Ulli Lust - Voix de la nuit

- Ces ritals sont affamés ! Dans ce pays règne encore le mythe de la virginité. La femme est sacrée ! Sainte Vierge Mère de Dieu ! Et plus on va vers le sud, pire c'est.
C'est pourquoi le foutre leur sort par les yeux, le nez et les oreilles ! Ils se jettent sur les touristes pour tirer un coup facile. Ils pensent qu'il suffit d'inviter une étrangère à manger des spaghettis... pour que ces connes tombent dans le panneau !
J'espère que vous n'êtes pas assez bêtes pour vous vendre pour une bouchée de pain !
- Bien sûr que non !
- Tu déconnes ?
[...]
- Les Romains ont l'habitude des mendiants. A Rome, la différence entre riches et pauvres est extrême. Alors faire l'aumône est de bon ton.
En plus, t'es une jeune fille, toute dépenaillée.
- Hé, c'est la mode ! A Vienne, on vend ces pantalons lacérés dans les boutiques !
- Hahaha ! Les gens d'ici ne savent pas ce que c'est que des punks ! De toute façon, y a qu'une société d'abondance qui puisse produire une mode pareille ! En Italie du Sud, il y a de la vraie pauvreté. Là, personne ne se mettra volontairement des loques sur le dos !
- Au début, je les ai lacérés moi-même. Et je suis fière de chaque déchirure qui s'ajoute.
- Les mecs aussi raffolent des déchirures. Pour mater ta culotte !
- Et alors ?
Edi est couchée avec Andreas. J'ai le sac de couchage pour moi toute seule. Enfin assez de place pour m'étirer. La brise fraîche de la nuit balaie le parc. Bruissement des feuilles. L'espace infini tout autour se déploie en moi aussi. Blottie dans mon nid, je suis heureuse.

p.423.
Ulli : Tu ne comprends plus l’allemand ou quoi ? Je veux dormir !
Andreas : Je comprends que tu souffres d’un terrible complexe de chasteté.
Ulli : Tu t’y mets aussi maintenant.
Andreas : Edi et toi, vous êtes comme deux petits lapins en délire. L’une est nympho et l’autre joue à la bonne soeur. Tu n’as pas idée de ce que tu manques. Faut pas être timide. Oublie ton éducation catholique. Nous vivons à l’heure de la révolution sexuelle !
Ulli : Et alors C’est pour ça que je dois me faire baiser par n’importe quel trou du cul ?
Andreas : Tu n’aimes pas les mecs ?
Ulli : C’est ça.
Andreas : T’es lesbienne, frigide ou juste prude ?
Ulli : Je déteste les mecs ! Les mecs, c’est pire que tout ! Vous vous comportez comme des malades. Si jamais je me suis intéressée au sexe un jour, c’est grâce à vous que ça m’a passé.
Andreas : Oh là là ! T’as eu de mauvaises expériences, hein ? Ça ne m’étonnerait pas. Mais, faut pas mettre tous les hommes dans le même panier. On n’est pas tous pareils. Moi, par exemple, je suis un expert pour gâter les femmes. Et je vais te dire pourquoi ! J’aime voir une femme fondre sous mes caresses, effleurer une chatte, la voir mouiller, humide, ahhh ! ! ! Edi m’a dit que tu n’as jamais eu d’orgasme. C’est vrai ? Je peux t’en procurer un, suffit de te détendre...
Écoute, Andreas. Tu es un bon pote. Si tu veux être au-dessus des autres, alors respecte ce que je te dis, d’accord ?
Andreas : Pourquoi t’es si coincée ? relaxe !
Ulli : Pfff ! Je ne suis pas coincée ! ! Je... Je... J’ai été violée. La première nuit à Palerme.
Andreas : Je ne savais pas... désolé.
Ulli : Ce n’était pas ce qu’il y avait de pire. Le pire... C’est d’être matée et pelotée sans arrêt, le viol mental. D’être traitée comme un petit toutou qui par hasard sait parler. Mais ce que toutou dit, tout le monde s’en fiche .
Andreas : Ça va, ça va. Dormons.
Il y a une légende autrichienne qui dit : celui qui veut traverser la tour sombre doit regarder vers l'avant. Celui qui se retourne sera englouti par l'enfer.
Une femme qui a un amant est un ange, une femme qui a deux amants est un monstre, une femme qui a trois amants est une femme.
On ne dit pas "oui" à un type qui dit "tu veux baiser" à la place de "bonjour"!
Nous estimons trop peu ce que nous obtenons trop aisément.

-Ulli... Il faut qu'on parle.
-De quoi ?
- Je crains que ce soit une erreur de parler de ça. Mais une chose est sûre. Je veux être honnête avec toi. ... Je ne veux pas te mentir.
-Allez, accouche !
-C'est toujours pareil. ... J'EN AI MARRE ! ... Marie était ma première amie, on s'est beaucoup aimés. C'était une musicienne magnifique, une femme sensible , pleine de tendresse. Physiquement elle était exactement mon type, mince, presque adolescente, et malgré tout ... ....durant toutes ces années, nous avons très peu couché ensemble, puis de moins en moins , et à la fin, plus du tout. ... Mais ça ne nous manquait pas. Sur bien des points, nous étions un couple idéal.
- Pendant des années tu n'as pas eu de relations sexuelles ?
- Si. C'était la période hippie. J'avais mes aventures, et elle aussi. Ça n'a jamais été un problème entre nous.
- Ah ! Bon.
- Mais un jour, elle m'a quand même quitté pour un autre homme. ... Depuis c'est toujours le même schéma qui se répète. C'est comme une malédiction ! ... Je rencontre et j'aime une femme, et tant que nous ne nous connaissons pas vraiment , nous avons une vie sexuelle d'une intensité indescriptible ! Mais quand ça devient une vraie relation et que la proximité augmente, l'animal sexuel qui est en moi se met à mourir. ... Je me suis souvent posé la question : ne suis-je attiré que par l'inconnu, la femme mystérieuse ? ... Ou bien cela vient-il du fait qu'elle ME connaît mieux ? ... Au début, je peux jouer le mec super, j'ai les choses en main, je suis conquérant. ... Mais au quotidien, inévitablement, c'est le petit Georg angoissé qui revient. ... Et il n'arrive pas à croire qu'une femme puisse le trouver attirant.
- Mais c'est idiot !
- Oui, je sais. ... Je perçois tout le mécanisme, mais j'en reste quand même prisonnier. ... Et là, ça a recommencé. Je ne ressens plus rien.
- Je ne comprends pas ... tu ne veux plus qu'on soit ensemble ?
-Qu'est-ce qui te fait dire ça ? ... J'ai peur de te perdre ! ...Tu es ce qui m'est arrivé de mieux ces dernières années ! Je t'aime !
- Moi aussi, je t'aime !
-Pfff. Et je ne sais pas ce qui m'arrive. Je ne dis que des conneries, oublie tout ça...
-Mais non, chéri ... Si je t'aime, c'est justement parce que tu es un peu fou !
- Un peu ? C'est une estimation très optimiste.
- Moi je trouve très sain de parler aussi ouvertement des sentiments. La maladie, ce serait de les refouler.
-Oui, mais ...
- On n'est pas obligés de coucher ensemble à tout prix. On peut quand même rester ensemble. Le sexe, ce n'est pas le plus important.
-Pfff...Mais SI, le sexe est important !
- Oui, bien sûr. Pour te détendre, le mieux est peut-être de ne pas y penser pendant un moment.
-Hmm... Peut-être.
- Mais je veux pouvoir continuer à t'embrasser !
-Ah, Ulli... Avec toi, tout est toujours si simple.
-Ça te dérangerait si j'avais des amants ?
-Non. Bien sûr que non.
p.321-2.
Andreas : À 25 ans au plus tard, ils doivent se ranger. Se marier, chercher un travail... mais avant, toutes les frasques sont permises.
Ulli : Et les filles ?
Andreas : Hein ?
Ulli : Et pour les filles ? J’en vois rarement.
Andreas : Ben elles restent à la maison, vont à l’école et se marient tôt.
Ulli : Et elles n’ont pas droit aux frasques avant ?
Andreas : Couvrir de honte toute la famille ? Oh que non !
Ulli : Et comment les mecs sont censés s’amuser sans les filles ?
Ha ha !
Ulli : C’est franchement dégueulasse.
Andreas : Au fond, les filles auraient plus de chances de réussir, parce qu’elles vont à l’école pour apprendre. Une pure perte de temps. On veut qu’elles fassent des enfants et deviennent de parfaites boniches.
Je fais quelque chose d'intelligent! Je veux dire, je refuse cette société de merde! Je la quitte!