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Citation de Charybde2


Ceux qui vivent sur l’île ont vu le sable leur passer entre les doigts et ils ne l’ont pas retenu. Pendant des millénaires le ciel avait été blanc, les grains tenaient à la dune, du bleu en larges aplats se déposait au-dessus des rangées de pins et des falaises calcaires. Personne ne se méfiait. Ensuite les blockhaus ont été construits et tout a été modifié. Depuis soixante-quinze ans qu’ils ont pris place dans le paysage, le monde autour d’eux s’effrite, grain à grain, et ceux qui vivent sur ce bout de terre regardent ailleurs.
Plus tard, un ciel mauve va recouvrir l’île. Un ciel d’aube et de crépuscule, de pétales de rose et de bruyère, un ciel de nacre et de taffetas pourpre. Un ciel qui ne ressemble à rien. Qui n’annonce rien. La seule certitude, c’est qu’il vient après l’érosion, quand il ne reste plus que des miettes de croûte terrestre, que tout a été rongé.
Mais quelques jours avant que le ciel ne devienne mauve, autour de l’un des blockhaus le sable s’est écroulé. Personne n’a réagi. Maintenant le blockhaus penche sur la dune, l’eau monte, à l’intérieur ne restent que des corps nus qui flottent. Nos corps. Qu’importent les os, qu’importe la chair. Nous flottons dans la soute à munitions. Lymphe et sang. Larmes et sel. Et le béton bouge en nous.
En réalité, ce qui a eu lieu ici marque à la fois le crépuscule et l’aube. La clarté est venue de l’onde. Disons qu’une vague a tout emporté et que cette histoire-là, c’est celle de la vague.
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