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Critiques de Tom Stoppard (12)
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Rosencrantz and Guildenstern are dead

Rosencrantz et Guildenstern sont deux personnages de la pièce la plus connue de William Shakespeare, Hamlet. Ils n’ont pas vraiment de traits de caractère et les autres personnages les confondent sans cesse l’un avec l’autre. Eux-mêmes ont des doutes sur leur identité. Ils passent leur temps à échanger des réflexions sur la vie entre les courts passages des autres personnages qui ne cessent de les conduire vers leur destin final (la mort qui se glisse jusque dans le titre) bien trop vite pour eux et contre leur gré. En chemin, ils rencontrent le chef de la troupe d’acteurs qui a joué la pièce devant le roi à Elseneur, pendant Hamlet. Ils partagent plus ou moins leur destin avec lui : il les accompagne jusque sur le bateau, où ils disparaissent. La conclusion appartient, comme dans Hamlet, à Horatio et Fortinbras.



« Philosophical farce » c’est ainsi qu’on a appelé les pièces de Tom Stoppard ; pas mal de questions philosophiques sont abordées, souvent par le biais de la comédie. C’est également le cas ici. L’absurde est l’une des principales caractéristiques de la pièce est une des premières impressions (confère le jeu de la pièce de monnaie). La pièce est aussi quelque part une parodie d’Hamlet et c’est de là que vient le comique. On peut voir dans la pièce une mise en abyme : on voit des scènes Hamlet pendant la pièce, recyclage assez typique de la deuxième partie du siècle.

La principale question abordée dans la pièce : qui sommes-nous et où allons-nous ? Mais aussi, quelle est la fonction de l’art ? Que sont au final deux personnages de théâtre ?
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Au cœur du problème

J’ai lu ce truc il y a plus d’un an. Ça ne m’a pas marquée. Heureusement, ma manie de noter les quelques citations intéressantes qu’on peut relever d’un bouquin m’a aidée à me rafraîchir la mémoire. Il paraît que ça parle du difficile problème de la conscience, autant dire, trois fois rien. Des gens se demandent donc si la conscience vient du cerveau, d’une autre dimension, de l’au-delà ou d’autre chose. Pendant ce temps-là, en tout cas, on peut remarquer que la conscience fonctionne bien et qu’elle est capable de plancher pendant des heures sur des questions de moindre intérêt. Peu importe d’où ça vient tant qu’on s’amuse avec après tout.





Le problème c’est que la pièce en elle-même n’est pas très intéressante et nous ferait regretter le temps de la vie amibe, preuve de l’inanité des débats rationnels sur la rationalité que chacun envisage à sa propre manière irrationnelle, mais sans se l’avouer. Lisez cela comme si vous assistiez à un débat télévisé entre individus non consentants au changement d’opinion. Découvrez de nouvelles idées et de nouveaux arguments que vous pourrez revêtir, ou non, pour vos prochaines soirées philosophiques à deux balles. Lisez cela si vous voulez du théâtre qui change du drame. On peut toujours se trouver de bonnes raisons.

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Au cœur du problème

Je réalise ce commentaire dans le cadre d’une masse critique et remercie donc les presses universitaires du midi pour m’avoir fait parvenir cet exemplaire d’un ouvrage somme toute fort stimulant par ailleurs.

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Sur le plan physique ce livre est un peu encombrant pour une lecture nomade (21*15*1.3 centimètres) mais reste léger et plaisant à tenir. La première de couverture annonce assez bien les points forts mais aussi le principal point faible (selon moi) de l’ouvrage en mettant en avant la photographie d’une jeune femme blonde au physique avenant regardant derrière elle une série de lumières bleues évoquant un vague concept scientifico-informatique relativement indéfinissable. La quatrième de couverture présente un ouvrage « à la croisée du théâtre et de la philosophie des sciences et de la vie », la pièce posant « la question de l’émergence de la conscience dans la matière vivante ». Le prix est de 13€.

L’ouvrage comprend 191 pages dont 24 d’introduction (enrichissante mais que je conseille plus de lire après la pièce elle-même). Le texte de cette dernière se décompose en 2 parties puisque la page de gauche est réservée à l’anglais et celle de droite à la traduction française.

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Cet ouvrage est une gageure puisqu’il prétend rien moins que de présenter sous une forme théâtrale une réflexion scientifique poussée sur la question de la survenue de la conscience au sein des êtres humains tout en analysant simultanément des questions éthiques comme celles de l’abandon d’enfant, philosophiques et même métaphysiques (Hilary, le personnage central, étant croyante). Nous allons aussi trouver des réflexions sur l’altruisme (un des éléments centraux du débat), la génétique, le matérialisme, la bonté, la science, les miracles, les probabilités, l’argent, les hormones…



Sur un plan pratique 10 personnage vont échanger des réflexions sur ces thématiques en convoquant divers éléments scientifiques ou culturels comme :

- En littérature Shakespeare (Hamlet), Keats, Wordsworth, Steinbeck. Nous sommes ici un peu dans la lignée de Huxley et du meilleur des mondes.

- En peinture Raphaël (vierge à l’enfant)

- En science le dilemme du prisonnier, le partage de sang de chauves-souris vampires, les vers de cerveaux, l’expérience de Milgram sur l’autorité (utilisée mais non citée comme référence)…

- L’amour au sein de couples comme maternel

- La religion.

C’est très intéressant car très riche et divers. D’une certaine façon nous avons en lisant l’impression de nous trouver au sein de vies d’intellectuels new-yorkais filmés par Woody Allen lors de sa période Bergman. Pour autant c’est aussi le côté un peu agaçant de la chose.

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J’aurais tendance à reprocher dans un premier temps une forme d’intellectualisme facile et assez commercial au mauvais sens du terme. Les références explicitées au-dessus sont toutes dans le « bagage classique de l’honnête homme de ce début du XXIe siècle ». J’avais parfois l’impression que l’auteur voulait me démontrer combien j’étais brillant et cultivé. Ce peut être lu avec le sourire mais aussi perçu comme un peu pédant et facile.

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Plus dérangeant encore, en mobilisant tant d’éléments en si peu de lignes chaque notion est caricaturée voire, dans certains cas, utilisée à contresens. Par exemple Brachylecithum mosquensis est plus souvent mangé par un oiseau que par une fourmi et, surtout, situer le niveau pertinent pour parler d’altruisme à l’échelle de l’insecte et pas de ses gènes est très discutable par qui a lu Dawkins. Globalement l’entremêlement de ces divers apports est fort peu compréhensible pour qui ne maîtrise pas ces savoirs mais assez vide aussi pour qui en a une connaissance autre que superficielle.

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Enfin il y a quelque chose de réellement agaçant à mobiliser tant d’auteurs et de connaissances diverses pour enfoncer des portes ouvertes du type : la conscience ne se résume pas à un super-ordinateur, l’abandon d’un enfant pose des problèmes de conscience, l’amour compte, la science seule n’est pas conscience, Dieu et la philosophie apportent d’autres réponses à la question de la conscience que la science… J’avais envie de dire parfois « Tout cela pour ça ! ». Et que dire de la trajectoire somme toute facile et assez pauvre de Hilary, sans doute destinée à favoriser une adhésion affective d’un public plus large ?

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Je n’ai rien appris sur la question de la conscience ni découvert de nouveaux axes de réflexion sur le sujet au final. C’est ma plus grande déception au sortir de cette lecture.



Après avoir été somme toute très critique précédemment ma note peut sembler assez élogieuse. Je la justifie pour les raisons suivantes :

- Cet OVNI est quand même un pari très audacieux et, si je n’estime pas qu’il atteigne tous ses objectifs, il reste fort stimulant.

- Le texte, rythmé et agréable, doit être très plaisant à voir joué.

- Dans la même logique les ressorts théâtraux sont bien conçus et les différents personnages, bien campés, sont agréables à suivre le long d’un récit assez habilement construit. Comme pièce de théâtre c’est un travail que je trouve impressionnant.

- L’ouvrage, en associant anglais et français, peut servir d’outil linguistique. Par ailleurs la présence du texte anglais permet de profiter de certains aspects que la traduction, même très bonne, peine à restituer totalement.

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Je ne conseille pas donc cet ouvrage à qui veut réellement réfléchir profondément sur le problème de la conscience. Selon les penchants de chacun je suggère alors un ouvrage de vulgarisation (Harari par exemple), un livre scientifique, une approche philosophique ou la lecture de textes sacrés.

En revanche pour qui a une certaine culture générale et a plaisir à retrouver diverses références associées ce peut être distrayant. La pièce est très bien construite, les personnages assez vivants et le fait de pouvoir lire ce texte en français et/ou en anglais est clairement un enrichissement.

J’aimerais par ailleurs non la lire mais la voir mise en scène.

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Au cœur du problème

Un grand merci aux Presses universitaires du midi et Masse Critique pour ce livre atypique et qui fait drôlement trampoliner les méninges. C'est du théâtre, en français "Le coeur du problème" et en anglais et en miroir "The hard problem".

Alors qu'est-ce qu'on a au coeur du problème ? La conscience, bien sûr !

Dans ce hard problem, on fait la connaissance d'Hilary, candidate à un doctorat à l'Institut Krohl qui se débat avec son propre cas de conscience : avoir dû abandonner sa fille à sa naissance (la casuistique de l'impossible).

Dans ce hard problème il y a Amal, candidat sérieusement compétitif, concurrent direct d'une Hilary bien moins bardée de diplômes, tous deux jetés dans le jeu du recrutement agressif de Jerry (C'est lui Krohl), oui jetés dans le jeu du prisonnier, allez savoir c'est peut-être pour étudier le fondement de l'intérêt particulier ou les dommages collatéraux de l'intérêt collectif !

Dans ce hard problème, on rencontre le hasard avec le personnage de Julia, qui n'est que pure coïncidence.

Dans ce hard problème, on tombe sur Cathy, l'enfant abandonnée et adoptée (par qui ? je vous dis pas), un miracle, je vous dis.

Dans ce hard problème il faut jouer au dilemne du prisonnier : le premier égoïste qui parlera dénoncera l'autre altruiste qui n'a jamais le temps de rien voir venir.

Alors qui est-ce qu'on découvre au coeur du problème ? Dieu, pardi !



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The real inspector hound

« The real inspector Hound » ou en français « Qui est le véritable inspecteur Dupif ? » joue sur les frontières entre la scène et la salle. Tout en s'amusant des conventions théâtrales, Stoppard en profite pour régler ses comptes avec la corporation des critiques dramatiques, et ce, de manière radicale. Car les deux critiques, qui résument toute la profession, sont abattus sur scène par la machine théâtrale.



L'originalité de la pièce tient dans le fait que deux des personnages sont placés au dehors de la scène et installés parmi le public. Ce type de procédé, qui tend à brouiller les démarcations entre ces deux groupes qui constituent une représentation, est aujourd'hui assez voire très banal, mais en 1968 c'était encore une transgression des codes théâtraux.



Ainsi sur le plateau se déroule un drame policier avec tous les ingrédients traditionnels (un cadavre, un assassin, un téléphone caractériel, un inspecteur avec sa pipe...) alors que de la salle les deux critiques commentent de plus ou moins près l'action. Plus ou moins près, car la plupart du temps ils ne se préoccupent guère de la pièce que l'on joue pour eux. Non, le principal enjeu réside dans la rivalité qui les oppose l'un à l'autre : l'un (Grossabeau) écrase l'autre (Delalune) sous le poids de sa notoriété. Ce Grossabeau étale bien grassement toute sa suffisance et se vante des nombreux succès qu'il remporte auprès des actrices débutantes. Le petit Delalune qui semble a priori plus sympathique, car timide, ne rêve, bien sûr, que de prendre la place du grossier personnage. Mais voilà que l'action sur scène, à force d'être interrompue par les deux experts-prescripteurs-dramatiques, prend un tour inattendue : monsieur Grossabeau est réclamé sur le plateau pour répondre au téléphone à l'une de ses jeunes conquêtes. Avec toute sa fatuité habituelle il monte sur scène pour prendre la communication. Or soudainement un coup de feu retentit et Grossabeau tombe raide, le combiné à la main. Stupeur ! Et stupeur d'autant plus saisissante que l'inspecteur chargé de l'enquête est introuvable. Ce pauvre Delalune qui ne rêve que d'être mis en avant endosse le rôle in petto. Bien mal lui en a pris car : « PAN! ». Dès lors, il y a non plus un cadavre mais trois. La chimère théâtrale va néanmoins se faire un plaisir d'intégrer, de digérer ces deux victimes « imprévues ».



The real inspector Hound est une comédie très agréable qui tout en développant un discours sur le théâtre recèle une causticité des plus réjouissantes. À voir, à lire et bien sûr à jouer.
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Artiste descendant un escalier

Trois vieux artistes vivent dans la même cage. Ils se connaissent depuis leurs études. Il y a Beauchamp qui enregistre les sons. Il y a Donner, le peintre. Il meurt dès la première scène. Et enfin Martello, le sculpteur.

Un ménage à trois. Sophie est morte plusieurs années plus tôt en se défenestrant dans l'appartement qu'elle partageait avec les garçons. Elle a été l'amant de Martello puis de Beauchamp. Donner en était amoureux.

L'humour est caustique. Les dialogues sont vifs. On y parle d'amour, d'arts, de mode, de succès.
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Rosencrantz and Guildenstern are dead

Rappelez-vous Hamlet : deux personnages devront suivre le jeune prince qui simule la folie, puis l'accompagneront en Angleterre où ils seront tués à la place du prince d'Elseneur. Souvenez-vous du peu de poids de ces deux jeunes gens dans la pièce de Shakespeare : hé bien ce sont Rozencrantz et Guildenstern, interchangeables, peu efficaces en effet, et débordés ici autant par leur rôle auprès d'Hamlet, que par leur statut d'hommes qui ne contrôlent rien, en tout cas, beaucoup moins bien qu'un acteur qui assume l'artifice de l'art, l'absurdité de notre vie …

La version de Stoppard est une version contemporaine d'Hamlet qui interroge autant la dramaturgie de Shakespeare que celle de notre vie. Drôle et très, très intelligent. Et drôle.




Lien : http://www.babelio.com/monpr..
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The Invention of Love / L'invention de l'am..

reçu dans une opération masse critique. Je ne sais comment qualifier cette pièce de théâtre. Les personnages vieux, jeunes ou morts se parlent, se rencontrent. On y parle philologie, amour homosexuel et sens esthétique. Oscar Wilde est aussi le grand invité de cette pièce ainsi qu'Oxford. Il y a pléthore d'allusions ou de citations grecques ou latines. Ce livre est intéressant mais je pense qu'il faut le relire plusieurs fois pour l'apprécier.

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The Invention of Love / L'invention de l'am..

L'Importance d'être un esthète



La figure de Tom Stoppard est incontournable dans le paysage dramatique britannique. Né en Tchécoslovaquie, il émigre en Angleterre après la Seconde Guerre Mondiale, prenant le nom de son beau-père. Après un début de carrière dans le journalisme, il se lance dans l’écriture de pièces de théâtre, mais aussi de scenarii pour le cinéma. Il participe ainsi à celui de Brazil, de Terry Gilliam, Empire du soleil de Steven Spielberg ou Shakespeare in Love, qui lui vaudra un Oscar. En 1997, sa pièce The invention of love, récemment traduite en français, retrace de façon détournée la vie d’Alfred Edward Housman, philologue et poète britannique contemporain d’Oscar Wilde. Ce dernier figure également dans l’ouvrage, en compagnie d’autres figures de la période victorienne, tel l’auteur Jerome K. Jerome, l’essayiste Walter Pater ou bien l’homme politique Henry Du Pré Labouchère. Celui-ci est d’ailleurs sinistrement connu pour être à l’origine de l'amendement Labouchère, qui pénalise en 1885 toute relation homosexuelle au Royaume-Uni.



Le début



À 77 ans, Alfred Edward Housman, surnommé AEH, attend sur les rives du Styx la barque de Charon, qui vient vers lui et lui demande de s’enchaîner. Après sa mort, les amis d’AEH ont dispersé ses cendres dans les plaines du Shropshire, comté anglais dans lequel l’auteur avait fait évoluer le personnage de son premier recueil de poèmes, Un gars du Shropshire. Charon lui dit qu’ils attendent une autre personne, puisqu’il doit embarquer un poète et un philologue. Or, AEH lui fait remarquer qu’il s’agit sans aucun doute de la même personne, à savoir lui-même. Il lui raconte qu’il a été durant vingt-cinq ans professeur de latin à l’université de Cambridge, et qu’il aimerait revoir un ancien professeur, mort depuis. Cela étonne Charon, qui est plus habitué à ce qu’on lui demande de rencontrer Hélène de Troie, et il prévient AEH qu’ils vont croiser un chien à trois têtes. Puis trois hommes apparaissent sur un bateau, en compagnie d’un petit chien.



Analyse



Un des sujets principaux de L’invention de l’amour est l’esthétisme, courant artistique né en Angleterre dans les années 1860. Influencé par l’école romantique allemande, ceux qui plus tard feront des émules parmi les chantres du décadentisme se réclament des écrits de Walter Pater. Il a d’ailleurs enseigné à Oxford, ayant pour élève Oscar Wilde, qui inspira, selon d’aucuns, au personnage principal de la pièce, A.E. Housman, un certain poème qui fut écrit durant le procès de l’auteur de L’importance d’être constant. L’œuvre de Tom Stoppard se permet ainsi de croiser ces divers personnages, et bien d’autres encore, créant des liens et des correspondances autour des figures de l’ère victorienne. L’idée de l’amour y est débattue, de l’idéal et des valeurs essentielles qui élèvent l’âme humaine. Housman, au seuil de la mort, se remémore certains des événements qui l’ont marqué, et les rencontres qu’il a pu faire, en particulier quand il était adolescent.



Car de la beauté il est beaucoup question dans L’invention de l’amour, en particulier de celle du jeune Moses Jackson. Cet étudiant d’Oxford, athlétique et bien fait de sa personne, a noué une forte amitié avec Housman, qui l’aimait secrètement. Si d’esthétisme il est question, c’est ainsi en grande partie en référence aux idéaux de la Grèce antique, à laquelle il est souvent fait allusion. On discute des échanges qu’ont pu entretenir les philosophes avec leurs élèves, et de la façon dont les relations entre personnes de même sexe n’étaient alors pas du tout considérées comme répréhensibles. Tom Stoppard évoque tout aussi bien le fameux Bataillon sacré, corps d'élite de l'armée de Thèbes, formé par 150 couples d’amants, que les duos composés d’Achille et de Patrocle, du poète Horace et du jeune Ligurinus, des rois Thésée et Pirithoüs. Le point commun, on le voit bien vite arriver, est celui de l’homosexualité, et de la façon dont elle est perçue selon les périodes.



De façon très académique, et parfois un peu pédante, L’invention de l’amour se fait ainsi le défenseur de la liberté d’aimer. Il prend ainsi contre-exemple sur l’amendement Labouchere, qui a fait reconnaître Oscar Wilde coupable, tout comme Alan Turing bien des années plus tard. Au passage, son abrogation définitive n’interviendra qu’en 2003, après diverses reformulations. Mais la pièce de théâtre prône surtout la liberté de ton, à la fois politique, mais aussi artistique. Ainsi l’œuvre en elle-même se permet-elle diverses digressions, pas toujours aussi heureuses les unes que les autres, et n’hésite pas à mélanger passé, présent imaginaire et futur potentiel. Si tant est que le lecteur ait la fibre académique, il apprendra beaucoup d’éléments sur la fin du XIXe siècle, les nombreuses notes de fin d’ouvrage apportant une multitude d’éléments de contexte, qui parfois perturbent la lecture mais attestent de la qualité de la traduction et de la rigueur de l’exercice littéraire.
Lien : https://panodyssey.com/fr/ar..
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The Invention of Love / L'invention de l'am..

Érudit, parfois drôle, parfois un peu longuet (il faut le reconnaître), on apprend beaucoup sur l'état d'esprit de l'époque victorienne, sur le milieu intellectuel de la fin du XIXème en Angleterre (et en particulier à Oxford), sur l'homosexualité (cet amour qui alors n'ose dire son nom). On croise de nombreuses figures, la plupart m'était inconnues, si ce n'est Ruskin (grâce à Proust), K. Jérôme (grâce à Trois hommes dans un bateau) et l'ami Oscar, of course.

L'édition est très bien, bilingue avec une introduction instructive et des notes éclairantes (en particulier quant aux nombreux clins d'oeil que fait Stoppard qui relèvent le plus souvent de la culture britannique). Tout ça pour un prix modeste (15€), bravo aux Presses Universitaires du Midi dont le catalogue (auquel je suis allée jeter un oeil) offre plein de titres alléchants (en particulier sur le jazz).

Merci à Masse Critique pour cette découverte !



The Invention of Love / L'invention de l'amourTom Stoppardtous les livres sur Babelio.com
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Arcadia

« Alors sur la danse… »

Pièce très ingénieuse, pleine de thèmes et de références à des phénomènes scientifiques et culturels-historiques. Le thème central est, bien sûr, l'apparente contradiction entre le chaos et l'ordre, qui s'avère être nul. Passé et futur, Lumières et Romantisme, amour et haine ne semblent pas être des extrêmes séparés, mais plutôt des phénomènes interdépendants très complexes. En jouant sur 2 terrains, à deux époques différentes (début 19e et fin 20e siècle), Stoppard parvient à créer une dynamique qui continue d'intriguer. Après 1 lecture (car cela me semble être une pièce à lire) vous comprenez à peine une poignée de références. Naturellement, cela fait de cette comédie avant tout une expérience intellectuelle, dont la morale est que le chaos a aussi un ordre sous-jacent. Avec la scène finale, dans laquelle les protagonistes dansent les uns avec les autres dans les deux périodes, Stoppard semble secouer toutes les théories lourdes, comme s'il tirait la langue au lecteur/spectateur. Encore une fois, ingénieusement fait, mais si c'est aussi une pièce réussie sur la scène me semble être une toute autre question.
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Au cœur du problème

J'ai lu ce livre dans le cadre de Masse Critique et je me suis donc lancée dans un ouvrage qui aborde la question de la conscience sous un aspect scientifique, philosophique voire même spirituel.



Qu'est - ce que la conscience ? Peut - elle être mesurée, identifiée voire imitée ? Est - elle propre à l'homme ou peut - elle être reproduite via le numérique/ la mécanique ? Toutes ces questions parsèment la pièce en tentant d'y répondre, sans jamais y parvenir complètement. Ce thème est complexe, ne pas réussir à le résoudre est évident.



Il y a beaucoup de références, que ce soit au domaine littéraire comme au traitement des domaines scientifiques (sciences humaines, finances, neurobiologie etc.). Avec une culture suffisante, il peut être aisé de suivre le déroulement de la pièce. J'avoue avoir eu quelques difficultés pour suivre les passages qui pour moi étaient flous, mal amenés (ou peut-être trop complexes pour un lecteur lambda ?). Il est possible aussi que cette pièce soit une pièce à regarder, et non pas à lire comme le célèbre ouvrage de Musset : Un spectacle dans un fauteuil. L'auteur fait le choix de jouer sur la mise en scène pour appuyer son propos et parfois même en brisant le quatrième mur. J'aime beaucoup ces pièces qui jouent avec leur format parce qu'elles en deviennent plus intéressantes, plus riches.



J'avais l'impression de me replonger dans mes études de lettres, quand je lisais des œuvres riches et complexes avec des sujets qui méritent la réflexion. Ici, la conscience est remise en question par Hillary, le personnage principal. Toute la pièce gravite autour d'elle, de sa remise en question philosophique à son passé affectif, notamment lorsqu'elle évoque l'adoption de sa fille. Cet aspect est visible dans le titre anglais et la traduction française a réussi à rendre compte de ce double sujet : "au cœur du problème" de la conscience, "problème de cœur". La traduction en ce sens est bien travaillée et permet de nous exposer les choix dramaturgiques et littéraires de l'auteur.



À l'inverse, je n'évoquerai pas le format, l'illustration ni la mise en page de la couverture. Je ne me suis intéressée qu'au contenu. L'apparence du livre est pour moi mal traitée malgré la symbolique de l'illustration.



Une bonne lecture, à lire la tête reposée. Et surtout, une pièce à voir.
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