ligne de chance se crisent en un lieu où la ligne de santé marque un peu d'inquiétude.
A quinze ans, on ne pense pas à la vie ; on aime rêver, construire des monuments avec de la soie ou de la mousseline, puis tout brûler pour recommencer le lendemain.