Thibault de Montalembert

Les "méchants" sont plus intéressants, parce que pourquoi sont-ils devenus méchants ?

La vie universitaire, la Faculté comme lieu idéal de connaissance, d'échange et de création. Je crois savoir aujourd'hui, pour l'avoir côtoyée, que la réalité n'est pas forcément celle-là. Il y a autant, sinon plus, de mesquinerie, d'étroitesse d'esprit, de fatuité dans les milieux universitaires et intellectuels qu'ailleurs.

La littérature a toujours été pour moi ce lieu où l’imaginaire se déployait et prenait son envol. Longtemps elle a été un moyen d’échapper à la réalité, une forteresse, une cachette. Puis elle est devenue l’outil de ma liberté. Insensiblement, l’air de ne pas y toucher, elle m’a porté au-dehors. Grâce au théâtre, à la pratique de la scène, elle est devenue l’instrument avec lequel j’ai créé le monde et, finalement, rejoint les autres.

Je revois cette chaise à porteurs tapissée de velours jaune, poussiéreuse et confortable. Elle était reléguée dans un salon où s’entassaient pêle-mêle armoires, fauteuils, caisses de vêtements, animaux empaillés, qui formaient des murailles derrière lesquelles je me glissais. Les bruits et les rumeurs de la maison me parvenaient assourdis. Aux confins de ce désordre, enfin au calme, je m’enfonçais dans le creux lustré de la chaise, un livre sur les genoux.
C’était L’Île au trésor de Robert Louis Stevenson, Michel Strogoff de Jules Verne, Le Dernier des Mohicans de James Fenimore Cooper, la trilogie de Marcel Pagnol dont je garde un souvenir lumineux, la collection « Signe de Piste » et son Prince Éric.

Je n’ai jamais cessé de pratiquer cet exercice de la littérature lue à haute voix. Je m’y emploie avec un plaisir et une joie qui ne se démentent pas et qui vont même croissants.

La lecture a toujours été un moyen d'essayer de comprendre et de saisir sensiblement, et non pas intellectuellement, le monde. Un moyen d'approcher la dimension réelle de l'homme. Rien ne me bouleverse tant que de trouver chez un auteur l'écho de ma propre soif spirituelle, l'écho de ce que déjà enfant, je ressentais comme ce qu'il y avait de plus vivant en moi.