Évidemment, comme je le lui avais dit, je croyais dur comme fer que le sort pouvait s’abattre sur deux êtres et faire tourner leurs têtes jusqu’à ce qu’ils en oublient même leurs prénoms.
Abbie s’appuyait sur une canne sculptée pour marcher et, lorsqu’elle s’était engouffrée dans la salle où nous étions, le parfum de vanille et de pâte à gâteau en pleine cuisson s’était amplifié dans nos narines. Je m’étais approchée d’elle et m’étais accoudée au comptoir. Son visage inspirait la confiance ; derrière ses rides, son sourire ressemblait à celui d’une jeune fille et ses yeux, d’un vert profond, semblaient quant à eux avoir traversé les siècles.
Ces moments étaient rares et précieux, maintenant qu'elle devenait une grande fille j'avais parfois l'impression de la perdre.
Je me surprenais toujours à remercier le monde de m'avoir donné deux si beaux enfants.