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Critiques de Thomas Edward Lawrence (41)
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Lettres

La plus vieille édition des lettres de T.E. Lawrence en France possède le charme des premières traductions, de celles qui ont longtemps marqué les esprits : David Garnett avait fait ce choix de lettres publiées en Angleterre et livrées dans une version française réalisée par René Étiemble et Yassu Gauclère aussi proche que possible de l'esprit de l'auteur, de sa manière de s'exprimer et de penser.

Les premières lettres mettent en évidence l'amour de Thomas Edward Lawrence pour l'architecture médiévale (religieuse et militaire) et elles ont pour destinataires ses amis de jeunesse, sa mère, ses frères, ou l'orientaliste C.M. Doughty ; et, par la suite, dès que le jeune homme est employé sur le champ de fouilles de Carshemish (Karkémish), sur l'Euphrate, elles s'adressent à l'archéologue David George Hogarth ; quand le champ s'étend à la politique et à l'action militaire, les correspondants se multiplient, et l'on y trouve des dirigeants, des officiers supérieurs et toutes sortes de gens d'influence ; l'écrivain s'adresse lui à quantité d'hommes et de femmes de plume (George Bernard Shaw, Thomas Hardy, E. M. Forster et tant d'autres) ; l'homme se livre à quelques personnalités et à quelques amis (et là, il se montre tel qu'il est, et l'on peut le trouver un peu dur, surtout à l'endroit de sa mère et des femmes). Comme simple soldat et mécanicien dans les rangs de la Royal Air Force, il revendique le droit d'assumer librement son nouveau rôle et son attachement à cette arme, sans qu'on le soupçonne d'avoir la moindre arrière-pensée politique ou d'agir sur commande, surtout quand l'on veut l'en éloigner (il y revient, mais, lorsque le terme du contrat d'engagement arrive et qu'il doit la quitter, c'est en homme perdu et sans avenir qu'il nous apparaît, comme s'il avait fait le tour de toutes choses et épuisé les bonnes raisons de continuer à vivre).



François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)

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Crusader Castles

Ce n'est pas une thèse, comme on l'a longtemps cru et écrit. C'est le mémoire d'un jeune homme qui fit ses études au Jesus College à Oxford de 1907 à 1910 et produisit ce texte comme Bachelor of Arts.

Thomas Edward Lawrence (1888-1935) s'intéressa fortement à l'architecture militaire et religieuse médiévale durant sa jeunesse, sans doute sous l'influence de son père Thomas Tighe Chapman, et il effectua en France, à commencer par la Bretagne, une série de visites pour y voir plusieurs de nos châteaux forts et de nos cathédrales (ayant fait de même dans son Pays de Galles natal). Il vint chez nous durant trois étés consécutifs, en 1906, 1907 et 1908. Il se déplaçait alors à bicyclette et envoyait à sa mère des lettres où il donnait ses impressions de voyage (il avait dans ses sacoches le Dictionnaire raisonné de l'architecture française du XIe au XVIe siècle d'Eugène Viollet-le-Duc, admiré par Lawrence-- et bien trop pour ce qu'il a fait à Carcassonne) .

Le plus important restait à venir : le long périple pédestre qu'il fit, en 1909,en Terre Sainte, au Liban et en Syrie, sur les pas des Croisés.

Il tira de tout cela ce travail "universitaire" ou scolaire accompagné de photographies, de plans et de dessins sous le titre de : L'influence des Croisades sur l'architecture à la fin du XIIe siècle (qui deviendra le livre Châteaux des Coisés publié par Golden Cockerel Press en tirage limité en 1936, un an après la mort de Lawrence).

Après 1918, Thomas Edward avait depuis longtemps tiré un trait sur son intérêt premier pour l'histoire médiévale, tout en continuant à s'informer et à faire ici et là des commentaires dans sa vaste correspondance suivie avec ses amis.

Ce n'est que récemment que les spécialistes de l'histoire lawrencienne et surtout les spécialistes de la castellologie sont revenus sur ce thême : après Maurice Larès et moi-même, nous avons vu plusieurs personnes reprendre la question, Robin Fedden, Hugh Kennedy, Nicolas Prouteau, Jean Mesqui et Alan Tami.



Que disait en gros Lawrence ? Que les Européens étaient partis en Croisade avec en tête le modèle du donjon quadrangulaire en pierre qu'ils implantèrent en Orient, sans être aucunement influencés par les exemples byzantins, arméniens et musulmans rencontrés sur place. C'est vrai pour la première partie de la démonstration : le donjon carré carré ou rectangulaire (sans les contreforts habituels visibles en Occident) a bien fait souche en Orient. Mais les influences croisées orientales et occidentales se sont bien interpénétrées. Il tenait le Château-Gaillard de Richard Coeur de Lion comme une forteresse de tradition européenne pure. Mais en est-on si sûr ? On pourrait aussi discuter sur le point de savoir d'où vinrent, à leur point de départ, les mâchicoulis et l'adoption du plan circulaire pour les tours (afin de résoudre la question des angles morts posée par les tours romanes ou "normandes").

Reste que le texte de Lawrence conserve bien de l'intérêt comme témoignage d'une passion et d'un point de vue qui est encore sujet à débat).



François Sarindar, auteur de Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)

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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

Traversée du désert, en long, en large, en travers et en chameau.



Les mémoires de guerre rapiécées de T.E Lawrence, Laurence d’Arabie pour la postérité, couvrent les deux années (1916-1918) de la révolte arabe contre les turcs. 2 ans et 900 pages pour trois bonnes semaines de lecture pour bibi d’Occitanie qui avait emporté ce classique pour un voyage en Jordanie de huit jours en se disant, prévoyant, qu’il aurait du mal à trouver une librairie en plein désert. Manquer d’eau, je veux bien mais pas de bouquins. En fait, j’aurai pu enchaîner avec un Paris Dakar en trottinette électrique pour espérer le terminer avant de rentrer.

Quel monstre ! Chaque page est un mirage, quête du point final comme celle d’une oasis, oh, oasis, ah ! J’ai ma dose de sable émouvants pour l’année. Plage de galets cet été. Tant pis pour le mal aux pieds.

Je vais la faire court, tellement il l’a fait longue. T.E Lawrence raconte comment a été fomentée et menée la révolte arabe contre l’Empire Ottoman, allié de l’Allemagne durant la première guerre Mondiale. Il raconte surtout le quotidien des escarmouches et embuscades auxquelles il a participé pour déstabiliser l’ennemi turc.

Archéologue de formation, l’historien se mua en homme d’action, épousant une cause qui devint pour lui une quête d’absolue. Elle fit sa légende et le regard de Peter O’Toole.

Ce qui m’a profondément marqué dans cette lecture, c’est la volonté de l’auteur de minorer son rôle dans l’histoire. S’il a largement contribué à la victoire et se révèle un extraordinaire stratège, il ne cesse d’être tiraillé par sa conscience concernant les ambitions cachées de son pays. Appuyer le mouvement nationaliste arabe qui veut s’émanciper de Constantinople dont le sultan appelait au Jihad en 1914, éviter tout soulèvement contre la présence anglaise dans le delta du Nil, s’assurer la maîtrise de la route des Indes, pipeauter des promesses d’indépendance qui tiendront davantage de la curatelle, et accessoirement, filouter les français dans la région au-delà des accords Sykes-Picot de 1916. Autant d’enjeux diplomatiques qui polluent les idéaux de l’homme d’aventure qui décrit si bien la honte de ses ambiguïtés dans ces pages. Petit complot de puissance coloniale au menu.

T.E Lawrence cherche donc aussi à casser son mythe, déboulonner sa statue avant que cela ne devienne à la mode, nuançant sa gloire militaire et contestant ensuite sa gloire littéraire.

Il partage par contre dans son récit sa fascination pour ses camarades arabes, nomades, fiers, fatalistes et instinctifs, pour les leaders du mouvement et notamment pour l’émir Fayçal, futur roi d’Irak, et roi éphémère de Syrie pendant 100 jours.

Dans ce récit flamboyant, il ne manque selon moi que deux choses : des femmes (pas une seule en 900 pages, cela relève de l’ascétisme), et… une carte, car on se perd vite dans le désert et sans panneaux, sans office du tourisme ou QR code sur le cul des chameaux, j’ai souvent perdu mon chemin dans ces pages entre La Mecque, Damas et Amann. Avis aux prochaines éditions.

Sans nul doute, « Les sept piliers de la sagesse » constitue un des plus beaux récits d’aventure du 20 ème siècle. Une lecture exigeante qui demande la patience d’un bédouin qui passe le balai devant sa tente un jour de tempête de sable mais qui parvient à magnifier des terres désolées.

Au fait, qui se souvient de la chanson qui a mal vieilli: "Fuis... Lawrence d'arabie" chantée par Annabelle en 1987. Ecoutez-là, elle vous hantera toute la journée.

Sinon, joli voyage. Je me suis pris pour Indiana Jones à Petra. On fait ce qu’on peut. Je n’ai pas les yeux de Peter O’Toole.





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La matrice : Journal du Dépôt de la Royal Air..

Lawrence d'Arabie a-t-il bien existé ? C'est à n'y pas croire, tant la mue est totale, après la période 1916-1921, du lieutenant-colonel britannique engagé dans la lutte contre les Turcs, alliés des Allemands pendant la Première Guerre mondiale et envoyé pour combattre aux côtés des Arabes d'autant mieux trompés qu'ils n'avaient servi aux Anglais que pour permettre à ceux-ci d'atteindre leurs buts de guerre : contrôler la partie du Moyen-Orient qui les intéressait et agrandir ainsi un Empire colonial soudain bien trop étendu pour ne pas devenir fragile, et tant le contraste est absolu entre l'homme qui raconte lui-même en la poétisant sa propre épopée au milieu des nomades dans le récit inoubliable intitulé Les Sept Piliers de la Sagesse, et cette expérience de "saint laïque" ainsi qu'il se plaisait à se définir lui-même, en s'enrôlant comme simple soldat ayant renoncé à tous les avantages liés à son grade d'officier pour vivre anonymement espérait-il au rang de subalterne dans l'armée de l'air britannique, cette Royal Air Force dont il avait salué la naissance avec enthousiasme et au sein de laquelle il espérait entamer une seconde vie, plus au ras de terre et loin des responsabilités aliénantes qui avaient été les siennes pendant le Premier Conflit mondial et lors du remodèment politique de la carte du Middle East entre 1918 et 1921, travail dans lequel il savait s'être compromis et sali les mains, bien qu'il se soit souvent menti à lui-même en déclarant s'être trouvé satisfait de la tâche accomplie auprès de Churchill au Colonial Office en 1921 pour essayer de pallier aux conséquences des erreurs commises entre 1918 et 1920 par les pro-colonialistes les plus cyniques du gouvernement de Londres et des représentants du pouvoir anglais en Inde qui avaient espéré régler à leur avantage la politique proche-orientale.

Mais il n'y avait pas que la politique et l'amertume de ses combats qui éloignaient T.E. Lawrence de sa défroque de Lawrence d'Arabie. Il y avait surtout l'envie de se débarrasser d'une identité et d'une peau dans laquelle il se sentait mal à l'aise, et d'échapper à une famille, et en particulier à sa mère Sarah Lawrence-Maden (S.A. dédicataire du poème des Sept Piliers de la Sagesse ne serait-ce pas Sarah Aurens, mère d'El Aurens, autrement dit Lawrence d'Arabie ?), qui lui avait caché son état de concubine de Thomas Chapman (qui aurait dû être le vrai nom de Lawrence d'Arabie finalement) et qui avait menti en laissant croire à son fils qu'elle avait mis au monde des enfants légitimes alors qu'ils étaient tous des bâtards ? le mensonge parental toucha plus T.E. Lawrence que ses frères et il voulut fuir cette famille et s'en créer une nouvelle en revêtant la belle livrée bleue des membres de la Royal Air Force, un uniforme dont il tirait une fierté perceptible dans sa Correspondance - faite de centaines de lettres toutes plus belles et toutes plus inquiétantes les unes que les autres - et dans ce livre apparemment déconcertant qui a été intitulé La Matrice. La Matrice, cela renvoie bien à la mère, et Lawrence, qui a pris le nom de John Hume Ross puis celui de T.E. Shaw - pour ne garder que ses prénoms et les reconquérir - a eu des mots très durs contre sa mère et la procréation, ce qui est apparent et transparent dans toute son oeuvre littéraire.

Le 30 août 1922, Lawrence gravit donc les marches de l'escalier de l'immeuble du numéro 4 de Henrietta Street, dans le quartier de Covent Garden, à Londres, jusqu'au dernier étage, la peur au ventre, pour pousser la porte du bureau de recrutement de la Royal Air Force puis pour gagner le dépôt d'Uxbridge où il devait faire ses classes.

Espérait-il passer incognito ? Cela ne dura guère. Dès décembre, la presse fut sur ses traces et une horrible campagne le conduisit en janvier 1923 à quitter l'habit de servitude qu'il s'était choisi. Après un enrôlement dans le Tank Corps qui lui fit horreur mais qui lui permit de s'intéresser à un cottage qui allait devenir célèbre sous le nom de Clouds Hill, il put, malgré la vive opposition de sir Samuel Hoare, ministre de l'air, et après l'intervention d'amis qui avaient craint un suicide, réintégrer les rangs de la R.A.F., forçant la main au premier ministre John Baldwin en juin 1925. Il allait rester dans cette arme jusqu'en 1935, non pas comme aviateur mais comme simple troufion puis comme mécanicien. Chose curieuse, il allait assister un jour au crash d'un hydravion militaire en mer, et cela allait le conduire à s'intéresser de près à la conception et au pilotage de vedettes nautiques d'intervention pour le sauvetage des équipages d'hydravions abîmés en milieu aquatique. J'ai pu souligner dans mon livre sur Lawrence que cette expérience le fit renouer inconsciemment avec sa famille par le fait que l'un de ses frères, William, le préféré de leur mère avait justement péri dans un accident d'avion en mer comme pilote de guerre pendant la guerre de 1914-1918.

Que vaut La Matrice ? Il ne faut pas chercher à comparer ce livre avec Les Sept Piliers de la Sagesse, chef-d'oeuvre et "triomphe" au style coruscant. Il faut lire La Matrice pour elle-même, la lire dans un milieu où la vie bat son plein, un café par exemple, car il est plein de crudité et de verdeur, comme on en trouve dans la troupe, et après tout Lawrence n'était pas ignorant de la chose. C'est une épreuve volontaire que Lawrence s'est imposé : vivre la monotonie et la routine dans les casernes, les bases aériennes, les dépôts, vivre l'humiliation des corvées de ramassage des poubelles - voir à ce sujet le passage intitulé Char à merde - ou du nettoyage de vaisselle dans de l'eau de moins en moins claire et celle non moins dévalorisante mais "façonnante" de l'obéissance à des caporaux et sergents tatillons et parfois inhumains.

Mais du mouvement aussi avec la course de vitesse entreprise au sol avec sa motocyclette filant à vive allure sur la route alors qu'au-dessus de sa tête vole un avion Bristol dont le pilote ne demande qu'à se prendre lui-même au jeu. Qui gagne ? Je vous le laisse découvrir. Ce passage est beau, tout comme il y a un bon rendu d'atmosphère avec l'arrivée à Lincoln, où tout semble dominé par la cathédrale, puis avec le passage par Nottingham. Il y a quelquefois de la Beauté pure dans ces pages et de la profondeur de pensée et de réflexion, jusqu'au milieu de la crasse et de la dureté de la vie dans l'armée vécue au plus bas échelon. Lawrence s'est-il humanisé à force d'en baver ? Pas totalement, il garde son quant-à-soi, ne fréquente pas les femmes mais ne s'interdit pas l'amitié avec certains gradés (on ne le voit pas dans ce livre, mais il sera très lié à Cattewater-Plymouth avec le wing commander Sydney-Smith et sa très belle épouse Clare qui écrira un petit recueil de souvenirs, The Golden Reign).

En fait au-dessus des sans-grades et des sous-officiers et officiers règne souverainement l'homme assez beau d'allure avec sa moustache à l'anglaise, le chef vénéré comme un père admirable que Lawrence n'a pas eu - malgré les portraits dythirambiques laissés par Lawrence de son propre géniteur, Thomas Chapman - et l'on sait que Thomas Edward vouait une admiration sans bornes à son plus haut supérieur le maréchal de l'air sir Hugh Trenchard.

Au bout du compte, Lawrence dit avoir trouvé le bonheur dans la R.A.F. Et l'on sent chez lui une difficulté à mettre le point final à ce livre étrange qu'est La Matrice, ni vrai rapport ou compte rendu comme il aurait dû l'être, mais exercice d'introspection d'homme plongé dans une vie de groupe où il est appelé, par la force des choses, à s'oublier lui-même. Il n'a jamais voulu de vraie conclusion à ce livre, car elle aurait pu marquer l'arrêt d'une expérience qu'il aurait aimé ne jamais voir s'achever.

Quand il dut quitter la R.A.F., Lawrence ne survécut que quelques mois et trouva la mort sur une petite route du Dorsetshire en mai 1935 alors qu'il tentait de rejoindre son hâvre désormais insuffisamment sécurisant de Clouds Hill.



François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)
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Crusader Castles

Thomas Edward Lawrence (qui se fera connaître plus tard sous le nom de Lawrence d'Arabie) visita dans sa jeunesse les châteaux forts anglais et gallois, puis ceux de France, notamment au cours d'un véritable tour à bicyclette durant l'été 1908, avant d'aborder, de juillet à fin septembre 1909, après une longue et sérieuse préparation, les châteaux élevés par les Croisés en Palestine, au Liban, en Syrie et jusqu'à la frontière de celle-ci avec l'actuelle Turquie. Il fit de ses lectures observations, reportages photographiques, dessins, plans et réflexions personnelles la base d'un mémoire qui devait lui permettre d'accéder en 1910 au grade de Bachelor of Arts. Son écrit de soutien intitulé : L'influence des Croisades sur l'architecture militaire européenne à la fin du XIIe siècle dit en fait tout le contraire de ce que le titre semblait annoncer. C'était une manière de voir les choses tout à fait originale au début du XXe siècle, et cependant l'universitaire C.T. Atkinson s'il jugea le travail bien présenté n'y trouva rien de formidable, ce qui n'était pas le point de vue des professeurs de Lawrence, plutôt enthousiastes et encourageants pour leur part. Aujourd'hui, malgré quelques sourires des castelologues et des historiens (je pense en particulier au spécialiste incontesté de l'histoire des Templiers, Alain Demurger), j'estime qu'il est nécessaire de réparer cette injustice à l'égard de Lawrence, qui ne me semble pas avoir fait un travail de potache, même si son approche ne répond pas vraiment à une méthodologie scientifique. Car T.E. Lawrence a quand même bien eu des intuitions : au contraire de ce que pensaient et de ce que pensent encore beaucoup des gens qui se penchent sur la question et qui tiennent pour chose certaine que les Croisés ont beaucoup appris de leur confrontation avec les Byzantins et les Musulmans en matière d'architecture militaire, et que les guerriers "francs" ont ramené en Europe occidentale des "recettes" apprises au Moyen-Orient, ce que nul ne niera, Lawrence a très finement noté que les guerriers partis vers ce qui allait devenir les États latins implantés sur les bords orientaux de la Méditerranée, apportèrent avec eux le plan quadrangulaire des tours maîtresses en pierre qui s'érigeaient alors partout en Europe. En fait, les deux choses sont vraies ensemble, et il a dû y avoir des courants dans les deux sens. Cependant, la rareté du bois comme matériau de construction au Moyen-Orient a fait que les voûtes de pierre ont presque immédiatement supplanté les planchers de bois encore fréquemment répandus en Europe pour séparer niveaux et étages. Quant au passage du plan carré ou rectangulaire des donjons et tours de séquence et d'angle des enceintes, au plan cylindrique parfait ou demi-circulaire avec ouverture à la gorge, avec essais intermédiaires de plans polygonaux, il a bien dû passer par un chassé-croisé continu entre l'Europe et les États des Croisés et par des innovations régulières. Au total, le travail plus ou moins rigoureux de Lawrence ne peut pas être négligé et mérite bien de la part de ceux qui s'intéressent à ces questions une attention particulière.

Maurice Larès était bien parti pour le démontrer quand sa santé et le soin que prenait de lui son épouse ont interrompu son effort dans ce sens. Une traduction du mémoire de Lawrence était en effet en cours de réalisation, mais cette démarche a brutalement pris fin. Il s'agirait à présent de la reprendre et d'accompagner cette version française d'un bon appareil de notes critiques.



François Sarindar, auteur de Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010).
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Guérilla dans le désert

Comment définir et analyser la guerre de mouvement et de raid, et donc de harcèlement, et la guerre psychologique conduites pendant la Révolte arabe dirigée par les Hachémites contre les Turcs de 1916 à 1918 ?

T.E. Lawrence théorisa beaucoup pendant et surtout après guerre, mais pour faire oublier qu'il n'était pas le concepteur des opérations ni le donneur d'ordres, et que si sa perception des choses, son implication et son esprit d'initiative furent loin d'être négligeables et donnèrent de merveilleux résultats, il n'a finalement fait qu'improviser et a cherché à donner sens à tout cela, mais après coup.

Si Lawrence a bien mis en musique à sa façon la prise à revers du port d'Akaba, sur la mer Rouge, en juillet 1917, et s'il a réussi de beaux "coups" dans les attaques de train et les destructions de ponts et de tronçons de voie ferrées entre Médine et Damas pour gêner le trafic ferroviaire essentiel pour l'approvisionnement et le déplacement des troupes turques - et a échoué dans quelques-unes de ses entreprises -, il a surtout bénéficié avec les Arabes d'un facteur chance et des coups de boutoir portés aux Turcs par les généraux britanniques Archibald Murray et Edmund Allenby en Palestine et en Syrie, qui ont permis aux troupes chérifiennes, placées plus à l'est, de remonter vers le nord en parallèle.

De sorte qu'il faut lire les écrits de Lawrence avec recul et circonspection, et ne pas regarder les résultats obtenus par les Arabes, sur le terrain, comme le fruit de leur seule bravoure et de leur infaillibilité guerrière.

Une observation plus fouillée des faits militaires et des tactiques employées permet de se rendre compte que plusieurs choses ont joué ensemble, plus qu'une idée stratégique de haut vol (impression donnée par la relecture lawrencienne des événements), dont l'application se serait imposée comme seul adaptée aux circonstances. Il faut par exemple relativiser la notion de "guerre de course dans le désert". La "petite guerre" conduite par les Arabes le fut certes avec une économie de moyens et de pertes, mais elle ne fut pas organisée scientifiquement ; elle le fut au mieux, avec parfois de très beaux résultats à la clé, et les résultats obtenus n'auraient certainement pas pu l'être sans le soutien financier (la "cavalerie de Saint-George") et l'appui logistique britannique et français. Ce qui n'enlève rien au courage et à l'audace des Arabes et de "Lawrence d'Arabie".





François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

J'avais une dizaine d'années lorsque j'ai vu le film de David Lean. Autant vous dire que je n'avais rien compris. M'étaient restés en mémoire les yeux brillants de Peter O'Toole et les images sublimes du désert traversé par des hommes juchés sur des chameaux. Depuis, je m'étais souvent demandée comment un officier anglais avait pu se retrouver à combattre dans le désert aux côtés des arabes dans une guerre dont j'ignorais tout. Bien entendu, les cours d'Histoire du collège et du lycée n'ont jamais répondu à mes questionnements. Il est d'ailleurs fort dommage que cet aspect de la 1ère Guerre Mondiale ne soit jamais abordé. Tout au plus nous dit-on que l'Empire Ottoman était allié de l'Allemagne et qu'il y eut des combats dans cette région. Contre qui ? Pourquoi ? Quelles conséquences ? L'école ne nous l'apprend pas et reste centrée sur le théâtre européen. Outre le fait qu'omettre cet aspect du conflit donne une vision tronquée, étriquée des faits, je pense qu'il y aurait là matière à intéresser nombre d'élèves. Le côté exotique pourrait apporter un peu de fraîcheur, un parfum d'aventure qui ferait un contrepoint du côté pesant de la guerre des tranchées. Je clos ici cette petite digression sur les lacunes de l'enseignement de l'Histoire pour en venir au récit de Lawrence.



Plus de 25 ans après mon visionnage du "Lawrence d'Arabie" de Lean (que j'ai maintenant très envie de revoir), me voici donc enfin à lire le récit de Thomas Edward Lawrence lui-même. Comme j'ai eu tort d'attendre si longtemps !



En premier lieu, lire "les 7 piliers de la sagesse" ce sera pour beaucoup de lecteurs (dont je fais partie) l'occasion d'apprendre beaucoup sur cet aspect finalement méconnu de la 1ère Guerre Mondiale. La description des différentes ethnies permet également de prendre la mesure de la complexité et de la diversité de la région à l'allure, déjà, de poudrière.



Ce côté très descriptif du récit ne doit pas laisser penser que l’œuvre en question se résume à un déroulé factuel d'événements. "Les 7 piliers de la sagesse" se lit bien plus comme un roman que comme un document. Non pas tant du fait des libertés qu'on pressent prises par son auteur mais bien par le souffle épique qui irrigue le récit. Lawrence raconte cette révolte arabe comme un roman. Un large lectorat devrait y trouver son compte. Les amateurs de récits militaires seront comblés ; combats, stratégies, sabotages, actes de bravoure sont au programme. Les amoureux de romans d'aventure seront aux anges. Le décor parfaitement dépeint par Lawrence a tout pour enflammer l'imaginaire et grâce à son récit au cœur de l'action , on partage la vie des bédouins, des éprouvantes traversées du désert aux pauses dans les oasis en s'offrant quelques passages dans les opulentes grandes villes comme Damas ou Beyrouth. Les férus d'Histoire auront quant à eux le plaisir de suivre dans le détail le déroulé des événements.



"Les 7 piliers..." étant un récit autobiographique, il n'évite bien sûr pas un aspect factuel parfois un peu répétitif. Et il y a bien quelques longueurs. Mais ces petits bémols ne viennent pas entacher le plaisir de lecture.



La plus grande qualité de l'ouvrage reste la plume de son auteur. Lawrence a un grand talent de conteur. Les descriptions des paysages sont magnifiques. Il transcrit parfaitement le côté grandiose des lieux. Lawrence sait aussi parfaitement décrire ses états d'âme, ses pensées intimes. Les passages d'action sont menés tambour battant. Quant aux différents protagonistes, ils sont superbement dépeints. Je ne sais pas dans quel mesure, Lawrence s'est arrangé avec la réalité pour recréer ces grandes figures mais le résultat est splendide. Les caractères sont finement dessinées, on va détester certains personnages, en adorer d'autres. L'acte de bravoure de Tallal m'a donné la chair de poule, nul doute qu'il restera dans ma mémoire.



Cette lecture passionnante ajoute encore à l'aura de mystère qui entoure Lawrence et donne envie d'en savoir plus sur lui. Quel a été son parcours avant cette guerre ? Qu'a-t-il fait ensuite ?

Et surtout, lire "les 7 piliers de la sagesse" fait regretter que Lawrence n'ait pas écrit de fictions. Avec sa qualité d'écriture, tant dans les descriptions que dans les émotions, il aurait fait un romancier merveilleux.



Challenge Multi-Défis 2016 - 26 (un livre de plus de 700 pages)

Challenge Pavés 2016 - 7

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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

Pourquoi lire les 7 piliers, alors que David Lean en a tiré un film inoubliable multi-oscarisé avec l'inoubliable regard bleu azur de Peter O'Toole ? Tout simplement parce qu'il s'agit d'un chef-d’œuvre de la littérature et qu'un film aussi bien fait soit-il ne peut jamais rendre parfaitement tous les aspects d'un chef-d’œuvre, et les 7 piliers n'échappent pas à la règle. Plus ennuyeux, il peut aussi la biaiser, et ici encore, c'est le cas.

Le Lawrence d'Arabie des 7 piliers n'est pas uniquement cet européen quelque peu exalté qui une fois la victoire arrivée sera trahi par ses supérieurs. Quand on lit Lawrence, transparaît aussi et inévitablement le vrai Lawrence : un soldat britannique (il finira colonel) aux ordres, pétri de préjugés européen et britannique (ah les pages où percent une franche francophobie !) auquel ses supérieurs ont confié une mission. Lawrence n'est pas un naïf qui a été trahi par les siens. Dès le départ, il a compris qu'il n'est qu'un pion dans une partie d'échecs (un Great Game au Proche-Orient) et que tout cela finira dans des conciliabules de ministères sur les bords de la Seine et de la Tamise. Mais pour autant c'est un pion qui ne renonce pas, qui cherche à infléchir le cours du jeu, qui se rebelle, qui tente d’infléchir le destin, son destin et celui des Arabes, dans une région où la soumission (c'est le sens original du mot islam d'ailleurs) est la règle : soumission au désert bien sûr, mais aussi soumission à la tribu, aux coutumes, à la mort.

Là où le film évoque l'immensité du désert, sa lumière, la fièvre des batailles, le livre lui évoque la réflexion humaine qui accompagna cette authentique épopée. A lire absolument, et vous regarderez le film d'un autre œil.
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

A l'occasion d'une recherches sur les arts libéraux, je suis tombé sur une possible interprétation du titre de ce livre que je trouve curieuse mais fort probable et dont j'aimerais garder une trace avant de l'oublier. Les sept piliers de la sagesse ne seraient pas autre chose que les sept arts libéraux enseignés dans les universités du moyen-âge : "La Grammaire [qui] parle, la Dialectique [qui] enseigne, la Rhétorique [qui] colore les mots, La Musique [qui] chante, l'Arithmétique [qui] compte, la Géométrie [qui] pèse, l'Astronomie [qui] s'occupe des astres (Gramm loquitur, Dia verba docet, Rhet verba colorat, Mus canit, Ar numerat, Geo ponderat, Ast colit astra. )."



Et (, pour l'instant,) c'est tout ce que j'ai à dire sur ce livre qui fait partie des huit cents ouvrages qui, avec une infinie patience, attendent d'être lus sur les rayons de ma bibliothèque .
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

L'évocation de certains livres me ramène à des moments de vie. C'est le cas des Sept piliers de la sagesse. Un livre aisé à mettre en image, par l'incarnation qu'en fit Peter O'Toole. Mais aussi un livre qui se nourrit des paysages que l'on traverse. Dans un horizon de sable, les sept piliers s'embrasent, et deviennent le livre de voyage absolu. L'épopée est extraordinaire, le souffle est épique, la traversée est grandiose, de ce monde qui change. A la croisée de la vision coloniale de l'empire britannique et du nationalisme arabe de Nasser, aux balbutiements de la conscience politique dans un monde en guerre, ce texte magnifique nous parle aussi du monde présent, alors que les tribus de Libye s'agitent, que la Syrie s'ébranle.
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Lawrence  (avant) d'Arabie

Je tiens tout d'abord à remercier Babelio et les éditions Interfolio de m'avoir proposé ce recueil à l'occasion d'une “masse critique non fiction”. Ce recueil de lettres permet de mieux cerner un caractère qui, pour moi, avait les traits de Peter O'Toole dans le film de David Lean. Les lettres que l'on peut lire sont toutes de T. E. Lawrence et il est quelquefois déroutant de ne pas lire une correspondance entière avec la réponse de ses destinataires. J'admets avoir eu du mal à m'y faire car il manque des éléments pour tout comprendre et parfois on ignore jusqu'au contexte des lettres. Néanmoins, on découvre un Lawrence peu connu car effacé par la légende. Jeune homme, il aimait beaucoup la bicyclette et entreprit un grand voyage en France, dont il profita pour visiter les châteaux médiévaux qui le fascinaient et les prendre en photo, une autre passion qu'il tenait de son père. C'est ce goût pour l'architecture qui le mena jusqu'en Orient. Il s'intéressait aux techniques architecturales qu'avaient pu rapporter les chevaliers en Occident pendant les croisades.

Les lettres sont très visuelles, on imagine sans peine à quoi ont dû ressembler ses voyages en Orient. En effet, il décrit son périple à ses proches qui ne se représentent pas du tout cette région, ce qui nous permet de la comprendre, nous aussi. Ses lettres reflètent l'importance que l'Orient prend peu à peu dans sa vie. Il s'émerveille de tout et tombe amoureux de cette région en 1909 pendant un voyage qu'il fait à pied entre le Liban et la Syrie !

Bien que le style de T. E. Lawrence soit très agréable à lire et visuel, il manque des éléments de contexte, des cartes et peut-être même des photos pour apprécier pleinement ces lettres et ne pas s'en lasser.

Un ouvrage que je recommande pour les amoureux de voyages, d'Orient et de littérature.



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Lawrence d'Arabie

Peut-il encore exister des "biographies autorisées" ? Cela éveille toujours un réflexe de méfiance ou de suspicion : on se dit, en lisant les ouvrages que leurs auteurs veulent ranger dans cette catégorie, que la version officielle s'efforce essentiellement de récupérer un personnage en le présentant comme on veut qu'il le soit pour que l'image de ce personnage ne soit pas déformée à force d'imagination. À moins que ce ne soit la crainte que trop de vérités ne soient dites qui anime le rédacteur de tels ouvrages.

En fait, là n'était pas vraiment le propos de Jeremy Wilson qui a réussi le tour de force d'écrire une somme avec cette biographie de T.E. Lawrence de plus d'un millier de pages.

N'est-ce pas trop ? À trop vouloir en dire, ne risque-t-on pas de se noyer dans les détails, des détails qui pourraient donner l'impression que l'on laisse échapper l'essentiel ?

Le choix adopté par Jeremy Wilson, d'aborder les choses non par thématique, mais dans un respect absolu de la chronologie complique peut-être la tâche du lecteur, mais, paradoxalement, il facilite le travail de l'historien et du chercheur. C'est le cas, par exemple, pour tout ce qui concerne les Sept Piliers de la Sagesse : il n'y a pas un chapitre où tout est concentré, et ce qui concerne la rédaction des différentes versions, les révisions et les éditions validées par l'auteur sont forcément traitées sur plusieurs chapitres, ce qui montre la complexité de l'affaire. T.E. Lawrence avait, à l'égard de son ouvrage, des réflexes contradictoires : il voulait que l’œuvre fût connue, et il avait tendance à considérer la guérilla dans le désert comme sa guerre, mais, comme il craignait toutefois les réactions de ceux qui avaient agi avec lui auprès des Hachémites, et qui pouvaient infirmer ou corriger ses propos, il veilla d'abord à vérifier leurs réactions en leur soumettant son ouvrage ; constatant qu'ils lui envoyaient tous des signaux positifs et ne trouvaient rien à redire, il comprit qu'il pouvait le diffuser un peu plus largement, mais, pour ne froisser personne, il eut alors l'idée d'une version abrégée, expurgée de certains aspects trop personnels (ainsi l'épisode de sa capture par les Turcs à Deraa est traité différemment d'une version à l'autre) et qui devait s'adresser à un plus large public (ce fut : Révolte dans le Désert) ; la version d'Oxford, plus longue que celle dont nous disposions jusqu'ici et qui en révèle davantage, nous est enfin connue.

Jeremy Wilson considère chaque étape, tout en se gardant de nous dire ce qu'il faut en conclure, et que l'on peut présenter comme je viens de le faire ici. Mais en adoptant cette attitude, il a fait un vrai travail d'historien, en se contentant de nous livrer les choses à l'état brut à la sortie des archives.

Il a procédé de même sur plusieurs sujets, sans émettre d'avis personnels ; c'est le cas, par exemple, sur la bâtardise de T.E. Lawrence et les circonstances exactes de sa naissance : Wilson dit tout, et s'il indique dans quel sens il faut interpréter tout cela, il ne s'avance pas davantage ; quand il évoque les conséquences de cette naissance adultérine sur le tempérament et la personnalité de Lawrence au long de sa vie, il s'abstient souvent de relier tous les éléments.

Si bien que l'impression générale est qu'il est difficile de recomposer l'ensemble et de se faire une idée générale, ce qui peut nous déconcerter. C'est l'esprit de synthèse qui manque parfois à cet ouvrage. En revanche, nous l'avons dit, il nous laisse là un outil précieux, qui permet d'avoir les informations voulues lorsque l'on fait une recherche à une date donnée.

Si bien que cette biographie reste, et pour longtemps, un précieux outil de travail.

François Sarindar, auteur de : Lawrence d'Arabie. Thomas Edward, cet inconnu (2010)

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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

Le colonel T.E.Lawrence était-il un agent secret mythomane et doue pour les lettres?Ou bien un chef de guerre,l'inventeur inspire de la guerilla?Sa transformation en bedouin fut-elle autre chose qu'un travestissement?Ou en était-il de son homosexualite?Le mythe de Lawrence tient a une existence et une personnalite hors du commun.Mais il ne serait rien sans cette autobiographie fascinante,ou se melent recits d'aventure,analyses politiques et réflexions philosophiques.

Un grand moment de littérature anglaise
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

″Pour la survie de la Grande-Bretagne, il nous fallait battre l’Allemagne dans les Flandres ; pour la survie de l’empire britannique, il nous fallait battre la Turquie en Syrie. ″



J’ai vu il y a fort longtemps Lawrence d’Arabie, et pourtant j’en garde un souvenir fort, tant pour la qualité du jeu des acteurs, l’esthétisme cinématographique, et cette musique lancinante qui m’inspire des envies d’évasion et de chevauchées dans le désert dès les premières notes.

Depuis un moment j’avais très envie de me plonger dans l’ouvrage qui a inspiré David Lean, et fait connaître au monde Omar Sharif.



Lawrence ne fut pas qu’un héros de cinéma, il fût avant tout un officier britannique, chevronné, qui se retrouva presque par hasard embarqué aux côtés des Arabes contre la domination ottomane dans la péninsule arabique au sens large, jusqu’aux confins de la Syrie. Nous sommes en 1916, il est alors envoyé comme agent de liaison auprès de l’émir Fayçal ; l’objectif est double : libérer l’occupation ottomane, et prendre Damas afin d’éloigner les Français, très influents dans la région.

C’est l’aventure d’une vie à laquelle T.E. Lawrence consacre cet ouvrage copieux, extrêmement détaillé et chronologique. Un ouvrage rédigé en 1919, dans un laps de temps de 6 mois, et dont l’auteur se fit voler la majeur partie quelques mois plus tard. Une seconde version fût rédigée à la hâte, puis remaniée, et retouchée avec soin, sécurisée. C’est la version dite d’Oxford, l’intégrale de référence.



Ce qui frappe, c’est la connaissance très précise des populations arabes composées de multiples tribus que l’auteur dans le cadre de ses missions a tenté de fédérer au maximum. Lawrence est un caméléon. Il adopte naturellement l’habit traditionnel, se fond dans les traditions tribales, souvent à ses risques et périls d’ailleurs. La première partie de l’ouvrage est consacrée à une forme d’état des lieux historique, une étude de mœurs, et à la psychologie d’un certain nombre de personnages que l’on retrouvera tout au long du recueil.

Outre l’aspect militaire, politique et sociétal, Lawrence fera dans tout son récit une véritable déclaration d’amour au Désert qu’il aura arpenté dans toutes ses dimensions à dos de méharée, à pied, ou en train. Il en aura exploré chaque pierre et chaque grain de sable. Il en ressort de somptueux passages, trop nombreux pour être tous cités.



La langue de Lawrence est éminemment littéraire. Qu’on se le dise, le texte est travaillé, parfois roboratif, exhaustif. On n’échappe pas à quelques longueurs qui ne sont rien à côté de la richesse de ce récit, de tout ce qu’il apporte de connaissances.


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La matrice

Mal de vivre, dépression, masochisme, besoin de dégradation, mythe de Sisyphe, voici les mots clés de ce texte qui décrit l'univers du troufion de la Royal Air force dans laquelle, T.E. Lauwrence s'est engagé sous un faux nom après son retour d'Arabie. Le texte fait état de la misère de la recrue de base et de la bêtise sans limite de l'univers militaire de bas niveau.
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

Un très grand livre, sec, pensif, un voyage intérieur qui approche par moments une sorte de "folie", qui évoque l'homme ordinaire dans une somme de circonstances qui, elles, sont extraordinaires. David Lean aidé du dramaturge Robert Bolt ont magnifié encore le récit en l'épurant, en le mutant (au grand dam des héritiers de T E Lawrence) en superbe épopée intimiste et lyrique. Depuis le film, l'engouement pour le livre n'a cessé de grandir.
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Les Sept Piliers de la sagesse - Intégrale

Dieu que j'ai eu du mal à entrer dans ce livre - en même temps, j'étais môme, c'était difficile et pas du tout habituel.



Du coup, il a fallu que j'aille m'enchantant de Lawrence d'Arabie pour y revenir - et pour une fois, j'admets, le cinéma servit la Littérature. On entre dans Lawrence comme on entre dans le Désert, et on est ébloui comme on peut l'être au matin quand le soleil caresse encore l'immensité fabuleuse des dunes rose-orange
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Guérilla dans le désert

Thomas Edward Lawrence en lecteur éclairé de Karl Von Clausewitz, voilà qui a donné de très imprévisibles résultats. A commencer par une guerre gagnée en s'épargnant les habituelles tueries caractérisant l'exercice. Rappelons-nous que nous sommes en 1917 et que dans le même temps les affrontements en Europe de la première guerre mondiale n'épargnèrent rien pour leur part. Toutefois les développements ultérieurs de la politique britannique au moyen-orient eurent des conséquences beaucoup moins satisfaisantes comme nous ne pouvons que le constater aujourd'hui. Ce n'était certainement pas ce que pouvait espérer et rechercher Lawrence. Cruel est le champ de l'histoire.
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Guérilla dans le désert

Cet ouvrage sent bon le sable chaud. Pas sûr qu’on puisse en dire autant du manuscrit, vu que l’auteur souffrait de dysenterie carabinée.

Quarante pages au long desquelles Lawrence d’Arabie expose les tactiques de la guerre dans le désert pendant la révolte arabe contre les Ottomans entre 1916 et 1918. Au programme, l’usure, le mouvement, le terrain et l’espace comme principaux acteurs d’un affrontement asymétrique.

Court et dense, un petit bouquin pêchu qui ouvre la porte à d’autres lectures stratégiques, à commencer par les références citées dans le texte de Lawrence (Guibert, Maurice de Saxe, von Moltke, Clausewitz…).
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La matrice

C'est dans une vente de livres d'occasion (50 ctmes d'euro le livre ! ) que j'ai acheté "La matrice" ," The mint" en anglais ( qui signifie également "menthe" - j'en perd mon latin ). C'est bien sûr le nom de Thomas Edward Lawrence, Lawrence d'Arabie, qui me décida a ajouter ce livre de poche édité en 1966 à la pile déjà conséquente de mes achats. (20 livres de poche : 10 euros ! ).





Pour un lecteur, babélien ou non, qui n'aurait pas lu les Sept piliers de la sagesse , ou qui n'aurait vu que le film de David Lean, La Matrice (titre donné par le traducteur Etiemble) , n'offrira qu'un passable intérêt ; juste un documentaire sur la formation des futurs aviateurs de la RAF en 1922. Formation semblable à toutes les armées du monde : nier l'individu pour mieux mettre en avant l'esprit de corps. Rien de nouveau sous le soleil et je dirai même cyniquement que c'est la condition sine qua none d'une bonne armée. Enfin d'une armée victorieuse.....car les défaites questionnent toujours les causes et les juges du lendemain ont vite fait de trouver que les conditions de formation n'étaient jamais assez dures.



Ce livre doit être replacé dans la biographie de Lawrence. Après l'armistice de 1918 et les accords Sykes-Picot qui établissent un nouveau découpage du Moyen-Orient ( je simplifie, les choses ont été plus compliquées...) , Thomas Edward Lawrence , simple officier de liaison mais instigateur de la révolte arabe contre l'Empire Ottoman (qui était allié de l'Allemagne) , se retrouve démobilisé. Et déçu. Son ambition de créer un Royaume hachémite unifié se heurta à la "réalpolitik" des" victorious powers". Tout cela se trouve dans ce chef-d'oeuvre qu'est "Les sept piliers de la sagesse" (que j'ai essayé de retrouver dans ma bibliothèque -en deux tomes chez Payot- mais vainement ; vendus ? donnés ? je ne peux le croire tant j'avais aimé ce livre, alors certainement égaré dans un déménagement....).

En 1922 il s'engage dans la RAF sous un faux nom : Ross. Il a 34 ans . C'est le sujet de "La matrice". C'est donc un "Lawrence d'Arabie" profondément désenchanté qui intègre " l'école du soldat" , les "classes" simplement pour le bidasse français ; "désireux surtout de s'avilir à jamais , par une sorte de suicide mental..." comme le dit très bien l'avant-propos du livre.

Je crois ( j'écris en pensant au babelien François Sarindar grand connaisseur de Lawrence , je marche sur des oeufs....) , que l'on ne peut pas comprendre le propos de " The mint" si on n'intègre pas les aspects les plus singuliers de la personnalité de l'auteur. L'épreuve qu'il s'est imposé en repartant de zéro peut se voir comme une rédemption ou tout simplement comme un pari nihiliste de destruction du moi. Il va être servi car la formation des futurs aviateurs , avant qu'ils ne s'envoient en l'air, est la même que celle des troufions novices de tous les pays : obéir. Se fondre dans un moule, dans une matrice. le soldat Ross expérimentera les affres d'une dure discipline avec un zèle masochiste qui en dit beaucoup sur T . E Lawrence.

Ecrit dans un style "rhapsodique" qu'accentue certainement la traduction d'Etiemble (j'y reviendrai...) , "La matrice" n'est pas un "livre plaisir". La litanie des jours , qui se suivent ...et se ressemblent, n'incite pas à la bibliophagie ! et pourtant... Quand il veut bien s'évader des contingences militaires, on retrouve le poète des "Sept piliers de la sagesse", notamment dans les descriptions de paysages, dans un raccourci saisissant, dans un dialogue surréaliste .

Un aspect intéressant également, et sociologiquement parlant : la césure entre l'auteur, issu d'un milieu bourgeois et cultivé, diplômé d'Oxford, grand lecteur, et la masse de ses compagnons plutôt originaires de la "working class" , friands de foot , de bouffe , et de sexe. Toute proportion gardée c'est ce que j'ai vécu pendant mes classes de parachutiste en....il y a longtemps. Non, je ne suis pas issu de la bourgeoisie (ou alors la petite...), mais j'étais déjà un grand lecteur, et ouvrir le soir dans la chambrée , les Mémoires d'Outre tombe, ça en jette quand vos voisins feuillettent Lui ! à condition de rigoler avec eux, quand même, de leurs blagues de cul....C'est d'ailleurs pour donner le change que j'ai lu tant de SAS à l'armée :-) Bon, je m'égare...



Un petit mot de la traduction d'Etiemble.

Etiemble, grand universitaire français, spécialiste de littérature comparée, sinologue, et...pourfendeur du "franglais" (un mot qu'il inventât ). Presque à chaque page une petite note de lui pour se justifier de l'emploi du terme français pour la traduction du mot anglais. C'est lassant. Je veux bien croire que le vocabulaire employé par Lawrence fait la part belle au langage parlé difficilement traduisible, mais une traduction moins littérale aurait assouplie la lecture de l'oeuvre de Lawrence (qui, rappelons le, est à l'origine une suite de notes décousues).

Petite curiosité : Lawrence parle à deux fois dans son livre de "football" . Etiemble écrit "futeballe" . Si !















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