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Critiques de Yong-yi Tseng (1)
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Chine, le théâtre

Clairement plus détaillé que Spectacles d'Asie que j'ai lu juste avant, l'essai de Tseng Yong-yi permet, lui, d'acquérir des connaissances dont on ne peut guère se passer s'il l'on souhaite comprendre ne serait-ce qu'un tout petit peu le théâtre classique chinois et son histoire. J'ai bien eu un peu peur au début, lorsque j'ai vu défiler devant mes yeux des termes à la file, comme pour tsa-tsiou, tch'ouan-t'si, eul-houang, si-pi et autres vocables parfaitement inconnus de moi. De plus, la transcription française en vigueur en 1990 des termes mandarins n'était pas faite pour aider ! Aujourd'hui, on trouvera les termes zaju, chuanqi, erhuang et xipi - ce qui facilite les recherches. Idéalement, un glossaire n'aurait pas été de trop, ainsi d'ailleurs qu'une chronologie des dynasties chinoises. Mais vu que les éditions Philippe Picquier ne sont sont même pas fendu d'une quatrième de couverture ou d'une présentation de l'auteur, pas étonnant qu'on n'ait pas prévu deux ou trois annexes qui se seraient révélées pratiques pour le lecteur. Bon, ces termes que j'ai mentionnés, on les comprendra en gros plus tard, heureusement.





En un essai relativement court, Tseng Yong-yi s'est attaché à retracer non seulement l'histoire du théâtre classique chinois - car c'est bien le seul et unique sujet -, et donc l'évolution des lieux utilisés pour les représentations, la diversité du public, mêlant toutes les couches de la société, mais aussi tout ce qui touche aux types de personnages, aux maquillages des acteurs/chanteurs/danseurs, et, bien entendu, à la place très spécifique de la musique (les zaju et autres xipi étant des modes musicaux), et qui reste difficile à appréhender pour des Occidentaux peu coutumiers du sujet. Car évidemment, le théâtre chinois classique, ce n'est pas seulement du texte joué, mais c'est tout un art mêlant décors minimalistes, costumes, jeu d'acteurs, certes - mais plus souvent chanté qu'uniquement joué, les spectateurs étant plus sensibles aux chants qu'aux passages parlés -, arts du cirque et arts martiaux. En gros, rien à voir avec ce que nous appelons en général théâtre en Europe. Je dois dire que Tseng Yon-yi, malgré un format d'ouvrage court, se débrouille très bien pour faire comprendre l'essentiel.





Il s'intéresse aussi aux structures des pièces, à leurs influences littéraires et à leur composition. Et là, sans s'énerver pour autant, il ne mâche pas ses mots. Selon lui, le théâtre classique chinois (que vous pouvez tout aussi bien nommer "opéra") n'a jamais su ou pu intégrer des éléments contemporains dans leurs pièces. Il mentionne les répressions dont les lettrés ont fait les frais sous certaines dynasties, mais sans s'y arrêter, si bien que cet aspect des choses m'a un peu échappé. En revanche, il n'hésite pas à dire que le public attend toujours la même chose, à savoir des pièces tirées des légendes chinoises célébrissimes, que les dramaturges ne veulent pas décevoir le public, et que le théâtre chinois classique en est arrivé à une forme de sclérose. Ajoutez à ça qu'il dénonce un bricolage permanent concernant la composition des pièces... Je ne saurais donner mon avis là-dessus, mais on appréciera que l'auteur ait mêlé la présentation d'éléments essentiels à la compréhension du théâtre classique chinois à un esprit critique, qui l'amène à s'interroger sur l'avenir dudit théâtre classique chinois (le présent ouvrage datant de 1990, je le rappelle).





Ce qui m'a intéressée, au-delà de tout ce que j'ai pu apprendre et qui m'était jusqu’à présent inconnu, c'est l'étrange parallèle qu'on peut établir avec le théâtre européen. D'un côté, certaines évolutions dans l'histoire de ces théâtres respectifs se ressemblent : lieux en plein air devenus au fil du temps lieux fermés, troupes de cour, troupes itinérantes, troupes de métier fixes, etc., place de l'improvisation très importante au moyen-âge, publics mélangés (on pense au théâtre élisabéthain) et tant d'autres éléments par-ci par-là. D'un autre côté, il paraît évident que jamais le théâtre européen n'a été multiforme comme le théâtre classique chinois. Certes on a connu en France une période de grands spectacles de cour, certes Wagner rêvait d'un art total, mais la musique instrumentale, le chant, la danse, les arts du cirque, les arts martiaux n'ont jamais eu la place que le théâtre chinois leur a réservé. Mais heureusement pour nous, nous avons su prendre quelque distance avec notre théâtre classique (même si certains de nos comédiens manquent à l'évidence d'un naturel qui serait le bienvenu)...





On comprend en tout cas pourquoi, dans la filiation du théâtre classique, le cinéma chinois a longtemps beaucoup misé sur les légendes, sur les chorégraphies et les arts martiaux : des films comme Histoires de Fantômes chinois ou Tigre et Dragon en sont des exemples connus, mais également Jackie Chan, issu d'une école de formation de l'opéra de Pékin et devenu une star internationale de films d'arts martiaux.
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