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Citations de Thomas Tryon (16)


... Le vent chantait de vieilles chansons, comme il est dit dans le conte, et comme le vent nous chantions aussi, nous chantions : " Bonsoir Lady ! " devant la porte, le soir de Noël, mais Lady ne sortait pas. Pourquoi me demandais-je, pourquoi ? Lady, sortez, nous vous aimons... Moi, je vous aime. Pourtant, elle s'y refusait. Je ne comprenais pas alors, ni personne. Maintenant je comprends.
Y a-t-il une Lady Harleigh dans toutes les petites villes ? Tout ce que je sais, c'est qu'il y en avait une dans la nôtre.

[Thomas TRYON, "Lady", 1974 – traduction de Marie-Colette Huet, 1976, chapitre 1, page 13 de l'édition du Club Français du Livre]
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Je m'éveillai ce matin-là, au chant d'un oiseau. Ce n'était que le petit oiseau jaune qui niche dans le caroubier devant la fenêtre de notre chambre, et je lui aurais volontiers tordu le cou car il n'était pas six heures et j'avais la gueule de bois. C'était la fin de l'été, avant la Fête des Moissons, avant que l'oiseau ne quittât son nid pour l'hiver. Maintenant, le printemps est de retour, hélas ! et, comme prévu l'oiseau jaune est revenu. Ici, on appelle cela le Retour Eternel [...]

[Thomas TRYON, "Harvest Home", Alfred A. Knopf ed., New York, 1973 - traduit de l'américain par Mireille Davidovici : "La fête du maïs" pour les éditions Albin Michel, 1974 - chap. I]
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- Elle dit que tu ne devrais pas corner les pages quand tu lis, s'il te plaît.
Il vit vaciller le regard de sa mère
- Je ne fais pas ça. Personne ne devrait traiter les livres ainsi. C'est du vandalisme.
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Il neigea encore. Je les vis tous dehors sous le grand orme, occupés à faire des bonhommes de neige, une demi-douzaine au moins et, las d'être malade, je regrettai de ne pouvoir me joindre à eux.
– Ils fabriquent toute une famille de bonhommes de neige, imagine un peu ça, s'écria Lady à son arrivée.
Elle lança au loin son manteau de fourrure. Quand elle m'embrassa, je sentis sa joue fraîche contre la mienne, brûlante. Elle m'apporta un pyjama frais, blanchi dans les baquets à lessive d'Elthea et, quand je fus changé, elle me frictionna la poitrine à la pommade Vicks, puis m'épingla une bande de flanelle propre, tout en regardant à la fenêtre le travail en cours. Ensuite elle approcha son fauteuil et me fit, comme souvent, la lecture à haute voix. Ce jour-là ce fut "La Reine des neiges", "tout à fait approprié au temps", dit-elle.
Une expression, que je ne pus tout de suite déchiffrer passa sur son visage lorsqu'elle évoqua le lutin dont le miroir changeait tout ce qu'il reflétait en quelque chose de laid, dans lequel "le plus superbe des paysages ressemblait à des épinards cuits", et où les gens les plus beaux devenaient hideux. Elle lut cela avec dégoût comme si le miroir avait réellement existé.

[Thomas TRYON, "Lady", 1974 - traduction de Marie-Colette Huet, 1976, chapitre 5, page 71 de l'édition du Club Français du Livre]
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L'homme est bon quand il le veut, mais la femme est mauvaise quand elle l'ose.
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parfois lorsque cette impression de solitude s'emparait de lui, quand il avait la nostalgie de quelque chose... de quoi, il ne le savait pas bien... il lui venait souvent à l'esprit qu'il regrettait les Collines d'Ombre, un endroit où il n'était jamais allé. Drôle ! Comment pouvait-on regretter un endroit qu'on n'avait jamais vu ? Babylone, fin de la ligne.
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Alors que je leur ai dit, leur dis depuis des années que je m'appelle Holland, Holland William Perry. Mais on est comme ça, ici, à Babylone. A propos, Mlle Degroot a connu grand-maman Perry quand on l'a envoyée ici, vous voyez qu'elle doit être probablement vieille, étant déjà là à l'époque. Alors je reste dans mon coin. Surtout, j'aime observer les autobus de la ligne de la Colline de la vallée qui terminent leur course au carrefour et font demi-tour. Oh ! oui, on a supprimé les trams, il y a des années déjà, mais à part ça rien n'a beaucoup changé. C'est toujours le bout de la ligne.

[Thomas TRYON, "The Other", Alfred A. Knopf ed., New York, 1971 - traduit de l'américain par Colette-Marie Huet : "Le Visage de l'Autre"pour les éditions Albin Michel, 1973 - Chapitre de fin]
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De chaque côté de la route s'étendaient des champs de maïs déjà haut ; je dis que la récolte promettait d'être bonne et la Veuve acquiesça.
"Je le savais. J'ai écouté pousser le maïs pendant tout l'été. Oh! oui ; on l'entend très bien. Vous viendrez avec moi, une nuit, l'année prochaine. Ne riez pas, ce ne sont pas des balivernes, et vous l'entendrez, vous aussi. Le doux bruissement des feuilles, doux comme des ailes de fée. Et les tiges qui s'élancent vers le ciel, les épis qui se gonflent, petit à petit, jusqu'à ce qu'on entende éclater leur enveloppe. C'est quelque chose que d'entendre pousser le maïs, par une chaude nuit d'été, à la clarté mauve de la lune. C'est à ce moment-là qu'on peut dire que la terre a rendu la semence au centuple."
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Bientôt il ne resta plus personne, que moi.
Et le mouton étripé.
Et Missy Penrose.
Elle respirait par la bouche et émettait d'étranges sonorités, incompréhensibles, en regardant la cavité béante. "Mmm-um-nmm." La panse n'était plus rouge, une bile noire s'écoulait maintenant des tissus déchirés. Elle y plongea les doigts et les ressortit encore plus sanglants, encore plus noirs, les leva vers le ciel. Son corps se raidit et se mit à trembler. "Mm, um, nmm, mm."
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Russel Perry est au salon, dans son cercueil, offert à la vue de tous. C'est toujours du salon que les Perry sont emmenés au cimetière. Au salon qu'on les baptise, qu'on les fiance, qu'on les marie : morts, ils sont exposés au salon. Il en a toujours été ainsi : les stores baissés, le cercueil sur des tréteaux couverts de drap noir, retenu par des cordons et des glands ; avec des soupirs, des chuchotements, semblables à des ombres, des silhouettes se glissent sans bruit dans la pièce pour pleurer, pour s'abandonner à des regrets ou parfois, secrètement, savourer la mort, posant des lèvres chaudes sur la chair froide et rigide en un dernier adieu.

(Thomas TRYON, "The Other", Alfred A. Knopf ed., New York, 1971 - traduit de l'américain par Colette-Marie Huet : "Le Visage de l'Autre" pour les éditions Albin Michel, 1973 : chap. V)
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Elle a regardé autour d'elle, passant en revue les statues, mais sans paraître y trouver le moindre intérêt.
" – Cet endroit, a-t-elle dit, c'est un vrai cimetière de morceaux de marbre. Une mauvaise leçon d'anatomie -- rien que des débris d'êtres humains qui ne vivront jamais, qui n'ont jamais vécu. J'estime que les gens ont tort d'idolâtrer les objets anciens. Comme moi, voyez-vous.
" Elle a fait sa célèbre moue, suivie du sourire sardonique.
" – Il ne faut pas dessiner ici. Vous devriez descendre dans la rue, pour observer des êtres de chair et de sang. Vous avez de la chance, vous ; vous pouvez aller dans la rue sans être importuné par vos semblables. Que faites-vous d'autre, à part le dessin ?
" – Pas grand chose.
" – Alors vous feriez mieux de changer d'activité, sinon vous ne tarderez pas à mouri-i-r de faim-aim-aim.
" L'expression avait l'air de lui plaire.
" – L'art est difficile, a-telle repris d'une voix profonde de tragédienne, la voix de la Duse ou de Sarah Bernhardt, me persuadant d'emblée que si quelqu'un savait toute la vérité de cet axiome : " L'art est difficile ", c'était bien elle.
" De nouveau, elle m'a toisé.
" – Est-ce que vous vivez seul ? Non, ça ne serait pas votre genre, je vois bien. Comment est-elle ?
" – C'est une fille, voilà tout !
" – Comme toutes, bien sûr. Vous feriez mieux d'avoir un chat. Ca coute moins cher, et les chats, on peut les abandonner pendant le week-end.
" Elle m'a planté l'index dans la poitrine.
" – L'Art ou l'Amour. On ne peut pas avoir les deux, vous savez... Le moment vient toujours où il faut choisir.

(Thomas TRYON, "Crowned Heads", 1976 – "Fedora", traduction française par Colette-Marie Huet, pages 37-38, éditions Albin Michel, 1978)
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Le temps revêtait le passé d'une patine de tendresse et l'on ne se souvenait plus combien, en ce temps-là, l'homme devait travailler dur et longtemps pour se nourrir, comme il était difficile de mettre au monde un enfant, comme il y avait peu de médicaments, peu de confort ; combien la vie était austère.
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J'aimais l'atmosphère de ces lieux, leur aspect tranquille, bucolique, la sensation de paix qui se dégageait des maisons, des pelouses soigneusement entretenues, des jardins nouvellement fleuris. J'aimais cette vigueur, cette pérennité dont étaient empreints les passants eux-mêmes, des paysans simples, aux visages simples de campagnards. On sentait une sorte de vénération pour le passé, un effort intransigeant pour conserver les choses telles qu'elles étaient autrefois et peut-être même une résistance à admettre les choses telles qu'elles sont.
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Toutes deux avaient le corps en épis de maïs, de grands yeux dans une tête de paille, des jambes de paille et, pour vêtements, des chiffons en lambeaux. La poupée de Missy n'était qu'un jouet d'enfant, mais l'autre... Je contemplai son visage étrange, effroyable, essayant encore de comprendre ce qu'elle était. Elle représentait, de toute évidence, une femme car de grosses protubérances, des seins, étaient fixées au corps de maïs et le sexe était clairement défini par une fente profonde entre les jambes.
Qu'était-ce? Quelle main avait fabriqué cela? Je me rappelai tout à coup un de mes livres d'histoire de l'art. Je pris l'ouvrage sur l'étagère et l'ouvris au chapitre "Art primitif"...
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Le vent souffla de nouveau, de nouveau la chose cria. Le corbeau lança un croassement plaintif, mortuaire. Je me sentis soudain très seul au milieu de cette clairière. Je regardai de nouveau l'arbre, essayant de percer le secret de cette créature grotesque. Son expression de défi acharné était à la fois mystérieuse et révélatrice, preuve que la vie lui avait été dérobée à un moment de refus ou de protestation.
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C’est toujours au salon que les Perry sont amenés au cimetière. Au salon qu’on les baptise, qu’on les fiance, qu’on les marie ; morts, ils sont exposés ici et il en a toujours été ainsi : les stores baissés, le cercueil sur des tréteaux couverts de drap noir, retenu par des cordons; autour des soupirs, des chuchotements, semblable à des ombres, des silhouettes qui se glissent sans bruit dans la pièce pour pleurer, pour s’abandonner à des regrets ou parfois, secrètement, pour savourer la mort, posant des lèvres chaudes sur la chair froide et rigide, en un dernier adieu. C’est donc cela la mort chez les Perry.
Il y’a des gerbes de glaïeuls et une paire de chandeliers de Sheffield de chaque côté du cercueil, les mèches fumantes des bougies donnent à la pièce une atmosphère étrange en cette fin de matinée.
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