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Critiques de Tiziano Terzani (52)
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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

La prophétie d’un vieux devin chinois au printemps 1976 va changer la vie de Tiziano Terzani, (qui était) journaliste et correspondant du Spiegel, Corriere della Sera et de La Repubblica en Extrême-Orient. Vu son travaille qui nécessite moult voyages en avion sur longues distances, le voyant lui prédit que prendre l’avion durant l’année 1993 lui sera fatal. Une prophétie qui en outre de lui faire vivre une année (celle de 1993)unique et sans précédent, va aussi lui sauver la vie. C’est ce qu’il nous raconte dans ce livre, parcourant le Laos, la Thaïlande, la Malaisie, l’Indonesie, le Cambodge et son voyage annuel Bangkok-Florence aller-retour, en train, bateau,bus et taxis. “Dopo una vita sensata, all’insegna della ragione, mi permettevo ora una decisione fondata sulla più irrazionale delle considerazioni e mi imponevo così un limite senza senso.”(Aprés une vie sensée, passée sous l’insigne de la rationalité, je me permettais une décision fondée sur une considération des plus irrationnelles, m’imposant des limites n’ayant aucun sens”).



En Orient et L’Extrême-Orient , l’occulte fait parti de la vie quotidienne. Ce qu’on appelle en occident “superstitions “, fait partie de leur logique, leur culture, leurs coutumes, leurs croyances, bref de leurs vies. On va voir un voyant, ou personnage du même genre doté de pouvoirs occultes, comme on va chez le médecin. On ne prend aucune décision importante sans les consulter. Une fois le verdict tombé tout n’est pas finit, il faut encore marchander avec là-haut pour détourner le destin; le marchandage dépendant des divers croyances,animistes,bouddhistes,hindouistes

....qui gèrent le quotidien.



Un livre foisonnant d’anecdotes extraordinaires, de coutumes, de croyances...de la vie quotidienne de ces pays, racontés avec moult réflexions et beaucoup d’intelligence. Des attrape-morts de Bangkok, aux prisonniers politiques birmanes construisants des routes les chaînes aux pieds, des amulettes de bouddha qui doivent être rechargées, aux fascinants marchés birmanes aux divers costumes bigarrés des divers ethnies, des Wa coupeurs de têtes ( groupe ethnique de Birmanie) inséparables de leurs couteaux, à la Birmanie gouvernée par la prophétie, des thaïlandais qui ne quittent jamais leurs maisons sans amulettes portées sur leurs corps ( par ex. tatouages, un très spécial pour trouver un mari puissant et riche , ref .le texte :) ), aux “barber shops”, appelé aussi “Sexy barber”de Betong (Thaïlande ), de la secte des vierges végétariennes du Sumatra, qui lisent le destin sur les pétales de marguerite au sourcil de Bouddha à Phnom Penh.....

Un livre intéressant et passionnant, pleine de nostalgie. Durant cette année sabbatique où il va en profiter pour ralentir, observer, réfléchir, et faire le tour des devins, “dukuns”, de chaque ville où il se rendra, outre son vécu, les ressentis de Terzani avec ses doutes, ses remises en question, son exaspération face au destin et au déclin de ces civilisations de l’extrême-orient sous le joug du matérialisme et de la “modernisation “, sont émouvants. Un livre qui à travers un discours profond sur l’occulte, nous rappelle l’importance vitale des forces de la nature et par conséquent celle de nôtre propre force intérieure inée,délaissée et négligée au profit d’un monde de plus en plus concentré sur le matérialisme, le superficiel, l’apparence....une belle leçon de vie, pour qui veut encore prendre le temps de se poser et de réfléchir sur le but de la vie et l’essence du “bonheur” et de la paix intérieur dans ce monde déchaîné dont l’unique dieu est l’Argent.





Il cavallo di Troia è la «modernizzazione».........«Fermate il mondo. Voglio scendere!»

( Le cheval de Troie est la modernisation....”Arrêtez le monde. Je veux descendre !”)
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Un mondo che non esiste piu

Des photos de voyage en noir et blanc de Tiziano Terzani qui fut plus de trente ans ( 1972-2004) correspondant du Spiegel, collaborant aussi avec Corriera della Sera, La Repubblica et L'Espresso, en Extreme-Orient. Un livre publié posthume en 2010, l'auteur est décédé en 2004. Les photos et les textes qui les accompagnent, des extraits de ses différents livres sur ces voyages, ont été choisi par son fils Folco qui lui était très proche.

C'est l'histoire d'une passion, l'histoire d'un homme curieux, simple, humble et humaniste, parti à la recherche des restes d'une Asie, qui aujourd'hui désormais n'existe presque plus. Il disait « prendre des photos signifie chercher dans les choses ce qu'on a déjà compris dans la tête. Une photo réussie est l'image d'une idée. Faut savoir déjà ce qu'il y a derrière les faits pour pouvoir les représenter en photo. Sinon photographier,-clic!- tout le monde sait le faire. ».

Des images du Vietnam “libéré”, des restes d'une Chine ancestrale que le maoïsme n'eût pu venir à bout et d'où il fût expulsé en 1984, d'un Tibet emprisonné et triste, du Japon et de ses 86000 bandits « officiels », les yakuzas, du rire vif de la femme aux dents de fer des îles Kouriles, des grandioses paysages et de la petite fille à la poupée aux cheveux blonds et yeux bleus du Mustang, pays perdu des Himalayas.....jusqu'à sa dernière retraite dans l'Himalaya, les seuls photos en couleur. Un pur bonheur visuel , accompagné de magnifiques extraits de ses livres, riche d'anecdotes, de réflexions, d'us et coutumes peu connus.

Ce livre malheureusement n'a pas été traduit; un très beau livre que je vous conseille même si vous n'avez qu'un italien rudimentaire, ou même pas ( l'occasion à jamais d'apprendre l'italien ), car les textes sont faciles à comprendre. Il vient d'être publié en édition brochée et est aussi disponible sur liseuse.
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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

Un devin m’a dit en 1976 à Hong Kong :



« Attention ! En 1993, tu cours le risque de mourir. Cette année là, ne prends pas l’avion. Jamais ». Puis en guise de consolation, il ajouta : « Si tu survis à un incident d’avion, tu vivras heureux jusqu’à l’âge de quatre-vingt-quatre ans ». « A ce moment là, je vivais en Asie depuis plus de 20 ans ; d’abord à Singapour, puis à Hong Kong, Pékin, Tokyo enfin à Bangkok ; je pensais alors que la meilleure façon d’affronter cette prophétie était la manière asiatique : ne pas s’y opposer mais s’y plier ».





Tiziano Terzani est journaliste et comme tout correspondant, il passe sa vie dans les avions, toujours pressé par l’immédiateté de l’information. De surcroît, c’est un journaliste de renom influent, du Der Spiegel. Qu’à cela ne tienne, plus par défi que par conviction, celui-ci va alors trouver un accord avec son employeur.



Pendant toute une année qui va devenir pour lui la plus exceptionnelle de toute sa vie, Tiziano Terzani va parcourir l’Asie que ce soit par mer ou par terre. Il ne reculera devant aucun mode de transport. Il redécouvrira ainsi ses semblables asiatiques, toutes ces personnes que l’avion ne fait que survoler avec cette impression d’abolir les distances.



Mais surtout, il y a des passages extrêmement jubilatoires comme se le représenter brinquebalant dans une charrette ou en s’imaginant avec lui en train de descendre le Mékong. Cela procure une véritable sensation de dépaysement.



Cette prophétie aura été pour lui comme pour nous, lecteurs, l’occasion de prendre le temps de poser un regard sur l’Asie. Cette Asie si lointaine, si mystérieuse qui fascine par sa différence. Ce voyage impromptu qui peut s’apparenter à un voyage initiatique, lui permet de véritablement s’imprégner de l’âme de ce continent qui en cherchant à ressembler à l’Occident, perd peu à peu son identité et où, la disparition sournoise des traditions délitent les liens doucement.



Que c’est triste cette uniformisation, cette mondialisation. Auparavant, les voyages apportaient un véritable déracinement. Aujourd’hui, le voyageur trouve, dans toutes villes, les mêmes enseignes. Où sont passés les magasins authentiques qui étaient le reflet du mode de vie de nos hôtes ?



C’est passionnant, c’est vivant, c’est érudit, c’est très agréable à lire. Le lecteur est projeté dans un temple entouré de moines à la robe safran dès le début de l’aventure, enfin, en visitant le Tibet, j'y étais!



Tiziano cherche surtout l’humain, beaucoup de rencontres dans ce livre, beaucoup d’échanges au cours de ces rencontres. Chaque pays visité, au travers de ses habitants, livre une part de lui-même, de ses traditions, de ses croyances, de ses atrocités aussi car l’histoire du pays n’est jamais oubliée, de ses réalités sociales et politiques.



Curieusement, Tiziano qui jusqu’à présent, ignorait tout ce qui concernait de près ou de loin les sciences occultes, se met à compléter son périple par une visite chez un devin, un mage, un sorcier dans chaque contrée visitée. Qu’est ce qui peu bien pousser cet homme pressé, à consulter un devin, serait ce en réalité une quête spirituelle, une recherche ?



Alors si vous aimez l’aventure, découvrir d’autres cultures, d’autres traditions, d’autres relations au mysticisme, aux croyances, ce livre est fait pour vous.





Je termine mon commentaire en pensant à tous mes amies et amis très proches, originaires du Cambodge qui ont fui lors de l’arrivée des khmers rouges dans Phnom Penh où Tiziano était présent :





« J’avais plutôt été impressionné par les temples où l’œuvre de l’homme semblait côtoyer le divin. Il y a des endroits au monde où l’on se sent fier d’appartenir à l’espèce humaine. Angkor est un de ces endroits. Derrière la beauté sophistiquée et conceptuelle d’Angkor, il y a quelque chose de profondément simple, archétypal, naturel qui va droit au cœur. En chaque pierre se trouve une valeur intrinsèque et l’on emporte le souvenir de cette grandeur ».



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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

c’est le 1er l’ivre de cet auteur que je lis. Ce livre a été traduit par Isabel Violante. Il est né le 14 septembre 1938 à Florence. Ah Florence! Pour moi ça avait l’air d’une malédiction.

Mai pour moi, l’avions ne vole jamais.deux fois. Voila le devin. Le vieux chinois de Hong -kong. me parla. La meilleure façon de m’y opposer est de ne rien faire. Il évoque Siddharta de Hermann Hesse où le passé et le présent le futur sont toujours présents comme le fleuve. Les pii sont à contenter. Merci à mes fidèles lecteurs et lectrices.

Je faisais l’amok. je cherchais un oracle.

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La fin est mon commencement : Un père raconte..

Un tout grand reporter, la sagesse de l'expérience qui n'exclut ni les coups de gueule ni la prise de risques. La prise de risques, Terzani n'a fait que ça tout au long de sa vie. Il part en Amérique, il y apprend le chinois, il est italien, il va proposer ses services au Spiegel à Hambourg, il va s'installer en Asie avec femme et enfants en changeant régulièrement de pays. I couvre la guerre du Vietnam. Rien que les pages sur ces événements meurtriers et la manière dont Terzani est en première ligne avec son inséparable Leica valent la lecture. On est cramponné aux pages ! Après beaucoup d'autres reportages, Terzani, grand admirateur de Gandhi entre dans la non-violence avec autant de conviction qu'il a vécu les plus grands événements mondiaux des années 60 à 80. Atteint d'un cancer, il se réfugie dans une cabane de l'Himalaya. Impliqué avec son coeur et avec ses tripes, il cherche à raconter ce qu'il voit, entend et sent. Un récit envoûtant et très profond.

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Un autre tour de manège

Tiziano Terzani a le cancer. Les médecins qui le prennent en charge à l’hôpital de New-York le font un peu flipper. Au programme : chimio et radiothérapie, mais surtout déprime et espoirs bidons. Tiziano Terzani a toujours eu l’âme baroudeuse. S’il a passé sa vie à voyager en tant que journaliste, il décide cette fois de partir en quête du remède miraculeux qui pourra vaincre son cancer mieux que la chimiothérapie. Lorsqu’il annonce sa maladie à un médecin d’origine indienne, celui-ci lui répond : « cela a dû être le moment le plus sacré de votre vie ». Tiziano va chercher le remède à son cancer mental pendant que les médecins occidentaux se chargeront de réguler son cancer physique.





On aurait pu s’attendre à ce que Tiziano Terzani nous fasse le récit d’un voyage merveilleux à travers les landes d’un Extrême-Orient fantasmé où tout ne serait qu’harmonie et sagesse. Et si nos préjugés nous rendaient responsables de la cancérisation généralisée de notre monde ? Après tout, même les mystiques indiens les plus modernes ont pu succomber du cancer, que l’on pense à Krisnamurti ou Maharaj. En traversant les territoires les plus sacrés de l’Inde, Tiziano Terzani doit bien reconnaître que ceux-ci ne ressemblent plus que de loin aux lieux sacrés décrits dans les grands livres. Ils se sont maintenant transformés en parcs d’attraction pour touristes occidentaux en mal de spiritualité. Alors, Tiziano Terzani ne cesse de décrire des allers-retours entre le monde oriental et le monde occidental à la recherche d’un équilibre convenable entre science et sagesse spirituelle. En occident, il se moque des groupes de yoga ou de reiki qui ont vidé les disciplines de leur substance pour apaiser quelques heures les angoisses de ses contemporains. En orient, il se moque des guérisseurs orientaux qui préparent de la pâtée pour chats en broyant des herbes et des minéraux. Même s’ils utilisent des remèdes naturels, ils ne pensent finalement qu’à soigner le corps, comme les médecins occidentaux, alors que la quête de Tiziano Terzani indique qu’il recherche avant tout la paix de son esprit. Mais qu’il s’agisse des traitements proposés par la médecine occidentale ou orientale, il salue les efforts de toutes les personnes qu’il rencontre lorsqu’elles essaient de donner un sens aux maladies que l’homme doit affronter. Ce qu'il refuse désormais, ce n'est finalement rien d'autre que la contre-façon.





« A la fin, tout le monde était content, tout le monde disait avoir ressenti de la chaleur, de la lumière, de l’énergie. Moi, j’avais seulement senti le sang me monter à la tête. Je n’en pouvais plus du rationnel, mais j’étais tout autant horripilé par son contraire. C’était mon dilemme : il me semblait que seul ce que j’avais découvert par moi-même, ce que j’avais l’impression d’avoir conquis, était intéressant et avait de la valeur ; a contrario, ce que je trouvais sur les étagères d’un supermarché me rebutait. […] Maintenant que je me trouvais parmi des « croyants », je redevenais un sceptique invétéré. »





Tiziano Terzani n’a pas vaincu son cancer mais il n’y a pas succombé non plus, acceptant toutes les méthodes thérapeutiques qu’on lui propose mais n’en acceptant exclusivement aucune. Son récit montre le bilan d’un homme qui essaie de garder l’esprit critique dans toutes les situations qu’il traverse. C’est sa force vitale, celle qui lui permet de prendre ses distances quant à toute situation d’élection, et sa passion immodérée pour les cultures et les personnes qu’il rencontre, qui lui ont sans doute permis de prolonger sa vie au-delà des pronostics les plus optimistes des médecins occidentaux.
Lien : http://colimasson.blogspot.f..
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Un autre tour de manège

Ce livre bouleversant est le testament d'un grand reporter approchant la soixantaine et en sursis temporaire après un cancer. Il a choisi de mettre son sort entre les mains de la médecine classique, mais sa soif de voyage et son attirance pour les médecines alternatives le conduisent à parcourir le monde, et plus particulièrement l'Inde où il a passé une partie de sa vie, à la recherche, plus que d'un remède, de la sagesse dont il a besoin pour donner un sens à sa fin de vie. Entre l'Amérique et l'Inde, entre la science et la spiritualité, c'est deux conceptions radicalement différentes de la vie et de la mort qui s'opposent. Malgré le contexte, ce n'est pas un livre triste mais au contraire un voyage vers la sérénité et une superbe leçon de vie. A lire sans réserve.
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Le grand voyage de la vie : Un père raconte à s..

Un voyage merveilleux, magique. Le sujet est ambitieux et extrêmement passionnant.
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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

« Dans la vie, il se présente toujours une bonne occasion. Le problème, c'est de savoir la reconnaître et parfois ce n'est pas facile. La mienne, par exemple, avait tout l'air d'une malédiction. Un devin m'avait dit : "Attention! En 1993, vous courrez un grand risque, celui de mourir. Cette année-là, ne volez pas, ne prenez jamais l'avion." Cela s'était passé à Hong Kong. J'avais rencontré ce vieux Chinois par hasard. Sur le moment, ces mots m'avaient frappé, évidemment, mais cela ne m'avait pas tracassé. Nous étions au printemps de 1976, et 1993 me semblait encore très loin. Toutefois, je n'avais pas oublié cette échéance. Elle était restée dans mon esprit, un peu comme la date d'un rendez-vous auquel on n'a pas encore décidé si on ira ou non. »



Terziano Terzani décide de suivre les prédictions l’oracle et ne prendra pas l’avion pendant une année. Bon prétexte pour renouer avec l’Asie qu’il a connue quelques années plus tôt, qu’il aime. Il en voit le changement, la « modernisation », autrement dit l’occidentalisation.

Une année, non pas entre parenthèse, mais une année de flânerie, de méditation, de réflexion, de poésie, de rencontres, de retrouvailles… bref, une année très riche. Le Journaliste, correspondant en Asie de l'hebdomadaire allemand Der Spiegel redécouvre le plaisir des voyages lents, la vie quotidienne « Tous les endroits se ressemblent quand on les atteint par l’avion, sans un effort minimum : de simples destinations séparées entre elles par quelques heures de vol. »

Dans chaque ville, chaque village, chaque pays où il séjournera il demandera l’adresse d’un voyant. Les résultats ne sont pas toujours à la hauteur, mais… il y a toujours un petit quelque chose. Est-ce l’art divinatoire, est-ce l’habitude d’observer leur « client », est-ce de la psychologie, est-ce son besoin d’y trouver quelque vérité. En occident, officiellement, on se gausse des personnes qui consultent, « En Asie, en revanche, la sphère occulte sert encore aujourd’hui pour expliquer les faits divers, au moins autant que l’économie et, jusqu’à une époque récente, l’idéologie. ».

Avec ce voyage tout en lenteur il redécouvre la Birmanie, la Thaïlande, le Cambodge, le Vietnam… Ce qu’il y voit ne lui plait pas trop. En effet, une occidentalisation (une américanisation) à marche forcée fait disparaître toutes les vieilles habitations, les vieux quartiers et, même, la spiritualité asiatique. Les villes ne respirent plus, aucun courant d’air frais ne vient rafraîchir les habitants, étouffés par les tours, autoroutes construites sans schéma (cela me fait penser à ses autoroutes françaises construites dans des couloirs d’orages, de neige, avec tous les désagréments)

Terziano Terzani nous fait découvrir l’autre face du « progrès », de la modernisation de l’Asie. Ce livre, biographie, carnet de voyage, grand reportage ; un peu roman d’aventure, philosophique, spirituel ne se lit pas d’une traite. Comme l’auteur décide de prendre son temps pour voyager, j’ai fait des escales qui m’ont permis de réfléchir à ce qui est écrit. Oh ! Je vous vois venir ! Non, ce n’est pas barbant du tout, au contraire.

L’écriture, classique, est belle. Je pense que la traduction lui a gardé cette beauté. J’ai aimé ce voyage dans le monde asiatique des sciences occultes. Ce que l’auteur dit sur la destruction de la spiritualité asiatique est plus inquiétant car il me semblait que c’était la base de leur civilisation.

Une pépite qui se déguste sur la longueur. La 4ème de couverture est un très bon résumé. e ne suis pas certaine d'en avoir bien parlé, mais j'aimerais vous avoir donné l'envie de le lire.


Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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Bonne nuit, Monsieur Lénine

Le nom de Tiziano Terzani ne vous dit peut-être rien. Il s’agit pourtant d’un grand reporter italien, qui semble avoir vécu plusieurs vies en une seule.



En août 1991, le voilà embarqué pour une croisière sur le Fleuve Amour. L’occasion de découvrir ce fleuve légendaire en compagnie de compatriotes russes et chinois.



Seulement, l’Histoire se mêle à leur histoire lorsqu’un putsch éclate à Moscou donnant, ainsi, une nouvelle perspective au voyage. 



Terzani souhaite se rendre à Moscou pour observer les événements depuis la capitale, l’œil du cyclone. 



Mais les événements vont se jouer de lui. Le putsch est un échec qui sonne le glas du bloc communiste.



Le journaliste décide d’analyser cet événement majeur mais, cette fois-ci, depuis la périphérie, lors d’un périple qui va le conduire au sein des républiques socialistes d’Asie centrale. Avec une question centrale : comment le communisme pouvait-il mourir ? 



Car oui, si le bloc de l’ouest avait tendance à ne voir en l’URSS qu’un bloc monolithique, les républiques socialistes vont reprendre dans la foulée leur indépendance.



Le journaliste va vite réaliser que souvent, elles vont se trouver confronter aux mêmes difficultés : des communistes au pouvoir qui vont juste changer d’appellation, la montée du fanatisme religieux et des forces démocratiques exsangues. 



Le journaliste livre le témoignage, parsemé d’anecdotes, d’un système communiste gris et sombre ayant échoué dans son projet. D’une corruption et d’une manipulation généralisées. D’une spécialisation des productions conduisant à l’interdépendance et l’appauvrissement des états satellites. 



Un tel témoignage, avec toute la subjectivité d’un homme, offre un point de vue intéressant sur les événements racontés dans les livres d’histoire. Une vision plutôt critique du monde socialiste, que j’ai eu plaisir à parcourir avec un ordinateur à mes côtés pour voir si les prévisions de l’auteur se sont révélées justes ou non. 



Un livre qui se savoure et donne envie de voyager !
Lien : https://allylit.wordpress.co..
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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

Sans conteste, cette lecture est une des plus passionnantes faite ces derniers mois. L'auteur, journaliste italien et grand voyageur, s'étant frotté à toutes sortes d'aventures et de terrains de guerre, décide de ne plus prendre l'avion pendant un an sur la foi d'une prophétie. Bien sûr, il n'y croit pas vraiment, mais se pique au jeu, fatigué de passer d'un aéroport à l'autre et de ne plus avoir le temps de se poser vraiment nulle part.



Il commence par nous expliquer comment il a pu s'arranger avec son employeur pour continuer à travailler avec une telle contrainte. L'auteur se donne pour mission de rencontrer un devin dans chaque ville et pays visités. C'est l'occasion d'un vaste panorama des croyances implantées en Asie et de leur influence sur la population. L'auteur repère rapidement que les prédictions sont en lien direct avec la société où vit le devin. Par exemple l'argent est omniprésent dès qu'il s'agit des Chinois. Il a plus affaire à des personnes ayant un sens de l'observation développé et un bon sens tout court, qu'à de vraies révélations. Quoique, certaines rencontres l'ont beaucoup troublé, mais toujours il essaie de rationnaliser.


Lien : http://legoutdeslivres.canal..
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La fin est mon commencement : Un père raconte..

[Lu dans le texte, existe aussi en traduction française]



Tiziano Terzani a été, de toutes les personnes que j'ai connues personnellement ou par leurs écrits, celle qui s'est le mieux préparée à sa mort. Mort joyeuse, abandon d'un corps désormais déformé et endolori, mort acceptée après s'être détaché de tout désir, angoisse et regret, dans un sentiment de réalisation de soi et de conjonction avec l'univers.

Dans ses trois derniers mois, Tiziano demande à son fils Folco de conduire avec lui un entretien-fleuve, reproduit presque verbatim, qui se présente donc comme un bilan de sa vie – biographie personnelle, professionnelle, affective – vie de grand reporter, écrivain et voyageur, mais surtout bilan de son cheminement intellectuel, politique, culturel et spirituel. Par-delà ses expériences d'études aux États-Unis, puis de travail d'enquête au Vietnam, au Cambodge, parmi les premiers journalistes occidentaux accrédités en Chine, puis au Japon et enfin en Inde, on peut apprendre en effet la manière de faire et l'éthique qui sous-tendirent son engagement et sa vie tout entière.

D'autres livres parmi ses derniers, qui n'étaient plus à proprement parler des ouvrages journalistiques (encore que...), en particulier : Un altro giro di giostra (titre mal traduit par : Un autre tour de manège), m'avaient donné de l'auteur une vision presque prophétique, d'un homme très avancé dans un chemin sur lequel moi-même et la plupart des gens qui m'entourent ne sommes qu'aux premiers pas. Pour beaucoup, je crois qu'il en a été ainsi, dans les dernières années de sa vie (les années 2000) et sans doute ensuite.

Et en même temps, ces ouvrages étaient spécifiques, avaient pour thèmes : le voyage en lenteur et la diversité culturelle (Un devin...), le pacifisme après le 11 Septembre (Lettres contre la guerre), le journal d'un malade de cancer (op. cit.).

Dans cet ultime témoignage, dont j'ai longtemps reporté la lecture, probablement redoutant une trop forte intervention du fils – crainte injustifiée – l'image de Terzani qui évolue au fil de sa vie prend toute sa consistance, je découvre même chez lui des périodes de dépression (au Japon), les doutes de sa désillusion politique, qui superficiellement m'avait paru reproduire à l'identique la déception après l'engouement que tant d'intellectuels occidentaux ont éprouvés pour le maoïsme.

On trouvera donc dans ce récit tout ce qu'on y cherchera : l'histoire d'une vie aventureuse, un vade-mecum pour reporters-écrivains-voyageurs, un essai sur les errements de l'homme contemporain, sur les perversités du pouvoir et du politique, une leçon sur la vie et sur la mort et la façon de vivre l'une et l'autre, de l'une à l'autre, avec un rayonnant éclat de rire.



[PS - petite curiosité linguistique : je me rends compte que l'italien oral, surtout celui d'un Toscan truculent, supporte très bien une surabondance de gros mots par rapport au français standard ; d'où un problème que le traducteur a dû se poser : supprimer un certain nombre de jurons (en sauvant peut-être les plus créatifs – traducteur « pallelesse » !) ou laisser croire que le grand reporter parlait comme un pochard ?]

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Lettres contre la guerre

Tiziano Terzani est un journaliste italien qui depuis 1971 a été correspondant en Orient pour différents journaux européens.

Il s'est toujours immergé complètement dans tous les pays d'Asie qu'il a traversé et a toujours cherché à voir le monde à travers les yeux des gens qu'il rencontre.

Tiziano Terzani s'est isolé du monde, mais après les attentats du 11 septembre 2001,lui qui a si souvent vu la guerre n'engendrer que d'autres guerres, sort de son silence et à travers sept lettres, regarde le monde à travers les yeux des terroristes.

Pour Tiziano Terzani, le 11 septembre 2001 va à tout jamais changer le monde.

"Le monde entier avait vu. Le monde entier allait comprendre. L'homme allait prendre conscience, se réveiller pour tout repenser: les rapports entre Etats, entre religions, les rapports avec la nature, les rapports entre hommes. C'était une bonne occasion pour faire un examen de conscience, accepter nos responsabilités d'Occidentaux et faire peut-être enfin un saut qualitatif dans notre conception de la vie."

Dans ses lettres, il écrit "les raisons des terroristes, le drame du monde musulman face à la modernité, le rôle de l'islam en tant qu'idéologie antimondialisation, la nécessité de la part de l'Occident d'éviter une guerre de religion, une issue possible la non-violence".

Il parle de l'Amérique qu'il a vu "arrogante, obtuse, entièrement concentrée sur elle-même, bouffie de pouvoir, de richesse sans la moindre compréhension ni curiosité pour le reste du monde".

Il parle de l'implication des Etats-Unis en Orient, en fonction de leurs intérêts et de ce qui en découle surtout au Pakistan et en Afghanistan.

156 pages, pour découvrir un journaliste qui "mieux que quiconque en Europe, a senti la nécessité du dialogue Nord-Sud et Est-Ouest, et l'absurdité non seulement de la guerre dite "contre le terrorisme" mais aussi toutes les guerres menées sous les prétextes de "modernité" ou de "civilisation" qui ne sont souvent que les cache-nez de l'avidité des hommes et de leur soif de pouvoir".



Un grand merci à Babélio, aux Editions Intervalles et à Tiziano Terzani pour cette virulence pacifiste des dernières années de sa vie.

Un livre à lire absolument.
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En Amérique : Chroniques d'un monde en révolte

Chroniques d’un monde en révolte.



J’ai découvert Tiziano Terzani, journaliste italien, dans son livre retraçant son voyage en U.R.S.S lors de la chute du communisme. 



Cette découverte se poursuit avec une œuvre de jeunesse, pourrait-on dire. Les premiers pas d’un jeune homme qui décide de quitter son métier dans une entreprise vendant des machines à écrire, pour une bourse d’études de deux ans aux États Unis, qui lui permettra de faire ses armes en tant que journaliste. En effet, Tiziano Terzani enverra chaque semaine à l’Astrolabio, journal italien, un article sur les États-Unis.



Et il faut dire que la période offre matière à analyse : la fin des années soixante sont une période tumultueuse entre guerre au Vietnam, lutte pour les droits civiques, révoltes étudiantes etc



Dans ce livre sont donc regroupés les articles du journaliste, souvent précédés d’un paragraphe de contextualisation. 



Il est très intéressant de lire ses chroniques avec le recul qui est le nôtre, de voir si les analyses de ce journaliste en devenir sont toujours pertinentes, de voir ses opinions de gauche se confronter à la réalité politique de ce pays qui sera sa terre pendant deux ans. 



Si j’ai trouvé le propos parfois un peu aride à suivre, car la politique américaine de cette époque n’est clairement pas mon fort, j’ai apprécié lire certaines analyses qui demeurent fort actuelles, notamment sur la violence dans les ghettos. 



Si vous aimez avoir un éclairage différent sur cette période de l’histoire, je pense que ce livre pourrait vous plaire.



Si au contraire, la politique ne vous passionne guère, je vous conseille de passer votre chemin.
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Un autre tour de manège

C'est le récit d'un homme qui cherche un traitement, et qui s'est trouvé, lui.

J'ai d'abord ouvert ce livre avec un préjugé : 500 pages sur un homme qui fait le tour des traitements contre son cancer, j'ai pensé que cela allait être affligeant, lourd, triste. Grossière erreur.

Tiziano Terzani est un intellectuel et un sage comme on en rencontre rarement. Grand reporter italien engagé, il a vécu dans plusieurs pays d'Asie, dont il est très respectueux des cultures traditionnelles, et dont il parle la langue.

Lorsqu'on lui diagnostique un cancer à 59 ans, il s'en remet aux médecins et chirurgiens du meilleur hôpital américain. Dans cet autre espace-temps qu'est la maladie, il prend du recul sur sa situation, et va à la rencontre d'autres « thérapies » et « thérapeutes » avec beaucoup de curiosité, de lucidité et d'esprit critique.

Il retourne ainsi en Asie, aux sources de ce que vendent les charlatans New-Age aux USA. Il y rencontre là aussi des charlatans, mais surtout de vrais croyants, car la spiritualité y est indissociable de tout traitement. Il se dit que c'est peut-être la composante manquante des traitements occidentaux, qui fait qu'il s'est senti déshumanisé. Mais il reste fondamentalement un non croyant. Cependant il chemine, il finit par apprendre ce qu'il cherche vraiment, à faire la paix avec lui-même et avec le monde.

Sans aucun pathos, ni mysticisme, sans prétendre être parvenu à une vérité universelle, Tiziano Terzani nous raconte humblement et honnêtement son parcours, sa quête de miracle, de spiritualité et de détachement. Et c'est merveilleux de l'écouter.

Un livre à savourer en prenant le temps, comme il a pris le temps de nous le conter, dans le calme et la sérénité.
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Un devin m'a dit : Voyages en Asie

Il est très regrettable que si peu de l'oeuvre de ce grand journaliste-essayiste italien, reporter de guerre en Asie pendant plus de 30 ans pour le compte du Spiegel et si connu en Allemagne, soit traduite en français.

Cet ouvrage (ancien) est la chronique d'une année que l'auteur passa à voyager sans jamais monter dans un avion, car un devin le lui avait interdit sous peine d'en mourir dans un accident. Superstition? défi? ou simple passion de l'aventure? Toujours est-il que le journaliste parvient à tenir le pari, se déplace surtout en Indochine, et parvient même à parcourir le trajet Bangkok-Florence en train...

Les prémisses de son grand opus "Un altro giro di giostra", son véritable testament spirituel, oeuvre d'une hauteur philosophique et spirituelle mémorable sont déjà posées, même si l'auteur n'a pas encore accompli son cheminement introspectif que lui permettra ensuite son cancer. Là, on n'aperçoit que sa curiosité et son regard qui souhaite déjà approfondir celui du chroniqueur. Mais il est encore très très occidental, très toscan dans cet ouvrage...

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Un autre tour de manège

Une oeuvre accomplie. Au premier degré il s'agit du journal intime du reporter de guerre, à partir du moment où on lui diagnostique un cancer, jusqu'au moment où il dépasse le stade de ressentir le besoin de s'en soigner. Le journal se déroule en fait sur deux plans parallèles: d'une part l'analyse de la thérapeutique du cancer comme reflet essentiellement sociologique des mécanismes médicaux et psychosociaux qu'ont les différentes sociétés pour affronter cette maladie, qui demeure une sorte d'emblème de la mort; d'autre part le parcours intime d'évolution de sa propre conception du cancer, qui consiste fondamentalement à passer d'une optique du combat contre la maladie conçue comme un ennemi extérieur, à une acceptation d'un destin commun entre l'homme et sa maladie, sachant que la recherche d'une thérapie est en fait une vaine recherche d'un antidote impossible contre la mortalité, élément universel inscrit dans la vie.

Terzani est, au départ, un rationaliste européen, voire un sceptique florentin: tout ce qu'il peut y avoir de plus éloigné de la pseudo-pensée new age. C'est donc "naturel" pour lui de se tourner d'abord vers la pointe la plus perfectionnée de la médecine occidentale, vers un centre oncologique américain fort connu. Mais il s'aperçoit très vite des limites de cette "machine de guerre" qu'est l'Amérique médicale, reflet du pays dans son ensemble. Il cherche autre chose, dans de longues promenades solitaires à pied qui le remettent de sa chimio et radiothérapie. Il se tourne vers le charlatanisme des médecines alternatives orientales en Occident pour y découvrir que, même si elles étaient de bonne foi, elles seraient fatalement sans effet hors du contexte où elles sont nées, et en-dehors de la compréhension et de la foi (culturelles) qui doivent nécessairement les accompagner. Alors il réagit à sa façon: il se met en voyage vers l'Asie, le voyage et l'Asie ayant été ses compagnons de vie les plus fidèles. Il cherche des remèdes à sa maladie partout dans le vaste continent, et s'en veut de ne pas croire aux effets miraculeux des différentes potions qu'il poursuit et qu'on lui administre. Car il perçoit aussi les limites de ces thérapeutiques traditionnelles, et, de surcroît, il est non croyant. Mais son chemin spirituel avance, sa prise de conscience de l'inutilité de sa recherche aidant. Il devient Anam, le "Sans-nom" dans un ashram indien. Il arrive à se savoir gré de son cancer qui lui a permis de se dérober à une vie qui glissait vers la routine et vers l'ennui, vers le manque d'espérance pour une humanité qui se tourne toujours vers la guerre, sa maladie lui permettant en revanche de faire cet incroyable parcours introspectif, dans la solitude, malgré son attachement sans faille à sa femme. Il vit des années dans l'Himalaya, sans eau courante et sans électricité, en écrivant et en dessinant des couchés de soleil. Parfois il revient voir les siens. Le cancer lui accorde un sursis de plusieurs années, puis vient l'heure du contrôle de routine à la clinique américaine: on voudrait lui administrer de nouveau de la chimiothérapie, le réopérer, recommencer avec des soins lourds et violents, mais il est assez mûr pour les refuser et se retirer, cette fois avec sa famille, dans sa maison de campagne en Toscane, jusqu'à sa "séparation d'avec son corps".

Le voyage avec sa maladie devient en fait, comme il le dit, "un voyage dans le bien et dans le mal de notre temps". Phrase ambitieuse; ouvrage à la hauteur de cette ambition.

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Un autre tour de manège

Tiziano Terzani est l'archétype du globe reporter. Il a couvert pour le Corriere della Sera et le Spiegel les grands bouleversements historiques du continent asiatique. La rencontre avec les spiritualités de l'Asie a profondément influencé sa vie. Après avoir déjoué de grands périls, il doit faire face à l'ultime épreuve, celle de la maladie. Lui l'aventurier à la recherche de frissons et de rencontres, le voilà qui repart sur les routes en quête d'un médecin, de solutions contre le mal, de traitement, à vrai dire plutôt complémentaires, qu'alternatifs. Les périodes entre chaque séance New-Yorkaise de chimiothérapie et de radiothérapie sont autant de répits durant lesquels il fait un vaste retour aux sources de l'Asie qui l'a tant marqué. Le voyage physique se double d'un voyage initiatique en quête du soi profond. Le regard rationnel et septique de l'européen accompagne l'ouverture d'esprit d'un homme curieux et conscient, jamais vraiment disciple dans sa démarche et qui ne prêche nullement le lecteur. La profonde humanité du témoignage, du regard qui est porté sur le mal existentiel qui touche notre société occidentale et les terribles méfaits de la globalisation, s'agrémente d'une ironie fine face au spectacle pathétique des gourous new age et la marchandisation de nobles enseignements qui sont précieux par leur gratuité même, l'investissement de chaque instant qu'ils requièrent et devant les prétendus remèdes miraculeux. Un investissement qui est aussi le nôtre, cette lecture étant un cheminement qui nécessite temps et patience notamment pour les épisodes indiens qui représentent le corpus principal du récit, mais l'expérience n'en est que plus gratifiante, ce livre étant un précieux précis de sagesse illustré par le recours important à la parabole. Assurément un livre indispensable que celui-ci, bouleversant même, et qui pour autant est une radieuse invite à vivre harmonieusement ici et maintenant. La plus belle lecture de votre serviteur depuis un sacré bon bout de temps, de celle qui donne envie de remettre un jeton pour un autre tour de manège autour de sa PAL.

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Bonne nuit, Monsieur Lénine

En août 1991, Tiziano Terzani est encore reporter en activité, aucun de ses ouvrages de réflexions humanistes et introspectives n'a encore vu le jour, et il se trouve en Sibérie, à bord du vaisseau « Propagandist », accompagnant une expédition sino-soviétique le long du fleuve Amour dont le cours, en grande partie, constitue la frontière encore assez tendue entre les deux géants d'Asie. Ce sont les hauts-parleurs du bateaux qui l'informent, ainsi que les autres passagers et les membres de l'équipage, tous aussi stupéfaits les uns que les autres, du putsch anti-Gorbatchev auquel suivra bientôt l'impensable : l'effondrement de l'Union soviétique et de son PC. Sa première réaction, naturellement, est de tenter de rejoindre Moscou au plus vite, à l'instar de la multitude des journalistes étrangers y accourant du monde entier. Mais très vite il se ravise : il terminera sa croisière puis parcourra seul toute cette immense périphérie de l'empire soviétique qu'était l'Asie centrale, les républiques caucasiennes, jusqu'au mausolée de Lénine sur la Place Rouge, se faisant le témoin en direct de cet événement historique incomparable, cependant depuis une perspective inattendue, autrement plus riche. Par la même occasion, il rencontre de multiples peuples différents, des panoramas et des villes légendaires, des lieux méconnus et abandonnés aux marges de l'Histoire, des vestiges d'un passé en voie de redécouverte et réinterprétation, aperçoit les signes avant-coureurs d'un post-soviétisme où tout est encore possible : une contre-révolution brejnévienne, l'hyper-nationalisme avec guerres conséquentes et annexes (celle entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan a déjà éclaté...), des reconstitutions territoriales d'héritage pan-turquiste ou encore, hypothèse alors aussi plausible qu'effrayante, la constitution d'une série d'états islamistes centrasiatiques, influencés par ce qu'était déjà rapidement en train de devenir l'Afghanistan.

Dans la rédaction de son récit de voyage, Terzani a beaucoup de chance et surtout énormément d'habileté journalistique : la chance de se trouver au cœur de l'avancée de l'Histoire, l'habileté de savoir choisir instantanément, et pratiquement sans guide ni connaissance des langues locales, ses destinations, ses interlocuteurs, et surtout les situations, au sens le plus profond du terme, qui sont les plus à même de lui faire comprendre ce qui est en train de se produire. Un néophyte aurait recherché en priorité des responsables politiques de premier plan à interviewer, et les aurait sans doute abordés avec déférence voire servilité : Terzani montre qu'il en apprend davantage en passant une soirée de beuverie dans une fête de circoncision qu'en écoutant les propos officiels éculés. Que les dissidents, les barbus en toque, les barbus anars, les gens du commun qui vous invitent à partager un repas ou un plateau de raisin chez eux sont souvent les plus intéressants. Les journalistes pressés se ruent en Géorgie où une escarmouche est montée comme blanc d’œuf, Terzani est déjà passé par là et il s'en va voir des fouilles archéologiques, visiter les marchés et y boire du thé, faire son jogging à l'aube, payer sa tournée à un petit mafieux libanais transplanté en Azerbaïdjan ou se faire rouler dans la farine par une grosse Russe enrhumée au Turkménistan. Et jamais il ne néglige les musées : toujours très intéressants, les musées soviétiques... Ni les récits des voyageurs des siècles passés. De plus, il prend de très belles photos en noir et blanc, avec ses fameuses Leica autour du cou : portraits, paysages, monuments, une prédilection marquée pour les statues de Lénine déjà abattues ou sur le point de l'être...

Dans la fébrilité de ces journées mémorables, au fil d'autant de découvertes proprement fabuleuses et de rencontres si disparates, il n'est pas surprenant que les plus de quatre cents pages bien serrées aient été remplies d'analyses et de prévisions. Quelques décennies plus tard, il semblerait que la réalité soit encore beaucoup plus banale que les scénarios redoutés ; les mêmes chefs, liés à des alliances traditionnels, ont très vite changé d'appartenance politique : de communistes à nationalistes ; leur parti avait d'ailleurs changé de nom déjà sous les yeux de Terzani, mais sans changer de conception de l'exercice du pouvoir...
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Lettres contre la guerre

Trois jours après les attentats du 11 septembre 2001, Tiziano Terzani, grand reporter qui connaît bien le monde en général et le monde musulman en particulier, retiré depuis quelques années en Inde en quête de spiritualité, publie une lettre intitulée Une bonne occasion. Et si ces attentats étaient la bonne occasion pour tout remettre à plat, discuter et ne pas céder à le violence qui entraînera toujours une violence encore plus grande. Quelques jours plus tard, une autre journaliste italienne publie un livre d'une rare violence contre les musulmans. Tiziano Terzani décide alors de reprendre la plume dans diverses régions du monde pour lui répondre et témoigner de ce qu'il voit et vit au contact des musulmans de Kaboul, Peshawar, Quetta.



Ce livre écrit entre le 14 septembre 2001 et le 7 janvier 2002 rassemble 8 lettres prônant la paix, la tolérance et l'entente entre le peuples. Tiziano Terzani après avoir été grand reporter sur tous les grands conflits s'est tourné vers l'Inde et sa spiritualité, s'est posé et est devenu aux yeux de beaucoup d'Italiens le visage de la paix. Il est décédé d'un cancer en 2004. Ce livre a précédemment été publié chez Liana Levi en 2002.



Difficile d'aborder le thème de la tolérance, de l'amour entre les peuples, de la compréhension de l'autre alors qu'il y a quelques jours des attentats terribles traumatisaient Paris, la France entière et bien plus largement encore, quelques mois tout juste après le massacre de Charlie Hebdo. Je me permettrais donc de citer T. Terzani qui intitule sa dernière lettre Que faire ? Et maintenant allons-nous céder à une surenchère dans la violence ? "C'est peut-être ce qui m'a fait penser que l'horreur à laquelle je venais d'assister était... une bonne occasion. Le monde entier avait vu. Le monde entier allait comprendre. L'homme allait prendre conscience, se réveiller pour tout repenser : les rapports entre États, entre religions, les rapports avec la nature, les rapports entre hommes. C'était une bonne occasion pour faire un examen de conscience, accepter nos responsabilités d'Occidentaux et faire peut-être enfin un saut qualitatif dans notre conception de la vie." (p.15) Une grande partie de la réflexion de l'auteur est basée sur sa conception de la vie et des rapports entre les hommes : "... je suis vraiment convaincu maintenant que tout est un et que, comme le résume si bien le symbole taoïste du Yin et du Yang, la lumière porte en elle le germe des ténèbres et qu'au centre des ténèbres il y a un point de lumière." (p.15) Mais il ne s'est pas arrêté à sa réflexion, il est retourné sur le terrain voir comment vivaient les gens en Afghanistan, au Pakistan. Et chaque témoignage est aussi l'occasion pour le journaliste de raconter l'histoire du pays, celle qui explique pourquoi et comment on en est arrivé là. Évidemment, les États-Unis sont montrés du doigt : "Chalmers Johnson répertorie les manigances, les complots, les coups d'État, les persécutions, les assassinats et les interventions en faveur de régimes dictatoriaux et corrompus dans lesquels les États-Unis ont été impliqués ouvertement ou clandestinement en Amérique latine, en Asie et au Moyen-Orient depuis la fin de la seconde guerre mondiale." (p.40). Pour ce "vieux professeur de Berkeley University, peu suspect d'antiaméricanisme ou de sympathies gauchisantes", les attentats sont des contrecoups de cette politique étrangère agressive, les États-Unis sont devenus le Diable aux yeux du monde islamique. L'Europe étant à la remorque des États-Unis, il est loin le temps ou le ministre des affaires étrangères français osait s'opposer à une décision de faire la guerre, elle est elle aussi la cible potentielle d'attentats et l'atroce nuit parisienne du 13/14 novembre est là pour le confirmer.



A chaque fois que Tiziano Terzani apporte des informations, il les confronte à sa réflexion, à ses questions. Il ne prétend pas détenir la vérité, il pose des questions légitimes, il met en doute les certitudes des autres. Ces textes ont quasiment quinze ans et pendant ces années, rien n'a changé. Ou plutôt, si, tout a changé : les positions des uns et des autres se sont durcies. Tellement, qu'il paraît même difficile de parler de la même manière -utopiste- que le journaliste italien. Jusqu'où pourra continuer cette violence ? A-t-on le droit au nom de nos principes occidentaux de s'immiscer dans les politiques de certains pays ? Notre indépendance énergétique doit-elle primer sur la vie des habitants des pays producteurs ? Nos sociétés sont tellement différentes. Le monde que nous proposons, nous Occidentaux, globalisé, mondialisé, abreuvés que nous sommes de culture américaine -même si la France résiste encore un peu à l'envahissement par son cinéma, sa littérature, son mode de vie- est une violence faite à certains pays pas prêts et pas désireux de s'y soumettre. Et qui serions-nous pour l'imposer ?



Mon billet peut sembler brouillon, maladroit et il l'est sans doute. Lors de ma lecture j'ai sans cesse hésité entre l'admiration pour la réflexion de cet homme, sa sagesse et la peur que la violence monte toujours plus haut. J'ai fini ma lecture le 13 novembre au soir. Le matin suivant je me réveille avec les annonces des attentats parisiens et j'écris mon billet ce même jour, à chaud ; j'y mélange les réflexions de Tiziano Terzani et les miennes. J'ai apprécié que cet homme puisse me donner un autre angle de vue, me donner des informations pour continuer ma réflexion : je ne suis sûr de rien, j'écoute et lis beaucoup avant de me faire une opinion et lorsque j'y arrive elle peut encore varier en fonction de ce que je lis et entends. Ce dont je suis sûr cependant, c'est que ce bouquin va rester longtemps en moi et près de moi, je vais même le conseiller à tous ceux qui comme moi s'interrogent sur cette violence et cette haine qui explosent. Et à tous ceux qui savent déjà tout, je le leur conseille également, il les fera peut-être réfléchir et les bousculera dans leurs certitudes.
Lien : http://lyvres.fr
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