Avis sur Les nocturnes à 0:16
Je le vois. Ce lambeau de brume, ce nuage trapu qui galope entre les broussailles, tapi dans mes angles morts. Le monstre brouillardeux est revenu. Rien d'étonnant : il fait sombre et j'ai trop peur. J'essaie de ne pas le regarder. Il faut que je me concentre sur les lumières du village, au sommet du coteau. Je dois oublier le nébuleux, il n'existe pas. C'est le fruit de mon imagination.
On a pas perdu tout ce qui nous vient de dehors. Si c’était le cas, on se ressemblerait tous. On serait un régiment de fantômes identiques. Tu as des valeurs, tu as des objectifs, tu as des rêves. Ils ne te viennent pas de nulle part : tu n’es pas vide.
Pour la première fois depuis des années, mon regard porte loin, sans obstacle. On dirait que toutes les étoiles du ciel sont tombées par terre, à mes pieds.
Au contraire, c'est un acte d'une grande puissance, par lequel tu te débarrasses des mauvais sentiments vis-à-vis de la personne qui a pu te faire du mal. Quand tu pardonnes, c'est toi qui as l'ascendant.
C’est l’espoir d’oublier qui vous a fait venir ici. On vous a promis qu’on gommerait vos souffrances de votre mémoire. C’est ce qu’ils ont fait Natt. Vous êtes là parce que vous étiez prêt à quitter parents, amis et vie sociale pour une amnésie.
Tu sais, ce n'est pas à moi de juger mon propre passé. Je n'ai foi qu'en un seul juge, et c'est à Lui que je m'en remets. Notre vie ne tient pas à notre passé, Natt. Il faut... il faut regarder devant.
- C'est comme si on était dans un rêve, murmure Yann.
- Pourquoi? je demande.
- Cette manie qu'on a de pas se poser des questions. De ne pas s'interroger sur notre environnement. On prend ce qu'on voit pour une réalité indiscutable. Sans chercher... plus loin. Je ne sais pas ce qu'ils ont pu nous faire, mais ici, on a la même naïveté que dans nos rêves. On est persuadés que tout est acquis et on ne s'aperçoit des incohérences que lorsqu'on y réfléchit vraiment...
Emma est une petite sœur sombre, rachitique et tordue, qui grandit avec nous. Emma est un tueur invisible qu'on apprend à craindre. Un monstre à éviter, qui pose sur nous ses milliers d'yeux.
Dans toutes les maisons, on trouve le même dépliant plastifié accroché bien en évidence sur un mur ou une porte. Très vieux papier. Il a appartenu à mon arrière-grand père et a toujours ce même aspect froid et sérieux.
Nous faisons partie de l’ordre du monde.
- C'est très difficile de se pardonner soi-même, glisse la Chouette. Les gens l'oublient souvent.