Author Series | Tilar J. Mazzeo | Sisters in Resistance
Le Ritz pendant la guerre, sera un foyer d’espionnage et de résistance. Dans les cuisines, certains employés formeront au péril de leur vie un réseau résistant qui transmettra des informations à l’extérieur de la capitale. D’autres cacheront des fugitifs dans des chambres secrètes sous les combles. Le barman d’origine juive fera passer des messages codés à la Résistance allemande, et c’est autour de ses célèbres cocktails, sous le nez de la Gestapo, que prendra forme un complot pour assassiner Adolf Hitler
Au Ritz, cependant, même les abris antiaériens sont de première class. Les caves sont équipées de tapis de fourrure et de sac de couchage Hermès, et le pétillant Noël Coward – un temps affecté à Paris au bureau britannique de la propagande pendant la « drôle de guerre » - ne pouvait réprimer un éclat ès qu’il se remémorait ls domestiques de Coco Chanel qui suivaient le pas de la couturière en portant son masque à gaz sur un coussin de satin.
Lors des premières journées parisiennes, Göring s’achète entre autres objet de convoitise un bâton de maréchal en or serti de diamants, commandé dans les plus brefs délais à la maison Cartier et qu’il paye à un prix dérisoire. On l’apercevra pendant l’été monter et descendre avec grandiloquence le grand escalier du Ritz, en tenue bizarre, l’esprit embrumé par la drogue, faisant tournoyer son bâton comme une majorette éméchée.
Hermann Göring s’est fait prescrire un traitement comportant de longs bains pour atténuer les symptômes du manque. Là, au Ritz, le médecin vient « immerger » Göring dans une baignoire, lui faire des piqûres, puis l’immerger à nouveau des heures durant, se souviendront les employés. Il fallait apporter au docteur des piles de serviettes et beaucoup de nourriture, parce que le procédé donnait à Göring une faim de loup.
Pour toutes les chambres qu’ils occupent au Ritz, les Allemands imposent une réduction de 90 % - ils payeront pour chacune en moyenne 25 francs par jour. Et à titre « d’invités » du peuple français, ils transmettront sans sourciller l’addition au gouvernement de Vichy.
Donnez moï ma carte, je ne peux pas survivre sans ma carte!
C'est la substantielle moelle de tout réel moment de décadence: on sait qu'une époque nous échappe déjà, inexorablement, alors même qu'elle est à son apogée.p33