A dix ans, j'avais des couettes ou des tresses suivant l'humeur du jour de ma mère et je la suppliais de me laisser aller en vélo à l'école, pour faire comme les grands.
A dix ans, mon meilleur copain s'appelait Séverin, et il avait les clés de sa maison autour de son cou -le chanceux! je pensais à l'époque- parce que ses parents travaillaient beaucoup, et il venait parfois en pantoufles en classe parce qu'il oubliait de mettre ses chaussures.
A dix ans, j'étais terrorisée par les mauvaises notes et ne savais pas sauter à la corde, manque de coordination, une corde à sauter dans les mains et je manquais de décapiter tout le monde (d'ailleurs, je ne suis pas plus habile maintenant... ).
A dix ans, j'en faisais de choses, je vivais dans un univers peuplés de rêves et d'aventures en tout genre (ça n'a pas changé non plus) et j'essayais de comprendre le monde qui m'entourait.
Un peu comme Felix.
Felix est le plus petit de sa classe et le deuxième juste derrière Rosalie Twerski, la fayotte de service, vous savez, celle qui a toujours la main levée et n'hésite pas à dénoncer ces camarades. Lonny est son meilleur copain. Il est plus grand que lui, mais c'est normal, il a deux ans de plus, et lui, contrairement à Felix, il s'installe au fond de la classe, ou plutôt on l'installe au fond de la classe. Parce que Soeur Dymphna n'est pas facile. En plus d'être sévère, elle a une légère tendance à la dépression et au passage de films en classe quand le rideau noir s'abat sur elle. Et par un fâcheux concours de circonstances (auquel Félix est bien évidemment étranger, il est beaucoup trop sage avec ses boucles brunes et son air de premier, euh.. second de la classe, non, ça n'a rien à voir avec ses tirs qui ont malencontreusement raté leur cible pour atteindre un obstacle non identifié et imprévu), Soeur Dymphna se voit obligée d'abandonner l'école et est remplacée par Melle Marguerite, la nouvelle instit', une laïque dans une institution privée, qui arrive avec ses manières libres et son français québecois.
L'année scolaire qui s'annonçait insipide devient franchement plus... originale.
Wally Lamb nous livre dans un portrait tendre et teinté d'humour de l'enfance qui découvre la vie. Felix est grand maintenant, il a dix ans, il comprend tout, ou presque. Et ce qu'il ne comprend pas, il doit le comprendre pour ne pas être ridicule, l'adolescence est sur le pas de la porte. Son copain Lonny sait plein de choses, il fait des blagues qui font rire tout le monde, un peu comme Chino, le serveur du restaurant de la famille, mais Felix ne peut surtout pas avouer qu'il ne comprend pas toujours leurs blagues. Il se pose des questions, la sexualité commence à l'interpeler et il a essayé de demander des explications à son père, mais celui-ci évite la question et trouve des excuses. Il se défile.
Felix porte un regard naïf sur l'Amérique des années 60, sur la modernité qui envahit le monde, les concours de cuisine et les spectacles à l'école, sur la famille, sur les amis (Zhenya et sa langue qui fourche est un personnage déluré très rafraîchissant dans ce contexte de Guerre Froide et de la peur de l'autre) et sur tout ce qui semble important quand on a dix ans.
C'est un roman que j'ai apprécié mais qui m'a un peu laissée sur ma faim. Il aurait pu me marquer, mais malheureusement, je n'en garderai pas un souvenir impérissable. Sans savoir pourquoi, j'avais en tête Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur en attaquant le récit (qui n'ont de point commun que le récit de l'enfance), et peut-être que cela a conditionné ma façon d'aborder la trame. La première partie a manqué de rythme à mon goût, mais a malgré tout été compensée par la fin qui m'a fait franchement sourire, comme un diesel qui met du temps à démarrer.
Par contre je m'interroge, pourquoi ce titre dans la version française ? On est bien loin du Wishin' and Hopin' original...
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