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Critiques de Yukio Mishima (636)
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Le Pavillon d'or

Yukio Mishima (ou l'inverse si l'on veut faire plus japonais) est parti d'un fait divers réel, à savoir l'incendie du célèbre et vénérable pavillon d'or de Kyôto par un novice quelque peu déséquilibré en 1950, pour en faire un roman initiatique d'une grande subtilité et absolument dépourvu de manichéisme.



Il faut rappeler que Mishima avait 25 ans au moment des faits et que l'incendiaire en avait 21, donc, qu'ils appartenaient quasiment à la même génération, ce qui a permis à l'auteur d'injecter multiples influences qu'il était capable de puiser chez lui ou certaines de ses connaissances pour forger un personnage crédible en s'appuyant sur les quelques éléments réels de la biographie du bonze novice qui se rendit coupable de ce sacrilège.



C'est donc un lent et vacillant cheminement auquel nous invite Mishima sur les traces d'un adolescent frappé d'une infirmité d'élocution, qui se sait laid, qui déteste sa mère et a perdu son père, lequel, lui-même prêtre zen lui a transmis un véritable sens de la vénération pour la beauté incomparable du pavillon d'or.



À la mort de son père, le prieur (principal religieux du temple où figure le pavillon d'or) recueille le jeune adolescent, étant un ami du père et lui ayant assuré de veiller sur lui. Ainsi, notre adolescent torturé devient novice au temple et peut contempler à loisir ce bijoux de raffinement et de fascination qu'est le pavillon d'or.



Il va se lier à deux amis, qui symboliseront le yin et le yang du jeune homme. Tsurukawa, d'une part, sorte de génie bienveillant qui arrive à percevoir les bons côtés du jeune bonze derrière ses infirmités et ses frustrations, tentant ainsi de les magnifier.

D'autre part, Kashiwagi, sorte de côté obscur, génie malveillant, qui sous prétexte de libération pousse son ami vers la dépravation.



On verra donc le jeune bonze tiraillé jusqu'au plus profond de son âme entre le côté lumineux et le côté obscur, adolescent mal dans sa peau, complexé dans sa chair, mal dans le monde, épris de beauté mais s'en sentant exclus, la recevant même comme une injure, faisant ressortir sa propre laideur, tant physique que spirituelle jusqu'à lui devenir insupportable.



La pavillon d'or cristallise tout ce qui, à ses yeux, est le summum du beau, donc ce qui l'empêche de vivre...



En somme, un beau roman sous forme de récit à la première personne, très psychologique où, au détours de quelques passages on devine un Japon d'après guerre, ruiné économiquement, gangrené par le marché noir et humilié par la présence des militaires américains. Je vous ai donné mon avis, c'est-à-dire, pas grand chose, maintenant c'est à vous de jouer pour forger le vôtre.
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Le Pavillon d'or

Si vous êtes actuellement en recherche d’un bouquin distrayant avec des personnages hauts en couleur et dégageant une joie de vivre, passez votre chemin et remettez à plus tard la visite du Pavillon d’Or !



L’action du roman se situe dans la région de Kyoto, l’ancienne capitale impériale.

Nous sommes dans l’immédiat après-guerre, le Japon est traumatisé par la défaite, l’apocalypse nucléaire et la présence des troupes américaines sur son sol met à mal la fierté de tout un peuple.



C’est dans ce contexte historique peu reluisant que nous faisons connaissance avec Mizoguchi, le fils d’un prêtre bouddhiste. Celui-ci à transmis à son fils son amour paroxysmique du Pavillon d’Or, le plus connu des temples de Kyoto.

Au décès du père, le Prieur du Pavillon d’Or, Tayama Dosen, prend le jeune Mizoguchi sous son autorité ; il devient alors novice du temple dont il à tant rêvé.

Mizoguchi est une personne introvertie qui se trouve laide et qui bégaie. Son seul véritable plaisir est la contemplation du Pavillon d’Or, summum à ses yeux de la beauté sur terre.

Il se lie toutefois d’amitié avec un autre novice, Tsurukawa. Celui-ci va avoir une influence positive sur Mizoguchi qui prendra peu à peu confiance en lui au point d’avoir pour ambition à un moment donné, d’occuper un jour le poste de Prieur. Mais Tsurukawa meurt brutalement.



Privé de son soutien moral, la trajectoire du jeune Mizoguchi va brutalement s’inverser.

De plus en plus perturbé et très mal entouré, il sombrera au fil des pages dans un délire paranoïaque dans lequel il rendra le Pavillon d’Or responsable de tous ses malheurs et finira par commettre l’irréparable…



J’ai adoré ce roman. L’histoire est finalement assez sordide mais l’approche psychologique des personnages, à commencer bien sûr par le personnage central Mizoguchi, est traitée avec beaucoup de justesse et sans parti pris. Mishima laisse le lecteur se faire sa propre opinion sur l’acte à priori insensé du jeune novice.

Mais c’est sans doute la poésie omniprésente que le lecteur appréciera avant tout. Il gardera longtemps en mémoire la magnificence du Pavillon d’Or, comme faisant partie intégrante de la nature.

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Une matinée d'amour pur

Profondément pessimiste Mishima ? Peut-être pas... Celui qui avait pour habitude de condamner la nature humaine et tout ce qu'elle représentait de plus abjecte à ses yeux, nous offre dans ce recueil sept nouvelles dans lesquelles il célèbre l'amour et la beauté tragique. Humeur mélancolique et tourmentée, à déguster tel un divin élixir qui nous donne l'illusion, le temps de cette lecture, d'entrevoir ce qu'il y a de plus laid dans la beauté et inversement ce qu'il y a de plus beau dans la laideur car oui, la douleur est belle chez Mishima, elle est toujours en contrepoint d'un amour quel qu'il soit, à l'image de chacun des personnages qui prend vie sous la plume de l'écrivain et dont les sentiments sont la plupart du temps douloureux et inassouvis.



Je me suis délectée de chacune de ces sept nouvelles. La nouvelle ayant pour titre "La lionne" m'a bouleversée. "Une histoire sur un promontoire", "Haruko", "Le cirque", "Papillon", "La lionne", "Un voyage ennuyeux" et "Une matinée d'amour pur" qui donne son titre au recueil , ont été publiées au Japon entre 1946 et 1965. Yukio Mishima avait à peine 21 ans quand il a écrit la première nouvelle. Elles ont toutes pour point commun de se dérouler au lendemain de la guerre sino-japonaise (sauf pour la dernière nouvelle) ce qui favorise l'atmosphère pernicieuse et mortifère qui plane sur ce recueil de la première à la dernière page. Les évènements terribles liés à l'invasion de la Mandchourie (Moukden) ou encore Nagasaki sont également évoqués en filigrane et viennent contraster avec la pureté quasi virginale qui émane de chacune des descriptions de l'auteur.



J'ai choisi aujourd'hui de vous parler plus précisément de trois nouvelles : "Une histoire sur un promontoire", "La lionne" et "Une matinée d'amour pur". Je vous laisse le soin de découvrir les autres.



Une histoire sur un promontoire...



"La sensation d'étrangeté atteindrait alors à son comble. Sur ce promontoire, dix à vingt minutes de promenade suffisaient pour pénétrer dans un univers de conte de fées."



Éloge de la rêverie, découverte de l'interdit et des premiers émois pour Aki-chan, petit garçon âgé de onze ans, originaire de Tokyo qui découvre les joies de la mer pour la première fois lors d'un séjour en famille sur la presqu'île de Bôsô. La baie des Hérons, petite plage perdue au milieu d'une nature brute et sauvage, paysages côtiers à perte de vue en contrebas d'un promontoire rocheux qui exerce sur ce petit garçon un attrait irrésistible, ce petit garçon qui est déjà très sensible aux nuances et aux teintes changeantes que lui offre le panorama et qui malgré son jeune âge, semble porter en lui une forme de gravité inquiétante.

Une maisonnette délabrée au bout du sentier tout en haut de ce promontoire, la mélodie d'un orgue qui résonne comme un chant funeste, la rencontre avec une mystérieuse jeune fille. Illusions d'optique, perspectives en trompe-l'oeil au gré d'un paysage qui ne cesse de se métamorphoser selon le point du jour, une partie de cache-cache pour notre petit narrateur et pour le lecteur...



La lionne...



"Depuis qu'elle avait assisté au spectacle atroce du rapatriement de Mandchourie, elle était devenue si sensible qu'elle avait écarté tout objet rouge de sa chambre. Mais, dans ses rêves, le sang coulait à flots."



Quand la Médée d'Euripide prend l'apparence d'une belle jeune femme naïve et fragile, issue de la haute bourgeoisie tokyoïte... Octobre 1946, résidence des Kawasaki, le maître de maison n'est plus, ses employés fidèles vivent dans le souvenir de cette demeure qui en un temps pas si lointain connut des jours fastes, et dans le dédain du nouveau maître de maison : Hisao, qui leur semble être la cause de tous les maux dont souffre sa jeune épouse, Shigeko, laquelle lui a donné un adorable fils, Chikao. La jeune femme est fragilisée par un séjour qu'elle a passé en Mandchourie dont elle garde des séquelles effroyables, elle est la plupart du temps laissée pour compte, bafouée par son lâche de mari qui la trompe impunément et elle n'a d'autre choix que de se venger et de mettre en oeuvre un plan dans lequel il n'y aura aucun compromis, aucun échappatoire, quitte à commettre le pire des crimes, froidement et sans remords aucun, contre sa propre chair, son propre sang. Quand la soif de vengeance dépasse l'amour qu'une mère porte à son enfant, la lionne jusque là endormie se réveille...



Une matinée d'amour pur...



"Quand on est allé danser, et qu'elle a avancé la bouche, ses lèvres prenaient une forme incroyable, un mélange de classe et de splendeur, une solennité de femme âgée, que je n'avais jamais connue. Au fond si elle avait eu les cheveux blancs et si elle avait laissé tomber son maquillage, j'aurais été capable de l'aimer d'avantage."



Tokyo, rives de la Tamagawa, courant des années soixante, un homme, une femme, respectivement âgés de cinquante et quarante-cinq ans cherchent à tout prix à conserver leur beauté originelle et moyennant une vie d'aisance qui le leur permet, ils usent de toutes les techniques qui sont à leur portée pour pouvoir conserver l'éclat de leur jeunesse passée. Mais est-il possible de retrouver l'éclat de ses vingt ans quand l'âme profonde en a quarante-cinq, quand le miroir renvoie ce qui n'est en définitif qu'une illusion ? À l'esprit nul ne saurait mentir sur l'âge... Vouloir retrouver la passion des premiers élans amoureux, ressentir le vertige du tout premier baiser échangé car nul autre n'aura plus jamais pareille saveur, Ryosûke et Reiko le savent et ne le supportent pas aussi ils tentent par tous les moyens de retrouver la sensation de ce premier baiser qu'ils échangèrent par un beau matin de mai, "un baiser pareil à l'éclat de l'aurore". Mais l'expérience n'est-elle pas sans risque lorsqu'elle compromet également la vie de deux jeunes innocents qui malgré eux deviennent les instruments d'un jeu pervers à l'issue macabre ?



Sept nouvelles magnifiques dans lesquelles l'âme respire par le corps et par la souffrance, l'auteur mélange subtilement les couleurs du beau et du laid pour nous offrir une peinture torturée et subtilement perverse. Quête d'absolu, d'extase, d'un moment qui a été et ne sera jamais plus comme ce premier baiser que Ryosûke et Reiko échangèrent autrefois, comme la mer en contrebas du promontoire qui se reflète dans les yeux d'un petit garçon au coeur pur. Dans ce recueil Mishima a su mettre magistralement en scène la beauté tragique comme il le fera quelques décennies plus tard avec sa propre mort.





La nostalgie camarade, la nostalgie camarade

Qu'est-ce qui te prend mon sucre de canne

De te klaxonner la gueule sombrer sur les récifs

De ta mémoire et revoir ton passif

En respirant la colophane



La nostalgie camarade, la nostalgie camarade

Il s'en passe des choses sous ton crâne

Rasé c'est plein de tristesse et de kif...

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Confessions d'un masque

Tel l’oiseau migrateur qui d’instinct se laisse porter vers des paysages familiers, j’ai retrouvé avec enthousiasme l’univers de Yukio Mishima.



« Confession d’un masque » est un roman intimiste écrit par l’écrivain japonais à seulement 24 ans et s’apparente à une autobiographie de la première moitié de sa vie. Certes j’aurais gagné en cohérence à le lire avant bon nombre de romans qui lui sont postérieurs, mais peut-être alors ne l’aurais-je pas autant apprécié !



Le narrateur, Kochan, est issu d’une famille tokyoïte relativement aisée au sein de laquelle émerge la personnalité étouffante de sa grand-mère paternelle.

De constitution frêle, le jeune Kochan aime se déguiser et les accoutrements féminins ont souvent sa préférence. Il adore regarder les livres d’images et n’aime rien tant que d’admirer les chevaliers intrépides, l’épée levée dans des combats sanglants.

L’année de ses douze ans une image du martyr romain Saint Sébastien, le célèbre tableau de Guido Reni, déclenche son premier émoi incontrôlé et deux ans plus tard il est fasciné par un camarade de classe de constitution athlétique un peu plus âgé que lui.

Alors qu’il souffre d’anémie, il croit son insuffisance sanguine liée à son péché quotidien d’onanisme et va jusqu’à imaginer un rapport inverse entre son « manque de sang » et ses songeries sanguinaires…



Perturbé par la découverte de son homosexualité et gagné par un sentiment de culpabilité, le refoulement de son véritable moi s’impose au jeune homme comme seule échappatoire.

En recherche d’une prétendue normalité, s’imposant l’obligation morale d’aimer une jeune fille, Kochan surnage tant bien que mal dans ses contradictions et ses faux-fuyants.

La personnalité du narrateur, âgé de 20 ans en ce printemps 1945, est à peine moins tourmentée que le ciel de Tokyo où s’intensifient les raids destructeurs des bombardiers américains.



« Confession d’un masque » est un roman rédigé avec intelligence, un formidable plaidoyer pour le droit à la différence. Avec sincérité, sans tabou, Mishima dévoile les pulsions inverties qui taraudent le narrateur depuis son enfance et, par là même, offre un témoignage parfois cru, terriblement réaliste.

La maestria avec laquelle le jeune écrivain s’empare d’un thème aussi sensible fait de ce roman une œuvre magistrale, incontournable.



C’est le dixième livre de Mishima que je découvre cette année ; pardonnez-moi je vous prie, de souligner une fois de plus la beauté singulière du style de cet écrivain !

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Le Pavillon d'or

La beauté est une offrande en même temps qu’une injure à celui qui naît sans grâce.

Dans la nuit du 2 juillet 1950, le Pavillon d’Or, temple bouddhiste de Kyoto, datant du quatorzième siècle, est incendié. Le Japon, alors très affaibli par la guerre, est en état de sidération face aux ruines de ce lieu sacré. Mais le plus choquant est peut-être l’identité de l’incendiaire, un jeune moine qui dit avoir agi par "haine de la beauté". Cet acte insensé, Mishima va tenter de lui donner une explication. C’est ainsi qu’il écrira ”Le Pavillon d’Or”, roman complexe et remarquable qui plonge le lecteur dans les eaux profondes du psychisme d’un adolescent blessé, Mizoguchi.



Chétif et bègue, exposé aux moqueries, Mizoguchi apprend tôt à se taire. Puis il grandit, en même temps que grandit en lui une sourde colère. Se sachant malade, son père entreprend avec lui son dernier voyage. Ce sera le Pavillon d’Or. Le père de Mizoguchi souhaite confier son fils au Prieur du temple. Et c'est pendant la visite, devant ces dorures se reflétant sur les miroirs d'eau que survient l'éblouissement, la bouleversante découverte de la beauté.

A la mort du père, une vie de jeune moine commence, en petite communauté. Là, il connaîtra son premier véritable attachement pour un autre élève moine, Tsurukawa, un jeune homme qui l'accepte tel qu'il est, lui permettant de s'ouvrir enfin. Mais cette belle amitié va très vite se doubler d'une autre, plus vénéneuse, avec le roué Kashiwagi, un infirme empli de cynisme.

Mizoguchi se sentira tiraillé entre ses deux amis comme on peut l'être entre la vertu et la tentation du Mal. Le premier est simple et bon, quand le deuxième est imprévisible, lâche et mesquin. C'est pourtant ce dernier ami qui attirera inexorablement Mizoguchi, réduisant à néant son idéal de pureté. Car Mizoguchi est un coeur pur qui fut une première fois blessé en découvrant l'infidélité de sa mère et qui le sera une nouvelle fois en voyant le Prieur du temple en compagnie d'une geisha. Ainsi donc rien n'est sacré en ce bas monde? La colère de Mizoguchi s'accroît encore lorsqu'il doit servir de guide à des touristes venus visiter le temple. L'une des scènes marquantes du roman est d'ailleurs une visite durant laquelle un américain, accompagné d'une japonaise, demande à Mizoguchi de marcher sur le ventre de sa compagne avec laquelle il vient de se disputer. Mizoguchi obéit, scène insoutenable de violence et d'humiliation qui sonne comme une allégorie de la défaite. Le Japon et la beauté sont foulés au pied par la vulgarité des vainqueurs et Mizoguchi, par sa soumission, est leur complice.



Comme pour mieux l'isoler encore, Mishima a fait de ce moine un personnage qui n'éveille pas l'empathie du lecteur. Adolescent torturé, fasciné par la beauté mais ne s'en jugeant pas digne, on le retrouve impuissant devant une belle femme ou méprisant devant une femme plus laide. Il est aussi calculateur et manipulateur.

Pourtant, n'est-ce pas pour soustraire aux forces occupantes ce merveilleux Pavillon d'Or que Mizoguchi décide d'y mettre le feu? N'a-t-il pas la volonté de rendre ce temple à sa culture par la vertu purificatrice des flammes? Le feu, comme expression de colère et de désillusion que la parole gelée ne peut dire.



Vertigineuse réflexion sur la Beauté et le Sacré, Le Pavillon d'Or est un abîme, un livre qui ne cesse d'ouvrir des portes sur des pièces toujours plus sombres. Mais peut-être que ce chef-d'œuvre mériterait une nouvelle traduction, celle-ci datant de 1961. Quel traducteur aujourd'hui écrirait "de faible complexion" ou "billevesée"? Je ne suis pas certaine que le charme suranné d'une langue impeccable mais très (trop?) classique rende encore justice à ce roman qui, lui, n'a pas vieilli et dont le sujet principal, la fragilité de la beauté nous atteint parfois de plein fouet, comme ce fameux soir où nous regardions, sidérés nous aussi, brûler la cathédrale Notre-Dame de Paris.





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La Mer de la fertilité, tome 1 : Neige de pri..

Premier roman de la célèbre tétralogie de Yukio Mishisma, « Neige de printemps » est l’histoire de Kiyoaki le fils unique du marquis et de la marquise Matsugae nouveaux nobles et propriétaires d’un magnifique domaine de quarante hectares situé non loin de Tokyo.

Le marquis a placé son fils dès sa tendre enfance dans une famille aristocratique, les Ayakura, où il a été élevé dans une ambiance de noblesse de cour près de la fantasque et très belle Satoko Ayakura de deux ans son aînée.



Pas encore majeur et maintenant chez ses parents, Kiyoaki a 18 ans en 1912 lorsque s’achève l’ère Meiji, période marquée par la fin de la politique d’isolement volontaire du Japon, et que commence l’ère Taisho perméable à la culture occidentale.



Sans être efféminé, Kiyoaki est d’une exceptionnelle beauté mais ni les études ni les activités sportives ne l’intéressent vraiment, il serait plutôt adepte des songeries languissantes et tient dans un journal intime le détail de ses rêves nocturnes.

Son précepteur depuis six ans, le viril Iinuma, se désole de son peu d’entrain et de ses médiocres résultats scolaires ; même son meilleur ami issu d’un milieu moins fortuné, le studieux Honda, est souvent perplexe face à de tels états d’âme.



Bien que follement épris l’un de l’autre, Kiyoaki et Satoko ont tous les deux une fâcheuse tendance à compliquer les choses. Planifié avec l’aide de l’entremetteuse Tadeshina, la suivante de Satoko, le moindre flirt est si peu spontané qu’il en devient risible.

La puérilité des deux jeunes gens est manifeste et un malentendu prend un jour des proportions démesurées, amplifiées dans le temps par l’orgueil de Kiyoaki.



Mishima, avec son habileté coutumière, transforme en quelques brefs chapitres une relation idyllique à fort potentiel, qui seyait si bien au lecteur, en drame passionnel attisé au fil des semaines par le poids des convenances propres à ce milieu aristocratique.



Les ami(e)s, laissez Yukio Mishima vous prendre par la main pour découvrir la magnificence du domaine Matsugae !

Vous y contemplerez à l’automne les érables majestueux de couleur garance.

Peut-être préférez-vous attendre le printemps et faire un petit tour en barque sur le lac jusqu’à l’îlot situé au centre de la propriété, alors que « les premiers bourgeons poussent à la verticale si bien que le jardin tout entier semble se dresser sur la pointe des pieds » ?

Vous aurez ce jour-là le bonheur d’admirer « la floraison des cerisiers qui s’intercalent entre les pins dans les longues rangées d’arbres de chaque côté de l’avenue qui conduit au portail sur près d’un kilomètre ».



Chacun des cinquante-cinq chapitres est un diamant poétique finement ciselé par un écrivain au sommet de son art. Rassemblés, ils forment une œuvre romanesque dont la beauté à nulle autre pareille a bouleversé et comblé le vieux lecteur que je suis.



Si ma bibliothèque disposait d’un petit endroit en forme de tabernacle j’y rangerais assurément « Neige de printemps », non sans l’avoir au préalable décoré des huit étoiles du baudrier d’Orion, cette célèbre constellation dont l’astérisme central s’affadit sous une lune radieuse.

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Le Marin rejeté par la mer

Ryûji a pris la mer parce qu'il n'aime pas la terre. L'amour lui sera fatal, à ce marin qui sent la mort mais ne la pressent pas.

Le marin rejeté par la mer, est un très beau livre plein de poésie, de profondeur,de sensualité et d'une infinie cruauté. Le piège de cette terre qu'il méconnaît, va se refermer sur le beau marin blanc! Une correction n'a pas été administrée, et voilà Ryüji condamné. La bienveillance ne paie pas, ou alors à un prix trop fort!

Ryüji, survivant des tempêtes et roi des mers va se perdre pour l'amour de la jolie veuve Fusako, mère de Noboru l'obsédé, le tourmenté. Noboru qui suit son psychopathe de petit chef.

Le marin rejeté par la mer, un roman triste et si beau comme les ports et la mer.
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Vie à vendre

Hanio Yamada a 27 ans et ne trouve plus de sens à sa vie. Après un suicide raté, il n'a même plus le goût de réessayer, et publie une petite annonce dans laquelle il met sa vie en vente au plus offrant. le premier client se manifeste rapidement, et le contrat entraîne le jeune homme dans une histoire rocambolesque d'adultère, au bout de laquelle, contre toute attente, Hanio n'est pas tué. Qu'à cela ne tienne, d'autres clients sont sur les rangs, tous plus barrés les uns que les autres, et pourtant aucun ne parviendra à ses fins. Hanio reste vivant, même si autour de lui les cadavres s'accumulent, pendant qu'il encaisse et dépense sans compter ses généreux frais de mission. Mais cette spirale infernale le laisse perplexe et finit par l'effrayer, et il en arrive même à penser que la vie vaut peut-être la peine d'être vécue. A condition toutefois de pouvoir se sortir de l'engrenage diabolique que sa petite annonce a enclenché...



Quel étrange roman... A la fois pastiche déjanté de polar et de roman d'espionnage, et réflexion sur le sens de la vie, le style est simple, fluide et rythmé, l'humour est présent, et même le fantastique. La fable est moins légère qu'il n'y paraît, et en dit probablement long sur la société japonaise de l'époque (1968), mais je manque de références. Une lecture déroutante, terminée il y a quelques semaines, pas désagréable mais dont il ne me reste pas un grand souvenir.
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Le Pavillon d'or

Le Pavillon d'Or ressemble pour moi au reflet du ciel sur l'eau pâle d'un lac. Ciel bleu, ciel noir ? C'est sans doute entre ces deux couleurs du ciel que le récit oscille et mon sentiment aussi (je vous jure : je n'ai pas fait exprès !).

Je suis entré par enchantement dans ce texte. L'écriture est belle, mais il y a autre chose, une variation, une oscillation, une incantation entre deux pans de la vie, le côté lumière et le côté ombre comme si le chemin de l'existence devait trouver sa cadence dans ces deux versants qui s'opposent.

Il faut se saisir de ce livre avec lenteur lorsqu'on est vraiment disposé à y entrer, c'est-à-dire détaché, éloigné de tous les bruits extérieurs de l'existence.

Les bruits intérieurs, ce sont autre chose, ils nous appartiennent en quelque sorte et je sais par expérience que certaines lectures savent les apaiser.

Yukio Mishima, l'auteur, dont ici c'est ma première incursion dans son univers, s'empare d'un fait divers qui survint dans la nuit du 2 juillet 1950 au cours de laquelle le Pavillon d'Or, temple bouddhiste de Kyoto, datant du quatorzième siècle, fut incendié par un acte criminel. Ce drame qui détruisit ce lieu sacré émut le Japon encore traumatisé par les plaies de la seconde guerre mondiale. Lorsque l'identité du pyromane fut révélée, un jeune moine qui avoua avoir agi par "haine de la beauté", le choc fut encore plus grand...

Nous suivons ce jeune bonze, le narrateur, dans les pas qui vont l'amener à commettre l'insensé. C'est un récit d'apprentissage. Tout est fait pour accueillir cet enfant dans le sérail religieux, mais il est laid, il est bègue, il en souffre, souffre des quolibets et injures de ceux qu'il croise sur son chemin. On pourrait se dire que dans son chemin d'apprentissage, il trouvera de quoi apaiser les tourments de son coeur...

L'obsession de la beauté, et donc celle aussi de la laideur, forme l'ossature du texte. Naître sans beauté, est-ce naître sans grâce ?

La beauté ici fait front à une volonté de sa destruction. C'est tout d'abord la beauté du lieu qui fascine le narrateur lorsqu'il le découvre pour la première fois, les premiers reflets du temple dans l'eau, son or qui brille, ondes chatoyantes, éblouissantes, aveuglantes presque, comme une beauté parfaite et arrogante, qui choque déjà le jeune garçon.

Peut-on éprouver une haine de la beauté au point de vouloir un jour la détruire ? L'humiliation qui ronge un coeur peut-elle à elle seule expliquer cela... ?

Mais la beauté est parfois dans la rencontre d'une jeune femme, sa peau blanche, son corps qui attire le regard fasciné, l'émotion d'un adolescent aux prémices de la vie.

Pêle-mêle, j'ai aimé l'atmosphère du livre, les paysages, les personnages (l'inoubliable Tsurugawa, le compagnon au coeur pur mais aussi Kashiwagi le cynique aux pieds bots), et surtout l'écriture et le style de Mishima qui fait surgir les images dans notre esprit.

Le narrateur cherche pourtant des chemins de traverse. Parce qu'il souffre. Il souffre du regard méprisant des jeunes filles. Comment ne pas se sentir brusquement effroyablement lourds face à la beauté qui surgit dans le paysage ? Comment prendre la vie à revers ?

Contre toute attente, il devient sans cesse un coeur impatient de retrouver le Pavillon d'Or lorsque ses pas l'en éloignent. Allez comprendre...

Pour autant, à aucun instant j'ai ressenti de l'empathie pour ce jeune moine dans sa souffrance. Je crois que l'auteur n'y tenait pas et cette distance dans laquelle il nous tient vis-à-vis de son personnage est sans doute la meilleure manière d'apprécier le récit dans toute son ambivalence.

La beauté, l'inutile beauté, est là, au coeur du récit, faisant peu à peu son ravage dans le coeur du narrateur, le perçant comme une vrille. Entre fascination et répulsion.

Ce roman est aussi un murmure de bruits et d'images. le grincement d'une balançoire. le bruissement des bambous. La douceur des chrysanthèmes. L'imminence de la mer...

Les deux amis du narrateur ont aussi de l'importance, entre le sage Tsurukawa et le cynique Kashiwagi. C'est un peu comme si l'un était sa bonne conscience, l'autre sa mauvaise, oscillant de l'une à l'autre comme le balancier d'un pendule. On pense forcément au Ying et au Yang. La fascination du narrateur pour ce personnage insensible qu'est Kashiwagi nous sidère forcément, la beauté s'est détournée de lui depuis longtemps et tout semble lui réussir, le désir, les femmes...

Les pages viennent, se déplient, érotiques parfois dans l'effleurement des mots. L'échancrure d'un kimono, le crissement de la soie qui s'ouvre, la blancheur d'une peau nue dans l'entrebâillement du tissu. le texte à certains endroits est d'un chavirement érotique capable de créer des émois chez le lecteur qui je suis. Vous me direz... Mais non, vous ne me direz rien... Laissez-moi savourer ce que l'écrit peut encore suggérer avec tant d'audace et d'extase alors que l'image est là pour tout gâcher...

Au rythme de cette déambulation tendue vers le geste fatal qui dicte les pas de notre narrateur, le Pavillon d'Or surgit dans l'absolu de son éternité, dresse son architecture, cristallise cet obstacle qui se met sans cesse sur sa route, entre lui et la vie, la vie qu'il pourrait cueillir à gorges déployées.

Le Pavillon d'Or, ce monument, qui impose sa stature impressionnante, est un personnage à part entière, qui tient du mystique et du vivant.

La permission devient alors consentement. Ce qui semblait interdit au narrateur devient alors une manière de s'accomplir dans l'incandescence d'un geste presque ordinaire, celui de gratter une allumette...

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Confessions d'un masque

Confession d'un masque est , c'est vrai , un roman sur la douleur d'un adolescent qui fait la découverte de son homosexualité et de la nécessité dans laquelle il se trouve , de faire le tri , de gérer les affects qui découle de ce voyage intérieur nécessaire .



Le texte est assez court et il est aussi absolument nuancé , très dense et ancré en profondeur dans la vie quotidienne d'un japon en guerre .

C'est le japon colonial , avec ses aventures continentales , Corée , Mandchoukouo , la seconde guerre mondiale , et l'effort de guerre qui est la conséquence d'un état de guerre continuelle de 1921 à 1945 finalement .



L'auteur oscille . Il fera lentement et de manière contrite le choix d'être diffèrent et marginal …

Difficile de ne pas « spoiler « donc : motus …



Cependant alors que le personnage principal s'affirmera et qu'il gagnera ainsi de la liberté , il devra aussi renoncer à exister entièrement ( avec intégrité ) d'un point de vue social .

C'est un roman très riche et subtil de ce point de vue .



La machine de guerre japonaise est l'armée par excellence , certes , mais elle est aussi tout un maillage politique , religieux et logistique d'un territoire , de sa population et des institutions privées ou étatiques .

Cette thématique est un vrai sujet dans ce texte . Ce japon (encore largement traditionnel) en guerre , n'est pas une simple tonalité de fond , c'est un véritable sujet , surtout si on connait l'auteur .



C'est une confession autobiographique romancée . L'auteur y aborde son identité de genre , mais aussi les fondements et les rouages qui ont alors commencé à le façonner politiquement , et à l'imprégner de valeurs conservatrices et traditionnelles en cours de modernisation ( avec l'exemple européen) .



C'est pour moi un texte qui porte sur le japon traditionnel en transition vers une modernité qui est foncièrement imprégnée par une impulsion très politique , très impériale , avec une tonalité autocratique .

C'est un témoignage intimement vivant sur le japon en guerre ( le japon profond ) .



C'est aussi évidement la découverte et la gestion d'une identité homosexuelle dans une société traditionnelle très normative , dans un cadre institutionnel non moins normatif .



Un texte puissant , assez court , qui vient démontrer que le tout , est souvent plus que la somme de ses parties .



De quoi parle ce texte ? :



-Du japon traditionnel en transition , et c'est passionnant , car c'est un témoignage de premier ordre qui est d'une finesse exceptionnelle .

-D'un point vue psychologique , je dirais que c'est d'un processus très analogue aux névroses d'intégration en psychologie clinique , dont traite ce texte .

- De l'identité de genre sur un mode confession intime romancée .

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Une soif d'amour

Une femme du nom d'Etsuko, encore jeune je suppose malgré son récent veuvage, habite chez son beau-père, Yakichi. Étrange cohabitation, où ils logent au premier étage, le fils ainé et sa femme au second, idem pour le fils cadet qui doit être sur une autre aile de cette maison bourgeoise entourée de vignes à l’abandon, de serres à l’abandon, des fleurs, des champs, un jardinier homme à tout faire, une femme jeune et servante.



S’est-elle réjouie de la mort de son mari ? Un mari qui allait voir ailleurs quand bon lui semblait. Etsuko, l’amante passive de son beau-père, qui écrit sur son journal faussement intime une attirance physique pour S. qui n’est autre qu’un domestique de la maison.



Les histoires d’un autre temps, l’opposition ville campagne et la hiérarchie sociale dans un Japon d’après-guerre qui panse ses pénuries. Les aristos sont devenus risibles auprès des paysans, la stature des hommes a changé. L’homme n’est plus un samouraï, il est déchu de son titre de noblesse et presque de respect. Mais la jalousie reste. Etsuko, la femme déchue et la femme jalouse tour à tour des maitresses de son mari puis de Miyo, l’autre domestique enceinte de S. Mais point n’en faut, je m’arrête là, ne te racontant pas toute l’histoire comme le fait le 4ème de couverture de cette vieille édition que je découvre à postériori (heureusement d’ailleurs que je ne l’ai pas lu ; mon avis : tu veux connaitre l’histoire sans lire le livre, plonge direct sur ce quatrième, tout est dit, en quatre phrases, du premier chapitre au dernier).



Ce roman est l’histoire de cette jalousie disséquée et analysée. De ses prémices à ses dernières secousses, finement, lentement, irrémédiablement, l’histoire Etsuko avance entraînant dans sa chute, celle de son mari, de son beau-père, du domestique...
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Le Pavillon d'or

Dans toute l'oeuvre de Yukio Mishima et dans son suicide spectaculaire, la mort explose comme un soleil. L'origine du roman le Pavillon d'Or ( Kinkakuji, 1956) est un événement réel, qui choqua les Japonais. le 1er juillet 1950 Hayashi Shôken, bonze novice de vingt et un ans, laid et bègue provoque l'incendie d'un chef d'oeuvre architectural de Kyoto, jusque là miraculeusement épargné des typhons et des bombardements. Mishima s'empare du sujet, de quelques particularités d'Hayashi Shôken et imagine le processus intérieur qui conduira un jeune novice à la destruction du Pavillon d'Or. Et en même temps il développe ses propres préoccupations esthétiques et philosophiques. L'écriture est limpide, précise et les descriptions saisissantes.



Mishima est un très bon conteur qui prend au piège son lecteur. On s'attache d'emblée à Mizogushi, le narrateur. Ce jeune homme, bègue et laid, moqué et mal aimé est émerveillé depuis son enfance par ce que lui raconte son père, un obscur prêtre de campagne aux mains sales, au sujet du Pavillon d'Or. La réalité le déçoit évidemment : c'est un vulgaire pavillon noirâtre. Son père meurt et Mizogushi n'éprouve rien. Il est détaché de la réalité. Il devient novice au temple du Pavillon d'Or. Il ne l'idéalise plus même si le Pavillon demeure sacré. Cependant il se remet à l'aimer passionnément quand le Pavillon est sur le point de finir en cendres dans les bombardements ou d'être balayé par le typhon. Mizogushi est seul à garder le Temple et fait corps avec lui, souhaitant ardemment sa destruction. Il éprouve alors un rare moment de paix et de volupté. Mais le Pavillon d'Or ne cède pas, il semble au contraire immortel et lui renvoie sa laideur physique et morale ainsi que son impuissance à la figure. Mizogushi a deux amis. le premier lui semble un modèle de beauté, de gentillesse et de pureté. le second Kashiwagi est plus intéressant, plus ambigu. Il est laid et a un pied bot. Il s'adapte à la réalité et sait se faire apprécier des femmes. Il cerne parfaitement la personnalité de Mizogushi, l'entraîne dans la débauche avec l'intention de l'arracher au Pavillon d'Or, comme l'explicite son interprétation de l'énigme zen de « NANSEN TUE UN CHAT »*. En vain. Mizogushi est trop orgueilleux. Il imagine alors se venger cruellement de tous ceux et de toutes celles qui le méprisent. La vengeance d'abord fantasmée se réalise dans une scène explicitement sadique. En même temps il veut posséder jalousement le Pavillon d'Or et le défendre des souillures, de la vulgarité en particulier celles de l'occupant et des touristes. Il a pensé à remplacer un jour le Prieur mais son ambition est sapée par son orgueil démesuré et sa mauvaise conduite. Il est seul. le Pavillon d'or est devenue sa prison, un lieu de Beauté, de Pureté qui l'empêche de vivre. Et qu'il lui faut détruire.



Mishima plonge très profondément dans les pensées et les émotions les plus obscures de son personnage avec une rare intensité. le lecteur éprouve de plus en plus de répulsion devant sa cruauté. A un certain stade, l'identification me semble impossible, surtout si on est une femme, et il faut prendre du recul pour admirer le chef d'oeuvre.



*Tuer le chat, c'était arracher la dent qui fait mal, extirper la Beauté à la gouge. Était-ce bien résoudre le problème ? Je ne sais pas. Les racines du Beau n'en étaient point, pour autant tranchées ; morte la bête, sa beauté ne l'était peut-être pas. Et c'est pour se moquer de cette solution trop commode que Chôshu met ses sandales sur sa tête. Il savait, pour ainsi dire, qu'il n'est pas d'autre solution que d'endurer le mal de dents.
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Le Marin rejeté par la mer



Relire « Le marin rejeté par la mer » m’a fait comprendre à quel point l’art de Mishima était abouti. Je savais qu’il s’agissait d’un meurtre abominable, je me suis donc transformée, au fil des pages, haletante, en une voyeuse ou plutôt lecteuse. Pourquoi n’existe-t-il pas un mot spécifique pour cette addiction faite de curiosité malsaine et de désir de continuer ? Lorsque certains lecteurs parlent de lecture en apnée, cela, à mon avis ne rend pas compte de la respiration d’un texte, et de notre respiration pendant cette lecture.



Je suis rentrée dans la pensée de ce jeune adolescent de treize ans, Noboru, travaillé entre ce qu’il sait et ce qu’il devine de ce qu’est la vie adulte : prêt à espionner sa mère à travers une plinthe avec vue sur sa chambre à elle, voulant être libre et dur, alors qu’il est tout juste sorti de l’enfance, il est, de plus, ami avec des garçons de son âge, dont l’un se déclare le chef, et dont la pensée réside en la reconnaissance, une fois pour toutes, que le monde est vide. Seul le meurtre parvient à remplir ces vides, ce non-sens de l’univers, de même qu’une fêlure remplit un miroir.

L’image de ce miroir revient, avec un art consommé, dans le roman : la mère, qui s’admire nue, l’amant, qui regrette, ou pas, ses années aventureuses de marin, et essaie de vérifier, en se contemplant, si son choix de rester à terre par amour est le bon.



Noboru a besoin de penser à sa force, il s’efforce de devenir insensible, de juger sa mère et l’amant de sa mère, et de leur faire le cinéma du petit docile.

« Il s’enivrait de cette menace tranquille et quand il tourna son cœur de glace vers les deux adultes un léger sourire comme celui qu’on verrait sur le visage d’un écolier qui vient en classe avec des leçons insuffisamment préparées mais avec la confiance en soi d’un homme qui s’élève du haut d’une falaise.»

La manière de dire, de suggérer, de nous faire attendre, de jouer avec nous, fait de ce roman (malgré les pages 62/66 : âmes sensibles, évitez de lire ça) un bijou de mise en scène du complexe d’Œdipe.



Mishima avait-il lu Freud ? Sûrement. Car plus la mère, et surtout l’amant, sont compréhensifs, moins le héros les respecte.



Mishima avait-il lu Nietzche ? Sûrement aussi. Car les garçons veulent se rendre maitres de l’existence, rompre avec le sentiment, s’exercer à la violence tranquille.



Lui, il est le maitre du récit d’une histoire d’amour, dont il déroule les fils qu’il nous met à la patte. Avec maestria.



LC thématique décembre : littérature étrangère

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La Mort en été

La Mort en été rassemble dix nouvelles qui portent les obsessions de Mishima pour un Japon traditionnel et sa fascination pour la mort.



La nouvelle qui donne le titre à l’ouvrage est celle qui m’a le plus fascinée. Mishima y raconte la mort d’un homme par seppuku et ses préliminaires. Un passage qui possède une tension et intensité inouïes encore extrêmement vivantes dans mon esprit, des années après sa lecture.



Une mort que Mishima a choisie pour lui-même, en la mettant en scène après un coup de force raté, une fin dont Marguerite Yourcenar, dans Mishima ou la Vision du vide paru en 1980, dit qu’elle est « l'une de ses œuvres et même la plus préparée de ses œuvres ».

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Dojoji et autres nouvelles

Puisque ce recueil contient quatre nouvelles, je vais en choisir deux, tellement elles contiennent de monde à la fois antique, traditionnel, inextricablement lié aux rites japonais et d'ouverture sur ce qui peut advenir dans le futur.



1- Dans « Les sept ponts, » où des amies se donnent pour but de franchir sept ponts durant la nuit, dans le silence le plus absolu, pour que se réalisent leurs voeux (amour et argent) Mishima réfléchit sur le désir de ces femmes, sur leurs prières, qui ne peuvent, par leur sincérité, qu'émouvoir la lune.

L'une d'elle doute, cependant : la souffrance qu'elle éprouve à marcher aussi longtemps s'arrêterait –elle si elle abandonnait ses absurdes illusions ?

Bonne question.

Les désirs ne seront pas exaucés, ce sont des rêves enfantins auxquels l'auteur ne croit pas, sauf pour la pauvre servante dont nous ne connaissons même pas le désir.



2- Dans « Patriotisme », Mishima détaille longuement la volonté d'un lieutenant de se faire « seppuku », de le faire par honneur, par amitié surtout, avec joie, d'autant que la femme qu'il aime le suivra, dit-elle et il en sûr. “Eros et Thanatos sont non seulement liés, ils sont concomitants, et presque les deux faces d'une même monnaie.

Rappelons-nous les visages possédés par l'orgasme d'une Sainte Thérèse d'Avila, sa « transverbération » peinte par Josefa de Obidos, et sculptée par le Bénin : elle est transpercée, mystiquement traversée par l'amour… de Dieu. Il n'y a Dieu que Dieu, qui puisse ainsi prendre possession d'un corps qui vibre.

Le même orgasme peut se voir dans le martyr de Saint Sébastien ( Tiepolo, José de Ribera, et surtout Rubens, là ou ce sont des amours qui viennent enlever la flèche) transformant ce saint en une icône sadomasochiste, dont Mishima avoue avoir été son premier émoi amoureux.

Raconter un suicide rituel serait simplement une horreur, si Mishima, avec son sens aigu de l'analyse, ne nous préparait pas, en décrivant justement les préparatifs de ce suicide, et l'amour fou qui lie les deux amants, à accepter que l'amour aille jusque là : ouvrir le col du mari pour que le couteau entaille. Cette nouvelle écrite en 1961 anticipe-t-elle, dans l'esprit de Mishima, sur son vrai seppuku en direct. ? Il avait déjà participé au film de 1966 sur sa nouvelle Patriotisme.



Curieusement, je pense que la question n'est pas sur ce que dit (et fait !) Mishima, mais la façon tellement littérairement réjouissante, sans espoir pourtant, absolument sans espoir, et à la fois détaillée, descriptive et elliptique, un bijou de nouvelles que nous offre l'auteur. Ce n'est pas l'amour plus fort que la mort, ça, nous y sommes hollywoodement habitués , c'est l'amour donc la mort.

Il faut lire ces pages d'ivresse devant la mort, nous ne sommes pas obligés de nous faire suppuku en refermant le livre.

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Vie à vendre

Pour le commun des mortels, c'est évident, mourir n'est pas facile - quoique inévitable. Mais se donner volontairement la mort peut s'avérer encore plus compliqué : cela suppose une habileté, une technique, en un mot un savoir-faire (à défaut d'un savoir-vivre) qui n'est pas donné à tout le monde et, en l'occurrence, pas à notre héros, Hanio Yamada. Se croyant enfin parvenu en un Paradis rudement gagné, c'est à l'hôpital qu'il se réveille sous le regard réjoui des infirmières et du médecin ravis d'avoir sauvé une vie… Game pas over du tout. Essaye encore !



Qu'est-ce qui a bien pu pousser cet homme ordinaire, “employé honnête et zélé” qui ne souffre de rien, même pas d'un chagrin d'amour, à vouloir se donner la mort ? “S'il devait à tout prix donner une raison à cela, une seule lui venait à l'esprit : il s'était suicidé justement parce qu'il n'avait aucune raison de le faire.” Absurde ? Toujours est-il que, même sans raison apparente, il s'entête et, ma foi, qu'à cela ne tienne : ce que tu n'arrives pas à faire toi-même, fais-le faire par quelqu'un d'autre ! Mais il aura beau mettre sa vie à vendre dans un journal de Tokyo, avant l'heure c'est pas l'heure - comme disait ma grand-mère - et quand ça veut pas… et bien ça veut pas !



S'ensuit une succession vertigineuse de tentatives aussi malencontreuses que piteusement avortées, les cadavres s'accumulent, les victimes s'amoncellent, dommages collatéraux de la maladresse et de la malchance… tandis que notre héros, toujours en pleine forme, contemple sidéré les conséquences calamiteuses de son obsession suicidaire. Comment faire, dès lors, pour mettre un terme à cette spirale infernale ? D'autant que, comme un piège qui se referme peu à peu, la peur de mourir finit par le hanter…



Publié sous forme de feuilleton en 1968 dans les pages de la revue “Shukan Purebôi” (Playboy hebdo) mais inédit en français jusqu'en janvier dernier, "Vie à vendre" est une fantaisie burlesque et totalement déjantée, parodie de roman d'espionnage, de conte gothique et de polar, que Mishima lui-même qualifia de “roman d'aventures psychédélique” où l'on retrouve - avec quel plaisir ! - tout l'art de son auteur : son écriture extrêmement soignée et maîtrisée, son imagination débridée, sa profondeur, son humour et sa sensibilité ainsi que certains des thèmes qui lui furent chers - notamment son obsession et ses rapports ambigus avec la mort, qu'il se donna d'ailleurs deux ans plus tard dans les circonstances que l'on sait.



Un roman follement drôle mais également plus profond qu'il n'y paraît par le regard qu'il porte et les questions qu'il (nous) pose sur le sens et la valeur véritables de la vie, et qui devrait réjouir tous les amateurs d'humour noir - mais pas que. Je me suis, pour ma part, régalée.



[Challenge Multi-Défis 2020]

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La Mer de la fertilité, tome 1 : Neige de pri..

La tétralogie La mer de la fertilité est une œuvre profonde et marquante, plus qu’il n’y paraît à première vue. Son premier tome, Neige de printemps, est une belle histoire d’amour entre deux jeunes gens de l’aristocratie japonaise, Kiyoaki Matsugae et Satoko Ayakura. Mais le jeune homme est une âme sensible, ignorant des choses de la vie, maladroit, ne sachant comment approcher correctement la jolie demoiselle. Un écart se creuse et c’est trop tard quand chacun comprend son erreur : Satoko est fiancée à un prince de la famille impériale. Les deux jeunes se revoient et ne peuvent résister à la passion qui les anime… avec les conséquences qu’on peut supposer. Le roman prend des airs de Roméo et Juliette, en particulier avec la nourrice qui sert d’entremetteuse pendant un moment.



Mais, Neige de printemps n’est pas qu’une belle histoire d’amour. L’auteur Yukio Mishima plonge ses lecteurs dans le Japon de 1910, l’aristocratie avec ses banquets et ses soirées mondaines, les études vie au collège, la religion shinto avec ses temples, ses fêtes et ses cérémonies, puis les geishas jamais très loin. C’est tout un monde qui a été recréé dans les moindres petits détails, je m’y sentais transporté. Mais une rendition réaliste de cet univers n’a pas été faite aux dépens de la poésie. Kiyoaki contemple la beauté qui l’entoure, la nature dans les jardins, le ciel étoilé, etc.



C’est un roman qui trouve pleinement son sens quand on lit le reste de la tétralogie. Kiyoaki Matsugae, à travers son amitié avec Shigekuni Honda mais surtout avec deux princes thaïlandais, se laisse parfois aller à des échanges philosophiques sur le sens de la vie, la religion, l’amour. Il est certain qu’une âme sensible comme la sienne, devant un amour impossible et tragique, cherche à se rattacher, à se tourner vers quelque chose de plus grand. À travers ses échanges et des lectures, il est introduit aux idées issues du bouddhisme, entre autres à la réincarnation. Ce concept est important puisqu’il lit ce tome aux suivants. En effet, à la fin, c’est un Kiyaoki faiblissant, mourrant, qui confie à son meilleur ami : « Je viens d’avoir un rêve. Je te reverrai. Je le sais. Sous la cascade. » (p. 450)



Qui n’aimerait pas une nouvelle chance à l’amour, la possibilité de l’immortalité grâce à la réincarnation ? Cette portée philosophique, spirituelle de Neige de printemps n’est que le début d’une grande fresque.
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Le Pavillon d'or

En 1950,à Kyoto, un jeune novice met le feu au Pavilllon d'or, le temple le plus célèbre de la ville. C'est de ce drame, qui a bouleversé le Japon, qu'est parti Yukio MISHIMA pour raconter l'histoire romancée de Mizogushi, le jeune moine incendiaire. Mais au-delà du fait divers, l'écrivain relate le parcours psychologique d'un garçon torturé, complexé par sa laideur et son bégaiement, obsédé par la Beauté dont le Pavillon d'or est, à ses yeux, la forme la plus pure. De son enfance pauvre dans un Japon dévasté et humilié par la deuxième guerre mondiale, aux côtés d'une mère adultère et d'un père bonze qui lui a transmis son amour immodéré pour le temple sacré, à son arrivée au Pavillon pour y être novice, recueilli par le prieur à la mort de son père, on découvre un jeune homme qui peu à peu sombre dans la folie, jusqu'à commettre l'irréparable.





Les mots sont trop faibles pour parler de toute la beauté et la poésie de ce texte magistral. Yukio MISHIMA, sans juger, sans prendre parti, décrit le parcours initiatique d'un jeune homme qui fut son contemporain. Laid et bègue, Mizogushi aurait pu composer avec ses handicaps, s'épanouir dans l'ombre de l'objet de son amour et pourquoi pas un jour devenir le prieur de ce lieu sacré. Son amitié avec le lumineux Tsurukawa, novice comme lui, l'encourage dans ce sens. Mais c'est le sombre Kashiwagi, élève dans le même lycée que lui, qui va dévoiler sa noirceur et sa perversité. Poussé par ce mauvais génie, Mizogushi s'éloigne du prieur et s'enlise dans la dépravation. Symbole du Beau, donc de ce qu'il n'est pas et se sera jamais, le Pavillon d'or devient l'objet d'un amour/haine jusqu'à ce que ses réflexions le conduisent à l'idée selon laquelle c'est ce Beau absolu qu l'empêche de vivre. A-t-il déjà été plus laid, physiquement et dans son coeur, ailleurs que près de ce temple prodigieux? Non, et c'est pourquoi il lui faudra le détruire pour enfin pouvoir s'intégrer à la vie, dans un monde débarrassé de ce rappel constant de la beauté.

Un roman au ton juste qui appelle maintes réflexions sur le le beau, le bien, le mal et la folie. A lire évidemment, pour la fine analyse psychologique de l'incendiaire et les très sensuelles descriptions de ce lieu hors du commun posé dans un superbe écrin naturel.
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Le Marin rejeté par la mer

Dans le port de Yokohama y'a un marin qui ne boit pas mais qui économise.

Dans le port de Yokohama y'a un marin qui ne pense pas aux dames mais qui espère rencontrer un jour la femme de ses rêves.



Officier trentenaire sur le Rakuyo, Ryûji croit en sa bonne étoile.

Un jour qu'il fait visiter son bateau à un adolescent de treize ans, Noboru, il croise le regard de la jolie femme qui accompagne son fils et sait immédiatement que c'est elle…

Veuve depuis deux ans, Fusako, dirige depuis la mort de son mari un magasin réputé d'articles de confection importés. Elle aussi a immédiatement le coup de foudre pour le beau capitaine Ryûji.



Lorsqu'ils se retrouvent deux jours plus tard, brûlants de désir, dans la chambre de Fusako, l'oeil scrutateur de Noboru les observe par un petit trou dans la cloison.

Noboru, bien qu'avenant, est le numéro trois d'une bande de six copains très hiérarchisée qui abhorre les adultes et se délecte d'atrocités sur les animaux.



« le marin rejeté par la mer » est sans doute un excellent ticket d'entrée dans l'œuvre de Mishima. L'écriture de ce court roman est de toute beauté, la psychologie des personnages étudiée au plus près et l'histoire terriblement captivante et féroce.



Dans le port de Yokohama

Aux premières lueurs,

Avec Yukio Mishima

On nage dans le bonheur.



Dans le port de Yokohama

Aux dernières lueurs,

Avec Yukio Mishima

On baigne dans l'horreur.

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Le Pavillon d'or

Au coeur de Kyoto, s’élève le Pavillon d’or, majestueux, entouré d’un écrin de verdure et objet d’innombrables visites. Ce pavillon fut incendié en 1950. C’est l’histoire de ce geste dément que nous conte Mishima.



Lors de sa première visite au Pavillon d’or, que son père lui avait décrit comme le summum de la beauté, le jeune Mizoguchi est déçu. Malgré tout, une fascination maladive s’empare de lui. Peu de temps après le décès de son père, Mizogushi devient novice au Pavillon d’or. Sa laideur et son bégaiement l’isole des autres étudiants. Mais deux amitiés successives feront naître chez le juin homme influençable des désirs de vengeance…



Dans ce texte hypnotique, le lecteur suit les pensées chaotiques du jeune novice et comprend au fil des pages le cheminement de sa folie. Il ne s’agit pas d’excuser mais d’expliquer.



Mishima n’est pas tendre pour ses personnages. Il tue les plus méritants, la mère, le père, l’ami bienveillant, mais dresse les portraits sans compassion de Kiwagashi, le compagnon qui a grandement contribué aux errements de Mizogushi, et du père prieur, qui n’est pas le saint homme qu’il voudrait paraître.



Le roman offre ainsi un tableau du Japon d’après guerre, sous occupation américaine, et privé de l’essentiel, qui sert de cadre à cette réflexion sur le bien et le mal, le beau et le laid, et l’irruption de la folie.





375 pages Gallimard 6 février 1975

Caverne des lecteurs


Lien : https://kittylamouette.blogs..
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