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Critiques de Tchinguiz Aïtmatov (96)
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La pluie blanche et Autres nouvelles

Tchinghiz Aïtmatov est kirghize. Son grand-père était un berger nomade et son père - haut-fonctionnaire - a été exécuté en 1938 pendant les Grandes Purges staliniennes alors que lui-même n'a que dix ans. Pendant la guerre, il travaille dans les champs. Viendront des études d'agronomie, puis il se tourne vers des traductions littéraires et se met à l'écriture également.



Pourquoi est-ce que je vous dresse une biographie très exhaustive de cet écrivain ? Parce qu'en connaissant, ne serait-ce que ce très peu de sa vie, on comprend et on saisit davantage la teneur et l'implication des thèmes de ses écrits. Ce qui est tout particulièrement vrai pour ce recueil de nouvelles.







Chaque texte de ce livre parle de sentiments forts : de l'affection filiale comme partie intrinsèque de l'âme, de l'amour qui n'est pas partagé et qui brise celui qui en est exclu, du sentiment de perte, du manque quand celui qui devrait accompagner, celui qui devrait être a péri.



Ces nouvelles sont un reflet d'une existence dans cette république misérable, vécue par un peuple attaché à ses traditions et pour lesquelles les récits oniriques, les rêves, les chants, les mythes sont restés, malgré le poids des conditions de vie, une part intime de l'identité.

La description des paysages, des steppes à perte de vue crée une nature changeante et riche en nuances, parfois violente. La vie quotidienne au pas des bêtes, liée à leur sort dit le labeur, mais également le travail communautaire, la solidarité qui habite les actes. Une vie tout en écoute des éléments, tout en regard des saisons, en quête d'une harmonie à laquelle s'accrocher quoiqu'il advienne.



Deux des nouvelles m'ont paru particulièrement poignantes : deux textes qui disent avec une immense sensibilité le sentiment de l'absence.

L'absence du père pour le petit garçon - dans "Le fils du soldat" - qui prend soudain conscience en visionnant un documentaire cinématographique, que son père, mort à la guerre, n'est plus et que l'abîme qui se crée, après cette révélation ne peut être comblé et fait naître en lui des sentiments dont il n'avait jamais éprouvé la douleur et l'étouffement.

Tout comme la détresse de ce père - dans "Rendez-vous avec le fils" - qui souhaite, une dernière fois, marcher dans les pas de son fils que la guerre a emporté et le faire revivre parce qu'il a décidé qu'il en avait le droit et peut-être aussi le pouvoir.





Dans une communauté oubliée et niée par le Pouvoir pendant très longtemps, exploitée, vivant de peu, cette exaltation des valeurs humaines et cet attachement aux principes transmis par les aïeux nomades donnent à découvrir la steppe comme une terre de légendes et de superstition vibrant aux couleurs des feuillages qui varient au fil des mois, au mouvement perpétuel et indompté des nuages, à la lueur du scintillement évanescent des étoiles.

Une abnégation, tout en humanisme qui force le respect, tisse les phrases de ce très beau recueil.





"La journée était chaude et paisible. C'était cette période de l'automne où l'air va se refroidir d'un jour à l'autre, mais les journées, comme un signe d'adieu, sont d'une luminosité et d'une pureté exceptionnelle."
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Adieu Goulsary

"... et le reste est la rouille et la poussière d'étoile."

(V. Nabokov)



Mon chemin vers Aïtmatov a été long, et ses livres se couvraient lentement de poussière dans la bibliothèque paternelle.

Lauréat du "Prix Lénine", sur lequel les critiques littéraires chantent les mélodies orphéennes, et cette histoire d'amitié d'un vieil homme et d'un cheval, considérée comme son Olympe littéraire... Bref, longtemps je me disais que ça ne vaudra même pas une taffe de la "papirosa Belomorkanal" éventée.

Tchinguiz, ami, je me repens !



Kirghizistan...

Le pays où les divinités terrifiantes vous regardent depuis les hauteurs des montagnes, et où la misère est la même qu'il y a cent ans. Les petits bergers y chantent des chansons sur le passé et sur la liberté avec une étrange voix de gorge, et à travers la surface d'Yssyk-Koul on peut apercevoir le centre de la Terre.



C'est dans ce monde-là, que Tanabaï Bekasov revient après la guerre, pour s'occuper de chevaux dans la montagne.

Et il rencontre Goulsary : un cheval doré, rond comme une miche de pain, pour lequel n'importe quel cavalier aguerri se laisserait mettre en pièces pendant le buzkashi. L'équidé qui marche si droit, que si on mettait un bac d'eau sur son dos, pas une seule goutte ne tomberait à côté. Personne à part Tanabaï n'a le droit de monter Goulsary.

Mais le cheval est confisqué dans la plus joyeuse camaraderie par le chef de kolkhoze, et le vieil homme reste seul. Il a bien femme et enfants, mais une partie de sa vie a disparu au loin, sur le dos de Goulsary.



L'enfer de la collectivisation, l'absurdité du régime qui veut faire croire que les poires poussent sur les pommiers - tout ça c'est du pain trop dur à avaler même pour les hommes forts de la trempe de Tanabaï. Le moulin de l'époque a happé l'homme et son cheval, broyé coeur, cerveau et muscles, pour n'en laisser que des os.



Le temps passe, et Tanabaï voit le chef de kolkhoze :

" On t'a trouvé un cheval, vieux. Ses meilleures années sont passées, mais pour ton travail il est encore bon."

Tanabaï revoit Goulsary, et son coeur tremble de tristesse :

" Tu vois, nous sommes à nouveau ensemble, à nouveau nous marcherons côte à côte..."

Mais sur le chemin de retour, Tanabaï va comprendre que Goulsary est si usé qu'il ne finira jamais le trajet.



Aïtmatov est très critique envers le pays où il a vécu; le pays qui savait détruire ses gens comme aucun autre. Même si on avait peut-être tendance à les mettre tous dans le même sac, en tant que "Soviets".

C'est une histoire de deux amis qui courent au devant vers la liberté. Le sous-ton est incroyablement mythique, comme si on lisait une vieille légende. La mort de Goulsary n'est pas seulement la mort d'un animal; elle met fin à la jeunesse, au bonheur et à l'espoir. Le meilleur est parti, celui qui à autrefois représenté le jour comme la nuit.

Ce n'était pas un "au revoir" ordinaire, mais un dernier "adieu" à quelqu'un qui avait toute notre âme. Sans espoir d'une autre rencontre, sauf au Ciel ou dans l'Enfer, si toutefois ils existent...

Adieu cheval doré, adieu la vie, adieu Goulsary. Прощай.



Il n'y a pas longtemps, je me demandais ce que je vais lire après avoir tranché le dernier Marquez. Maintenant je sais. Je vais lire Aïtmatov.
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Djamilia

"Oui, pour moi, c'est la plus belle histoire d'amour du monde".

Ce n'est pas de moi, mais d'Aragon , "préfaceur" et "traducteur "de ce livre.

Je serai moins enthousiaste, d'autant plus qu'Aragon n'a pas vu " coup de foudre à Nothing Hill", ce qui pourrait entrainer la révision de son jugement. :)



Nous voilà en Kirghizie, entre montagne et steppe en 1943. Les hommes ont déserté le village où restent les femmes , les enfants, les vieux et les blessés de guerre. le mari de Djamilia , blessé au front, doit rentrer sous peu. Pendant ce temps, elle porte le grain à la gare dans des conditions très dures.



Bon , j'ai quasiment résumé toute l'action de ce court roman. Je m'y suis quand même ennuyé , même si je reconnais toute la finesse de l'auteur dans le rapprochement des personnages mais également dans l'évocation de sa terre , alors soumis au joug des communistes.

Les traditions, le mode de vie, mais bien sur aussi les paysages très bien décrits apportent une touche culturelle indéniable à l'ensemble.

Rudesse des hommes, de l'environnement, de la vie tout simplement , le peuple Kirghize est présenté sobrement dans son milieu , au sein des montagnes et des chevaux et est évoqué comme une entité , une communauté où les limites de la famille sont floues .

Un livre rapide à lire et que je pourrais aussi rapidement oublier.

La préface d'Aragon est pour le coup nécessaire pour situer le livre et l'auteur dans leur contexte.

Enfin , l'algorithme de Babelio présente Danielle Stell et Musso comme des auteurs proches de Aïtmatov , j'ai comme un doute :)
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Djamilia

"Djamilia" est une nouvelle, peut-être la plus connue de l'écrivain Tchinghiz Aïtmatov pour le lecteur français.



Ce récit est toujours décrit comme une histoire d'amour, je ne l'ai pas lu seulement ainsi pour ma part, y écoutant avant tout, comme toujours avec l'écrivain kirghize, les échos et le murmure d'une communauté pendant une période troublée puisque le récit prend vie pendant la guerre.



Les hommes jeunes ou valides sont partis, ne demeurent au villages que les hommes âgés, ceux qui ont été exemptés ou encore reviennent les blessés des combats dont ils ramènent l'ombre au plus profond d'eux-mêmes.

Ce sont ces gens, ceux qui "restent", qui doivent exploiter les champs, récolter et acheminer le blé dans un effort de guerre pour "le pain des soldats".

Djamilia, une jeune femme mariée à un soldat parti combattre, est sollicitée pour venir travailler au transport des sacs de blé, sa belle-mère n'accepte que parce que son plus jeune fils l'accompagnera et veillera ainsi sur elle. Ils feront le travail aux côtés de Daniiar, soldat blessé, secret, mélancolique qui incarne ces temps passés à se battre. La fêlure que les combats ont ouverte en lui, ce repli sur soi, cet éloignement de l'agitation, des paroles, ce silence, ce regard acéré sur toute chose, ce retrait de tout instant n'ont pas altéré son humanisme et sa fierté.



Davantage qu'une histoire d'amour, c'est un hymne à des traditions, à une Culture, un regard éperdu sur la steppe, sur le ciel étoilé, sur les arbres et la nature qui bruisse et éprouve la douleur et l'émotion des hommes.



C'est dans la nuit, au retour du déchargement des sacs, dans l'alanguissement des corps fatigués, que les paysages vénérés accèdent à une plénitude perçue, leur beauté, leur pouvoir d'ensorcellement, leur invitation à l'évasion vers un imaginaire, au son des chants d'abord murmurés par Daniiar. De ces chants qui déverrouillent les coeurs, de ces notes qui élargissent l'esprit pour permettre de quitter pour un moment, une vie âpre et retrouver la fougue émotionnelle des ancêtres nomades et peut-être recevoir le courage de partir sur les chemins, au gré des offres, et embrasser une autre vie.





Les mélopées qui disent l'existence d'un ailleurs, d'un autre regard à poser, de ces sentiments qui glissent sur les apparences et ne s'embrasent qu'à la richesse des âmes.





Si vous avez aimé ce récit, n'hésitez pas à découvrir les autres nouvelles de ce grand écrivain recelant peut-être encore plus d'émotion.





"Quand, semblait-il, le dernier écho de la chanson s'éteignait, le nouvel élan palpitant qu'elle prenait semblait réveiller la steppe somnolente. Et celle-ci écoutait avec gratitude le chanteur qui la couvrait des caresses d'un chant familier"
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Djamilia

Djamilia est un roman qui m’a été vendu comme étant une histoire d’amour. Et, dès le début, une préface élogieuse de Louis Aragon la présente également ainsi à ses contemporains, ayant contribué à populariser une œuvre qui aurait pu tomber facilement dans l’oubli. Il y a de ça, bien sûr, et l’amour est au cœur de ce roman, mais il y a plus. C’est probablement parce que l’intrigue amoureuse n’arrive pas d’emblée et prend du temps à s’installer. Eh oui, dans un roman de 132 pages, c’est possible. Je dirais que l’essentiel de ce roman de Tchinguiz Aïtmatov est de traiter, à travers une intrigue amoureuse, de la vie dans les steppes russes, dans les régions reculées du Kirghizstan, son pays natal. Il fait vivre et immortalise des traditions.



Mais je vais trop vite. La fameuse Djamilia qui a donné son titre au roman, plutôt jeune, habite dans la famille de son mari Sadyk qui, quatre mois après leur mariage, est parti à la guerre. C’est une femme fière et forte. « Djamila dès l’enfance avait, avec son père, mené un troupeau de chevaux – elle était la seule qu’il eût comme fille et comme fils – mais dans son caractère se manifestaient quelques traits masculins, quelque chose de rude et parfois même de grossier. Et Djamila travaillait avec énergie, avec une poigne d’homme. » (p. 37-38). Dans ma tête, j’ai l’image de ces femmes mongoles qui luttaient et ne donnaient leur main qu’à l’homme qui serait capable de la maitriser. On est loin de la frêle Juliette cachée dans son château. Mais il ne faut pas croire à une brute non plus. « Elle était trop ouvertement joyeuse, comme un petit enfant. […] Et Djamila aimait aussi chanter. » (p. 40). Surtout, elle devait attirer le regard. « Djamilia était vraiment belle. Élancée, bien faite, avec des cheveux raides tombant droit, de lourdes nattes drues, elle tortillait habilement son foulard blanc, le faisant descendre sur le front un rien de biais, et cela lui allait fort bien et mettait joliment en valeur la peau bronzée de son visage lisse. Quand Djamilia riait, ses yeux d’un noir tirant sur le bleu, en forme d’amande, s’allumaient d’une ardeur […] (p. 41). Bref, une héroïne complète.



Tout ce beau monde, Djamilia, sa belle-famille et tout le village – le saïs – travaillent à cultiver le blé et le charger et faire transporter jusque dans la plaine. C’est leur effort de guerre. Un travail d’autant plus difficile qu’il ne reste pratiquement que les femmes, les enfants et les vieillards. Jusqu’à l’arrivée d’un étranger, un certain Danïiar…



Et c’est ainsi que commence l’histoire d’amour. En fait, non. Djamilia est farouche et fidèle, du moins au début. Elle n’en à rien à faire du nouveau venu. Mais, avec le temps… Une histoire mille fois racontée : en l’absence du mari, la femme esseulée trouve le réconfort ailleurs. Toutefois, là où le roman innove, c’est qu’il ne présente pas l’histoire du point de vue de Djamila ni de Danïiar mais plutôt de celui son jeune frère par alliance, Seït, qui veille sur elle et la famille. Au début, je trouvais cela agaçant mais, je m’y suis fait. Après tout, ce point de vue, s’il créait une distance vis-à-vis de l’histoire d’amour, il permettait de donner un éclairage différent. Par ailleurs, Seït est présent lors de plusieurs des rencontres entre les jeunes gens, qu’il soit au loin, tout près mais caché ou bien discret. En fait, il perçoit presque tout à travers les gestes et les paroles, bien qu’il n’en saisisse pas la portée avant qu’il ne soit trop tard. Une narration du point de vue des amoureux aurait donné accès aux pensées des amoureux mais, en y pensant, pas beaucoup plus. On comprend bien pourquoi Djamilia veut fuir avec son amant.



Et bravo pour cela! Au milieu du XXe siècle, il était encore tabou de parler de divorce, encore plus pour une femme de fuir avec son amant. Vous imaginez dans un pays d’Asie centrale à la population fortement musulmane. C’est une ode au courage de cette femme, prête à un immense sacrifice pour suivre l’homme qu’elle aime.



Surtout, l’auteur Tchinguiz Aïtmatov donne un éclairage plus grand sur la culture kirghize. Dans son roman, les dessins de Seït apparaissent à quelques moments, ils jouent un rôle important dans le dénouement de l’intrigue. Pourtant, là-bas, il n’y a pas vraiment de place pour des peintres, seulement des cultivateurs ou gens pratiquant des métiers traditionnels, axés sur un travail concret. Eh bien, à la fin, le garçon décide de choisir sa passion au risque de s’aliéner sa famille et sa communauté. On ne sait ce qu’il adviendra de Djamilia et Danïiar et de l’amour naissant entre eux (survivra-t-il à l’exil?), mais il est certain qu’il continuera de vivre à travers les dessins de Seït. Je crois que c’est la partie la plus belle et romantique de toute l’histoire. D’autant plus que le jeune devait éprouver quelques sentiments à l’endroit de la jeune femme…



Après tant de mots positifs sur ce roman, presque un éloge, le moment est venu de parler du style de l’auteur, Tchinguiz Aïtmatov. Malheureusement, je l’ai trouvé plutôt ordinaire. Je ne l’ai pas détesté mais il ne m’a pas particulièrement épaté non plus. Sa plume est plutôt directe, ce qui semblait convenir à ces gens à la vie rude. Ses descriptions sont inégales, il décrit amplement certains personnages mais pas d’autres. Pareillement pour les lieux et les occupations des gens. Mon imagination et Wikipédia devaient combler plusieurs trous… On retrouve quelques figures de style (surtout des comparaisons), aidant à mieux comprendre, à bien visualiser. Mais il manque une certaine poésie qui aurait rendu cette histoire encore plus mémorable. Bref, une lecture que je suis content d’avoir faite mais qui n’aura pas sa place spéciale dans mes coups de cœur littéraires ou parmi les grandes histoires d’amour. Dommage…
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Le léopard des neiges

Le léopard des neiges. Il s’agit d’un des derniers grands prédateurs d’Asie centrale, errant dans les hautes montagnes et dans les vallées du Tian-Shan. Là, Jaabars a perdu sa place auprès des femelles, délogé par un jeune ambitieux. Depuis, rejeté, il est devenu une de ces bêtes solitaires. Et c’est la pire espèce, celles-là… Toutefois, rapidement, après une dizaine de pages, la narration passe du règne animal à celui des humains. Arsène Samanchine rumine ses pensées dans un restaurant moscovite. Lui aussi, c’est solitaire à sa façon. Sur le déclin ? Autrefois journaliste respecté et en demande, il n’est plus que l’ombre de lui-même. Dans cette Russie d’après-communisme, l’argent est devenu omniprésent et essentiel mais, lui, il n’en a pas. On le suit dans ses mésaventures mais rien ne débouche. Même ses histoires amoureuses ne lèvent pas… Les parallèles entre l’homme et la bête deviennent de plus en plus évident. Mais, plus ma lecture avançait, plus je me demandais où l’auteur Tchinguiz Aïtmatov désirait m’amener. L’intrigue semblait s’étirer, tout comme mon ennuie qui pointait. C’est que le personnage n’est pas particulièrement attachant à la base, alors vous imaginez ce qu’on peut penser de ses péripéties… Quand Samanchine retourne dans son patelin au Kirghizistan, dans les hautes montagnes, je me suis dit : « Ça y est, le journaliste va se retrouver face à face avec le vrai léopard des neiges. Peut-être même l’affronter. » Bon, ce n’est pas tout à fait ça, Samanchine se fera plutôt le guide pour des princes arabes voulant chasser le fameux félin mais ici encore l’auteur me réservait quelques surprises. Et j'inclus là-dedans la drôle de finale que j'ai dru relire pour comprendre. Dans tous les cas, si je n’ai pas détesté le roman – après tout, il m’a fait découvrir une région du monde peu exploitée dans la littérature, en marge des grandes histoires – il me laisse sur ma faim. J’ai l’impression qu’Aïtmatov tenait un bon filon, plein de potentiel, mais qu’il ne l’a pas suffisamment exploité.
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Adieu Goulsary

Le fougueux Goulsary réquisitionné par le président du kolkhoze appartenait à Tanabaï, éleveur de chevaux et brebis et qui va de déception en déception, culminant quand, redescendant fin de l'hiver pour l'agnelage, il découvre une bergerie pourrie, sans réserve de paille.



Anticipant l'hécatombe il part hurler sa rage aux dirigeants corrompus du parti, sa femme le retient, le calme, lui dit qu'avec le buisson d'églantier on pourrait peut-être boucher les trous du toit...



Emouvant témoignage, la survie après tous ces efforts, le froid, la pluie, la faim, les promesses non tenues, les souffrances infligées à sa famille.

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Il fut un blanc navire

«Il avait eu deux histoires. L’une à lui seul, personne ne la connaissait. L’autre contée par le grand-père. Après, il ne lui en est plus resté aucune. Et c’est de cela qu’il va s’agir
. Cette année-là, il avait eu sept ans, il allait vers sa huitième année.» Ainsi débute «Il fut un blanc navire» de Aïtmatov.

Le meilleur des grand-pères, grand père Mômoun va acheter un cartable à son petit-fils à la boutique ambulante qui venait parfois visiter les trois familles vivant au poste de Sân-Tach à la frontière du kazakhstan, au nord-est du lac Issyk-Koul. Ce cartable tout à fait ordinaire est extraordinaire pour l’enfant seul abandonné par ses parents que le «Preste Mômoun» va bientôt accompagner à l’école.


«La dure et lourde paume de grand-père se posa sur la tête du petit garçon. Brusquement, celui-ci sentit sa gorge se serrer, il prit conscience de la maigreur du vieillard, de l’odeur familière de ses vêtements. Une odeur de foin sec et de sueur d’homme habitué au travail. Il était fidèle, solide, c’était son grand-père. Le seul être au monde, peut-être, qui l’aimât plus que son âme était ce vieillard simplet et un peu braque que les malins avaient surnommé le Preste Mômoun... Et après ? Qu’il soit comme on veut, c’était quand même bien d’avoir un grand-père à soi.»

p 33

L’histoire de l’enfant celle qui est à lui seul, c’est celle qu’il s’est inventée quand il monte comme tous les soirs sur la colline du guet d’où il peut voir ce qui se passe au poste mais aussi tous les sommets environnant grâce aux jumelles du grand-père et même apercevoir dans le lointain, à la marge extrême du regard le lac Issyk-Koul. 


L’enfant se rêve alors poisson pour rejoindre le blanc navire qu’il voit apparaître dans les jumelles, glissant sur l’eau bleue du lac, sur lequel il imagine son papa matelot et ses retrouvailles avec ce père rêvé.


L’enfant personnifie toute la nature autour de lui, il nomme les rochers, leur parle et les fait parler, de même pour les arbres, il parle aussi à son cartable. Il remodèle la réalité au gré de sa fantaisie.

Il est aussi imprégné des légendes que lui a conté son grand-père, en particulier celle fondatrice de la Mère des Mârals à la Belle Ramure que les Kirghiz considère comme la mère de leur peuple. Ces légendes relient à la terre, à la nature environnante et font naître le sacré, sont le terreau des croyances ancestrales qui donnent le respect de la vie sous toutes ses formes et de son mystère. Les anciens, comme le grand-père, en sont les gardiens.


Mais leur vie est empoisonnée par l’oncle Orozkoul marié à la tante Békéi, fille du grand-père. Comme la plupart de ses semblables il ne respecte plus rien, ni la nature, ni les hommes, il n’est que mépris et amertume, ne croit plus en rien... Il abat les plus beaux arbres, il frappe sa femme et n’a aucun respect pour le vénérable grand-père et encore moins pour les légendes....

Je ne peux rien dire de plus, seulement que j’ai encore plus aimé «Il fut un blanc navire» que «Djamilia». 
Ce récit est plein de sensibilité que ce soit pour évoquer les êtres mais aussi pour rendre hommage à la beauté de la nature attaquée par l’homme qui s’en est détourné.
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Djamilia

La curiosité m'a poussé a lire cette nouvelle, écrite par un auteur du Kirghizstan. Et pour le dépaysement, je dois dire que je n'ai pas été déçu. On découvre ici, une autre culture, d'autres coutumes, d'autres mœurs. Le personnage principal se remémore sa jeunesse, pas vraiment facile, tous ces frères sont a la guerre et il doit travailler pour aider sa famille. Heureusement Djamilia, sa belle-sœur (femme de son frère) et la pour égailler ses journées.



Jusque la, tout va bien, au niveau de l'intrigue, je n'ai rien a redire mais c'est l'écriture, le style ou la traduction ? ou bien peut-être les trois..... La vraiment, j'ai eu beaucoup de mal. Le style est vraiment très littéraire, les dialogues pas toujours bien signalés , bref j'ai du très souvent relire les phrases plusieurs fois pour bien comprendre qui parlait, pour savoir ou l'auteur voulait en venir.



124 pages de dépaysement, mais 124 pages qui demande de la patience.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Djamilia

Petite incursion dans la littérature kirghize aujourd'hui avec Djamilia de Tchinghiz Aïtmatov. Je n'avais jamais entendu parler de cette oeuvre avant de chercher précisément une histoire se déroulant au Kirghizistan et écrite en langue kirghize, mais il s'avère que Djamilia est un véritable monument littéraire au Kirghizistan et que son auteur est considéré comme l'un des plus grands écrivains soviétiques.

C'est un très court roman de cent pages environ dont le narrateur est un adolescent travaillant dans un kolkhoze auprès des femmes de sa famille, tandis que les hommes sont partis à la guerre. Il s'éveille et s'émerveille aux côtés de la belle et forte Djamilia, l'épouse de son frère, et il assiste à la naissance du lien qui l'unira à Daïinar, un soldat revenu du front, peu loquace et mystérieux.

Louis Aragon a vu dans Djamilia « la plus belle histoire d'amour du monde », au point d'avoir envie de traduire l'oeuvre du russe au français. Sa préface est touchante et je recommande plutôt de la lire après avoir lu l'oeuvre de Tchinghiz Aïtmatov. Pour ma part, je me souviendrai de ce texte comme d'une ode à la nature et à la liberté. L'histoire d'amour, en effet, est relativement longue à se mettre en place, elle suit le rythme lent et répétitif du travail dans les champs et du transport du blé, destiné à nourrir les troupes, jusqu'à la gare la plus proche. Cette histoire d'amour est surtout très discrète : tout est suggéré, esquissé, deviné même, à travers le regard d'un adolescent qui a à la fois pleinement conscience de certaines situations et du mal à saisir les signes. de fait, plus que l'amour d'un homme pour une femme, et inversement, c'est l'amour de l'écrivain pour sa terre qui m'a subjuguée dans ce roman. Certains passages sont de véritables tableaux poétiques, et le fait que le narrateur ait une appétence particulière pour la peinture n'y est sans doute pas pour rien. Je ne sais pas si j'aurais apprécié autant cette oeuvre si je l'avais lue chez moi, tranquillement installée dans mon fauteuil, et je mesure, en écrivant ce billet, la chance que j'ai eue de pouvoir tourner cette centaine de pages en ce mois de juillet 2022 à l'endroit même où Seït, Djamilia et Daïinar ont joué leur partition, dans les merveilleuses steppes kirghizes.


Lien : http://aperto-libro.over-blo..
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La pluie blanche et Autres nouvelles

C'est par ce recueil de cinq nouvelles que je fais connaissance avec Tchinghiz Aïtmatov. J'aime beaucoup la poésie avec laquelle il décrit la nature,la force qu'elle apporte aux hommes même si elle attend beaucoup d'eux. Ceci est particulièrement puissant dans L"oeil de chameau, la plus longue du recueil où un jeune homme integre un village dans la steppe pour devenir mécanicien agricole mais se heurte à l'hostilité de son chef qui le méprise.

Chaque nouvelle parle avec pudeur et une émotion à fleur de peau de l'amour,de la perte,de la guerre.

J'ai ressenti la douleur, la solitude, la difficulté chez tous les personnages de ces histoires, à trouver le bonheur ou même simplement une place en ce monde. Tous ces éléments bien que le contexte géopolitique et la periode soient differents,m'ont fait penser à Georges Navel.

J'aimerais découvrir d'autres écrits de cet auteur.
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Djamilia

Cette nouvelle traduite du kirghiz par Aragon et A. Dimitrieva est présentée avec le sous-titre "La plus belle histoire d'amour du monde".

Elle est incontestablement dotée d'un grand charme.

Mais je ne suis pas suffisamment accoutumée au paysage humain qui se trouvait à l'intersection du monde soviétique et des contrées lointaines telles que le Kirghistan, où il étendit son empire, pour m'être sentie à l'aise avec cette lecture.

En effet j'y ai subi l'effet d'une double contrainte : celle de pénétrer dans l'organisation des travaux agricoles des kolkhozes, obligatoirement mixtes, où les travailleurs hommes et femmes ont une égale dignité ; et dans la société extrêmement patriarcale kirghize, non mixte, régie par un code de l'honneur strict, alors que bon nombre d'époux ont quitté le village pour aller combattre.

Ce qui fait que je me suis perdue dans des supputations et des étonnements sur telle et telle attitude de Djamilia, de son beau-frère ou de Daniiar sans pouvoir les interpréter. Que je me sois même demandé comment les interpréter montre sûrement que je ne me suis pas laissée porter par l'histoire.

Sans doute cet amour n'aurait-il pas été concevable si le communisme n'avait pas bouleversé les structures et le fonctionnement de cette société traditionnelle au point de mettre en contact quotidien des jeunes gens des deux sexes ; de dévoiler aux jeunes hommes la fierté des femmes et leur extraordinaire pugnacité au labeur ; de dévoiler aux jeunes femmes la beauté des hommes et leur humanité ; et de rendre perceptible la souffrance des femmes privées de mari.

Il est fort probable que cette situation inédite les ait bouleversés eux-même et privés de repères. Comment comprendre sans cela que, par exemple, Djamilia ait pu se sentir blessée de l'application d'un code traditionnel interdisant au mari de s'adresser à son épouse dans toute correspondance avec la famille ?

Sans doute la perte de points de repères séculaires a-t-elle rendu possible cette formidable transgression : vivre une histoire d'amour adultère.

C'est du frottement entre deux mondes incompatibles que naissent les pires violations de l'ordre établi.

L'amour de Djamilia et de Daniiar porte atteinte, s'il demeure impuni, au noyau même de la société patriarcale qu'il remet en cause dans ses fondements et sa pérennité.
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Djamilia

Le narrateur nous conte sa vie paisible dans un village du Kirghizistan. Sa vie aurait pu être des plus banales s'il n'y avait pas eu sa belle-soeur, Djamilia pour qui il éprouve ses premiers émois (interdits et platoniques).

Dans cette petite communauté, la tradition musulmane et ancestrale prime, et Djamilia n'y fait pas l'unanimité à cause de son fort caractère et elle est jugée trop individualiste et égoïste au regard des standards traditionnels. Tout cela n'est que commérages, jusqu'au jour où Djamilia commet l'irréparable alors que son mari, comme beaucoup d'hommes, est parti au front.



C'est un très court roman assez dépaysant qui a un intérêt surtout "anthropologique" (pour un lecteur occidental) si on peut le dire ainsi. C'est aussi un roman très pudique sur les sentiments et surtout sur les différents "visages" que peut avoir l'amour , de l'idéalisation des premiers émois lorsque l'amour est à sens unique à celui qui est interdit mais contre lequel on ne peut lutter quand il est là. C'est aussi un roman sur la transgression et le sacrifice d'oser être pleinement soi dans les micro sociétés ou communautés traditionnelles. L'écriture/traduction n'est ni déplaisante ni mémorable. C'est une lecture qui permet d'élargir ses horizons et d'en apprendre sur la façon de vivre et de voir le monde dans d'autres pays, et c'est là l'une des grandes forces de la littérature.
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Djamilia

Après avoir dépassé la surprise d’une écriture inhabituelle, j’ai laissé la steppe kirghize me séduire, le galop de ses chevaux m’embarquer, ses paysages saisonniers m’élever et les habitants de l’aïl me séduire. L’invitation au voyage de la quatrième de couverture a tenu toutes ses promesses. Aragon ne s’est pas trompé. Djamilia est un magnifique roman d’amour aux couleurs de l’Asie Centrale. C’est un appel incessant au Vrai, à la liberté, à l’Amour et à la contemplation.

La description du chant de Danïiar a bouleversé le plus profond de mon être, l’inondant de frissons, soufflant sur lui une onde rafraîchissante et bienfaisante, remunant tripes et souvenirs pour faire émerger des larmes sereines et douces.

Quelle beauté ! Quelle force ! Quel calme ! Quelle imensité ! Quels amours ! Quelles couleurs ! Quelle région ! Quel roman !

Embarquez vous aussi, le dépaysement est assuré !

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Djamilia

C'est grâce à Moustafette que j'ai eu envie de lire ce petit livre et je ne le regrette pas.

Le personnage de Djamilia est très attachant . Dans cette société où la femme gardienne du foyer doit rester soumise, au moins en apparence, et respectueuse des codes, elle, Djamilia garde sa fantaisie et sa liberté quel que puisse être le prix à payer. Elle a conservé quelque chose de sa spontanéité enfantine et c'est pourquoi elle est très proche de son petit beau-frère qui va découvrir le désir mais surtout la liberté de choisir sa vie que ce désir lui a donné.
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Une journée plus longue qu'un siècle

Décidément, ces temps-ci, je lis de drôles de bouquins. Celui-ci m'a été offert par un ami russe, ex soviètique, connaissant le Kazakhstan et sachant que j'y suis allé moi aussi. Il m'a offert ce qu'il considère comme le chef-d'oeuvre de l'auteur, opinion largement partagée. Le décor planté, que dire de ce livre? D'abord qu'il est long (500 pages) et surtout qu'il m'a paru à la lecture encore plus long (5000 pages?). Peut-être faut-il cette lenteur pour rendre l'ambiance de l'immense steppe kazakhe? Ensuite, il parle de tout et presque de n'importe quoi. Il s'agit d'abord de l'histoire dramatique d'un ancien soldat de l'armée soviètique persécuté par le régime dans les années 50 parce ce qu'il est revenu vivant de captivité. Histoire très touchante. le récit est recoupé par de longues légendes locales remontant à plusieurs siècles et qui ont en commun une cruauté à rendre jaloux Staline en personne. Ce n'est pas tout, ces légendes sont pleines des senteurs de la steppe, de musique, de personnages taillés dans le granit... Enfin, la trame officielle du roman est un incroyable road-movie à dos de chameau (et quelle bête!) ayant pour but de conduire la dépouille du plus ancien des cheminots d'une station perdue en pleine steppe au cimetière traditionnel de ses ancêtres. C'est bien évidemment aussi une histoire de cheminots, d'ouvriers soviètiques vivant dans des conditions misérables. Comme l'auteur adore le détail, il y avait déjà de quoi remplir les 500 pages. Mais ce même auteur a cédé à une mode des années 80 en URSS et a arrondit le tout avec une intrigue hautement (?) philosophico-politico-pacifiste de science-fiction américano-soviètique! Malgré des longueurs steppiques, il y a de nombreux morceaux de bravoure et des sujets rarement traités ailleurs... Je parle ici de la version finale des années 90 augmentée d'un tiers suite au rajout de la légende du volcan blanc du terrible Genghis Khan...
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Djamilia

Au Kirghizistan, dans un petit village (aîl), vivent Seït (le narrateur) et Djamilia, sa jeune belle-sœur, dont le mari a été envoyé au front peu après les noces.

Nous somme pendant la seconde guerre mondiale et tous les hommes sont partis. Suivant les traditions, c’est donc au jeune Seït, alors adolescent, d’assumer les travaux du kolkhoze, et de protéger sa famille.

Tous les jours, avec Djamilia et Daniiar, un invalide de guerre ayant trouver refuge au village, ils emmènent les récoltes à la gare .

Seït va assister aux amours naissantes de Djamilia et Daniiar, subjugué lui-même par cet homme à la voix envoûtante chantant avec toute son âme Il va grâce à lui découvrir la richesse de l’amour que l’on peut porter à sa terre ou à un être. Cet amour immense qu’on a envie de partager. Il lui ouvrira les portes d’un monde magnifique: celui des arts.



La première partie est un peu longue à mon goût, ne laissant que peu de place à l’histoire d’amour. Mais nous ne pouvons que nous laisser emporter dans ces paysages grandioses et nous laisser émouvoir par ces sentiments naissants.
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Il fut un blanc navire

Un gamin, abandonné par père et mère survit dans un poste forestier où vivent trois couples , unis par un lien de famille. Le poste est à la limite de la forêt, dans la montagne.La vie y est difficile, l'hiver les trois maisons se retrouvent coupées de tout, l'été quelques passages d'éleveurs ou de camions animent le lieu.



L'enfant divague dans la nature, près du fleuve, dans la montagne, il divague dans sa tête aussi, s'inventant des amis, se nourrissant des légendes que son grand-père lui raconte. Il n'y a que ce grand-père qui prennent soin de cet enfant et lui donne une tendresse infinie.



Et puis, la bêtise, la méchanceté,la violence, l'alcool des adultes vont plonger cet enfant dans un drame auquel il ne saura faire face.



C'est un court roman, très beau, poétique,émouvant, une très belle occasion de découvrir un pays méconnu et un auteur intéressant.
Lien : http://theetlivres.eklablog...
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Djamilia

Seit se souvient. Quand il était jeune garçon de treize ans, il fut le témoin privilégié d’une histoire d’amour dont il garda un souvenir intense. Durant la guerre, son frère était parti se battre et il devait veiller sur Djamilia son épouse. Celle-ci tomba amoureuse d’un autre homme, Daniiar, un homme réservé, parlant peu, mais chantant beaucoup...



« Or, les chansons de Daniiar m’avaient mis l’âme à l’envers ».



Non seulement ce livre nous parle de la passion amoureuse, mais il nous instruit aussi sur l’univers peu courant des kholkhozes au Khirghiztan. Peu de personnages dans ce roman. Ce sont des travailleurs, marqués par la guerre. La jeune Djamilia est assez solaire. C’est une jeune femme de tempérament sincère et joyeux, réquisitionnée pour conduire une britchka (un attelage), afin d’assurer le transfert entre la gare et les kholkhozes où vivent beaucoup de femmes et les enfants, en ces temps de guerre. Ensuite, Daniiar n’est pas moins flamboyant grâce à ses chants entêtés. De leur rencontre, émerge beaucoup de sensualité.



Un petit livre poétique préfacé par Aragon, écrit avec un style simple. Quand Daniiar chante pour Djamilia, non seulement sa musique rend son amour plus beau et plus fort, mais elle est pour lui un moyen de s’élever et de s’unir.

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Djamilia

Kirghizistan. Août 1943. L'amour à l'état pur



Ce petit récit d'une centaine de pages qui se lit d'une traite est un véritable bijou. Tchinghiz Aïtmatov, le plus renommé des écrivains kirghizes, nous y conte quelques jours du quotidien pendant la grande guerre patriotique de Seït, un adolescent de treize ans, le narrateur, Djamilia, sa belle-soeur, dont le mari est au front, et Danïiar, soldat taciturne et mystérieux, de retour du front.



Il faut rappeler que dans les pays d'Asie centrale, on ne se marie pas par amour, les femmes sont mariées à leur insu et la polygamie y est encore possible.



Alors, entre la vallée kirghize où s'écoule le tumultueux Kourkoureou et les premières steppes kazakhes, va se dérouler un ballet à trois autour du transport du blé du village à la gare, ce blé qui deviendra la pain du soldat au front. le temps s'y écoule au rythme des chariots et des chevaux laissant la part belle aux pensées de toutes sortes. A aucun moment il n'est question de sentiment, encore moins d'amour. Tout n'est qu'allusion. Pourtant, au travers des rares paroles échangées, de la voix envoutante de Danïiar qui revient petit à petit à la vie en chantant dans la nuit sous la voute étoilée, de la nature sauvage et majestueuse qui semble réagir en écho, se tisse dans le non dit une histoire que Louis Aragon qualifiera dans sa préface de plus belle histoire d'amour du monde.



Oui, toutes les nuances de l'amour sont bien là, évoquées avec on ne peut plus de pudeur, avec des mots simples et beaucoup de poésie. Et sans dévoiler quoi que ce soit de l'issue, je ne peux qu'être d'accord avec Aragon.



PS comme souvent, il vaudra mieux lire la préface après le livre pour garder intact le plaisir de la découverte
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