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Citation de enkidu_


Depuis l’effondrement du califat (khilâfa), qui symbolisait l’unité politico-religieuse de l’empire musulman, et à cause des séquelles profondes laissées par le colonialisme occidental des XIXe et XXe siècles, le monde musulman a perdu son astrolabe dans cette tempête de l’histoire moderne. Une double rupture caractérisera désormais la situation musulmane : une rupture brutale avec l’héritage historique musulman(1) et une rupture énorme par rapport à la civilisation occidentale dominante d’une part et même par rapport aux civilisations montantes d’Extrême-Orient (notamment la Chine et l’Inde), d’autre part. Cette situation met l’univers musulman dans un double bind généralisé.

La communauté musulmane d'Europe, encore marquée par ses origines ethniques, anthropologiques et culturelles, présente aux yeux de l'Occident un foyer favorable à toutes les dérives, car elle est encore liée à un monde musulman où le retour au religieux s’effectue avec beaucoup d'effervescence incontrôlable et où la religiosité se construit souvent dans une logique de réaction.

(1) L’élite intellectuelle musulmane, plus ou moins « sécularisée », éprouve elle-même, à certains égards, une grande difficulté à lire l’histoire et l’héritage colossal de la pensée musulmane. La rupture est épistémologique. Elle s’explique par une rupture littéraire, linguistique et sémantique. En effet, l’accès à la bibliothèque musulmane qui contient ce patrimoine intellectuel multiforme (théologique, juridique, littéraire, philosophique, scientifique…), exige une grande compétence linguistique classique – entre autres – qui fait défaut chez des intellectuels musulmans généralement « occidentalisés ». Les livres qui renferment ce savoir restent illisibles, hormis pour une poignée de spécialistes. Ils les lisent, quand ils les lisent, à travers le prisme d’un paradigme occidental dominant, issu d’une histoire particulière. Ceci, entre autres raisons, empêche le progrès ou le renouvellement de la pensée musulmane à partir de son paradigme propre, de ses racines et de son histoire, alors que c’est le seul moyen pour mieux s’ouvrir sur le monde moderne et intégrer adéquatement et éclectiquement la pensée occidentale, elle-même polymorphe. (pp. 25-26)
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