Citations de Theodor W. Adorno (147)
le poème exprime le rêve d'un monde où tout pourrait être différent
Il suffit d'écouter le vent pour savoir si l'on est heureux.
Tu seras aimé lorsque tu pourras montrer ta faiblesse sans que l'autre s'en serve pour affirmer sa force.
Le système n'est pas celui de l'esprit absolu mais celui de l'esprit le plus conditionné, de ceux qui en disposent et ne peuvent même pas savoir à quel point c'est le leur.
Car le cheval en sait davantage sur les héros que les héros eux-mêmes.
Plus la vie elle-même devient stéréotypée, plus le stéréopathe se sent dans son droit et voit son schéma de pensée confirmé par la réalité. La communication de masse moderne, modelée sur la production industrielle, diffuse un système de stéréotypes qui lui permettent à tout moment d'avoir l'air à la page et "très bien informé".
Après des millénaires de rationalité, la panique s'empare de nouveau de l'humanité, dont la domination acquise sur la nature devenue domination de l'homme excède de loin en horreur ce que les hommes eurent jamais à craindre de la nature.
Le monde moderne est atrocement pratique.
Leur société de masse n'a pas seulement produit la camelote pour les clients, elle a produit les clients eux-mêmes.
Il appartient, avec quelques rares penseurs de son époque tels que E.A. Poe, Tocqueville et Baudelaire, à ceux qui ont ressenti quelque chose des changements véritablement chtoniens qui, au début du grand capitalisme, se sont produits dans les hommes eux-mêmes, dans les modes de comportement humains et dans la composition interne de l'expérience humaine. C'est ce qui donne à ses motifs critiques leur sérieux et leur dignité.
S’amuser signifie toujours : ne penser à rien, oublier la souffrance même là où elle est montrée. Il s’agit, au fond, d’une forme d’impuissance. C’est effectivement une fuite, mais pas comme on le prétend, une fuite devant une triste réalité ; c’est au contraire une fuite devant la dernière volonté de résistance que cette réalité peut encore avoir laissé subsister en chacun.
La frénésie de consommation des produits les plus récents de la technique, (...) fait accepter la camelote la plus éculée et jouer le jeu de la stupidité programmée. Ne jamais se demander à quoi sert un produit, faire comme tout le monde, participer à la bousculade, voilà qui vient remplacer tant bien que mal les besoins rationnels.
Ce que l’industrie culturelle propose aux hommes dans le temps libre est, certes, si mes conclusions ne sont pas trop précipitées, consommé et accepté, mais avec une sorte de retenue, semblable aux gens naïfs qui ne considèrent pas les événements du théâtre ou les films comme vraisemblables. Plus que cela : on n’y croit pas tout à fait. L’intégration de la conscience dans le temps libre n’a manifestement pas encore tout à fait réussi. Les intérêts réels des individus sont encore toujours suffisamment forts pour résister, dans une certaine limite, à l’emprise totale. Cela s’accorde bien avec le pronostic selon lequel une société dont les contradictions principales persistent ne peut pas être non plus totalement intégrée dans la conscience.
Car la délicatesse entre les êtres n'est rien d'autre que la conscience que sont possibles des relations affranchies de finalités utilitaires.
Être sociable, c'est déjà prendre part à l'injustice, en donnant l'illusion que le monde de froideur où nous vivons maintenant est un monde où il est encore possible de parler les uns avec les autres.
La barbarie perdure aussi longtemps que les conditions qui ont permis cette régression persistent. C'est cela l'horreur totale.
La nostalgie du Dimanche n'est pas le désir de retrouver le foyer après une semaine de travail, mais la nostalgie d'un état libéré de la nécessité d'un telle semaine.
Le timbre comme couleur (Klangfarbe) possède avant tout, par opposition aux moments rationnels, aux rapports entre les sons harmoniques, aux hiérarchies du système tonal, mais aussi par rapport à la rationalité du travail motivique-thématique traditionnel, quelque chose de diffus, de mimétique; quelque chose qu'on continue de consigner en fin de compte dans la langue à l'état de ruine, sédimentée dans le "stimulus sonore" et les choses de même nature.
Si la main ne tremblait pas, la volonté n'existerait plus.
Ce phénomène qui s'est produit en Allemagne, où les mouvements chrétiens "radicaux" comme la théologie dialectique de Karl Barth s'opposèrent courageusement au nazisme, ne semble en rien limité à l' "élite" théologique. Le fait qu'une personne se préoccupe réellement de la signification de la religion en tant que telle, lorsqu'elle vit dans une atmosphère générale de religion "neutralisée", est significatif d'une attitude non-conformiste. Cela peut conduire facilement à l'opposition contre le "type normal", pour lequel fréquenter l'église fait partie d'une "seconde nature", tout comme ne pas admettre les juifs dans son cercle. En outre, l'insistance placée sur le contenu spécifique de la religion, plutôt que sur la division entre ceux qui appartiennent et ceux qui n'appartiennent pas à la foi chrétienne, accentue nécessairement les motifs de l'amour et de la compassion, enfouis sous les modèles religieux conventionalisés. Plus la relation d'une personne avec la religion est "humaine" et concrète, plus son approche de ceux qui "n'y appartiennent pas" a des chances d'être humaine : leurs souffrances rappellent au subjectiviste religieux l'idée du martyre, inséparablement liée à sa pensée concernant le Christ.