29e Foire du Livre de Saint-Louis Alsace 2012
Entretien avec Yves Bigot qui présente son livre "Quelque chose en nous de Michel Berger", publié aux éditions Don Quichotte
« Brigitte Bardot ne se soucie pas le moins du monde des autres. Elle fait ce qui lui plaît, et c’est cela qui est troublant. » Troublant, fascinant, pour ceux qui l’apprécient, l’admirent, voire la remercient, pour qui beauté et liberté conjuguées sont les traits magiques de la divinité. "Elle n’est ni dépravée, ni vénale. Il est impossible de voir la marque de Satan en elle et, pour cette raison, elle semble encore plus diabolique aux femmes qui se sentent menacées et humilées par sa beauté ",conclut Simone de Beauvoir.
FRANCE GALL
Page 158 : Pierre Lescure, amateur avisé, remarque que c’est la première fois en France, qu’un public chante pareillement « Je me souviens de Palais des Sports et d’autres concerts où je suis sidéré, car d’un seul coup des voix cristallines de jeunes adolescentes et d’énormément de jeunes femmes chantent avec France. Des salles entières debout chantent avec juste le piano ‘Tout pour la musique ‘, tous les grands titres de France, plus tard, tout le monde en pleurs chantera ‘Evidemment ‘, ‘La minute de silence’. Les briquets, tout ça vient de lui, c’est Michel qui l’a inventé ici »…
Elle salue ensuite l'un de ses fans transis, Valéry Giscard d'Estaing, dont elle portera en 1974 sur sa poitrine tant désirée le t-shirt de campagne "Giscard à la barre" (on aurait pu économiser l'accent grave).
Elle a pris du plaisir sur ce film, où elle se sent belle, aimée, respectée, et se lie d’une amitié indéfectible avec la femme du producteur Jacques Gauthier, Christine Gouze-Rénal, sœur de Danièle Mitterrand, qui deviendra productrice à son tour, la première femme française dans ce rôle. C’est d’ailleurs elle, comme le rapporte Jeanne Witta-Montrobert dans La Lanterne magique, mémoires d’une scripte (Calmann-Lévy, 1980), la belle-sœur du futur président de la République, qui convainc Brigitte, « encore pudique » selon ses propres termes, de montrer ses fesses à l’écran le temps de traverser une rivière, en lui faisant remarquer que sa doublure « a le cul qui traîne par terre » et qu’on croira malgré tout que c’est le sien. « Je décide de m’asseoir sur ma pudeur du haut de mon cul, noblesse oblige », s’emballe la Bardot, dans ce style cru qu’elle affectionne. Elle tombe amoureuse
En minijupe ultra-courte et rayée comme un matelas berlingot sur la plage de Pampelonne, elle est vive, emportée, effrontée, personnage qui lui sied bien, avant, une fois séduite, d’administrer quelques vues somptueuses de son anatomie, alanguie sur le ventre en référence à la scène d’ouverture du Mépris.
La politique ne se situe pas toujours là où on l’imagine, et c’est bien pourquoi on ne devrait pas l’abandonner aux hommes – et femmes – politiques. C’était sans doute ça, la démonstration des Golden Sixties, un but trop grand pour les capacités actuelles de l’humanité, sûrement. Dieu créa la femme, direction « Heartbreak Hotel ». Comme pour Brigitte, comme pour Elvis, c’est peut-être là notre condition humaine, celle du monde moderne pris entre le confort et l’ordre bourgeois haussmanniens et la bohème irrésistible et dangereuse des troubadours électriques, comédiens et rock stars, superbement exprimée par cette révolte existentielle no logo à la double négation vernaculaire : « (I Can’t Get No) Satisfaction ».
Mais, comme toutes les plus belles femmes, BB ne voit que ses défauts et, pour un peu, se trouverait moche. « J’ai un nez déplorable. Il se fronce dès que je rencontre un homme, comme si je reniflais un bol de lait. C’est pareil pour ma bouche : la lèvre supérieure est plus lourde et charnue que l’autre. J’ai des joues trop rondes et des yeux trop petits. » Quand elle rit, elle met ses mains devant sa bouche : elle n’aime pas ses dents. Elle n’aime pas non plus son nez. Allonge ses yeux par des autographes de mascara. Or, elle a besoin de se sentir belle pour affronter les millions de regards qui l’attendent dès qu’elle sort ce nez dehors.
Et Dieu créa la femme a beau être bricolé et improvisé, sans être autobiographique, il représente Brigitte, exprime sa personnalité, magnifie sa nature. Comme elle est, elles sont, exceptionnelles, et parfaitement en phase avec les aspirations de son époque, elle en sera la déesse, Saint-Tropez l’Éden, et le film une déflagration. « Nous n’avions jamais vu ça au cinéma. C’était insensé.
L’érotisme appartient à l’art. Mais l’exhibitionnisme, sous couleur et prétexte d’art, ne saurait être excusé que s’il est proposé avec habileté et discrétion. Tout un film basé sur la mise en valeur des avantages physiques d’une jolie fille, de ses impudeurs et de ses trémoussements, c’est fastidieux et assez déplaisant. Et pourquoi mêler Dieu à cette pauvre histoire ? »
Roger Vadim, son mari, trompé sous ses yeux et ses caméras, lui offre là le plus beau et le plus suicidaire des hymnes, cadeau de rupture qui met en scène leur Passion, trahison et crucifixion comprises, puisqu’il annonce et scénarise leur inévitable séparation tout en la conjurant à travers ce monument annonciateur de la chute de dix mille ans de patriarcat monothéiste. Il a compris qu’elle lui échappait, que son besoin d’absolu, sa soif de bonheur extrême comme dans le délire des amants du Songe d’une nuit d’été était l’expression d’un besoin inextinguible. « Je voulais à travers Brigitte restituer le climat d’une époque. Juliette est une fille de son temps, qui s’est affranchie de tout sentiment de culpabilité, de tout tabou imposé par la société, et dont la sexualité est entièrement libre.