Je regarde par la fenêtre les arbres qui défilent à toute vitesse, parfaitement alignés. Il poursuit.
– Mon gars, je sors de l’immeuble et juste devant y’a des Pakistanais avec des draps. Caleçons, chaussettes, marcels, gants, bonnets. Parfois même des poissons. Ils s’installent avec leur grosse poiscaille, là, sur des cartons, et ils la vendent. Sans glace je te dis, rien. Une infection. T’en as un autre qui vend des bananes. Des sacs de pain. Je passe en face, je prends la rue Acharnon pour aller au travail, et là je dois faire un vrai slalom. Je suis obligé de marcher au milieu de la rue, un jour je vais me faire faucher par une bagnole. Et puis y’a les coiffeurs. Je te jure, ils se font couper les cheveux en permanence ces gens-là. Les salons de coiffure sont ouverts du matin au soir, avec la queue jusque sur le trottoir. Dans chaque pâté de maison, t’as un coiffeur avec une enseigne arabe. Je sais pas ce qu’ils ont comme règle qui leur dit de se faire couper les cheveux tout le temps. C’est écrit dans le Coran ça ?
Je fais signe que je n’en ai aucune idée. Je lui demande où il se fait couper les cheveux.
– Chez Mary, rue Alkiviadou. Au début elle était rue Heyden, dans un demi-sous-sol. Huit euros elle me prend. Normalement c’est douze. D’accord, elle me connaît depuis que je suis gamin, et puis faut dire que j’ai plus beaucoup de cheveux maintenant, elle me fait un prix.
Il rit de sa blague. Je souris.
…) pour que ma mère soit contente je compte lui demander de m’amener un livre illustré avec ce genre de photos qui montrent des foules rassemblées des manifestations des guerres des combats ça me fait quelque chose quand je vois beaucoup de monde rassemblé je flaire quelque chose comme du grabuge ce qui me plaît bien et comme une justice aussi autant de gens rassemblés chaque fois ils ont forcément raison et au moins si tu es avec eux au milieu de la foule tous ceux qui sont autour de toi sont d’accord avec toi et toi aussi tu es d’accord avec eux et tu le sais et ils le savent eux aussi et y’a besoin de rien dire de plus c’est pas une mince affaire ça.