Tous les départs comportent différentes strates. Le sien se fit un doigt sur les lèvres pour imposer le silence à au moins quatre-vingt-dix fantômes. Arrivées. Atterrissage à l’aéroport international Jomo Kenyatta avec, en toile de fond, un lever de soleil nairobien digne d’une carte postale : scène avec acacias-le-matin et ciel rouge et mauve. Une sensation de vie concrète enveloppait les passagers. Déferlement de saveurs, de senteurs de terre : pour elle, tout un éventail de souvenirs. La main d’une mère dispersant des fines herbes dans des outres en peau de mouton, épiçant des cheveux avec du beurre clarifié, parfumant des savons corporels avec du cèdre, de l’écorce d’acacia séchée et des feuilles de leleshwa. Toute une enfance écrite en arômes.
Cette même nuit, sous les lueurs lointaines de la région septentrionale, une femme enfuie de chez elle pour prendre la mort de vitesse déchire ses vêtements. Elle a parcouru deux cent quatorze kilomètres dans ce but. A l'image de sa fille le feu l'enchante. Des flammes rouges s'élancent. Deux chèvres endormies grognent. Guérison et lucidité. Un problème de fantômes. Une solution de fantômes requiert un gage. Un bouc émissaire.
Akai se mordit les poignets pour leur donner son sang à boire, mais ses forces s'étaient amoindrie et ses dents glisserent. Etir tomba de ses bras et fut prise de convulsions au sol. Akai réalisa de toute son âme combien la petite était minuscule et combien ses bras se sentaient légers sans elle. Elle essaya de pleurer. Akai arrangea Ewoi et s'éloigna sans Etir. Une hyène hurla à proximité.