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3.76/5 (sur 64 notes)

Nationalité : France
Biographie :

Virginie Noar est une auteure française.

"Le corps d'après" (2019) est son premier roman.

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Virginie Noar vous présente son ouvrage "Le corps d'après" aux éditions François Bourin. Rentrée littéraire Août 2019. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2340023/virginie-noar-le-corps-d-apres Notes de musique : Youtube Audio Library Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Dailymotion : http://www.dailymotion.com/user/Librairie_Mollat/1 Vimeo : https://vimeo.com/mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Tumblr : http://mollat-bordeaux.tumblr.com/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Blogs : http://blogs.mollat.com/
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Citations et extraits (35) Voir plus Ajouter une citation
Corps si souvent éprouvé est tout à coup devenu solaire. Il n'y a pas si longtemps, il n'y avait que l'épreuve de ma silhouette anguleuse et ma peau transpercée, creusée, mélangée aux corps étrangers pour me faire vivante. Désormais, je suis femme pleine, vivant la turgescence des épidermes comme l'avènement de ma féminité, une sorte de quintessence du sexuel féminin. Je me sens corps érotique, alors que jamais je n'ai pu être vraiment comblée de mon état “femelle”. Alors que toujours, j'ai été: genoux écorchés; enfant sage; démarche maladroite; enfant obéissante; peau basanée; fantasmes assassins; désirs refoulés. Corps encombré encombrant. Alors que toujours, j'ai été à l'inverse d'exister.
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"Bon tu veux faire du porno, c'est ça ?"
Sans l'avoir prévu, je lui ai livré la médiocrité de ma carrière de vendeuse à peine entamée, les jours gris de ma banlieue indifférente, le train éternel de mon ennui, mon jour de repos choisi pour le rencontrer, mon désir de m'échapper d'une existence pliée d'avance. Travailler, acheter une maison, avoir des enfants, une clôture contre les voleurs, un tablier pour moi, une tondeuse pour mon mari, un labrador pour les mioches ou des mioches pour le labrador. L'ordre des choses et les circonstances de la servitude volontaire m'étaient étrangers, mais j'étais déjà certaine d'une chose : je voulais m'en échapper. p. 142
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INCIPIT
Mais tu n’es pas morte.
Les pieds immergés dans la mare de tes entrailles exfoliées, tu n’es pas morte, tu es bien vivante. De chair et d’os et de viscères.
Derrière la porte, elle est là, les paupières closes et l’insouciance au corps.
Elle t’attend, elle te manque; où est-elle? Elle flotte dans l’air et tes chevilles se noient.
Tu ne parviens pas à toucher, là. Ça ne cesse jamais de couler, tu ne sais que faire de cette serviette rêche et minuscule, blanche absurdité moquant l’ampleur de la tragédie. Ils ont cousu, là, entre tes jambes, à l’intérieur de toi béante, ils ont fait des points avec un fil et une aiguille, t’ont rapiécée, le geste las et l’âme ailleurs. Ils ont cousu ici et tu l’as senti, oh oui tu l’as bien senti, tu es déchirée dedans.
Ça tourne autour. Tes jambes vacillent, ton corps est faible et rompu, tu voudrais rentrer à la maison et dormir jusqu’à beaucoup. Tu as mal aux os, tu as mal au corps, tu as froid, tu frissonnes.
La sage-femme t’a laissée, là, sur le seuil de la porte. Elle t’a abandonnée et a dit «à tout à l’heure» d’une voix guillerette, comme si elle ne voyait pas dans tout ce corps éreinté que tu voulais la supplier de ne pas te laisser comme ça, vidée comme un poulet, dépecée, charcutée, mutilée.
En tremblant, tu fais couler un mince filet d’eau sur ce morceau de chair bleuie par les efforts, cette tranche de peau malade et gélatineuse qui se balance sous tes yeux et porte la mélancolie précoce du nourrisson qui n’y reviendra jamais.
Ton ventre. Tu n’as même pas pensé à le toucher une dernière fois et il n’en reste que sa peau flétrie. Tu es devenue un fruit passé, tu dois maintenant te laver, effacer les traces de l’Évènement, tout doit disparaître. Là-bas, derrière la porte, ils ont déjà dissimulé le sang la merde les larmes les cris, les draps ont été changés, la lumière a été tamisée, il ne reste que le bébé à la peau douce dans un pyjama de velours et un bonnet trop grand pour lui, un bracelet en plastique avec son prénom dessus, la layette et les publicités dedans. Tout est prêt pour que le monde accueille le nourrisson enfin extrait de la mère mais, tout de même, madame, lavez-vous la vulve, soyez présentable.
Où est-elle? Que fait-elle?
Lave-toi.
Tu as froid, tu pleures, tu suffoques dans ce réduit aseptisé mais tu sais aussi que c’est que du bonheur, c’est comme ça qu’ils disent tous: «quand ils déposent le bébé sur ton ventre vide, tu oublies tout». Pourquoi tu n’oublies pas tout, toi, hein?
Lave-toi.
Pourquoi tu pleurniches alors que ton bébé, là-bas, c’est que du bonheur?
Avec l’écume blanche du savon entre tes mains, tu effleures lentement ta poitrine et. Ton ventre. Flasque et las.
Prise de vertige, tu ne peux soudain réprimer le hoquet de dégoût qui jaillit de ta bouche. Tu regardes tes pieds, souillés de vomissures et de sang et tu entends «c’est que du bonheur» dans ta tête obstinée, cette petite tête capricieuse qui ne veut rien entendre de ce que disent les autres.
Et puis tu chancelles.
Tu voudrais pleurer, être vivante de larmes ou de cris peu importe, tu claques des dents, tu voudrais dormir et qu’on t’arrache de ce corps étranger, là, tout de suite, ne jamais avoir vu cette étendue de sang qui macule la salle de bains étroite et virginale. Tu t’assieds sur la cuvette des toilettes parce que.
Ça virevolte.
Tu ne peux plus. Tu as mal. Peur. Tu chuchotes «au secours».
Ça tourne. Ça virevolte.
Tu tombes, de ce corps nu qui saigne sans s’arrêter. Mais tu n’es pas morte.
Tu n’es pas morte.
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Je ne sais plus dans quel ordre nous avons fait les choses, homme femme réunis dans un déséquilibre grisant, nous nous retrouvions chaque jour partout toujours, nous nous aimions dès qu’il était possible de s’aimer féroce, j’ai en mémoire des escaliers dans la pénombre d’un hôtel vétuste quand, bercée par le brouhaha de la grande ville, je me suis salie de lui, dans ma main bouche ventre et (je t’aime)
mes cheveux tirés, sa verge à l’étroit, sa verge à l’envers de moi, contre moi, en moi
(je t’aime).
C’est peut-être ce jour-là que c’est arrivé, je ne sais pas. La vie dans un je t’aime obscène. C’est allé tellement vite. Nous n’avons même pas eu le temps de penser les mots. Nous étions heureux, je crois, de ces deux barres verticales et inattendues dans le boîtier en plastique, présage connu et déjà éprouvé.
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Et la culpabilité, plus encore que la colère, m’envahissait face à cette litanie grossière. Je me pliais alors aux humeurs imprévisibles de la mère, entretenant en sourdine et dans le flou de ma faute une rage comme une promesse à moi-même, contre moi-même, de ne jamais lui donner raison. Je m’imaginais mère à mon tour, dans un avenir lointain – parce qu’au fond étais-je capable, moi –, une mère idéale, de celles qui peuplent les livres et les films – où sont les pères –, de celles qui aiment inconditionnellement, dégagent une autorité naturelle, sourient sans sourciller toute la sainte journée, de celles qui parviennent à être mère et femme en même temps, alternant dévotion domestique et vie sexuelle, vie sociale et vie pour soi, de celles qui travaillent et sont indépendantes, gèrent en même temps les bouches sales et les devoirs, les joyeux dimanches et les plannings, les visites au musée et celles chez le pédiatre. Dans mes rêves, je vivais dans une propriété aux grands murs blancs parce que, bien sûr, les rêves d’enfant n’ont jamais lieu dans la poussière. Les rêves d’enfant ignorent la fatalité de ce qui fait reproduction. Mais au-delà de tous ces vœux, je me voulais mère aimante, capable de tendresse et d’amour impudique, sans leçons culpabilisantes, à l’écoute des larmes et des douleurs, une mère qui joue et cuisine avec ses enfants, se fout de la farine qui vole sur les murs et des jaunes d’œufs qui dégoulinent, une mère qui bricole des guirlandes de Noël et des anniversaires sur mesure. Une mère qui rit aux éclats.
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L'instinct, c'est pourtant la force de vie qui préexiste en chaque corps vivant pour survivre et évoluer. Ce n'est pas une histoire de salaires inéquitables ou de coups sur la tronche, ce n'est pas une histoire de fillettes fragiles princesses mignonnes et de garçons intrépides courageux chevaliers, ce n'est pas une histoire de bonheur ou de nature. L'instinct, c'est simplement l'addition de nos prédispositions à être, intuitions de nos corps à être compétents autonomes forts puissants. Verge ou vagin, peu importe.
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Les femmes qui baisent plusieurs hommes, celles qui n’aiment que les femmes, celles qui décident de porter un job, celles qui tarifient leurs relations sexuelles, toutes ces femmes-là qui ne servent pas l’homme et son pénis entre les jambes, toutes ces femmes-là ne sont pas vraiment des femmes aux yeux de ceux qui s’octroient le droit de valider leur existence. Il y aura donc toujours, quelque part derrière moi, cette voix qui me dira quoi faire avec mon corps et mon vagin pour être une femme digne de ce nom
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Dans ces moments-là, quelque chose en moi voudrait la pousser violemment, hurler mon corps réduit à être objet indésirable, mais je serre les dents en pensant à tout le mal qui lui a déjà été fait depuis ce matin-là, depuis son frère, depuis sa vie qu’elle n’avait pas réclamée. Parfois même, je la laisse me piétiner pour compenser le péché d’être une mère qui s’éteint avant de la stopper d’un « non » lapidaire et sans appel. Face à ses larmes de colère, d’une voix monotone et sans nuances, je répète la litanie inlassable de mon impuissance, c’est mon corps, j’ai besoin que tu le respectes. Je comprends que tu sois en colère mais je n’ai plus envie. C’est difficile pour moi. En réalité, je ne parviens pas à ressentir sa colère. Incapable d’empathie, je suis fermée à toute sensibilité émotionnelle
(je m’effondrerais sinon)
mais je sais dire les mots appris par cœur. Je suis hermétique mais je sais que c’est ainsi que je dois agir, je sais que ce sont ces mots-là qui guérissent sans excuser, je l’ai lu dans les livres dont ma bibliothèque regorge, ces manuels qui guident ma parentalité sous forme de conseils imprimés et m’évitent de les détruire avec ma turpitude.
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Bientôt, ils baiseront. Ils le savent mais feignent de l’ignorer parce qu’ils rêvent encore de la magie des premiers instants, cette faim qui dévore les tripes quand l’autre n’est plus là, ils rêvent de mourir de trop s’aimer avant de s’éteindre de trop de banalités. Pour l’heure, ils rient et se racontent la médiocrité du monde, ce monde aux écorchures saillantes quand eux sont devenus lisses et exemplaires.
Peut-être un jour décideront-ils d’avoir un enfant. Perpétuer la race humaine, reproduire le modèle, fabriquer d’autres soi-même. Mais pour l’instant, il expose ses préceptes sur la politique la météo la guerre, cette société qui n’est plus ce qu’elle était quand nous n’étions pas encore nés. L’autre fois, il a même aperçu un clochard sous la porte cochère de son entrée d’immeuble – on n’en voyait pas il y a encore deux ans, dans ce quartier, de ceux-là. Il faisait froid et même si c’est l’automne qui fait semblant d’en être un il a vraiment eu de la peine pour lui. Mais quand même faudra-t-il faire une descendance au monde, l’améliorer de nos enfants.
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Bien sûr, il y avait les mots et je lui en fabriquais tous les jours de nouveaux, des mots doux, des mots jolis comme des provisions avant l’orage. Et parfois, je n’y arrivais pas du tout, ces jours et ces nuits quand elle ne dormait pas, quand elle appelait celui qui avait déserté et qu’elle tapait, tapait de toutes ses forces, me mettant à l’épreuve de la violence, et quelquefois je hurlais si fort, et quelquefois je la saisissais par le bras, elle protestait en disant que je lui faisais mal, c’est vrai que je la blessais sans le vouloir car ensuite je constatais les marques rouges sur son avant-bras même si moi j’en étais sûre de ne pas avoir serré, il y avait sur son corps miniature les traces de moi impossible à réfréner, et quelquefois la fureur était si grande que j’étais forcée de m’enfermer dans une autre pièce pour ne pas céder à la tentation de la révolte.
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