Vincent Pomarède : Corot
Olivier BARROT, filmé dans une des salles de la Maison Européenne de
la photographie à Paris, présente "COROT", livre de
Vincent Pomarède sur le
peintre Jean-Baptiste COROT dont une rétrospective des oeuvres est exposée au Grand Palais.
Partie intégrante de la légende, cette image du gamin engagé aux côtés des révolutionnaires inspirera la figure du jeune adolescent peint par Delacroix dans la partie droite de son tableau et suggérera à Victor Hugo, trente-deux ans plus tard, le personnage de Gavroche dans les Misérables. Dans ce roman, le grand écrivain, témoin de l'épopée romantique, évoquera avec lyrisme et réalisme l'intensité de ces convulsions révolutionnaires de 1830 que Delacroix avait déjà décrites, avant la plume du poète, d'un pinceau enthousiaste : "De quoi se compose l'émeute ? De rien et de tout. D'une électricité dégagée peu à peu, d'une flamme subtilement jaillie, d'une force qui erre, d'un souffle qui passe. Ce souffle rencontre des têtes qui pensent, des cerveaux qui rêvent, des âmes qui souffrent, des passions qui brûlent, des misères qui hurlent, et les emporte." Et résumant quelques pages plus loin, les révoltes de 1830, Victor Hugo affirmait : "Il y a l'émeute et il y a l'insurrection ; ce sont deux colères ; l'une à tort, l'autre à droit." (p.14-15)
Si Corot n'est pas un érudit, ni un lecteur assidu des grands auteurs, il possède pourtant une solide culture classique. Par exemple, il sollicite une amie afin de trouver une édition en français, latin et grec des textes de Théocrite, un de ses auteurs favoris. Nous savons aussi qu'il relisait souvent Virgile et qu'il aimait particulièrement Pascal et Bossuet. Sa connaissance du théâtre de Shakespeare est évidente, de même que sa passion pour les poésies d'André Chénier (voir Homère et les bergers). La poésie, si proche de la musique et de l'opéra, l'intéressait vivement et il appréciait Alfred de Musset tout autant que Salomon Gessner, ce peintre et poète suisse. Sa correspondance révèle un homme aimant faire partager ses lectures : "Hier soir, dans la chambre d'hôtel, je relisais une page de Jean-Jacques Rousseau, ce paysagiste de génie : "L'aspect du lac de Genève et ses admirables côtes, écrit-il, ont toujours à mes yeux un attrait particulier que ne je saurais expliquer, et qui ne tient pas seulement à la beauté du spectacle, mais à je ne sais quoi de plus intéressant qui m'affecte et m'attendrit". C'est exactement ce que je ressens ici."
867 - [p. 70]
Traités du paysage. La nature codifiée ?
Dans son Cours de peinture par principes (1708), Roger de Piles, héritier de la tradition classique, distinguait deux types de paysage : le style héroïque, caractérisé par « des objets nobles et capables d’élever l’imagination », dont Poussin a fourni les exemples les plus célèbres, et le style pastoral ou champêtre, où les paysages, « abandonnés à la bizarrerie de la seule nature », sont marqués par la vérité du coloris, comme dans les œuvres de Bruegel.
la liberté guidant le peuple peut donc être considérée - et le fut par la plupart des critiques et historiens d'art - comme une œuvre engagée et novatrice, enracinée dans les préoccupations révolutionnaires et romantiques des jeunes artistes de cette époque troublée de 1830: l'émotion populaire, le drame individuel, la description réalise d'un évènement contemporain, l'héroïsme féminin, les légendes du moyen age, etc.
la rapidité d'exécution de la liberté guidant le peuple ne doit pas pour autant faire croire que l'œuvre fut composée sans recul par un artiste travaillant dans la fièvre et de manière instinctive. bien au contraire, nous connaissons de nombreuses esquisses préliminaires à l'exécution définitive du tableau qui prouvent que Delacroix en avait longuement préparé aussi bien la mise en scène générale que chaque détail .
ainsi idéalisée et intangible, cette liberté demeure pourtant tout à la fois profondément humaine, charnelle et réelle, pierre angulaire d'une composition faire de verticales ascendantes, rythmée par les correspondances subtiles des bleus, des blancs, des rouges et des roses vifs qui donnent à l'harmonie générale, volontairement assourdie, une vibration particulière.
(la légende)
.
Sans aucun doute, Corot est un des peintres les plus difficiles à cerner …. Le développement, durant les dernières années de sa carrière et surtout après sa mort, d’une véritable légende autour de sa personnalité encombre la réflexion sur son œuvre.
Ses propres amis insistent sur sa supposée naïveté, aussi bien humainement que face à la politique ou à l’art, naïveté devenue un véritable mythe. On a en fait mélangé ses propres déclarations concernant la nécessité d’un regard « naïf » sur la nature et des traits imaginaires de son caractère.
Une autre légende porte sur sa méconnaissance de la peinture ancienne et sa répulsion à pratiquer la copie d’après les maîtres. Par la suite, ses partisans ont fabriqué l’image d’un homme sans culture, alors que nous savons parfaitement que l’opéra, le théâtre, la musique et la littérature le passionnaient et qu’il s’était doté, durant ses études secondaires puis pendant sa formation de peintre d’une solide culture littéraire et artistique.
(Influence et formation)
L’influence la plus nette durant son apprentissage, influence qui allait ensuite guider son œuvre, est la conception néoclassique du paysage, que lui enseignent, entre 1822 et 1825) ses deux professeurs, Michallon et Bertin. Il apprend à comprendre et à copier les maîtres et la nature, soit à travers la peinture ancienne, soit directement sur le motif (en Normandie ou à ville d’Avray)
A son retour (d’Italie), il enrichit ses recherches picturales, découvre l’école nordique du XVIIe et la peinture anglaise, plus particulièrement Constable.
… Il effectue un tour de France des régions pittoresques. (Auvergne, Provence, Limousin, Bretagne, Normandie, Nord) et bien sûr en forêt de Fontainebleau où il est parmi les premiers à venir régulièrement, dès 1822.
.. ll séjourne également à l’étranger, retournant à deux reprises en Italie. Il se rend fréquemment en Suisse, patrie de sa mère …visite aussi la Hollande en 1854 et l’Angleterre en 1862.
Paul Signac a mis en lumière le rôle de Delacroix – le traditionnel adversaire d’Ingres – pour expliquer l’évolution de la peinture vers le néo-impressionnisme –, mais on ne saurait oublier que Degas, Renoir – et plus récemment Picasso et les artistes du pop’art – ont été marqués par leur admiration pour Ingres.
au moment des trois glorieuses, Delacroix vient d'avoir trente deux ans. Depuis la mort de Theodore Géricault en 1824, il fait figure, plus ou moins à son corps défendant, de chef de file de la jeune génération des peintres romantiques, bien décidée à briser le joug de la tradition "académique".