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Citations de Véronique Dufief (38)


En tant qu'enfants au sein d'une famille-ce que nous restons toute notre vie-nous tombons aussi malades, je crois, pour les autres. Les plus fragiles et les plus réceptifs d'entre nous-et les deux vont toujours ensemble-"captons" les souffrances de notre entourage. Nous captons leur stridence avec une telle violence que, vu notre configuration intérieure, nous n'avons souvent pas d'autre choix que de donner une cristallisation pathologique à l'expression des douleurs que nous percevons autour de nous et qui désormais passent par le langage de notre fragilité, réveillée en quelque sorte, et ravivée par la souffrance d'autrui-cette souffrance que nous incorporons à notre vie par la maladie étant souvent non-dite, inexprimable.
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De cette analyse, j'ai tiré plusieurs enseignements. Et d'abord que l'introspection est un leurre, une prison. La connaissance de soi ne peut passer que par le canal, la médiation de l'autre. Si je me contente de m'adresser à moi-même, et que, ce faisant, je fonctionne en circuit fermé, je tombe toujours dans la voie sans issue des illusions de l'ego. Si, au contraire, un tiers écoute ce que j'essaie de me dire à moi-même, alors, sorti en partie de moi par sa médiation, je découvre ce qui ne peut apparaître que lorsqu'on est à la fois au dehors et au-dedans de soi.
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Le scrupule, qui a souvent l'esprit de l'escalier, tente ainsi de réparer, dans les meilleur des mondes de l'imagination, des indélicatesses ou des fautes qu'on se reproche d'avoir commis dans un passé pourtant impossible à retoucher. Qu'à cela ne tienne, le perfectionnisme s'acharne à refaire les répliques, à reconstruire un monde idéal qui n'a jamais eu sa place dans le temps objectif. Le scrupule prend souvent une forme obsessionnelle par laquelle le sujet se fait à lui-même un tort immérité.
J'ai pour ma part un talent exceptionnel pour me rendre malheureuse toute seule sans l'aide de personne.
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L'enfer est parmi nous, autant que le Royaume des Cieux La paroi qui les sépare est imperceptible. Chaque jour, elle est transpercée en son côté. Il n'y a que l'épaisseur diaphane d'une hostie entre l'enfer et le paradis.
Personne ne peut se vanter d'avoir foulé le sol de l'enfer. On revient toujours muet de son épouvante. Par moments, j'ai eu envie de crier Je suis ressuscitée ! parce qu'ayant séjourné dans les abîmes, j'étais encore vivante et capable de chanter avec le psalmiste. Aujourd'hui, je sais que je ne peux rien dire qu'à bouche fermée. C'est par amour pour nous que la démesure nous est interdite.
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Mais la demande la plus fréquente des candidats au suicide assisté, c'est de ne pas souffrir, et d'être épargné par l'atteinte de ce qui est perçu comme une déchéance dont il est légitime de vouloir être protégé.
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Une journée d'inexistence. Pas l'envie de vivre... (...) Ce n'est pas possible d'avoir du courage tous les jours. Quelquefois, on s'en donne, et la journée peut être même plus belle que les jours où tout est facile, où l'on fait les choses sans y penser, ce qui peut nous rendre distraits et absents à nous-mêmes. Quelquefois, le coeur n'y est pas. Le fond de l'être est lourd, inerte, impossible à remuer. (p.71)
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LE BEAU VISAGE DU MONDE
L'oiseau noir de la mélancolie a de nouveau recouvert mon visage de son ombre et la tristesse est revenue me prendre à la gorge. Je ne chante pas la vie béate, la vie simplette, le meilleur des mondes. D'autres l'ont ridiculisé avant moi, mieux que moi. La vie qu'il m'est donné de vivre joint en prière les deux mains du tragique et de la plénitude, et c'est en cela que je suis foncièrement "bipolaire"-ajustée à la réalité telle que donne à l'entrevoir le christianisme.
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Vivre dans le temps présent est la seule ascèse à laquelle on puisse employer toute sa vie. L'enfance a le savoir inné, mais pas la conscience. L'adolescence l'oublie, toute entière absorbée par sa métamorphose. L'âge adulte le désapprend, tout engoncé dans les sollicitations de la vie préfabriquée, programmée, sérieuse. Viennent de temps en temps des mouvements de soif intense, mais la vie routinière prend vite le dessus. L'âge mûr se glorifie de sa force et de son expérience pour imposer à l'être sa loi de toute-puissance avec une énergie décuplée par la perspective qui commence à poindre, du vieillissement. Souvent-sauf pour les rares sages, les amoureux du silence, les contemplatifs-il faut attendre la vieillesse ou un deuil, ou la maladie pour accepter d'aller précautionneusement d'un bout à l'autre de la journée, sans viser plus loin.
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Plus encore que la vieillesse, ce que la majorité de nous redoute dans la faiblesse de l'âge, c'est le risque de perdre l'esprit, de sombrer dans cette démence sénile dont nous ne prononçons plus guère le nom. Il ou elle a encore toute sa tête est la parole la plus complimenteuse qu'on puisse employer en parlant d'une personne âgée.
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Quand viennent les grandes épreuves de la vie, on n'a pas d'autre choix que de s'en tenir à l'humilité du jour. Mais dès que revient l'énergie, on place à nouveau sa foi dans la vigueur des lendemains prévus à volonté au service d'un désir qu'à nouveau, plus rien n'arrête. Et derechef, on est pris par l'illusion d'être fort, de maîtriser sa vie. On abandonne ce qui aidait à vivre au moment de la défaillance, dont on s'empresse de censurer le souvenir, on abandonne ce précieux viatique comme inutile à l'heure de la santé, alors que c'est là LE trésor.
On dépense une ardeur et une intelligence étonnantes à faire semblant, pour soi et pour autrui, d'être au volant de sa vie, de la conduire, et même, si possible, de le faire avec une grosse cylindrée. Les moments de faiblesse se cachent dans l'oubliette de ce que personne ne doit savoir-pas même nous-:des accidents de parcours honteux, humiliants, qui contreviennent à notre idée du bonheur et de la force.
Toute la vérité des Béatitudes tient dans notre refus de prendre en compte ce que nous sommes tous en réalité : des pauvres en quête d'amour. Combien sommes-nous à faire semblant d'être heureux ou victorieux au prix de contorsions invraisemblables quand elles ne sont pas ridicules ou franchement nocives ?
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Il y a des questions qui prennent une envergure existentielle vouée à rester sans réponse et à écarteler l'âme douloureusement sans lui laisser de répit, dès lors qu'on les pose dans l'absolu et qu'on les extrait du temps circonscrit de la journée d'aujourd'hui.
Dès qu'on se place à l'échelle du jour de maintenant, les baudruches de la fin des temps disparaissent en se dégonflant de leur enflure factice, et les questions se posent dans leur seule dimension réelle : leur dimension concrète. Qu'ai-je à faire maintenant si je veux répondre aux sollicitations du temps présent ? Inquiétude ? Anxiété diffuse sans objet identifiable ? Aller marcher. Surexcitation intellectuelle ? Elaboration de plans de travail démesurés ? Et que vais-je donc faire pour le dîner ? Que puis-je préparer de bon pour ce dîner-ci, sans me débarrasser de la corvée alimentaire par la confection d'une tambouille machinale. Sentiment d'isolement ? Et à qui pourrais-je faire un signe amical, qui aurait besoin, lui ou elle aussi, d'être distrait de sa solitude ?
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La découverte des antidépresseurs dans les années 1950 a causé le fait médical attesté d’une véritable « épidémie «  de dépressions. A l’evidence aussi, on assiste aujourd’hui à une pathologisation grandissante des crises qui jadis signalaient la croissance intérieure naturelle de tout sujet au cours de son existence.
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"Quelle génération pèse donc sur l'autre? Laquelle impose sa loi? Qui rend abominables les devoirs de la tendresse quand l'obédience ou la servitude en détruisent la spontanéité et la liberté d'expression? Entre les grands-parents corvéables à merci et les vénérables aïeux dont la tyrannie affective pèse parfois si lourd, ou y a-t-il de la place pour une douceur partagée, sans ces germes de rancœur empoisonnée qui mènent si souvent vers les ruptures et les solitudes définitives?"
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Oui, j'ai fait beaucoup d'exercices, pendant des années, pour délier ma plume, pour la plier à toutes les exigences de clarté, de dénuement et de profondeur auxquelles j'aspirais. J'ai enseigné, m'imprégnant jusqu'à la moelle, de la parole des créateurs que je me reconnais pour maîtres: Philippe Jaccottet , Simone Weil, Jean Guéhenno, Jules Supervielle, Marivaux le virtuose, Beckett, Offenbach et les livrets désopilants de ses opérettes, Saint-John Perse, Hugo, François de Sales. Tant de noms qui sont pour moi comme un chemin. (p.57)
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L’homme affamé de sagesse ressemble à ces gourmands de la vie si déconcertants qui ont dévoré quantité de livres de recettes sans jamais avoir essayé de faire la cuisine, ou plus simplement, de mettre les pieds sous la table pour honorer le merveilleux banquet offert.
Laisse la faim creuser ton corps,Nãjuka, et ton corps aller au-devant des fêtes que lui réserve l’immédiate profusion de ce qui l’entoure.
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Nous avons mille et une manières de nous fourvoyer dans les couloirs du temps. Les anticipations inquiètes sont aussi funestes qu'est mortifère le scrupule qui nous retient dans les rets de ce qui n'a pas eu lieu mais nous poursuit, sans compter cette néfaste répétition qui, de la légende grecque des Atrides aux intuitions freudiennes, nous fait vivre dans un passé révolu mais pas résolu.
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Je découvre ainsi qu'aujourd'hui, un peu plus chaque jour, que guérir, ce n'est pas ne plus être malade, c'est être dans la Vie, être vivant jusqu'à l'incandescence de la fragilité, avec l'inaltérable joie et la souffrance, toujours possible, acceptée comme l'expression insondable du désir humain. (p. 107)
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Savoir est une réelle consolation. La science a cet effet cathartique d'éloigner le sujet de son mal grâce à la description de celui-ci. Si le mal peut faire l'objet d'une description, alors il perd sa monstruosité et de son vertige. Il n'est plus l'immonde. Il devient une chose pensable. (p.42-43)
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...la sensibilité, lorsqu'elle est trop vive, subit le spectre de l'anticipation comme une fatalité qui la condamne à pâtir par procuration et avant l'heure d'un mal qui n'adviendra peut-être jamais dans la réalité, et qui n'est peut-être un mal que parce que l'anticipation le déforme comme tel.
Cette angoisse anticipatrice peut produire des ravages. A quelque temps d'une échéance redoutée, on met mentalement en scène ce que notre imagination se représente en guise de futur fatal, et on se rend malade à l'avance de quelque chose qui n'aura jamais lieu sous cette forme ailleurs que dans le fantasme déformant d'une anxiété dévoyée. En subissant dans le présent un événement imaginaire, on s'empêche de vivre paisiblement ce qui nous arrive au fur et à mesure du déroulement temporel de la réalité, et, littéralement, on s'empoisonne le sang en peuplant de fantômes un univers mental enfermé à l'extérieur d'une temporalité heureuse, qui serait, elle, ajustée au moment présent.
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D'un point de vue psychiatrique, à ma connaissance, on ne "guérit" pas de la bipolarité. C'est une structure constitutive de la personne lorsqu'elle se déclare. Elle peut avoir alors des manifestations pathologiques, telles que les vélléités suicidaires, les angoisses, le scrupule excessif, les préoccupations obsessionnelles, les compulsions, la mégalomanie et la paranoïa comme étais psychotiques lorsque le sujet est désespérément démuni face à un état de fragilité brutale.
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