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Citation de Eric_G


Les nuages se rassemblèrent et restèrent immobiles en observant le fleuve se perdre sur le sol de la forêt, s'écraser tête baissée sur les reins des collines sans du tout savoir où il allait, jusqu'à ce que, épuisé, malade et souffrant, il ralentisse et s'arrête à une vingtaine de lieus avant la mer.
Les nuages se regardèrent puis se separèrent dans la plus grande confusion. Les poissons entendirent le galop de leur sabots alors qu'ils s'en allaient porter la nouvelle du fleuve qui avait perdu l'esprit, au sommet des collines et à la cime des arbres à marguerites. Mais il était trop tard. Les hommes avaient rongés les arbres à marguerites, jusqu'à ce que, ecarquillant les yeux hurlant, ils se casserent en deux et touchèrent le sol. Dans le silence fantastique qui suivit leur chute, des orchidées tombèrent en tourbillonnant pour les rejoindre.
Quand ce fut fini et qu'à leur place des maisons poussèrent sur les collines, pendant les années qui suivirent, les arbres qu'on avait épargné rêvèrent de leurs camarades et leurs marmonnements de cauchemar excédèrent les crotales-diamants qui les quittèrent pour de nouveaux arbres poussant dans des endroits que le soleil voyait pour la première fois. Puis la pluie changea et ne fût plus la même. Maintenant, il ne pleuvait plus pendant une heure chaque jour au même moment, mais pendant des saisons entières, trompant encore plus le fleuve. Pauvre cours d'eau devenu fou. Maintenant il restait assis à la même place comme une grand-mère et il devint un marais que les Haïtiens appelèrent Sein de Vieilles. Et c'était un vrai téton de sorcière : un ovale frippé noyé de brume, d'où s'écoulait une substance noire et épaisse auprès de laquelle les moustiques eux-mêmes ne pouvaient vivre.
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