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Citations de Shashi Tharoor (19)


Tu sais bien Ganapathi, comment dans notre pays, pas un mariage n'est arrangé, pas un voyage en avion organisé, pas un projet inauguré, avant que les thèmes astraux n'aient été établis et consultés. Un Indien sans horoscope est comme un Américain sans carte de crédit [...]
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Il est difficile pour toi, qui vis aujourd'hui au milieu de l'évidence du dénuement et qui le prends pour naturel de concevoir une Inde autre que pauvre, injuste et misérable. Mais c'est pourtant ce qu'était l'Inde avant l'arrivée des Anglais, ou alors pourquoi seraient-ils venus ? Crois-tu que les marchands, les aventuriers et les commerçants de la Compagnie Orientale des Indes avant l'arrivée fait voile vers un pays de disette et de misère ? Non, Ganapathi, ils sont venus dans une Inde fabuleusement riche et prospère, ils sont venus en quête de fortune et de profit, et ils prirent ce qu'ils purent prendre, laissant les Indiens se vautrer dans leurs restes. Ganga savait, en pataugeant dans la gadoue et la merde des taudis ouvriers, que tout cela n'existait pas avant l'arrivée des Anglais et représentait une négation de cette idée de Vérité en laquelle il croyait si passionnément.
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Car, docteur, je leur ai tant donné, entassés comme ils sont dans le monde où le travail est rare et les salaires très bas, un monde d'espace étroit et de perspectives bouchées, de tyrannie sociale et de lutte permanente. J'incarnais l'alternative, leur autre vie. Inventer quelque chose au-delà de la réalité , personnifier l'évasion et par là la rendre vraie, aussi vraie que tout ce que connu d'autre, et infiniment plus agréable : voilà ce que j'ai fait et fait mieux que quiconque. J'ai chevauché les écrans et recréé les rêves de millions, leur disant : Regardez, avec moi, Ashok Banjara, vous pouvez vivre vos rêves tout éveillés , vous pouvez prendre vitre destin en main et nous pouvons triompher ensemble. J'ai gardé l'Inde éveillée en montrant à la nation qu'elle pouvait rêver les yeux grands ouverts. J'ai donné une chance à chaque Indien de réinventer sa vie, de connaître le frisson de l'aventure, de s'aventurer à poursuivre la file hors d'atteinte, d'atteindre à la victoire la plus glorieuse, de se glorifier dans la simple joie de vivre. J'ai apporté de la dignité et d'innombrables existences, docteur, j'ai apporté l'espoir.
Le même espoir qu'ils m'offrent maintenant avec leur veille à l'extérieur de l'hôpital. P 404
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Alors tu crois que je ne serai pas à la hauteur, hein ? m'écriai-je. Nom d'un chien, ce que je vais dicter, ce sont les souvenirs de ma vie et de mon temps. Brahm, dans mon épopée je parlerai du passé, du présent et de l'avenir, de l'existence et du trépas, de la floraison et du dépérissement, de la mort et de résurréction, de ce qui est, de ce qui fut, de ce qui aurait dû être. Page 18
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Le pouvoir de la non-violence s'exprime dans l'affirmation de l'homme qui dit: " Je m'inflige une punition pour vous montrer que vous êtes dans votre tort." Mais une telle déclaration a peu d'effets sur ceux qui ne se soucient guère d'être dans leur tort et ne cherchent qu'à punir, que l'on soit ou non en désaccord avec eux. A leurs yeux, l'acceptation de châtiment est la manière la plus simple de remporter la victoire.
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L'indépendance de l'Inde marqua le début de l'ère de la décolonisation. Toutefois de nombreux pays n'obtinrent leur liberté qu'à la suite de luttes violentes et sanglantes. D'autres peuples sont tombés sous la botte des envahisseurs, ont été dépossédés de leurs terres ou contraints de fuir dans la terreur leurs demeures ancestrales. Pour eux, la non-violence n'était pas un choix valable. Elle ne pouvait se révéler efficace que contre des adversaires qui étaient vulnérables à la perte de leur autorité morale, ou bien envers des gouvernements qui étaient réceptifs aux pressions exercées par l'opinion publique nationale et internationale, et étaient susceptibles d'admettre leur défaite pour éviter la honte. A l'époque même de Gandhi, la non violence n'aurait rien pu faire pour sauver les juifs de l'Allemagne nazie - ils disparurent dans les chambres à gaz dans l'indifférence générale.
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Ainsi, le concept de non-violence, comme beaucoup d'autres formés à partir d'une négation, tels que la non-coopération et non-alignement, signifie bien davantage que le déni d'un contraire. La non-violence est bien plus que l'absence de violence. La non-violence était une façon de faire valoir la vérité en choisissant de souffrir plutôt que d'infliger la souffrance à l'adversaire. Il était essentiel d'accepter pleinement là sanction afin de prouver la force de ses propres convictions.
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Ainsi c'était fini, et nous avions gagné. L'Inde avait conquis la Grande-Bretagne; les coolies en khadi de Gangaji, ses hordes de tisserands avaient triomphé des brigades de galons et d'épaulettes du plus grand empire que le monde ait connu. Tu ne peux pas imaginer, Ganapathi, tu ne peux pas imaginer l'excitation, l'exaltation, l'exultation de cet instant, à minuit, quand furent hissées les trois couleurs nationales et que le Dhritarashtra, sa voix brisée par l'émotion, annonça à la nation dans la plus durable de ses métaphores visuelles : " Au coeur de la nuit, à l'heure où le monde dort, l'Inde s'éveille à l'aube de la liberté."
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Pas plus que nous n'aurions soupçonné ce que le processus pratique de la Partition allait entraîner. La nomination, par exemple, d'un géographe politique qui n'avait jamais de sa vie mis les pieds sur aucun des territoires à attribuer soit à l'Inde, soit au nouvel Etat du Karnistan. "C'est très facile annonça l'universitaire binoclard en brandissant une baguette devant une carte à petite échelle. [...] "Félicitations mister Nichols !"Un vieux fonctionnaire se leva d'un bond. "Je vis et je travaille dans ce district depuis dix ans et je dois vous tirer mon chapeau. Vous venez de réussir à faire passer votre frontière internationale au beau milieu du marché, à donner les rizières au Karnistan et les entrepôts à l'Inde, la plus grande porcherie de la zilla à l'Etat islamique et la madras du Saint Prophète au pays que les musulmans quittent. Oh, et si j'interprète correctement ce gribouilis-là, ajouta t-il en prenant sa baguette à l'expert bouche bée, l'instituteur aura besoin d'un passeport pour aller au petit coin à la récréation. Bravo mister Nichols, j'espère que le reste de votre travail se révélera aussi ... facile !"
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On les laissa enfin seuls devant une porte aux sculptures compliquées d'où émanait une vague odeur de santal.
"La chambre du maharadjah, chuchota le colonel.
- Pourquoi chuchotez-vous ? demanda Vidur
- Pour ne pas réveiller le maharadjah, chuchota le colonel.
- Nous sommes ici, fit remarquer Vidur, pour réveiller le maharadjah."
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J'ignore s'ils émurent Priya Duryodhani, ces millions d'hommes en haillons, de femmes ravagées et de nuées de gosses qui, avec une dignité tragique, se frayèrent à coup de souffrance, un chemin dans la conscience du monde. J'ignore si elle se désola ou enragea de les voir se blottir sous des arbres, des tentes, dans des tuyaux géants désaffectés, de l'implacable mousson et de l'implacable humanitarisme des objectifs à foyer variable occidentaux. J'ignore si elle enragea devant la pluie de platitudes et d'offres de charité dont l'univers la gratifia tandis que les réfugiés continuaient à se déverser des blessures sanglantes infligées par l'armée karnistanaise. J'ignore si ce fut par amertume ou mépris qu'elle refusa ces sparadraps et tranquillisants que le monde s'avéra plus disposé à donner que le garrot qu'elle recherchait, la forte pression internationale qui seule aurait pu forcer Jarasandha Khan à retirer ses baïonnettes de la tendre chair gélabine dans laquelle elles s'étaient si grotesquement enfoncées. J'ignore, Ganapathi, ce qu'elle ressentit. Mais nous savons tous ce qu'elle fit.
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Le soleil avait entamé sa descente précipitée dans l'inconnu et l'horizon s'embrasait d'orange, tel du safran éparpillé sur une mer houleuse. Dans l'obscurité montante les insectes ressuscitaient, bourdonnaient, pépiaient, mordaient dans la pâleur marbrée de la chair coloniale. C'était l'heure où les esprits anglais se prenaient à songer à boire. Le crépuscule ne dure jamais en Inde, mais sa venue équivalait à celle de l'ouverture des pubs que nos maîtres avaient laissés derrière eux. La nuit tombait et le moral remontait; l'odeur âpre du tonique à la quinine inventé par des planteurs solitaires pour noyer et justifier leurs gins solitaires se mêlait à la senteur des frangipaniers de leurs jardins feuillus et ravagés d'insectes, et le cliquetis apaisant de la glace contre le verre n'était troublé, de temps à autre, que par la claque d'une paume frustrée sur un bout de peau rougissant, tout juste évacué par un moustique anglophage.
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Cela commença comme à l'accoutumée - car les Anglais n'ont jamais rien appris de l'Histoire - par un impôt. Pourquoi ces canailles de Peaux-Roses s'amusèrent-elles à taxer les Indiens, je ne le comprendrais jamais, car elles avaient déjà volé tout ce qu'il leur fallait depuis des siècles, depuis les incrustations précieuses du Taj Mahal jusqu'au Kohinoor sur la couronne de leur reine, et on aurait pu penser qu'elles auraient pu se passer d'ôter avec autant de soin sa maigre pitance au travailleur indien. Mais il y a toujours eu un aspect pervers et précis dans l'oppression britannique : l'édifice légal du Raj fut bâti sur la prémisse que tout ce qui résultait du remplissage de formulaires en quatre exemplaires ne pouvait absolument pas constituer une injustice.
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La jeep descendit la piste en cahotant, éparpillant enfants piailleurs et poules caquetantes dans toutes les directions comme des graines semées par un fermier pompette.
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"Mais, bon Dieu, qu'est-ce que ça nous apprend sur l'Inde, cette histoire ? Que les apparences sont plus fortes que la vérité. Que les rumeurs ont plus de pouvoir que les faits. Que la fidélité est à sens unique, le seul fait de la femme. Et que, quand la société donne tort à une femme, celle-ci ferait bien de ne pas compter sur le soutien de son mari. Elle n'a pas d'autre choix que de mettre fin à ses jours." (Points - p.102-103)
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"Tout est recyclé en Inde, jusqu'aux rêves. " (Points - p.152)
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Je suis croyant, à l'exception d'une brève période d'athéisme adolescent (qui apparaît lorsque l'on découvre la rationalité et disparaît lorsqu'on en reconnaît les limites et que l'on prend conscience que le monde offre trop de mystères extraordinaires auxquels la science n'a pas de réponse).
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La démocratie, Ganapathi, est peut-être la plus arrogante de toutes les formes de gouvernement parce que seuls les démocrates ont la prétention de représenter un peuple entier : les monarques et les oligarques n'avancent rien de tel. Mais les démocraties qui deviennent autoritaires vont encore plus loin dans l'arrogance : elles affirment représenter un peuple s'asservissant lui-même
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Tes sourcils et ton nez, Ganapathi, se tordent en un point d’interrogation éléphantesque. Etes-vous arrivé, sembles-tu demander, à la fin de votre histoire ? Comme tu as peu de mémoire ! Pas plus tard que l’autre jour, je te disais que les histoires ne finissent jamais, elles se continuent simplement ailleurs. Dans les montagnes et dans les plaines, dans les cœurs et les foyers de l’Inde.

Mais mon dernier rêve, Ganapathi, me laisse avec un problème beaucoup plus grave. S’il possède une signification, une signification quelconque, c’est que j’ai raconté jusqu’ici mon histoire d’un point de vue complètement erroné. J’y ai réfléchi, Ganapathi, et je me rends compte que je n’ai pas le choix. Il me faut la raconter de nouveau.

Je vois la consternation se peindre sur ton visage. Je suis navré, Ganapathi. J’en toucherai un mot demain à mon ami Brahm. Entre-temps, reprenons au commencement.

Ils me disent que l’Inde est un pays sous-développé…
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Ronsard a écrit trois volumes de vers pour trois femmes différentes. La première et la dernière, Cassandre et Hélène, ne l’approchèrent point ; l’une parce qu’elle était trop belle et l’autre parce qu’elle était hideuse. C’est du moins ce qu’en disent ceux qui les ont connues ; mais Ronsard, ne voulait rien d’elles que leurs noms à mettre en sonnets, fit Cassandre plus belle encore que Cassandre, et daigna donner à Hélène tout ce que Dieu lui avait refusé. Aussi nous les voyons toutes deux incomparables.

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