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Citations de Théodore de Banville (161)


L'hiatus, la diphtongue faisant syllabe dans le vers, toutes les autres choses qui ont été interdites et surtout l'emploi facultatif des rimes masculines et féminines, fournissaient au poëte de génie mille moyens d'effets délicats, toujours variés, inattendus, inépuisables. Mais pour se servir de ce vers compliqué et savant, il fallait du génie et une oreille musicale, tandis qu'avec les règles fixes les écrivains les plus médiocres peuvent, en leur obéissant fidèlement, faire, hélas ! DES VERS PASSABLES !
Qui donc a gagné quelque chose à la réglementation de la poésie ?
Les poëtes médiocres. - Eux seuls !
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Théodore de Banville
En fait de vers, bien lire Hugo, c'est tout apprendre.
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C'est que, si vous êtes poëte, le mot type se présentera à votre esprit tout armé, c'est-à-dire accompagné de sa rime ! Vous n'avez pas plus à vous occuper de la trouver que Zeus n'eut à s'occuper de coiffer le front de sa fille Athènè du casque horrible et de lui attacher les courroies de sa cuirasse, au moment où elle s'élança de son front formidable et sereine comme l'éclair qui déchire la nuée. La rime jumelle s'imposera à vous, vous prendra au collet, et vous n'aurez nullement à la chercher ! Si au contraire vous n'êtes pas poëte, vous pouvez comme Boileau aller chercher votre rime au coin d'un bois et lui demander la bourse ou la vie ; vous pouvez même la poursuivre dans les pays torrides ou jusque dans les glaces où se perdit le capitaine Franklin, vous êtes certain de ne pas la trouver. Car, de même que certains hommes ont reçu du ciel le don de rimer, d'autres hommes ont reçu du ciel, en naissant, LE DON DE NE PAS RIMER. Don surnaturel et inexplicable, comme l'autre. M. Scribe, par exemple (après Voltaire,) avait reçu le don de ne pas rimer ; il le posséda jusqu'au miracle ; aussi faut-il admirer chez lui cette faculté sans vouloir l'expliquer, non plus qu'aucun miracle.
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La Reine Nicosis, portant des pierreries,
A pour parure un calme et merveilleux concert
D’étoffes, où l’éclair d’un flot d’astres se perd
Dans les lacs de lumière et les flammes fleuries.
Son vêtement tremblant chargé d’orfèvreries
Est fait d’un tissu rare et sur la pourpre ouvert,
Où l’or éblouissant, tour à tour rouge et vert,
Sert de fond méprisable aux riches broderies.
Elle a de lourds pendants d’oreilles, copiés
Sur les feux des soleils du ciel, et sur ses pieds
Mille escarboucles font pâlir le jour livide.
Et, fi ère sous l’éclat vermeil de ses habits,
Sur les genoux du roi Salomon elle vide
Un vase de saphir d’où tombent des rubis.
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Théodore de Banville
Chère, voici le mois de mai

Chère, voici le mois de mai,
Le mois du printemps parfumé
Qui, sous les branches,
Fait vibrer des sons inconnus,
Et couvre les seins demi-nus
De robes blanches.

Voici la saison des doux nids,
Le temps où les cieux rajeunis
Sont tout en flamme,
Où déjà, tout le long du jour,
Le doux rossignol de l’amour
Chante dans l’âme.

Ah ! de quels suaves rayons
Se dorent nos illusions
Les plus chéries,
Et combien de charmants espoirs
Nous jettent dans l’ombre des soirs
Leurs rêveries !

Parmi nos rêves à tous deux,
Beaux projets souvent hasardeux
Qui sont les mêmes,
Songes pleins d’amour et de foi
Que tu dois avoir comme moi,
Puisque tu m’aimes ;

Il en est un seul plus aimé.
Tel meurt un zéphyr embaumé
Sur votre bouche,
Telle, par une ardente nuit,
De quelque Séraphin, sans bruit,
L’aile vous touche.

Camille, as-tu rêvé parfois
Qu’à l’heure où s’éveillent les bois
Et l’alouette,
Où Roméo, vingt fois baisé,
Enjambe le balcon brisé
De Juliette,

Nous partons tous les deux, tout seuls ?
Hors Paris, dans les grands tilleuls
Un rayon joue ;
L’air sent les lilas et le thym,
La fraîche brise du matin
Baise ta joue.

Après avoir passé tout près
De vastes ombrages, plus frais
Qu’une glacière
Et tout pleins de charmants abords,
Nous allons nous asseoir aux bords
De la rivière.

L’eau frémit, le poisson changeant
Émaille la vague d’argent
D’écailles blondes ;
Le saule, arbre des tristes vœux,
Pleure, et baigne ses longs cheveux
Parmi les ondes.

Tout est calme et silencieux.
Étoiles que la terre aux cieux
A dérobées,
On voit briller d’un éclat pur
Les corsages d’or et d’azur
Des scarabées.

Nos yeux s’enivrent, assouplis,
A voir l’eau dérouler les plis
De sa ceinture.
Je baise en pleurant tes genoux,
Et nous sommes seuls, rien que nous
Et la nature !

Tout alors, les flots enchanteurs,
L’arbre ému, les oiseaux chanteurs
Et les feuillées,
Et les voix aux accords touchants
Que le silence dans les champs
Tient éveillées,

La brise aux parfums caressants,
Les horizons éblouissants
De fantaisie,
Les serments dans nos cœurs écrits,
Tout en nous demande à grands cris
La Poésie.

Nous sommes heureux sans froideur.
Plus de bouderie ou d’humeur
Triste ou chagrine ;
Tu poses d’un air triomphant
Ta petite tête d’enfant
Sur ma poitrine ;

Tu m’écoutes, et je te lis,
Quoique ta bouche aux coins pâlis
S’ouvre et soupire,
Quelques stances d’Alighieri,
Ronsard, le poëte chéri,
Ou bien Shakspere.

Mais je jette le livre ouvert,
Tandis que ton regard se perd
Parmi les mousses,
Et je préfère, en vrai jaloux,
A nos poëtes les plus doux
Tes lèvres douces !

Tiens, voici qu’un couple charmant,
Comme nous jeune et bien aimant,
Vient et regarde.
Que de bonheur rien qu’à leurs pas !
Ils passent et ne nous voient pas :
Que Dieu les garde !

Ce sont des frères, mon cher cœur,
Que, comme nous, l’amour vainqueur
Fit l’un pour l’autre.
Ah ! qu’ils soient heureux à leur tour !
Embrassons-nous pour leur amour
Et pour le nôtre !

Chère, quel ineffable émoi,
Sur ce rivage où près de moi
Tu te recueilles,
De mêler d’amoureux sanglots
Aux douces plaintes que les flots
Disent aux feuilles !

Dis, quel bonheur d’être enlacés
Par des bras forts, jamais lassés !
Avec quels charmes,
Après tous nos mortels exils,
Je savoure au bout de tes cils
De fraîches larmes !
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Théodore de Banville
Nostalgie

Bien souvent je revois sous mes paupières closes,
La nuit, mon vieux Moulins bâti de briques roses,
Les cours tout embaumés par la fleur du tilleul,
Ce vieux pont de granit bâti par mon aïeul,
Nos fontaines, les champs, les bois, les chères tombes,
Le ciel de mon enfance où volent des colombes,
Les larges tapis d’herbe où l’on m’a promené
Tout petit, la maison riante où je suis né
Et les chemins touffus, creusés comme des gorges,
Qui mènent si gaiement vers ma belle Font-Georges,
À qui mes souvenirs les plus doux sont liés.
Et son sorbier, son haut salon de peupliers,
Sa source au flot si froid par la mousse embellie
Où je m’en allais boire avec ma sœur Zélie,
Je les revois ; je vois les bons vieux vignerons
Et les abeilles d’or qui volaient sur nos fronts,
Le verger plein d’oiseaux, de chansons, de murmures,
Les pêchers de la vigne avec leurs pêches mûres,
Et j’entends près de nous monter sur le coteau
Les joyeux aboiements de mon chien Calisto !
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III. — MADAME LA LUNE

Pâle et grasse, et montrant des traits charmants, assez pareils à ceux du divin Théophile Gautier, madame la Lune, à demi couchée en arc dans une barque en ébène, ornée de plaques d’étain, de plomb et de cuivre jaune et d’incrustations de nacre et d’argent, avec une proue et une poupe très relevées, se promène sur le lac du Bourget, entourée des derniers poètes lunaires, chimériques petits-fils des bousingots et des Jeunes-France. Aussi extraordinaires que s’ils se promenaient sur le boulevard en habit d’Arlequins, ces lyriques blêmes sont rigoureusement vêtus à la mode de dix-huit cent trente, et il y en a même deux ou trois qui portent des bottes à glands et des manteaux où le vent s’engouffre !

Ils se recueillent en des poses fatales, et vaguement parmi eux apparaissent, avec des manches à gigots et des bandeaux moyen âge, quelques dames de la même époque, minces comme des saules, s’efforçant un peu d’avoir lieu, mais évidemment reléguées, par la nature même des choses, dans la flottante pénombre des rêves.

Au contraire, leur céleste Maîtresse, qui n’est restée étrangère ni à la modernité, ni au mouvement impressionniste, s’est habillée en Japonaise, pour flatter les idées récentes ; car son esprit est un peu attardé, mais sa coquetterie, non. Les cheveux très relevés par devant, elle est coiffée d’une tiare où le cuivre jaune, l’étain, le plomb, les perles, l’argent, et l’opale aux feux langoureux ont été mêlés dans les combinaisons les plus variées et les plus ingénieuses, et d’où s’échappent ses longs cheveux très noirs, poudrés de mica et de poudre bleue. Derrière la tiare, d’où tombent deux grandes pendeloques en jayet blanc et en or pâle, descend un long voile de gaze noir bleu, avec des dessins formant des méandres compliqués et longs en perles d’acier bleu.

Couchée sur une grande peau de chien noir, madame la Lune porte les unes par-dessus les autres plusieurs robes de satin, dont la plus intime est gris-perle, et dont les autres deviennent de plus en plus claires, jusqu’à celle de dessus, qui est d’un blanc bleuâtre, et que serre une large ceinture gorge-de-pigeon, ornée de plaques de métaux pâles. À son cou brille un collier fait avec des yeux de hiboux, et elle est chaussée de petits souliers recourbés en cuir blanc, aux semelles d’argent, ornés de croissants en cuivre jaune.

— « Ah ! messieurs et chers poètes, dit-elle d’une voix endormie, l’aimable lac, avec son château féodal sur une roche, et son couvent de moines : il n’y manque rien ! C’est là que Lamartine a chanté Elvire. Qu’elle devait être mince et aérienne pour avoir inspiré de tels vers mélancoliques, pareils au gémissement du vent dans les plaintives cordes de fer d’une harpe éolienne !

— Madame, dit un Oswald un peu entaché de réalisme, il ne faut rien exagérer. On assure qu’Elvire était une blanchisseuse…

— Ah ! soupire avec une petite moue la dame au front d’argent, ne m’enlevez pas vos illusions ! »

Et tout de suite, pour montrer que cela lui est parfaitement indifférent, elle rit en découvrant ses petites dents d’opale brillantes ; elle s’évente avec son éventail en plumes de jeune cygne, et le reflet de son céleste visage de Pierrot jette sur les flots doucement agités mille et mille paillettes d’argent, qui les ourlent de délicates et capricieuses broderies.
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II. — MONSIEUR LE SOLEIL

Au milieu d’un éblouissement de rayonnante fournaise, monsieur le Soleil s’apprête à monter dans son carrosse de topaze dont la portière est déjà ouverte, et dont les chevaux orangés, toujours cabrés, jettent par les naseaux des fusées de lumière et de perles. Il est vêtu en général romain, avec la fauve cuirasse aux ornements gaufrés, la ceinture au large nœud, les flamboyants lambrequins à franges au haut desquels brille une figurine d’Hercule, l’épée, le coutelas, et les chaussures de peau de lion à semelles épaisses, qui laissent passer le bout de ses pieds nus.

Sur sa flottante perruque de flamme est posé très haut un laurier de rubis d’où tombent de longs rubans de braise rose, et son visage d’or que coupe au-dessus de la lèvre la toute petite moustache droite, comme dessinée à la plume, s’encadre dans une cravate en dentelle de feu.

À quelques pas, dans un autre carrosse, on voit vaguement le profil de la vieille dame. Autour de monsieur le Soleil s’empressent les Astres princes et ducs, et à l’écart, un vieux courtisan, rougi à blanc et écrivant sur ses genoux, prend des notes. Cependant le Victorieux, le Porte-foudre a vu quelques-uns des rutilants seigneurs de sa suite réprimer un rapide sourire ; il veut en savoir la cause, et les interroge.

— « Eh bien ! dit-il à l’un d’eux, parlez franchement, je vous l’ordonne. Que dit-on de moi dans les gazettes ?

— Sire, murmure le seigneur incandescent, je n’oserais. Le respect…

— J’ai dit : je veux.

— Eh bien ! Sire, des esprits chagrins pensent qu’à force de tout éclairer trop nettement, votre aveuglante lumière rend les objets vulgaires et mesquins, en montre l’infirmité et la laideur, et que celle de la Nuit, avec ses tendres mollesses bleues, donne aux choses un charme plus pénétrant et plus intime.

— Bon ! dit monsieur le Soleil, en mettant le pied sur le marchepied du carrosse, ce sont là de simples idées romantiques, dont le législateur du Parnasse fera bonne justice. Et tout cela ne serait pas arrivé, si on avait continué à représenter régulièrement les excellentes pièces de théâtre de monsieur Racine ! »

À ces mots le carrosse se referme. Les Astres princes et ducs montent à cheval, et bientôt, carrosses et cavaliers et l’escorte de soldats, tout s’envole dans la clarté furieuse, et le cortège n’est plus que flamme et incendie, sauf les larges bottes à entonnoir des cochers, qui apparaissent toutes noires dans la gloire triomphale de l’universel embrasement.
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LA LANTERNE MAGIQUE

TABLEAUX RAPIDES


Trahi, deri, traderi, dère ; la, la, la, traderi, tradère ! Demandez la Curiosité ! Faites monter chez vous la belle Lanterne Magique ; il ne vous en coûtera pas plus que cinquante-cinq sols. Jusque-là c’était le plaisir des tout petits êtres ; mais, moi, j’ai inventé une Lanterne Magique à l’usage des grandes personnes, qui vous montrera mille tableaux ingénieux et divers, pour l’amusement des parents et la tranquillité des enfants.

Attachez un drap blanc sur votre mur, et cependant appelez-moi par la fenêtre, et mettez-vous en rang bien sagement, comme les spectateurs du mardi à la Comédie Française. Moi, je viendrai avec mon appareil, et alors vous aurez du plaisir pour votre argent. Vous verrez le Bon Dieu, et monsieur le Soleil, madame la Lune, mesdemoiselles les Étoiles, le Roi, la Reine, le Gendarme, le Bourreau, le Matin, le Midi, le Soir, les sept Péchés Capitaux, les Éléments, et beaucoup de figures d’une alléchante modernité.

Mes Tableaux rapides vous apparaîtront, groupés méthodiquement par douzaines, en l’honneur des douze Apôtres, et aussi du nombre de syllabes contenu dans le vers alexandrin, auquel je m’étais fort adonné du temps que j’étais poète, avant d’embrasser une profession honorable.

Mais je vous les expliquerai en prose, tout naïvement, sans économiser mes plus flambants adjectifs, non plus qu’un honnête ouvrier peintre n’épargne son outremer lapis, son jaune d’antimoine et sa laque de garance rose dorée, lorsqu’il s’agit de satisfaire de bonnes pratiques.
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I. — LE BON DIEU

Sous le portique dont les pierres sont de la lumière extasiée, brûlée d’amour, et dont le moindre atome, s’il pouvait s’enfuir, aveuglerait le troupeau fou des Soleils, le bon Dieu, en habit d’empereur, voit et contemple les Infinis, assis sur son trône. Sous ses pieds se déroule l’éther frémissant, avivé d’imperceptibles points étincelants, qui sont les Univers. Près de lui sont les Anges terribles, qui s’émeuvent parce qu’ils entendent venir jusqu’à eux des plaintes, des sanglots et des râles.

— « Oh ! Seigneur, écoutez, dit Ananiel. Ce sont des monde innombrables qui, refroidis et glacés, meurent de vieillesse. Voyez leurs cadavres se roidir, et pendre désespérément leurs chevelures inertes ! »

Mais à peine a-t-il parlé que des milliers de mondes nouveaux naissent, s’éveillent, grandissent et, semblables à des enfants joyeux, s’enfuient emportés dans l’ardente musique du Rhythme universel.

— « Mon serviteur, dit le bon Dieu à l’ange, pourquoi t’affligeais-tu sur ce que peut renouveler et réparer l’inépuisable Vie ? Mais dites, quel est ce cri plaintif et doux, que j’entends comme un faible murmure ?

— Seigneur, dit Zadakiel, prenant la parole à son tour, il vient de l’humble planète à jamais bénie où a été versé le sang divin. C’est un petit enfant de Moulins (Allier) qui voudrait avoir un polichinelle.

— Mais, dit Raziel, voyez, Seigneur ! Voici que sur cette même terre un féroce conquérant a dévasté les royaumes, détruit les villes, teint les fleuves de sang rouge. Il a lui-même égorgé des tas d’hommes qu’il a fait manger à son lion, et il a écrasé les cohortes sous les pieds de ses éléphants. Derrière lui il laisse des femmes éventrées aux lèvres blanches, des pyramides faites de têtes coupées, des champs où l’herbe ne repoussera plus, des squelettes de hameaux calcinés, et des chemins nus où il n’y a plus que de la cendre noire.

À ces paroles, les Anges baissent tristement leurs têtes. Mais comme la pensée de Dieu a pitié de leur tristesse, et comme le Temps n’existe pas pour eux, en levant les yeux de nouveau ils voient les temples rebâtis, les villes relevées, les jardins en fleurs, les champs pleins d’épis mûrs, et près des fleuves tranquilles, des mères au beau sein allaitant leurs enfants nouveau-nés, tandis que le soleil de midi baise les fronts des moissonneurs.

— « Messager, dit le bon Dieu à Raziel, tu vois que les maux et les désastres seront guéris, et que nulle douleur n’aura crié en vain. Mais va-t’en vite inspirer de bonnes pensées à la mère du pauvre être ingénu qui se plaignait tout à l’heure. Je tiens beaucoup à ce que ce petit enfant de Moulins ait son polichinelle ? »
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Jules de Rességuier, Sonnet

Fort
Belle,
Elle
Dort

Sort
Frêle ,
Quelle
Mort !

Rose
Close,
La

Brise
L’a
Prise
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La chimère (extrait)

Oiseau, je t'ai surpris dans ton vol effaré,
Je t'arrache à l'éther ! Femme, je te dirai
Des mots voluptueux et sonores, et même,
Sans plus m'inquiéter du seul ange qui m'aime,
Je saurai, pour ravir avec de longs effrois
Tes limpides regards céruléens, plus froids
Que le fer de la dague et de la pertuisane,
Te mordre en te baisant, comme une courtisane.
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Roland (extrait)

Roncevaux ! Roncevaux ! que te faut-il encor ?
Il s'est éteint l'appel désespéré du cor.
Hauts sont les puys et longs et ténébreux, mais Charles,
Frémissant dans sa chair, entend que tu lui parles,
Et, couchés à jamais pour l'éternel repos,
Les païens gisent morts par milliers, par troupeaux,
Sur le sable, à côté des Français intrépides.
Ah ! les vaux sont profonds, et les gaves rapides,
Et la rafale fait tournoyer sur les monts
Ces âmes de corbeaux qu'emportent les démons.
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Erinna (extrait)

Ô Rhythme, tu sais tout ! Sur tes ailes de neige
Sans cesse nous allons vers des routes nouvelles,
Et, quel que soit le doute affreux qui nous assiège,
Il n'est pas de secret que tu ne nous révèles !

Tu heurtes les soleils comme un oiseau farouche.
Ce n'est pour toi qu'un jeu d'escalader les cimes,
Et, lorsqu'un temps railleur n'a plus rien qui te touche,
Tu rêves dans la nuit, penché sur les abîmes !
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Le charme de la voix

Quand s’élancent leurs strophes d’or,
Il faut aux Odes qu’on admire,
Pour leur faire prendre l’essor,
Les instruments et leur délire.
Mais toi, mais toi, tu peux les lire !
Car la Muse t’aime, et tu vois
Qu’elle n’a plus besoin de lyre
Avec les chansons de ta voix.

Ta grave, ta charmante voix,
Pure comme un cristal féerique,
Est parfois si douce ! et parfois
Brûlante comme un vent d’Afrique.
Telle, à son rhythme symétrique
Prêtant les colères des Dieux,
Sappho, la déesse lyrique,
Parlait aux flots mélodieux.
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Les Cariatides /Livre premier


Madame Élisabeth-Zélie de Banville.

Ô ma mère, ce sont nos mères
Dont les sourires triomphants
Bercent nos premières chimères
Dans nos premiers berceaux d’enfants.

Donc reçois, comme une promesse,
Ce livre où coulent de mes vers
Tous les espoirs de ma jeunesse,
Comme l’eau des lys entr’ouverts !

Reçois ce livre, qui peut-être
Sera muet pour l’avenir,
Mais où tu verras apparaître
Le vague et lointain souvenir

De mon enfance dépensée
Dans un rêve triste ou moqueur,
Fou, car il contient ma pensée,
Chaste, car il contient mon cœur.

Juillet 1842.
p.1-2
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Nuit d'étoiles

La nuit jette sur la dune
Ses diamants comme un roi.
Elle est blanche comme toi,
Sous les doux rayons de lune.

Tes yeux, ô magicienne,
Confondent leur ciel obscur
Avec l’implacable azur
De la mer Tyrrhénienne.

Mille fleurs s’épanouissent
Près de son riant bassin,
De même que sur ton sein
De folles roses fleurissent.

Elle sait, la Nuit sacrée,
Mère des enchantements,
De quels épouvantements
J’ai l’âme encor déchirée.

O saphir ! azur sans voiles !
O calme délicieux !
La mer est comme les cieux
Resplendissante d’étoiles.

Mais de ta bouche fleurie,
Pour calmer ce mal cuisant
Tu me baises en disant
Que ma blessure est guérie.
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C’est le Chat qui va sur les toits miauler, gémir, pleurer d’amour ; il est le premier et le plus incontestable des Roméos, sans lequel Shakespeare sans doute n’eût pas trouvé le sien
(...)
Le Chat aime le repos, la volupté, la tranquille joie ; il a ainsi démontré l’absurdité et le néant de l’agitation stérile.
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Théodore de Banville
L’Automne

Sois le bienvenu, rouge Automne,
Accours dans ton riche appareil,
Embrase le coteau vermeil
Que la vigne pare et festonne.

Père, tu rempliras la tonne
Qui nous verse le doux sommeil ;
Sois le bienvenu, rouge Automne,
Accours dans ton riche appareil.

Déjà la Nymphe qui s’étonne,
Blanche de la nuque à l’orteil,
Rit aux chants ivres de soleil
Que le gai vendangeur entonne.
Sois le bienvenu, rouge Automne.
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Théodore de Banville
Massacre

Elle n’a pas treize ans; fillette à peine éclose,
Sa bouche en fleur a l’air d’une petite rose.
Avec un doux ruban d’azur autour du cou,
Elle va devant elle et sans savoir jusqu’où.
Affamée elle mange et dévore des pommes
Avec ses dents de nacre, et regarde les hommes
D’un air effronté, mais cependant ingénu.
Elle se réjouit de montrer son bras nu
En lorgnant au bazar quelque bijou de cuivre.
Si parfois un passant fait mine de la suivre
Et semble affriandé par ses minces appas,
Vite elle fait la dame et ralentit son pas.
On voit je ne sais quel mystérieux délire
Et quel affolement dans son vague sourire;
Et pourtant, malgré son manège triomphant,
Elle a bien l’ignorance auguste de l’enfant
Dans ses yeux pleins de grâce et de mélancolie.
Oh! quel deuil, la naïve innocence avilie!
Chantonnant son refrain comme un oiseau bavard,
Elle va sans repos le long du boulevart,
Traînant son corps fragile et son âme tuée,
Pauvre petite, hélas! déjà prostituée.

Mercredi, 12 janvier 1887.
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