Yvon Belaval

La pensée vraie, dit-on, se doit de n'appartenir à personne. Un théorème est sans humeurs, sans âge, sans siècle, texte pur, structure sauvée de la mort par relations internes, comme la monade. Pourtant, les énoncés philosophiques ont -au moin aussi- une autre vérité. Quelqu'un parle. Il parle à quelqu'un. Il essaie. Se perd. Se retrouve. cela veut dire. Dit parfois. Plus souvent laisse dire. Et voici que la mort revient, avec sa poésie toujours inachevée, avec le temps, avec l'histoire et son désordre. Ou les ruses de son désordre. On peut lire dans tous les sens. Inventer. Il n'y a pas de jeu dans ce jeu qui ne se laisse pas déduire, parce qu'on n'en connait pas les règles, sauf la plus banale: le mortel, lui, a des humeurs, un âge, un siècle et son désordre, de moins en moins libre, finit par débrouiller quelque idée directrice, d'un passé encore vivant devant un avenir perdu.



Yvon Belaval

Né en 1908. Professeur à la Sorbonne. Une oeuvre d' historien de la pensée, essentielle pour la connaissance, aujourd'hui, de Leibniz et du XVIIIe siècle. Une série de recherches" psycho-philosophiques" sur le langage, la sincérité, l'échec. Trois livres de réflexion sur la poésie contemporaine.

Jean Paulhan a eu de nombreuses correspondances: Giono, Saint John Perse, Ponge; ici, c'est avec mon beau-père qu'il s'entretient; ce dernier a besoin d'être reconnu que ce soit en poésie ou en philosophie et Paulhan peut l'aider. Peu à peu une belle amitié se déroule.

Il est question de poésie, de littérature, de philosophie et de peinture: les deux hommes se lisent avec attention et Yvon Belaval propose une explication approfondie de l'oeuvre de son protecteur.

Je me replonge dans cet univers à la suite de questions posées par une inconnue qui cherche à connaître l'homme; il y a peu de détails qui transparaissent dans ces échanges ardus. Mieux vaut lire la revue Autrement où il se livre un peu.

Je l'ai connu comme prof de fac à Lille en 64/65, retrouvé à la Sorbonne puis il m'a fait rencontrer son fils et nous nous sommes mariés en 67; j'ai fréquenté Yvon jusqu'à sa mort en 88; un homme passionnant mais difficile à cerner, avec beaucoup de cordes à son arc!

Ce me semble être le plus facile de tous les écrits de ce philosophe: des petites phrases courtes et parfois des paragraphes qui traitent d'un peu de tout et sont parfois des anecdotes drôles. Exemple: A la corrida, la petite Denise (bientôt sept ans) croyait que le même taureau revenait à chaque course.



ou plus vache:

Qu'est-ce , aujourd'hui, qu'un philosophe? Un professeur! Imaginez qu'à la question: "Qu'est-ce qu'un artiste?" il faille répondre: "un professeur de dessin."

On peut picorer à son goût!

Yvon Belaval est XVIIIèmiste; il commence cette bio-bibliographie par un tableau synoptique de la vie et des oeuvres de Cholerlos de Laclos et des principaux événements contemporains. (bien pratique!) Il meurt un an après la naissance de Victor Hugo (ce siècle avait deux ans..). On ne retient de ses écrits que les Liaisons dangereuses.

Quatre personnages principaux: deux roués: la marquise de Merteuil et son complice le vicomte de Valmont. Deux naïfs: Cécile Volange (15 ans) et son amoureux Danceny (20 ans)

Les romans épistolaires sont nombreux à l'époque: les Lettres persanes et la Nouvelle Héloïse pour citer les plus connus et Les liaisons dangereuses sont considérées comme le sommet de cette littérature par lettres. L'oeuvre fait débat, elle donne lieu à des interprétations très diverses.

Suit un choix de textes.

Y B devait s'intéresser à ce genre de contenus car je crois me souvenir qu'il a préfacé une Justine de Sade.

La quatrième de couverture n'existait pas à l'époque! ni l'Isbn.

Il s'agit d'un livre publié en 1950 par la NRF. Un livre qui prépare la lecture du Paradoxe sur le Comédien et qui replace ce texte dans l'Esthétique générale de son auteur et dans la philosophie de Diderot, cet homme qui n'a cessé de se réclamer de la philosophie, chez cet homme qu'on appelait et qui s'appelait lui-même: le philosophe.

Les problèmes de l'art dramatique l'ont toujours préoccupé depuis le collège.

Le texte de Diderot répond à Voltaire et Rousseau.

Maxime fondamentale: il faut imiter la nature.

Cet ouvrage doit permettre une lecture sans préjugé

Sans ce livre, sans doute épuisé, je n'aurais jamais compris ce philosophe. L'ai-je vraiment compris d'ailleurs? Leibniz, critique de Descartes du même auteur m'a aidée aussi dans la mesure où, à l'époque, je connaissais assez bien René Descartes. En dehors des auteurs de base enseignés à la fac:( chez nous, c'étaient Platon, Descartes, Kant, Rousseau) j'ai eu beaucoup de mal à entrer presque toute seule dans la pensée des autres grand auteurs: Aristote, Spinoza, Hegel pour ne citer que ceux-là. Je m'en suis mieux sortie avec Freud et Nietzsche, un peu avec Bergson aussi que j'avais lu avant d'entrer en terminale et bien d'autres d'ailleurs avec un regret d'avoir passé pas mal de temps sur Saint Anselme plutôt que sur Saint Augustin mais c'était la volonté du chef de l'époque Eric Weil.

Lu, il y a très longtemps; j'avais été un peu déçue car j'espérais une critique du jargon; dans mon souvenir, il s'agissait plutôt de rhétorique ; il y a eu récidive avec un livre posthume: l'auteur l'avait gardé comme d'autres textes sans les terminer ni les corriger n'ayant pas vraiment l'intention de publier, d'autres ont cru bon de le faire...

Ne croyez pas trouver ici des poèmes de l'auteur (j'y ai cru un moment); il s'agit d'une suite de La Recherche de la poésie: des essais critiques.

Que serait un Art poétique contemporain?

Poésie et radio: cet article m'a intéressée en tant qu'audio-lectrice, il est transposable à l'écoute de la poésie (et autre) en MP3.

L'enregistrement de Nadja, approuvé par André Breton et l'enregistrement, avec Eluard lui-même, de Poésie ininterrompue ouvrent la voie.

Ce n'est pas une lecture facile, car il faudrait avoir lu tous les auteurs et les textes cités mais cela m'a paru intéressant .

Il s'agit surtout de poésie contemporaine (écrit en 43, publié en 1947 réédité en 1973) Réimpression sans modification, qui sera suivie de Poèmes d'aujourd'hui (1964) et de préfaces pour Max Jacob, Raymond Queneau, Jean Tardieu.

Ce livre se compose de trois essais:

-en marge du poème (où l'on décrit la naissance du plaisir poétique, entre autres.)

- sur la création poétique

-la poésie perdue.

Ces essais m'apparaissent plus philosophiques que littéraires.

Troisième tome de cette très complète histoire de la philosophie éditée par la Pléiade. C'est la philosophie contemporaine, à compter du XIXè siècle, qui est ici abordée par les plus grands spécialistes. Un travail d'une grande qualité.

C'est par celui là que j'ai commencé, le titre m'attirait mais je n'ai connu l'auteur qu'en 1964.

Il faudrait que je le relise car mes souvenirs sont flous tant d'années après.

c'est très énervant pour moi de voir une vieille erreur que je n'arrive pas à corriger (elle est copiée de Wikipedia) La photo d'Yvon est en fait celle de Max Jacob

La bonne photo a été mise sur Babelio et très récemment (2021) sur Wikipédia.

Une grande amitié régnait entre Max Jacob et Yvon qui avait déjà mis deux lettres dans le Souci de sincérité, étudié un de ses poèmes dans La Recherche de la poésie et rédigé l'article Max Jacob dans l'Encyclopédie Universalis.

La rencontre a eu lieu en 1927, YB avait 19 ans et M.J, 50. Ils ne se revirent pas souvent car Yvon était souvent à l'étranger mais ils se sont beaucoup écrit. Max, juif converti déplorait qu'Yvon soit athée; Dieu comptait beaucoup pour lui. Max raconte beaucoup d'anecdotes avec humour, il fait beaucoup de jeux de mots...

Je n'ai pas aimé ce livre posthume..je crois que si Yvon avait voulu éditer ce livre écrit il y avait longtemps, il l'aurait fait!

Relecture en février 2021, ma colère est passée pourtant prête à ressurgir quand j'apprends qu'on voudrait publier un texte très intime écrit à moins de vingt ans! Yvon a écrit dans Remarques: Honte aux voleurs de lettres et d'archives, qui ressuscitent la vie d'un grand homme pour projeter une ombre et non une lumière sur leur oeuvre.



Les Digressions ont été écrites en 46, publiées peu après sa mort; texte suivi par Lettre d'un apprenti; ces deux textes portent sur "l'art et la technique du bien-parler"

j'aime bien la façon dont il traite la peur de la page blanche: "on n'éprouve de mal à dire que dans la mesure où l'on n'a rien à dire" Les règles de rhétoriques si décriées deviennent aide et source d'enrichissement.

Le deuxième tome de cette histoire de la philosophie éditée par la Pléiade. Ici est abordée la période qui va du début de la Renaissance à la fin du XVIIIè siècle. Personnellement pas la période qui me donne le plus à penser, mais une somme de travail d'excellente facture.